Ce matin, un roman est tombé de l’étagère. Il s’est ouvert à la page 22 et j’ai trouvé, soigneusement pliés, trois feuillets.
Sur le premier était écrit :
Rendez-vous compte ! Il paraît que ce roman, que
vous avez dans les mains, cacherait un secret ;
avec sa vieille couverture vraiment élimée et
la quatrième si délavée qu’on y voit presque plus la
lune qui y est dessinée, que peut-il donc cacher ?
En feuilletant ses pages, c’était… je ne sais plus, en
juin dernier, je crois… bref, je n’ai rien remarqué.
Drôle d’endroit pour une drôle de correspondance…
Le second semblait être la réponse. Voici ce qu’il raconte :
Il y a des romans très aimés, qu’il
faudrait jeter parce que élimés ? Ça
me ferait mal, vous savez ! Car je dois
préciser que je m’attache aux personnages
le long de ma lecture. Je suis capable de lire
jour et nuit. Pas vous ? Quant à ce roman
et son secret, moi non plus, je n’ai, pour
l’heure, rien trouvé.
Un avis que je partage ! Moi aussi, j’aime les personnages que je rencontre au fil des livres, ils deviennent très vite de bons amis. Mais revenons à nos feuillets. Le troisième me paraît être la réponse de la réponse :
Je vois que vous n’êtes guère perspicace,
vous êtes comme moi : vous vous perdez
en lisant. L’histoire vous attrape. Je vous
dirai même que les personnages les
plus attachants, on ne peut les quitter.
Lundi, j’ai fini un roman et j’attends le
prochain avec impatience !
Énigmatique correspondance… Cette histoire de secret a émoustillé ma curiosité. J’ai remis les trois feuillets à leur place, page 22, et j’ai emprunté le livre. Je l’ai lu tranquillement à la maison, attentive au moindre mot pouvant laisser supposer quelque mystère, mais rien ! Je ne suis pas plus perspicace que les inconnus de ces missives anonymes. Ce n’est qu’un roman gentillet, une histoire d’amour un peu convenue.
Alors, je me suis penchée de plus près sur les feuillets, je les ai examinés, relus plusieurs fois et d’un coup, Eurêka ! Alléluia ! Fiat lux ! Ce sont ces textes qui étaient codés. Pour les décoder, il suffit juste de lire les premiers mots de chaque ligne, comme dans la correspondance coquine attribuée à George Sand et Alfred de Musset.
Mais que cache donc ce rendez-vous avec la lune de juin ? J’ai décrypté un mystère pour me retrouver face à une énigme ! C’était bien la peine… Il me faut poursuivre l’enquête. Ah ! Que n’ai-je les belles intuitions de mon cher commissaire Adamsberg !
J’ai rapporté le livre à la bibliothèque le lundi suivant, je l’ai remis à sa place sur l’étagère des romans. Et puis, j’ai attendu, attendu, mais personne n’est jamais venu. Le mystère de la lune de juin reste entier... au moins jusqu'au mois de juin...