Publié le 29 Février 2024

Julien, cuisinier

Je me pose un instant, afin de respirer à pleins poumons dans la fraîcheur du petit matin. Je ferme la porte du restaurant, monte l'escalier pour aller me reposer quelques heures avant de prendre la route pour rejoindre le lieu prestigieux, élégant et mystique où se déroule le fameux concours « du meilleur ouvrier de France à Paris ».

La nuit a été longue, j'ai passé des heures de recherches à élaborer un plat ambitieux, plein de surprises pour le Jury, afin de les étonner, de surprendre leurs papilles.
Moi, Julien, jeune cuisinier d'un village de province, dans la campagne ardéchoise, j'ai enfin eu l'audace de me présenter à ce concours où je vais côtoyer une certaine élite de la cuisine française. Des frissons envahissent mon corps, rien que d'y penser.
 
De tout jeune, je suis tombé dans les casseroles, comme l'on dit souvent dans le milieu, en observant mes grands-parents cuisiner du matin au soir pour les ouvriers agricoles du coin.
A l'époque, ils étaient très nombreux. Le restaurant était toujours plein, parfois même il fallait rajouter des tables.
Mes grands-parents tournoyaient leur vie entre le jardin et les casseroles. A eux d'eux, ils avaient réussi un savoir-faire inégalé à l'époque du "bon et du beau" dans l'assiette, dans toute la région. Le matin au petit déjeuner, les odeurs de viande, poisson, herbes diverses chatouillaient déjà mes narines. Mon petit déjeuner était toujours très copieux, œuf coque, tartine de pain fait avec la bonne farine du moulin à côté de chez nous, le beurre à la baratte étalé en couche épaisse, les fruits frais du verger, le lait de Suzanne de la ferme en face.
J'étais prêt pour faire le long chemin qui menait à mon école.
Sur la route, souvent des images me revenaient à l'esprit, les couleurs de tous ces ingrédients virevoltaient devant mes yeux.
Mes parents et grands-parents m'ont appris sans jamais me le dire, le goût de l'effort, de la rigueur et du mérite. Je le vivais chaque seconde.
A l'âge de 14 ans, j'ai passé le concours pour intégrer le lycée hôtelier, c'était un choix évident. J'ai grandi et appris cet univers de tout petit, je me glissais souvent entre les tables et j'écoutais les conversations des clients, vanter la cuisine qu'ils dégustaient tous les jours. J'étais très fier. J'avais le sentiment que c'était moi qui  avait cuisiné.
Aussi avec le temps, je suis devenu compétiteur et j'y ai vu un moyen de me surpasser. J'ai commencé à faire des petits défis personnels, des concours amateurs, afin de me confronter aux plus performants du moment.
Je m'en sortais pas trop mal, cela me rendait heureux. J'ai réalisé des stages dans des grandes maisons, cela m'a permis de faire mes armes et parfaire mes connaissances du haut métier..
Me voilà enfin prêt pour gravir un échelon de taille.
Je reste un brin songeur, est-ce que je vais pouvoir franchir ce pas de géant ?
Le jour du concours est arrivé, la salle était en ébullition, brouhaha, musique, la foule.
Le temps est resté suspendu pendant trois heures données pour réaliser notre sujet.
La sueur a trouvé son chemin, le long de nos échines.
Enfin le gong a sonné, tout est terminé.
Je brille avec mon étoile, comme un joli arbre de Noël.
Rires et pleurs accompagnent cet exploit bien mérité. J'ai 28 ans

L'homme solitaire

L'étoile incrustée sur la plaque de cuivre, suivie de mon nom brille. Les clients, satisfaits de mon succès, m'ont fait l'honneur de remplir les tables blanches de mon restaurant. Seront-ils plus indulgents avec mes plats, si je vais les saluer ?

A 14 heures, je décide d'aller les remercier chaleureusement. Je remarque alors, à la table du fond, un homme seul lisant son journal.
Il ne déjeune pas, bizarre ?
 
 
 
Je me dirige vers la chef de rang, lui pose la question : elle me dit que ce monsieur, insiste pour être servi lorsque tous les clients seront partis. Cela est gênant en cuisine. Qu'a-t-il derrière la tête celui-là ?
Je décide d'aller voir ce monsieur, il me dit clairement :
- Je ne peux déjeuner s'il y a du monde autour de moi.
Je souris, je prends cela pour un caprice, je tourne les talons. N'est pas bien ce client, il lui manque la lumière à plusieurs étages... il y a des personnes vraiment « barjo »...
Je retourne en cuisine pour savoir les ingrédients qui restent afin de lui concocter un plat satisfaisant. Je donne des ordres à ma brigade, puis je descends au jardin pour vérifier si le dispositif d'arrosage s'est déclenché. Je vaque dans les allées de légumes et fleurs comestibles. Je remonte en cuisine, je range quelques instruments, je parle un moment avec Pierre, mon premier commis. A ce moment là, tout le personnel est parti faire une pose et revient à 18 heures pour le service du soir.
 
Ce matin je me sens heureux et léger, la tension est retombée. Je me suis levé avec une mer de nuages dans le ciel, et subitement le soleil fait son apparition. Tu dois baisser les stores, sinon il va faire trop chaud..
Je me rends près des fenêtres, me retourne et vois le fantaisiste bonhomme assis sans bouger ; je m'approche et lui dis :
- Le plat vous a plu ?
Il ne répond pas, je lui tape délicatement sur le bras, et là, son haut du corps part en avant et s'affaisse dans son assiette.
Je panique, je tâte son pouls. Il est mort !!!
Je ne sais pas quoi faire... j'hésite un instant et appelle les gendarmes.
Après quelques minutes qui m'ont semblé des heures, les gendarmes arrivent et constatent le décès soudain de l'individu.
Pourquoi est-il venu dans ce village ?
 
