LA MAISON

L’œil, d'abord, heurterait le mur jaune où des photos sépia témoigneraient des anciens habitants. On passerait devant elles et elles nous salueraient, animées comme dans Harry Potter, puis on franchirait une petite porte rouge qui s'ouvrirait sur un couloir tout sombre, un peu mystérieux, presque inquiétant, pour peu qu'on le regarderait avec des yeux d'enfants et au bout, il y aurait la cuisine avec les gens des photos assis autour de la table.

Il y aurait une marmite de soupe fumante, des conversations murmurées, des sourires aimants. Alors on s’assiérait avec ces vieux gens, nos ancêtres, pour une improbable rencontre dans le temps aboli. On raconterait nos vies d'hier et d’aujourd’hui devant la grande cheminée noire de suie et les rideaux à carreaux rouge de la fenêtre.

Par la fenêtre, on verrait une cour avec un grand tilleul et un soleil couchant qui enverrait sa lumière dorée dans la cuisine. Alors, on repartirait par le couloir sombre, un peu mystérieux, presque inquiétant, jusqu'à l'escalier. Les marches de l'escalier seraient en bois clair sur un mur bleu.

En haut, on entrerait dans la chambre avec des papillons sur les murs et des coquelicots, et un grand lit en chêne, tout trapu et massif, recouvert d'un gros édredon blanc, de coussins moelleux et de quiétude dorloteuse.

Et puis, l’œil serait attiré par un rideau étrange, mouvant, qui se balancerait doucement contre le mur. On le tirerait prudemment et, derrière, on trouverait la maison d'aujourd'hui avec la télé, le micro-onde, et toute la technologie moderne. Alors, on se dirait qu'on a fait un drôle de voyage dans cette maison née d'un stylo !