Publié le 4 Novembre 2024
LES TEXTES
Bernard
Catherine
Letizia
/2024/10/tiens-un-truc-en-plume.html
Mado
Nadine
Odile
/2024/10/la-fleur-d-oranger.html
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Un atelier d'écriture, des thèmes variés, les textes des membres de l'atelier.
Publié le 4 Novembre 2024
LES TEXTES
Bernard
Catherine
Letizia
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Mado
Nadine
Odile
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Publié le 4 Novembre 2024
Un incident avait eu lieu. Elle était seule dans cette grande maison. Elle contempla alors le jardin, s'arrêta devant les fleurs de couleurs orangers, elle leur dit « vous êtes mes petits soleils » Grisou le chat des voisins sauta au-dessus du muret, « reviens Grisou », « j'ai des choses pour toi ». Puis elle continua sa visite et fit le tour du poulailler, elles étaient toutes occupées à gratter le sol et à caqueter, mais tout au fond en dessous d'un perchoir, elle découvrit une grosse boîte en fer blanc, rouillée sur les bords, une vieille boîte à gâteaux, dessus le couvercle étaient dessinés des enfants qui jouaient, un tenait une canne à pêche, l'autre un saut et le troisième faisait un château de sable, elle percevait cela comme une image d’Épinal. Dessous la boîte était gravée une formule magique 3U3SUQRP, était-ce un rébus ? Ou plutôt un message codé ? Elle chercha à l'ouvrir désespéramment, elle ne voulait pas l’abîmer, elle était persuadée que c'était un trésor, ce ne pouvait être autrement pour que cette boîte soit enfouie au milieu d'un endroit aussi improbable. Elle emporta son butin dans la chambre à coucher, elle s'allongea sur le lit et avec le manche d'une petite cuillère posée sur la table de chevet, elle arriva à soulever le couvercle, surprise, une autre boîte plus petite semblait coulisser, une boîte à glissière. Elle entendit des voix, est-ce Alfonsine sa grand-mère qui rentrait déjà , son cœur battait, elle devait vite ranger la boîte à malice.
D'un autre côté la curiosité l'emporta, elle ouvrit la seconde boîte, elle en sortit un éléphant en ivoire, était-ce un talisman, un porte-bonheur ou peut-être une amulette vaudou.
La boîte tomba et dans un fracas le double-fond s'en détacha, une vielle lettre manuscrite, toute écornée et dentelée s'en échappa, elle était écrite dans une langue étrange.Elle pourrait sans doute la décrypter à la lumière des rayons x et grâce aux algorithmes scans spectroscopiques en découvrir la signification. En attendant elle hypothéquait plusieurs pistes.
Ne faisant pas partie de l'alphabet grec, hébreu, latin, arabe, chinois ou encore des kana japonais, elle se mit à rêver à une tribu encore inconnue ou à un peuple venu de l'au-delà. Il s'agirait bien de déchiffrement 3-1 qui correspondrait à trois enfants, peut-être provenaient-ils d'une planète ou seuls les enfants auraient survécu.
- Bertina où est tu ? Qu'est-ce que tu fais ?
L'objet de la découverte, Bertina le découvrira des années plus tard quand Alfonsine lui racontera l'histoire des trois frères.
Publié le 26 Octobre 2024
Un déménagement, quelle corvée ! Mais aussi quelle charnière de vie : changement de décor, objets destinés au rebut ou à une seconde vie, réappropriation d'un espace différent... c'est tout cela à la fois, c'est vrai ;
Publié le 26 Octobre 2024
Un vent frais s'est levé, chassant les nuages. J'ai posé une chaise longue sur ma terrasse et un châle sur mes épaules. Mai tarde à m'offrir un printemps désiré. J'ai vécu cet hiver comme un exil sans fin. Je ne m'habitue pas à cette campagne pluvieuse où je vis.
« J'oublie le temps qui passe
dans les volutes d'un thé
où flotte une feuille de menthe »
Un joli livre de poésie offert par ma fille « Loin des bains chauds »
Un rayon de soleil éclaire le pot bleu majorelle où j'ai planté l'an dernier un oranger. L'air embaume du parfum apaisant de ses fleurs. Une poésie, un thé à la menthe, une fleur d'oranger, me voilà en pays d'enfance, en Tunisie
Je revois l'impasse du Carrefour où vivaient mamie Berthe et tata Raymonde, sa fille cadette. Aux beaux jours, l'impasse s'animait : toutes les femmes s'installaient, qui sur des chaises, qui sur un banc ou sur les marches de leur maison. Ça riait, ça chantait, ça parlait haut et fort dans un sabir, mélange de français et de judéo-tunisien, émaillé de temps à autre de mots italiens. Seuls les Granas, l'aristocratie des juifs tunisiens venus de Livourne, parlaient ce dernier.