Je réalise alors que mon univers s'écroule. Mon commerce est fermé jusqu'à nouvel ordre, suivant les avancées de l'enquête.
Les rumeurs au village commencent à enfler. Les réseaux sociaux se déchaînent je suis perdu, humilié, triste et fatigué.
Cet homme est venu perdre la vie chez moi pourquoi ? Crise cardiaque, ou bien rupture d'anévrisme, ou alors, il s'est empoisonné,.
Personne n'a rien vu, ni entendu.
C'est un mystère !!
Quelques instants plus tard, le légiste à découvert dans son cou, la trace d'une piqûre.
Alors, ce n'est plus une crise cardiaque, mais un homicide... My God !! Quelle catastrophe !
Les gens commencent à faire circuler le bruit qu'il a été empoisonné , dans mon restaurant.
C'est ma perte, la disparition de mon étoile, après tant de travail acharné réduit à néant.

Un homme sans histoire

La nuit venue, je monte me coucher au fond de mon lit et réfléchis à ce qui m'arrive.
Cependant, il ne faut pas que j'oublie, malgré le désastre qui me submerge, la commande du mariage de la fille du Maire, qui aura lieu samedi prochain. Je m'étais engagé avant le concours de l'étoile, il faut que j'honore cela dans les meilleures conditions. Il y va de ma réputation.
Aussi, je planche dès mon réveil sur une pièce montée exceptionnelle.

Je dessine un socle, fait d'un biscuit très fin et moelleux, vanillé, entre chaque socle une compote de fruits rouge bien murs de purée de fraises parfumées. De chaque côté des cercles, une guirlande de petites roses en boutons, munies de deux feuilles vertes en pâtes d'amande . Elle monte en tournoyant autour du gâteau jusqu'au sommet, où elle rejoint le couple bras dessus, bras dessous, dans leur beau costume.

La robe de la mariée s'étale sur toute la surface étroite du biscuit.
Au bas, tout autour, un joli ornement très fin de sucre couleur argenté en roulé boulé, forme une dentelle. Et pour finir le gâteau, je pense mettre des sphères en chocolat gaufrette, brodées en sucre. Pour la présentation, sous le support, un tissu d'étamine blanc ondule en vagues voluptueuses, piqué d'étoiles.
 
 
Demain à la première heure, je présenterai à Monsieur le Maire, mon esquisse pour obtenir son approbation, et me mettre au travail. Malgré cette affaire incroyable.
 
Mon esprit est en transit à cette situation extravagante. Les gendarmes ne laissent rien filtrer. Aussi après réflexion, je termine cette dernière commande et décide de prendre quelques jours de vacances et de poursuivre l'enquête, car j'ai le sentiment que cette sale affaire à un lien avec ma famille.
Je compte descendre vers la Méditerranée au soleil, tout en gardant contact avec mon meilleur ami. Il est journaliste à la « Voix du matin » et me fera parvenir des renseignements au fil de ces recherches.
Un matin, il m'appelle et me dit :
– J'ai son identité, il s'appelle : Mr Jérôme RICARDO 44 ans comptable, il vit chez sa mère, Mme Christiane RICARDO contrôleuse aérienne habite à Marseille.
 
Ce nom ne me dit rien !
Me voilà parti pour Marseille. Je reste prudent, car les gendarmes continuent leurs investigations. Ils n'aimeraient pas me trouver dans leurs pattes.
Après avoir interrogé le voisinage, j'apprends que Madame Ricardo est décédée il y a six mois d'un cancer, le fils n'est plus à cette adresse, aux dernières nouvelles il était très affligé par la perte de sa maman, dont il était très proche. Personne ne l'a jamais plus revu.
Un matin mon ami, m'apprend que mon père a été emmené par les gendarmes, pour être interrogé. Je suis stupéfait ! Ma mère est effondrée !
Il faut que je rentre très vite, elle est perdue car mon père est diabétique et à le cœur malade. Il doit suivre un traitement sérieux.
 
Sitôt arrivé, j'appelle mon avocat, les choses se mettent rapidement en place.
Les questions se bousculent dans ma tête et restent pour l'instant sans réponse.
L'autopsie nous en dira plus.
– Pourquoi les gendarmes s'acharnent-ils sur mon père ?
Un homme sans histoire, il n'a jamais fait parler de lui. Je ne comprends rien.
48 heures après mon père a été relâché. Nous pensions qu'il aurait désiré nous dire quelques détails, mais non rien !
Le vide, l'abîme !!!!!!!!!!
Il reste muré dans le silence, prostré dans sa chambre les yeux fixés dans le vague. Il a subi un gros choc. Ma mère est silencieuse.
– Mais pour quelle raison a-t-il été interrogé ?
Il n'était pas là au moment des faits.
Mystère …
Il a été relâché pour cause «  pas assez d'éléments ».
Son avocat a démontré qu'il n'était pas dangereux pour la société, malgré l'accusation, sa maladie a joué un grand rôle pour sa mise en liberté surveillée. L'enquête continue.
– Que s'est-il passé ?
– Connaît-il cet homme ?
– A-t-il été mêlé à une escroquerie ?
Ma mère se tait......

