LA CROISIERE DE GINO BALDINI

Publié le 19 Décembre 2023

 
Personnage
 
Mr Baldino Gino
une quarantaine damée, retraité de l'E D F. Physique agréable, 1,80 m, 80 kg en muscles. Volubile pour cacher son vrai caractère, baratineur, équivoque dans ses préférences amoureuses. Le but de son voyage, retrouver le pays qui l'a vu naître : La Suède.
 
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L'EMBARQUEMENT
      
Baldino, optimiste, a réservé une cabine pour deux personnes. Il entre, visionne sa piaule d'un coup d'œil rapide, laisse tomber son paquetage dans un coin, si l'on peut dire car sa carrée est ronde. Le hublot donne vue sur un séminaire, mal barré pour un athée. Simple détail car le bateau quittera le quai dans la soirée pour une de traversée de nuit jusqu'à Marseille. Le mobilier se compose d'un lit en 140, un bureau, deux chaises, un coin toilettes. Il passe un doigt sur la table pour vérifier qu'il n'y est pas de poussière, rassuré sur ce point. D'un côté le séminaire, de l'autre le monument aux morts, heureusement il n'est pas superstitieux.
 
DINER DU COMMANDANT
 
Mr Baldino Gino fut surpris quand il reçut l'invitation pour le dîner du dimanche soir à la table du commandant. Il avait prévu autre chose. Ayant vécu ses années de quatorze à vingt ans dans un quartier typique de Marseille, il voulait rendre visite a quelques connaissances, compères de sorties nocturnes bien arrosées. Son grand-père, grand résistant serait là, s'il vivait toujours.

Donc, ce dimanche matin il s'attife de ses plus beaux habits style 1935 plutôt que 31. Le voilà parti tout guilleret à la pensée de revoir ses potes de 20 ans. Première difficulté, la ville avait évolué. Trouver un bus pour le quartier du Panier lui prit beaucoup de temps. Il arriva tout de même à l'heure de l'apéritif. Le quartier n'était plus ce qu'il avait connu mais il retrouva la vieille taverne toute crado qu'il avait fréquentée, relookée en café restaurant, salon de thé, boite de nuit. Il entra timidement quand il fut interpellé par son prénom. Le bistroquet bien que vieilli l'avait reconnu. Certains vieux copains de maraudes étaient là et jouaient la tournée de momies à la mourra. Puis ce fut les embrassades, les : qu'est ce que tu deviens ?

Il expliqua rapidement qu'il avait hérité une grosse somme en espèces, qu'il se payait une croisière devant l'amener en Suède, mais bourré le jour de la réservation il s'était retrouvé dans une autre direction. Tournées après tournées il resta déjeuner avec ses potes, raconta son parcours avec dérision ; il se souvinrent de quelques coups fourrés à la limite de la légalité. Les heures défilaient quand il se souvint de la réception du soir à la table du commandant. Il pris congé, promis de revenir à la fin de son périple, et arriva au dîner avec vingt minutes de retard.

La bouche pâteuse il donna une excuse bidon sur la raison de ce retard, mais personne ne fut dupe. Le capitaine lui désigna sa place au bout de la table à coté, il le sut après, d'un ancien évêque défroqué pour avoir côtoyé de trop près certaines communiantes. Le capitaine menait la conversation. S'adressant à un convive : Mr le marquis que nous vaut votre présence sur cette croisière ? Sans attendre la réponse il s'adressa à une vieille baderne sourde, la poitrine constellée de médailles de toutes formes et couleurs. Il eut un sourire pour la jeune et jolie secrétaire qui l'accompagnait. Puis ce fut Mr le ministre de.......Mr le sénateur célébrant ses 80 ans, mis en difficulté aux dernières élections, qui parla sans raison de ses problèmes urinaires en prenant comme témoin la ravissante jeune femme qui l'accompagnait. Le procureur de la république rongeait son frein quand le capitaine lui donna la parole. Sans fausse honte il s'expliqua sur son succès dans sa profession et auprès des jolies femmes, en caressant discrètement la poitrine de la jeune femme assise à coté de lui qui, sans cesser de sourire lui claqua une gifle retentissante. Sans se démonter s'adressant à la tablée il dit : Voyez par vous même.

Gino profita de se malaise général pour s'esquiver. Il rejoignit sa cabine, prit une longue douche chaude, termina par deux jets d'eaux froides, se jeta sur son lit sans pyjama et se retrouva entre deux Eves très amoureuses.