Je ne comprenais pas tout mais la musique des langues m'enchantait.
Toutes attendaient, en mangeant des glibettes de courge et de tournesol, l'arrivée des degazah. Ces bédouines, venues du désert avec le chergui, ce vent chaud du Sahara chargé de sable, emportaient avec elles leur précieuse marchandise, les eaux de fleurs d'oranger. Leur odeur enfermée dans de petites bonbonnes ne demandait qu'à s'échapper et chatouiller nos narines déjà conquises.
Mamie Berthe ne se séparait jamais d'une petite fiole de ce liquide précieux mélangé à de l'eau et du sucre que nous nommions mazahr. La vertu souveraine sur son cœur, qui s'affolait à la moindre contrariété, n'était plus à démontrer. Et un rien contrariait notre mamie. On ne savait jamais vraiment la cause de ses multiples et éruptives irritations.
Berthe, dite mamie de l'Ariana, son lieu de résidence, aimait à s'asseoir dans sa courette intérieure où fleurissaient un oranger ainsi que des roses qui faisaient la réputation de ce coin de campagne tunisienne. Boire son mazarh à l'ombre de son oranger décuplait les pouvoirs miraculeux de cette médecine.
Elle m'avait offert pour mon passage en classe de troisième une petite fiasque transparente ornée d'une main de fatma,- signe de protection certifié-, contenant le délicat élixir.
« Pour conjurer les affres du futur examen du B.E.P.C, ya benti ! ». C'est à dire ma fille.
Elle me savait émotive. Je redoutais les examens de passage et je les redoute encore aujourd'hui, tant je doute de moi-même.
Ces jours paralysants, je serrais très fort le flacon dans mes mains, comme pour extraire la quintessence de ses propriétés. Je récitais une petite prière sans queue ni tête, inventée pour la circonstance afin d'en renforcer la magie. Le charme n'opérait pas toujours. J'avais du repasser mon baccalauréat.
Petite, la nuit qui tombait réveillait mes peurs enfantines. Papa venait dans ma chambre que je partageais avec ma petite sœur nous raconter une histoire. Avant de sortir, papa était sommé de chasser le bouchadia* qui s'incarnait pour moi dans la crémone. Fenêtre fermée, bouchadia envolé !Si la peur persistait, maman imbibait un morceau de tulle avec la fameuse eau de fleur d'oranger sucrée. J'alternais la succion du tulle avec la succion de mon pouce gauche. Effet quasi immédiat.
J'ai continué ce rituel avec la naissance de ma fille. Un morceau de tulle imprégné de mazarh chassait l'angoisse du crépuscule.
Le soleil n'a pas gagné la partie, le ciel s'est obscurci, je frissonne. Il est temps de rentrer. Je souris, mon cœur rempli de la chaleur du pays où je suis née
*Le boussadia ou bouchadia était un danseur ambulant de type griot rattaché aux folklores algérien et tunisien
Il évoque par son allure et ses gestes un sorcier africain. En effet, les hommes interprétant ce rôle étaient généralement noirs car originaires du Soudan voire maquillés en noir. Islamisés et poussés à émigrer vers le Maghreb, certains sorciers auraient choisi volontairement de se transformer en personnages ridicules pour exprimer leur désarroi et perpétuer de manière déguisée leurs traditions réprimées par un islam conquérant.
Généralement sans domicile fixe et vivant d'une sorte de mendicité déguisée il parcourait naguère les routes du pays en passant de villes en villages. L'amusement par le ridicule et le déplacement d'un lieu à un autre constitue un aspect essentiel de sa personnalité. Amusant les adultes et terrorisant les enfants, il participait à l'animation des rues et des marchés en effectuant sa représentation seul au milieu de la foule rassemblée sur une place publique ou au milieu d'un souk.
Publié le 18 Octobre 2024
Il trônait sur la plage arrière de son range rover. Un boîtier au cubisme déformé. Comme une idée derrière la tête.
Jean, son sourire, sa capacité à dépasser le temps, oublier le jour, appâter la nuit.. La photo, un agenda numérique.
C'était quand ça..?
Le carnaval des débauchés.