La romance a brisé l'étoile

L'avocat me donne rendez-vous pour le lendemain dimanche, vu l'urgence, à sa propriété à Aubenas.
Le château est grand et majestueux, la grande allée, bordée de magnolias grandifolia, distille un parfum envoûtant. Les allées secondaires sont recouvertes de magnifiques rosiers et rhododendrons, ainsi que de splendides hortensias, qui donnent une harmonie de teintes pastel.
Je suis un peu en avance, je prends un café à la brasserie de la place, lorsque un homme m 'interpelle : « Julien ! », je me retourne et aperçois « Joël » le meilleur copain de mon père, qui est comme un frère pour lui.
On déjeunait souvent avec lui « chez Marius » sous la tonnelle couvertes de grappes de raisins dorés dont les grains craquaient sous le soleil.
– Tu es le fils d'Henry ? Tu lui ressembles toujours autant.
Il me dit :
– Je suis au courant de ce qui lui arrive, je suis très triste, mais je le comprends.
– Vous comprenez quoi ?
– Ah tu n'es pas au courant. ?
– Au courant de quoi ?
– Alors je ne te dis rien, je ne veux pas le trahir.
– Joël, dites-moi ce que vous savez, cela l'aidera.
– Tu sais, ton père a été un homme meurtri dans sa jeunesse, ses parents étaient des
religieux fanatiques, ils l'ont brisé. Ils fréquentaient une sorte de secte.
– Ah bon ! Je ne savais pas
– Lorsqu'il a rencontré ta mère, ça été sa renaissance pour lui, ils se sont aimés et mariés en 1977. Tes parents étaient très heureux. Ils baignaient dans une atmosphère simple, harmonieuse, joyeuse. Quelques années après ton père a dû descendre à Nice pour parfaire ses examens d'expert comptable pendant six mois. Ton père et ta maman étaient très malheureux d'être séparés.
A l'hôtel où il était descendu, il a fait la connaissance d'une jolie femme. Tous les jours à table, ils se retrouvaient pour déjeuner. Un soir le patron a réuni tous ses clients pour fêter « le vin nouveau ». Ils avaient tous bien bu, et ton père a succombé à cette femme. Pour rien au monde, il n'aurait laissé ta mère. C'était son oxygène, son équilibre. Il ne s'autorisait même pas d'y penser.
Plus tard au hasard de ses déplacements pour son travail, il revoyait cette jeune femme.
Un jour elle lui avoua avoir eu un enfant de lui. Il était fier et heureux. Car ta mère à cette époque menait un combat pour avoir des enfants. Aussi, il garda le silence c'était son secret.
Il l'aimait ce petit, il recevait des photos de lui, il ne l'a jamais laissé tomber. Mais au fil du temps, les visites se sont effilochées, ils ne les a jamais plus revus.
– Ah bon !! Plus jamais ?
– Non.
– Je ne sais rien de tout ça, j'étais souvent avec mes grands-parents, c'est peut-être pour cela que je ne suis pas au courant de tout ce fourbi.
– Le jour du drame ton père m'a téléphoné en pleurs, il m'a expliqué que ta mère lui a
demandé de passer au restaurant prendre les nappes sales, et voilà que ce Monsieur l'interpelle et lui dit :
– Tu me reconnais pas ?
Aussitôt, il remarque sur sa joue le même grain de beauté que lui. La situation lui a sauté au visage. Il a vu rouge.
Ton frère lui dit :
– Tu me présentes à ta femme et ton fils, je n'ai plus de famille, ma mère est morte. Je
suis seul maintenant.
Là ton père a perdu pied, il n'a pas réfléchi, il a pris sa seringue dans sa poche et l'a piqué avec son insuline pour son diabète. Tu sais, il ne voulait pas le tuer, il a perdu la raison.
– Quelle histoire, mon père est devenu fou !
– Tu sais Julien, ton père t'a écrit une lettre.
 
Je rentre chez moi, je cherche dans le tiroir aperçois l'enveloppe froissée, je l'ouvre
et lis :
Mon Cher fils
Lorsque tu liras cette lettre, je serais ailleurs, aussi il faut que je t'avoue, que tu as un grand-frère que j'ai caché à tout le monde, ainsi qu'à ta maman. Je n'ai pas voulu lui faire du mal ; mon cœur a saigné par manque de sagesse. Ce petit je l'ai aimé, mais de loin, je n'ai pas eu le courage d'affronter le regard de ta mère. J'ai souffert de ne pas l'avoir vu grandir. Je le côtoyais de temps en temps, mais plus tard, ils se sont éloignés de moi.
Je ne te demande pas de me pardonner, mais d’essayer de comprendre mes faiblesses. Je t'aime et espère que tu seras plus honnête que moi. Je pensais protéger ta mère mais j'ai eu tort. C'est sans doute moi que je protégeais.
Aujourd'hui je me noie dans mon chagrin.
Ai-je commis le pire ?
 
Va-t-il tenir le coup, lorsqu'il réalisera qu'il a tué son fils, me dis-je.
Je sors du cellier bouleversé, je croise le regard de ma mère dans le couloir, et là j'ai su quelle savait...
Elle aussi a choisi le silence et la solitude.
Peut-on un jour se sortir de cette sombre histoire d'amour ?
 
Arlette
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Publié le 29 Février 2024