L'ESCALE A BARCELONE
 
Le lendemain matin Gino se réveille plus ou moins vaseux, seul dans son lit. Ses deux compagnes de jeux se sont escamotées à l'aube, rejoignant leur cabine en catimini, réjouies de cet intermède en cours de croisière. Gino se rend à la salle où l'on sert les petits déjeuners, où l'ex évêque est déjà attablé, et qui l' invite à s’asseoir à ses côtés. La conversation vient immédiatement sur le programme de la journée, le paquebot faisant escale à Barcelone. L'ex évêque se présente disant se prénommer Fernand. Gino, lui, se dit Gino et la glace est rompue.
Fernand raconte sa journée d'hier passée à la piscine a reluquer (c'est le mot qu'il a employé) les donzelles en maillot de bain une pièce résumée à un confetti qui souligne l'endroit de leur silhouette qu'il ne faut pas regarder. Gino résume sa journée avec ses anciens potes, et sa gueule de bois. Ils décident de déjeuner à bord et descendre en début d'après midi pour visiter Barcelone. Gino lui explique être venu dans une autre vie avec une bande de copains pour faire la fête.
La ville s'étant modernisée il ne reconnaît plus rien. Ils vont à l'aveuglette et leurs pas les amènent devant la Sagrada Familia  toujours en travaux. Gino se souvenant d'une incroyable paella mangée dans une gargote de la vieille ville, ils décident de s' y rendre. Ils ont du mal à s'orienter. Le vieux Barcelone ressemble au vieux Nice, exceptée la langue. Fernand parlant correctement l'espagnol demande son chemin à un gars sympa qui lui indique tout un quartier ayant gardé l'ambiance des années 1960. Superbe ! Vieux immeubles décrépis, ruelles sombres, tavernes d'un autre temps. Ils choisissent une échoppe où aucun touriste n'oserait s'y aventurer. D'un coup Gino se revoie des années auparavant, établé devant une succulente paella au milieu d'une clientèle à mine patibulaire. Il revoie une vieille dame, limite clocharde, édentée, au fond de la salle, attablée seule devant son assiette. Il la revoie boire à la régalade un vin blanc sorti d'une burette qu'elle lève de plus en plus haut. ll fouille du regard les recoins de cette gargote et la revoie la, identique à ses souvenirs. Il se frotte les yeux, incrédule, mais elle est bien là, peut-être une figurante employée pour maintenir le folklore auprès des touristes. Fernand interloqué regarde Gino, statufié, laissant refroidir sa paella. Il l'interpelle et Gino se réveille croyant avoir rêvé. Il lève les yeux, regarde le fond de la salle, et la vieille est toujours là.
Les heures passent, il leur faut maintenant regagner le port. Gino, ébranlé, reste coi, Il remet au lendemain l'explication qu'il doit à Fernand. Ils font quelques pas puis Gino s'arrête, fait demi tour avec Fernand sur les talons qui ne comprend rien à ce revirement. Gino rentre dans la taverne en courant, file au fond ou la vieille continue à siffler son vin à la régalade. Mais oui bien sûr ! Quel con j'ai été, se dit Gino, c'est une automate !

LA LETTRE

Cher Fernand

Ayant reçu une lettre sans signature avec certains mots à consonance espagnole, je présume que c'est toi qui me l'a envoyée. Si non, tu déchires et tu jettes. Tu me laisses entendre que notre connivence pourrait nous amener à avoir des rapports plus intimes et faire l'économie d'une cabine en n'en occupant qu'une. Notre nouvelle amitié me retient pour ne pas te répondre vertement non. Je ne suis pas homo et n'ai pas l'intention de le devenir. Si notre statut d'amis (je dirai camarades) te suffit, je te promets d'oublier ta proposition et d'entretenir notre camaraderie telle qu'elle est à ce jour. Si tu n'es pas l'expéditeur de cette missive, déchire et jette la mienne dans l'océan afin de profiter sans ambiguïté de notre, je me répète, connivence.

Gino

CHÈRE VALENTINE

Chère, ou très chère Valentine selon ce que vous attendez de moi.
 
      C'est avec grand plaisir que je vous rejoindrai ce soir à 19 h au bar.  Je piaffe des quatre fers comme le ferai un jeune cheval que je chevauche lorsque mes occupations me le permettent. J'avais bien remarqué l'intérêt que vous me portiez, subtil clin d'œil ! Les croisières sont sujettes à des rencontres qui affutent des sentiments que l'on divulgue facilement, alors qu'à terre l'approche serait plus subtile. Après l'apéritif nous pourrions dîner ensemble et selon l'entente un petit flirt serait envisageable. Mais ne retenait pas votre soirée car ce soir je suis retenu par les deux gourgandines, compagnes des deux ex grands hommes. Je n'ai rien de prévu pour demain soir. Si vous êtes présente ce soir, ce sera de bon augure pour la suite de la croisière. J'en frétille déjà de plaisir en attendant ce soir 19 heures.
                                                                                                                                                                Déjà votre ................
 

SOIRÉE ÉROTIQUE

      19h, arrivée de mes deux jeunes amoureuses accompagnées de deux copines aussi effrontées qu'elles. Elles se jettent sur les cocktails et se lutinent gentiment, s'échauffent, m'entourent, me frôlent avec attouchements. La soirée s'annonce intéressante. Soudain la porte de ma cabine s'ouvre, apparait Valentine, majestueuse, hautaine, qui ordonne aux deux hétaïres de foutre le camp illico. Son regard pénétrant les subjugue, elles restent coites, muettes. Elles ne sortent pas, elles s'enfuient. Seuls tous les deux, Valentine se sert un verre de raide, s'assoit, sort un jeu de cartes et me demande si je sais jouer au poker. J'acquiesce, lui disant que j'avais pratiqué lors de mes années troubles. Elle précise : poker déshabillé. Elle bat les cartes, je coupe, elle donne. Je gagne par deux fois, Je lui fais enlever ses chaussures, son foulard, puis la roue tourne et je commence à perdre. Elle sourit, se moque et au bout de pas longtemps je me retrouve en slip. Le poste de radio diffuse un slow, elle s'approche de moi, m'enlace, me chauffe, s'écarte et me susurre : déshabillez-moi, déshabillez- moi, pas trop vite, lentement, prenez votre temps. J'obtempère, la voilà presque nue. Elle se détourne de moi, fait glisser lentement sa petite culotte le long de ses jambes, se retourne, je reste coi, sans voix.
 
      Epilogue
                      VALENTINE EST UN HOMME !
 

 

Rédigé par Louis

Publié dans #Ecriture collective

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