Le sommet enneigé au milieu des copains. C'était quoi son nom..?
Comme si l'oubli avait effacé son identité, pas sa joie de vivre.
Jean, il t'avait oubliée dans un train au milieu de la Lozère, comme un cliché jauni trop caressé, dont les coins triturés marquent l'usure.
Revenue seule sur la Riviera, l'appareil posé sur les genoux comme un trophée désenchanté, les yeux trop flous pour mettre au point. Le précieux appareil confié à Xavier, soutien dans l'épreuve..
Le bain de jouvence à Cagnes, celui qui révèle les humeurs, ou les couleurs dans le labo. Au retour, le coffre boursouflé de la décapotable, gueule ouverte aux lèvres maussades, une moue dépitée.. L'appareil a fui, offrant à d'autres la richesse de sa pellicule, les souvenirs dilués dans un passé désuet.
Tu souris. Le temps, une affaire de principe. À nous la liberté !
Lee Miller change de camp, passe du passé au présent. Les négatifs baignent en acide et ressortent sans rides, jonchent le plancher, suggèrent un autre monde.
Tu piétines, tu déchires, tu lévites et t'envoles ailleurs.
Tu es Néo et traverses les âges farouches de l'avenir. Tes yeux sont pixels lyophilisés, tu les noies de lumière pour passer les frontières.
Un nouvel objet entre tes mains, noir, plat, confident sombre et secret, toujours présent. Il est ta vie, tes envies, ton écoute, ton livre de chevet. Tu lui parles à l'oreille, il écrit ton mystère, tu le regardes , il t'observe, te propose ton image, sans même le négatif.
Le doudou de ta vie, que tu gardes à jamais en mémoire malgré tous les travers, celui qui reste au fil du temps et passe les époques, les frontières, celui qui perce les mailles du filet et ajoute des détails incongrus… ces lacs bleus sous les yeux, ces travées inconnues au bord des lèvres, ces vagues muettes sous le menton et puis, cette tignasse ébouriffée des tendres années, qui s'est muée en rivière argentée. Checkpoint, crédit bloqué, game over ?
Publié le 17 Octobre 2024
Cachée au fond d'un tiroir, enveloppée dans un papier de soie, j'ai retrouvé cette médaille que j'avais fait faire pour elle. En la prenant dans ma main, comme un vieux film en noir et blanc, les images se sont mises à défiler sur l'écran de mes pensées.
C'était un matin de printemps de l'année 1942. Le cerisier était en fleurs et elle se balançait par-dessus la barrière en riant. Son mouvement de va-et-vient soulevait sa robe fleurie laissant entrevoir le galbe parfait de ses jambes. Chaque jour, je venais voler son image que je gardais au fond de mon cœur. Je restais là, moi le timide, à la regarder sans oser lui avouer mon amour.
Le temps doucement s'est écoulé au rythme de son rire et du grincement de la balançoire. Pourtant un jour, le silence avait pris possession de mon petit coin de paradis. Les journées s'écoulèrent emportées comme les feuilles d'automne.
Elle n'est plus jamais revenue! Elle, oui je l'appelle elle car je n'ai jamais osé lui demander son nom et cette médaille que j'avais enfouie tout au fond de ma mémoire me rappelle que l'amour ne peut disparaître.
Publié le 16 Octobre 2024
Deux roses, un flash !
Notre mission : coudre le programme du récital.
Une bobine de fil jaune roule sur la table, une grosse aiguillée - pour "faire" plusieurs cartons avant de recommencer à humecter le fil du bout des lèvres pour le passer dans le chas - pique papier et carton sur un léger crissement. Le dé sur mon doigt pousse l'aiguille avec délicatesse ; ne pas déchirer le précieux objet, surtout !
A côté de moi, les doigts gourds de Mémédjian, notre doyenne, peinent à nouer le fil au centre du feuillet. D'autres mains compatissantes viennent se superposer aux siennes, apportant leur aide.
Parfois, l'une d'entre nous se pique, le sang perle, le doigt blessé file à la bouche pour une coagulation pratiquement instantanée, et l'ouvrage reprend, le doigt vire au bleu. Oh ! La douleur quand un doigt trop piqué force sur l'aiguille !