L'avocat me donne rendez-vous pour le lendemain dimanche, vu l'urgence, à sa propriété à Aubenas.
Le château est grand et majestueux, la grande allée, bordée de magnolias grandifolia, distille un parfum envoûtant. Les allées secondaires sont recouvertes de magnifiques rosiers et rhododendrons, ainsi que de splendides hortensias, qui donnent une harmonie de teintes pastel.
Je suis un peu en avance, je prends un café à la brasserie de la place, lorsque un homme m 'interpelle : « Julien ! », je me retourne et aperçois « Joël » le meilleur copain de mon père, qui est comme un frère pour lui.
On déjeunait souvent avec lui « chez Marius » sous la tonnelle couvertes de grappes de raisins dorés dont les grains craquaient sous le soleil.
– Tu es le fils d'Henry ? Tu lui ressembles toujours autant.
Il me dit :
– Je suis au courant de ce qui lui arrive, je suis très triste, mais je le comprends.
– Vous comprenez quoi ?
– Ah tu n'es pas au courant. ?
– Au courant de quoi ?
– Alors je ne te dis rien, je ne veux pas le trahir.
– Joël, dites-moi ce que vous savez, cela l'aidera.
– Tu sais, ton père a été un homme meurtri dans sa jeunesse, ses parents étaient des
religieux fanatiques, ils l'ont brisé. Ils fréquentaient une sorte de secte.
– Ah bon ! Je ne savais pas
– Lorsqu'il a rencontré ta mère, ça été sa renaissance pour lui, ils se sont aimés et mariés en 1977. Tes parents étaient très heureux. Ils baignaient dans une atmosphère simple, harmonieuse, joyeuse. Quelques années après ton père a dû descendre à Nice pour parfaire ses examens d'expert comptable pendant six mois. Ton père et ta maman étaient très malheureux d'être séparés.
A l'hôtel où il était descendu, il a fait la connaissance d'une jolie femme. Tous les jours à table, ils se retrouvaient pour déjeuner. Un soir le patron a réuni tous ses clients pour fêter « le vin nouveau ». Ils avaient tous bien bu, et ton père a succombé à cette femme. Pour rien au monde, il n'aurait laissé ta mère. C'était son oxygène, son équilibre. Il ne s'autorisait même pas d'y penser.
Plus tard au hasard de ses déplacements pour son travail, il revoyait cette jeune femme.
Un jour elle lui avoua avoir eu un enfant de lui. Il était fier et heureux. Car ta mère à cette époque menait un combat pour avoir des enfants. Aussi, il garda le silence c'était son secret.
Il l'aimait ce petit, il recevait des photos de lui, il ne l'a jamais laissé tomber. Mais au fil du temps, les visites se sont effilochées, ils ne les a jamais plus revus.
– Ah bon !! Plus jamais ?
– Non.
– Je ne sais rien de tout ça, j'étais souvent avec mes grands-parents, c'est peut-être pour cela que je ne suis pas au courant de tout ce fourbi.
– Le jour du drame ton père m'a téléphoné en pleurs, il m'a expliqué que ta mère lui a
demandé de passer au restaurant prendre les nappes sales, et voilà que ce Monsieur l'interpelle et lui dit :
– Tu me reconnais pas ?
Aussitôt, il remarque sur sa joue le même grain de beauté que lui. La situation lui a sauté au visage. Il a vu rouge.
Ton frère lui dit :
– Tu me présentes à ta femme et ton fils, je n'ai plus de famille, ma mère est morte. Je
suis seul maintenant.
Là ton père a perdu pied, il n'a pas réfléchi, il a pris sa seringue dans sa poche et l'a piqué avec son insuline pour son diabète. Tu sais, il ne voulait pas le tuer, il a perdu la raison.
– Quelle histoire, mon père est devenu fou !
– Tu sais Julien, ton père t'a écrit une lettre.
 
Je rentre chez moi, je cherche dans le tiroir aperçois l'enveloppe froissée, je l'ouvre
et lis :
Mon Cher fils
Lorsque tu liras cette lettre, je serais ailleurs, aussi il faut que je t'avoue, que tu as un grand-frère que j'ai caché à tout le monde, ainsi qu'à ta maman. Je n'ai pas voulu lui faire du mal ; mon cœur a saigné par manque de sagesse. Ce petit je l'ai aimé, mais de loin, je n'ai pas eu le courage d'affronter le regard de ta mère. J'ai souffert de ne pas l'avoir vu grandir. Je le côtoyais de temps en temps, mais plus tard, ils se sont éloignés de moi.
Je ne te demande pas de me pardonner, mais d’essayer de comprendre mes faiblesses. Je t'aime et espère que tu seras plus honnête que moi. Je pensais protéger ta mère mais j'ai eu tort. C'est sans doute moi que je protégeais.
Aujourd'hui je me noie dans mon chagrin.
Ai-je commis le pire ?
 
Va-t-il tenir le coup, lorsqu'il réalisera qu'il a tué son fils, me dis-je.
Je sors du cellier bouleversé, je croise le regard de ma mère dans le couloir, et là j'ai su quelle savait...
Elle aussi a choisi le silence et la solitude.
Peut-on un jour se sortir de cette sombre histoire d'amour ?
 

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Rédigé par Arlette

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Publié le 28 Février 2024

 
Carole était en train de cuisiner et de chanter pour son mimosa. Elle était censée recevoir la visite de Bernard et de son ami cultivateur de mimosa, Christian, qui devaient arriver d’un moment à l’autre.
Quelques minutes plus tard, depuis le palier, les deux hommes déclarent leur arrivée en chanson : «…Canti la capelina, la rosa e lou lilà… ». Carole ouvre la porte. «Lou mimosa ! » chante Christian. Carole pointe du doigt son mimosa et ils sourient tous les trois. Une fois les présentations faites, Christian explique à Carole qu’ils venaient de participer à une cérémonie où en tant que membre d’une chorale, il chantait « Nissa la Bella ». Bernard ajoute : « Il est modeste. Il ne raconte pas l’essentiel. En fait, il vient de remporter le concours du « meilleur mimosa » ! ». « Je ne savais même pas que ça existait ! » répond Carole. Bernard continue : « Eh oui, nous sommes des gens qui excellons dans nos domaines respectifs ! » Et il est interrompu par Christian : « Et le truc de Bernard c’est la pétanque… »
A ce moment-là, Bernard qui s’était dirigé vers la cuisine, retrouve la socca qui était en train d’être préparée par Carole : « Je n’en reviens pas ! C’est toi qui as cuisiné ça ?... Je vais t’inscrire au concours de la meilleure socca ! ». « Hors de question, j’ai l’horreur des compétitions ! », répond Carole. Puis, elle s’adresse à Christian : « Tu voulais parler de la pétanque ? ». Christian répond : « Ah oui, Bernard va participer à un tournoi de pétanque pendant la fête des Mai et il a aussi entraîné une fillette qui jouera dans la catégorie junior. » Bernard ajoute : « La petite Emma qui était passée sur le terrain l’autre jour avec sa mère… Et toi, Tu veux que je t’inscrive aussi dans la catégorie adulte ? Tu as le niveau ! ». « Je te dis que je ne veux pas de compét ! » réplique Carole. « Ça vous dit de rester déjeuner, les garçons ? » « Avec grand plaisir ! »
Une fois la dégustation de la socca entamée, Carole demande : « Au fait, je suis très curieuse de savoir comment vous vous êtes rencontrés! » Christian répond : « C’était pendent la pandémie. On chantait Nissa la Bella à l’occasion de la fête des Mai sur la terrasse. Bernard s’était étonné que j’avais changé les paroles à ma manière : En fait, j’y ajoute toujours un « lou mimosa ! » comme aujourd’hui. » Bernard a ajouté : « Je l’ai interpellé là-dessus et il m’a expliqué qu’il était cultivateur de mimosa et qu’il considérait que ce passage devait être ajouté à l’hymne. Il m’a fait tout un tas d’arguments là-dessus ! »
« C’est fou ! moi aussi j’ai connu Hélène, l’amie qui m’a fait venir à la pétanque, en chantant « Nissa la Bella » sur la terrasse. A l’époque, je n’y connaissais rien du tout. J’avais juste de vagues souvenirs des images du 14 juillet 2017 où cela était chanté sur les Champs- Elysées. Du coup, je faisais plein d’erreurs de prononciation. Par exemple, je prononçais le « éu » comme le «eu» du français. Je pense qu’au bout d’un moment, Hélène en a eu ras-le bol et elle m’a expliqué qu’en niçois, ça se prononçait plutôt comme un « U » du français. En revanche, entre-temps, je me suis tellement documentée et entraînée que là, récemment, quand je suis allée voir un match au stade, j’étais incollable sur l’hymne. Et pour le coup, c’était moi qui ai corrigé un gamin qui a fait la même erreur. Je me rappelle que je venais de récupérer le mimosa et je l’avais amené avec moi. En entendant « La rosa e lou lilà… » je me suis effondrée en larme. Je disais à mon mimosa : « pourquoi tu dois être dans cet état alors que tes pairs rayonnent sur les champs ? ». D’ailleurs, il y avait un autre gamin qui a demandé à sa mère ce que c’était « Dóu dounjoun » et moi, tout en larmes, je lui explique qu’il s’agissait du Donjon qui veut dire « la tour la plus haute d’un château fort » et que celui de Nice a été complètement détruit il y a plus de trois siècles. »
L’après-midi était arrivé à son milieu. Bernard et Christian s’apprêtaient à partir. Avant de se quitter, Bernard a demandé à Carole si elle était intéressée par le fait de tenir un stand de socca pendant une journée dans le cadre de la fête des Mai. La réponse de Carole était positive.
Durant les jours suivants, Carole s’est durement entraînée pour l’événement. Le jour J est enfin arrivé. Bernard et Christian qui étaient venus chercher Carole pour aller ensemble sur le lieu des festivités ont sonné à la porte. Avant de quitter son appartement, Carole a jeté un dernier regard sur son mimosa. Elle a vu tous les soleils de celui-ci lui faire des clins d’œil. Elle les entendait dire « Allez, tu vas y arriver, tu vas assurer grave ! »
Une fois en route, Christian a rappelé : « les amis, vous savez qu’on va chanter « Nissa la Bella » à la fin de la journée. Etes-vous prêts ? « Carole et Bernard se sont mis à chanter : « O la miéu bella Nissa Regina de li flou…Lou Pouòrt e la Marina… ». Soudain Carole les a interrompus en disant : « à chaque fois que j’entends ce passage, je pense au tableau « la Baie des Anges » de Raoul Duffy ». « Il y en a plusieurs, non ? » demande Christian. « Oui, mais j’ai un lien spécial avec celui du 1938. Il était le sujet de l’une des séances de mon atelier d’écriture ! » répond Carole.
Les amis sont arrivés sur le lieu des festivités. Comme prévu, Carole tenait le stand de la socca et Bernard jonglait entre les tournois adultes et juniors de la pétanque. Tout au long de la journée, Carole a eu deux catégories de visiteurs : d’un côté, les passants qui achetaient de la socca et n’arrêtaient pas de lui faire des compliments sur sa bonne cuisine et de l’autre, Christian qui lui rappelait sans cesse de s’entraîner à chanter l’hymne pour bien assurer lors des cérémonies finales.
La journée allait toucher à sa fin. Carole était en train de chanter «… Lou Pouòrt e la Marina
Paioun, Mascouinà ! Canti la soufieta… » lorsqu’elle a reçu la visite de Marie, élégante quarantenaire parisienne qui l’avait déjà croisée pendant une partie de la pétanque. Marie regard Carole pendant quelques instants puis lui demande : « on se connaît, non ? » et elle continue : « Ah oui, je sais, je vous ai vue en train de jouer à la pétanque !... Au fait, vous avez une très jolie voix et vos soccas ont l’air délicieuses ! Je dois avouer que le jour où je vous ai vue crier sur le terrain de pétanque, je vous ai prise pour une cinglée mais, là, je me dis qu’ « une cinglée » ne peut pas avoir de si beaux talents de chanteur et de cuisinier !... En fait, je suis parisienne de base et je n’avais pas trop l’habitude de voir des terrains de pétanque comme ça ! »
Carole lui a dit qu’elle est d’origine parisienne aussi. Marie s’excite : « Et pourtant, vous êtes tellement émue quand vous chantez l’hymne niçois qu’on dirait une vraie niçoise ». Carole répond : « en fait, la pétanque a joué énormément dans mon intégration. Aujourd’hui, je me considère comme niçoise du cœur ! En écoutant l’hymne niçois, j’ai le regret de ne pas avoir connu certains endroits plus tôt ; comme « le paillon » avant qu’il soit urbanisé ou bien les zones touchées par la tempête Alex avant qu’elles soient ravagées. En revanche, « la rue Mascouinà » est toujours là ! ».
Leur discussion continuait. Un lien sympathique se nouait entre les deux dames. Soudain, Carole entend le nom de Bernard et d’Emma annoncés comme les gagnants du tournois de pétanque, chacun dans sa catégorie.
« Mesdames et Messieurs, je vous rappelle que le prix de nos heureux gagnants consiste à un tour de l’Europe !... Et le prix de « la meilleure socca » est attribué à Madame Carole Cajou ! »
Carole reste incrédule. Il lui a fallu quelques instants pour réaliser que Bernard l’avait inscrite à ce concours à son insu et il s’est arrangé tout au long des compétions pour qu’elle ne s’en rende pas compte ! « Viens Carole, c’est l’heure de chanter l’hymne ! » s’exclame Christian. Le public commence à chanter :
O la miéu bella Nissa
Regina de li flou….
Canterai li mountagna
Lou tiéu tant ric decor
Li tiéu verdi campagna
Lou tiéu gran soulèu d’or
Carole est prise d’une forte émotion. Elle passe en revue ses belles balades pendant les quatre saisons dans l’arrière-pays niçois, ses sorties en bateau, son baptême de plongée,…. Soudain, elle se voit partir sur un bateau vers les horizons lointains. Ce sont les voix d’Emma et de Bernard qui la réveillent : « …Viva, viva, Nissa la Bella, à nous le tour de l’Europe ! »
Carole les accompagne : « A nous le tour de l’Europe ! »
 