Ce carton, c'est un après-midi tranquille, bercé de conversations dont je ne comprends pas un mot. Je voyage sur des paroles étrangères, mon fil jaune suit son aiguille ; sur la table, les programmes s'empilent. C'est ce moment-là que me racontent ces deux roses découpées et collées avec soin. Ce sont les ciseaux, les boites à couture, le "cezve" fumant de café turc à la pause de quatre heures, les pâtisseries orientales cuisinées le matin-même, les voix des dames, la musique de leur langue, leurs histoires que j'invente, leurs rires, leurs soupirs, tout le soin qu'elles ont mis à confectionner ce carton. Tout l'amour, tout l'espoir pour que ce concert d'exilés soit inoubliable, parfaitement réussi jusqu'au petit programme fait main.
Quant au concert dans l'église arménienne, je m'en souviens bien sûr, J'ai encore dans l'oreille les voix graves et douces de ce chœur d'hommes, les chants grégoriens magnifiques, mais mon souvenir le plus chaud reste cet après-midi de partage et de labeur parmi ces grandes dames.
Publié le 24 Novembre 2022
Lettre de Rupture à un objet
Notre histoire d’amour touche à sa fin. Il faut savoir tourner la page, nous dire adieu.
Merci pour les bons moments que nous avons passés ensemble, sur la terrasse, dans le jardin, près de la cheminée. Je te demande pardon pour mes sautes d’humeur, mon incompréhension à te tenir dans ma main durant des heures...tu m’as souvent entendu râler ! Il fait trop chaud, j’en ai marre, à quoi ça sert personne ne fait attention.
Je ne renie rien de ce partage utile et précieux, mais tu es à bout de force, usé, tu ne me sers plus à rien.
Infidèle, oui ! Je t’abandonne pour une centrale vapeur plus puissante, plus opérationnelle.
Elle va changer ma vie, m’apporter un certain plaisir. Grâce à elle, je passerai moins de temps à cette corvée qui se nomme repassage.
JM
Publié le 21 Novembre 2022
Ma chère Laden,
(oui, je sais, depuis ce maudit terroriste, c’est un nom qui n’a pas bonne presse)
Il faut que je te dise : je t’aime toujours, ce n’est pas le problème, mais je vais être obligée de me séparer de toi, ce n’est plus possible. Le linge est toujours nickel, rien à dire, mais tu fuis, l’eau se répand partout en flaques, je dois éponger, écoper même, je n’en peux plus. Déjà l’an dernier j’ai essayé de te sauver, mon plombier préféré y a passé quelques heures, mais je dois me rendre à l’évidence : le moment est venu de nous quitter. C’est le cœur serré que je te verrai enlevée par les livreurs de celle qui va te succéder.
Vingt quatre ans de bons et loyaux services, un record qui ne risque pas de se reproduire avec l’obsolescence programmée ! De toute façon, je ne serai plus là pour le constater. Et tant de bons moments que nous avons vécus ensemble au cours de toutes ces années ! Tu étais toujours là quand j’en avais besoin et ton ronronnement me rassurait. Il y a bien eu quelques soucis, quand le peignoir rouge a teinté tout le linge en rose bonbon et d’autres que je ne me rappelle plus, tant je veux garder les meilleurs souvenirs de notre longue vie commune.
Alors tu vas partir, on va te réduire en pièces détachées qu’au mieux on va recycler, au pire jeter dans quelque déchetterie. Çà me rend triste, mais c’est la vie. Il va falloir que je m’habitue à la nouvelle, plus silencieuse, plus moderne avec des programmes plus sophistiqués.
Alors adieu, sois heureuse dans l’au-delà des machines à laver, s’il existe.
Publié le 20 Novembre 2022
Cher râteau
J’ai voulu reculer sans regarder et tu n’as pas hésité.
C’est vrai, j‘ai marché sur le mordant de ton orthodontie
mais tu aurais pu éviter de me frapper,
du plus fort de ton manche.
C’est énervant.
Pourquoi tu ne ratisses pas plus large ?
Je déteste ton étroitesse d’esprit
et tout le ramassis que tu accumules.
Avec toi on ne sait pas où jeter son dévolu.
Les poubelles finissent par avoir toutes la gueule ouverte.
En plus, quel radin, mon cher râteau.
Toujours à gratter des quelques riens,
des insignifiances
pour ramasser à la pelle des tas d’appropriés,
des propriétés.
En cette cabane de jardin comme témoin
Très cher, voilà je te quitte.
Tu peux aller chercher pelles ailleurs
et même construire des châteaux de sable en Espagne.
Je garderai juste la tondeuse
pour que tu ne me coupes pas encore l’herbe sous le pied.
Adieu
Dany-L