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Rédigé par Fathemeh

Publié dans #Patrimoine & Méditerranée

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Publié le 27 Février 2024

 
1910- extraits du journal de voyage de Sir Arthur. S.
De passage à Nice pour quelques mois, M. S-M. Biasini a proposé de me faire participer au comité des fêtes de Nice en tant que représentant des étrangers.
Après avoir lu les récits de voyage de Tobias Smollett, quoiqu’un peu anciens ainsi que quelques articles de Stephen Liégard sur la Côte d’Azur, j’ai eu envie d’entamer mon grand tour et de visiter cette fameuse Ville de Nice dont on parle tant dans les dîners en ville.
Quelle Ville magnifique toute d’Or et d’Azur.
J’ai donc accepté avec joie cette proposition.

La première commission du comité des fêtes a eu lieu le 5 avril. Pour la redoute de 1911, nous avons choisi la couleur mimosa, avec parements, garnitures et flots de rubans cerise. Les paillettes or et argent seront admises.
Des affaires de la plus haute importance m’ont rappelé à Londres et je ne suis revenu qu’en octobre.
Les projets présentés au concours pour le sujet du Carnaval n’ayant pas été retenus, la commission a adopté le thème « le triomphe du féminisme ». Il est bien évident que j’étais en désaccord total avec ce projet, mais je n’avais pas une voix prépondérante. Voici la composition des trois premiers chars du Carnaval qui aura lieu du 16 février au 18 avril 1911, avec défilés de chars et mascarades, batailles de fleurs, Veglione, feux d’artifice, redoute mimosa et redoute blanche et enfants carnaval des enfants. (extrait de la revue de Nice, 1910) :
Premier char : Madame Carnaval, chef du gouvernement tient de la main droite les rênes du Char de l’Etat et de la main gauche un chat à neuf queues.
Char de Carnaval : Carnaval, dompté par sa femme a perdu toute majesté et tout pouvoir. Confiné aux fonctions domestiques, il fait la lessive familiale sur son grand char, donnant le biberon à l’un de ses enfants… Aux quatre coins du char, des larbins débarbouillent les autres marmots.
Le comité a choisi ce thème. Que Dame carnaval gouverne, je n’y vois pas d’inconvénient, mais uniquement le temps de ces festivités…
Il ne faudrait plus que maintenant les femmes aient le droit de vote !
 
1911
Madame la duchesse de Montebello à l’occasion d’une de ses réceptions me demanda un jour si j’avais eu la joie de goûter ses spécialités niçoises dont sont si friandes nos bonnes et lavandières. Non, bien entendu. Ma cuisinière dont le langage chantant est un mélange de niçois, d’Italien mâtiné de quelques mots de français et d’anglais cuisine très bien, uniquement des spécialités anglaises.
Je lui demandais de me préparer une dégustation de plats niçois. Elle me proposa quelques jours plus tard un menu dont voici le déroulé : en entrée un peu de porchetta qui est un cochon de lait empli d’abats et d’herbe. Il s’agit d’une sorte de pâté absolument excellent, arrosé d’un petit vin rosé des hauteurs de Bellet au loin dans la campagne. En entrée, elle me servit de petits farcis niçois (oignons, tomates, aubergines, courgettes avec une farce à base de viande et de blettes). En plat principal, une daube aux carottes avec des pâtes fraiches. En fromage une tome des montagnes et enfin en dessert de la tourte de bléa qui est une tarte composée de blettes qui semble être la base de l’alimentation niçoise, de pignons, de pommes rainettes et probablement d’autres ingrédients. Quel excellent repas. ! Cela faisait longtemps que je ne me sentais aussi repus. Je décidais alors de faire un petit somme à l’ombre de la tonnelle de la maison.
Je pris ensuite l’habitude lorsque je revenais à Nice d’inviter quelques convives chez moi pour un repas typiquement niçois.
 
1912
Je me promenais il y a quelques jours du côté du Vieux-Nice. Je vais rarement dans ce lieu si étroit et si mal famé où l’on trouve de nombreuses boutiques et où vous êtes houspillé ou agressé de tous les côtés. J’entendis des cris au coin de la place Rossetti et je m’approchais. De nombreuses personnes, surtout des hommes se tenaient là et criaient en levant une main et montrant un ou plusieurs doigts, l’autre main, étant cachée derrière le dos, tout en énonçant ce qui semblait être des chiffres. Je suis resté un moment à les regarder. C’était plutôt exotique et ils semblaient complètement passionnés. Je me suis pris au jeu, mais je ne crois pas avoir bien compris les règles. J’en ai parlé le soir dans les salons de Mme De Périole, mais personne ne semblait connaître ces étranges coutumes.
 
5 mars 1912
En villégiature à Nice pour quelques mois, M. Mounier, l’aimable consul des Pays-Bas m’a parlé de tableaux exceptionnels exposé au Monastère de Cimiez. Je m’étais déjà rendu à Cimiez à l’occasion de la fête des Mais, mais je ne m’étais jamais aventuré aussi loin.
Il faisait beau avec ce ciel bleu azur si propre à Nice et qu’on ne trouve qu’en hiver. Je décider de cheminer à pied et commençais à grimper le long des sentiers qui parcourent la colline à travers la campagne. Les amandiers étaient en fleurs et l’air pur embaumait de mille parfums. Les arbres croulaient sous les oranges et les citrons. Quel merveilleux spectacle.
J’arrivais au Monastère de Cimiez qui me sembla de premier abord imposant et entrais dans la chapelle du monastère. Le contraste entre la luminosité de l’extérieur et l’ombre me saisit. Je fus enveloppé par une douce fumée et un parfum mêlant la cire fondue des bougies et l’encens. Je m’approchais du chœur de l’église et levais les yeux sur le retable « la crucifixion », tableau réalisé par Ludovic Bréa.
M. Auguste Pégurier, artiste peintre et fin connaisseur de l’art niçois m’avait indiqué qu’il s’agissait d’un peintre primitif niçois ayant exercé son art de 1475 à 1516.
Quelles admirables couleurs ! On y voir le christ en croix entouré de Marie très affectée, de Marie-Madeleine,ainsi qu’un certain nombre de personnage en lien avec la bible. Leurs visages sont marqués par la douleur et la désolation. Saint François d’Assise, lève ses mains stigmatisées. Le pénitent Jérôme frappe sa poitrine d’un galet. Tout est rouge sang, vert, blanc et or.
Au deuxième plan, on distingue la ville de Jérusalem et au dernier plan, il me semble reconnaitre les montagnes alpines sur un fond Azur. Le drapé des robes et des toges est remarquable ainsi que le contraste entre les différentes couleurs qui paraissent lumineuses.
A droite un deuxième tableau représente Jésus descendu de la croix sur les genoux de sa mère. Celle-ci prie avec ferveur. De part et d’autre, Saint Martin partageant son manteau avec un pauvre, Sainte Catherine portant la roue et l’épée, attributs de son supplice. La richesse de leurs vêtements contraste avec les couleurs de deuil de la Vierge.
Le fond d’or, symbole de la perfection unit les trois panneaux,
Les cloches sonnaient déjà les vêpres. Il était temps de retourner en ville.
Je laissais derrière moi ces merveilles pour rejoindre la route en passant par l’oliveraie.

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Rédigé par Brigitte

Publié dans #Patrimoine & Méditerranée

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Publié le 27 Février 2024

 

AndreÏ

1980 dans un orphelinat d'Europe de l'est, Andreï subissait sa énième punition.

Ce garçonnet de huit ans au joli visage, clair de peau, les cheveux en broussaille, yeux marrons bordés de longs cils avait commis un grave délit aux yeux du directeur.
Cet  homme froid, austère et cruel exerçait ses pleins pouvoirs sur des enfants terrorisés sauf Andreî, abandonné dès la naissance. 
Ce gamin faisait tout pour se faire remarquer et exister quitte à que ce soit aux travers les punitions.
Aujourd'hui il avait osé ricaner devant le directeur et après avoir reçu une paires de claques et un tirage d'oreilles bien douloureux, il devait rester au coin pendant deux longues heures sans bouger en gardant les mains croisées derrière le dos.
Ce petit être cabossé par la vie dès sa naissance allait il devenir un homme insensible et violent ou, grâce à la résilience, un être sensible et  aimant.
Andreî ne se posait jamais ce genre de question sur son avenir et se contentait d'avancer, de rester fier sans jamais au grand jamais verser une seule larme bien qu'il souffrait terriblement en son for intérieur d'une extrême solitude et d'un immense manque d'amour et de tendresse.
 

 

En jouant au dur, il se forgeait une carapace qui l'empêchait de sombrer et plus il s'endurcissait, plus le directeur le détestait et le lui faisait savoir par des coups de plus en plus violents et des punitions de plus en plus dures...

Porte des Lilas

 

Vingt ans ont passé et, après des études inintéressantes à ses yeux, Andreî devenu plombier décile d'aller vivre à Paris où la demande est importante et grâce à son ancien patron, a trouvé un remplacement. Il arrive avec son modeste bagage gare de l'Est et se retrouve complètement perdu au milieu de la foule.

 

"Whaou tous ces gens, des blancs, des noirs, des jaunes, des moches, des beaux, des bien habillés, d'autres pas"
Il va acheter des tickets de métro et au guichet demande un plan et un itinéraire en baragouinant quelques rares mots de français connus.
"Comment je vais faire pour arriver chez moi après avoir passé ma vie dans un village de 2000 âmes"...
Andreï s'engouffre dans les entrailles de Paris et doit, coûte que coûte, arriver porte des Lilas dans le petit meublé loué.
"J'y crois pas ça schlingue à Paris et on ne voit rien de la ville"
Les gens courent dans tous les sens, se bousculent, mais il sait qu'il va y arriver en demandant encore et encore son chemin.
Il se retrouve porte des Lilas, prends l'escalator et se retrouve à l'air libre face juste à côté de son logement.
Il est beau avec son magnifique sourire, il est heureux comme jamais et il veut croire en sa chance après avoir déjà beaucoup trop  souffert dans son enfance.
"J'vais bosser, faire la bringue, danser et bien trouver une ou deux jolies Parisiennes pour sortir avec moi"
Il arrive chez lui, respire profondément et s'allonge  tout habillé sur son petit canapé lit inconfortable mais qu'importe...

L'escarpin

Après quelques jours pour se familiariser avec le quartier et ses nouveaux collègues de travail, Andreï accepte avec joie une virée à "la bohème du tertre", célèbre cabaret de Montmartre.
Ils dînent dans une ambiance festive. Le restaurant est déjà archi plein quand son regard se porte sur le pied d'une femme.
L'escarpin au talon aiguille transparent, vertigineux, haut de douze centimètres, supporte une voûte plantaire en cuir argenté et le dessus de la sandale est orné d'une large bande de cuir tressé qui maintien le joli pied en place.
L'arrière du stiletto remonte sur le talon avec  une fine fermeture éclair permettant de mettre et retirer le soulier.
Un bracelet rond en cuir argent, tressé finement est cousu à coté de la fermeture et magnifie le soulier avec grâce.
Andreï n'a jamais vu rien de tel et il est hypnotisé par cette vision d'une élégance extrême.
Son regard intense remonte sur la jambe, la robe, les bras de l'inconnue qui le regarde amusée en souriant.
Il la fixe lui aussi néanmoins un peu honteux puis, prenant son courage à deux mains, l'invite à boire une coupe de champagne car, parait il  les Parisiennes boivent uniquement cette boisson.
Elle accepte l'invitation en se déplaçant légèrement sur ses deux magnifiques escarpins qui lui fait tourner la tête !!

Une si longue route

De fil en aiguille ils firent connaissance, elle citadine sûre d'elle, extravertie et joyeuse et lui, jeune homme cabossé par la vie, un brin timide, un brin rêveur, inquiet souvent, courageux certes désireux de se construire une nouvelle vie, à Paris pourquoi pas, bien qu'il ne maitrisait pas la langue mais qu'importe, quand on est jeune, on à tant de ressources.
Elle possédait son havre de paix dans la campagne normande et ils y partirent quelques jours pour mieux se découvrir loin de la capitale et de sa foule constamment en ébullition.
Ils prirent le train à la gare Montparnasse et atterrirent dans un bled de quatre pelés, un tondu, avant qu'elle ne récupère, garée dans un coin du parking désert, sa vielle guimbarde juste bonne pour les chemins de terre et les nids de poule. Cela les firent hurler de rire, cette voiture d'un autre temps, qui cahotait dans les sentiers entourés d'arbres certainement centenaires.
Au bout de quelques minutes, ils arrivèrent près de la maison entourée de bosquets et de grands champs.
L'herbe était verte et si épaisse quand ils sortirent du véhicule qu'ils crurent qu'elle s'élançait vers eux pour leur souhaiter la bienvenue. Les rafales de vent envoyaient un doux chant mélodieux et enveloppaient les deux amoureux d'une caresse odorante et sensuelle. La longère un peu délabrée semblait les attendre depuis fort longtemps, ses volets vermoulus claquaient au rythme des bourrasques et semblaient dire :"il est temps de rentrer car la nuit épaisse, noire et inquiétante ne va pas tarder".
La cheminée remplie de bois craquait à mesure que le feu se consumait et envoyait des ombres comme des images sur les murs. C'était calme, reposant, inquiétant peut-être, mais ils étaient heureux loin de tout, dans un autre univers et cette douce quiétude était comme un baume sur le cœur, une douce promesse d'un avenir plus radieux pour Andreï  qui ferma les yeux un court instant pour se recueillir sur ce moment de grâce...
 
Véronique
______________________________________________
 
 

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Publié le 27 Février 2024

 
De fil en aiguille ils firent connaissance, elle citadine sûre d'elle, extravertie et joyeuse et lui, jeune homme cabossé par la vie, un brin timide, un brin rêveur, inquiet souvent, courageux certes désireux de se construire une nouvelle vie, à Paris pourquoi pas, bien qu'il ne maitrisait pas la langue mais qu'importe, quand on est jeune, on à tant de ressources.
Elle possédait son havre de paix dans la campagne normande et ils y partirent quelques jours pour mieux se découvrir loin de la capitale et de sa foule constamment en ébullition.
Ils prirent le train à la gare Montparnasse et atterrirent dans un bled de quatre pelés, un tondu, avant qu'elle ne récupère, garée dans un coin du parking désert, sa vielle guimbarde juste bonne pour les chemins de terre et les nids de poule. Cela les firent hurler de rire, cette voiture d'un autre temps, qui cahotait dans les sentiers entourés d'arbres certainement centenaires.
Au bout de quelques minutes, ils arrivèrent près de la maison entourée de bosquets et de grands champs.
L'herbe était verte et si épaisse quand ils sortirent du véhicule qu'ils crurent qu'elle s'élançait vers eux pour leur souhaiter la bienvenue. Les rafales de vent envoyaient un doux chant mélodieux et enveloppaient les deux amoureux d'une caresse odorante et sensuelle. La longère un peu délabrée semblait les attendre depuis fort longtemps, ses volets vermoulus claquaient au rythme des bourrasques et semblaient dire :"il est temps de rentrer car la nuit épaisse, noire et inquiétante ne va pas tarder".
La cheminée remplie de bois craquait à mesure que le feu se consumait et envoyait des ombres comme des images sur les murs. C'était calme, reposant, inquiétant peut-être, mais ils étaient heureux loin de tout, dans un autre univers et cette douce quiétude était comme un baume sur le cœur, une douce promesse d'un avenir plus radieux pour Andreï  qui ferma les yeux un court instant pour se recueillir sur ce moment de grâce...
 

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Publié le 25 Février 2024

Incipit

Lecteur, cette aventure est littéralement impensée, aussi je passe par le mot pour l'inventer

Me voilà confondue avec une image ; cette image m'a choisie...
... Elle est intéressante sur un plan formel, plastique ; Étant neutre d'émotions envers elle je ne saurais la regarder autrement car elle attend que je la signifie et la renseigne. Donc cette image interpelle d'autres fonctionnalités chez moi... Mon esprit d'observation un peu particulier, ou le goût de l'étrange...
 
Le signifiant, La photo, l'Image, description ;
 
La photo est traversée de souffles contraires qui dessinent en filigranes les lignes directives du lieu. Dans un espace sombre un avant-plan vertical noir, au delà du sombre un mur gris que troue un fenestron repeint en blanc au bout duquel un cadre de fenêtre mal peint saigne d'un bleu sali ! Disons qu'un intérêt vital se trouverait derrière la vitre dépolie (ou serait-ce une image collée ), où une forme humaine délavée de bleu dans la lumière blafarde se signale. A cet instant précis, l'avant-plan personnage vertical noir réagit ; Un regard échangé entre eux deux, et une conversation muette et intense circule en accéléré, une connexion s'établit en un message codé. Urgence ou bien Interrogatoire ?
 
-Je vois, tu parles, je réponds, car je me re-connais... cette image est signifiée.
 
Transpercés comme par une lame en ces nanosecondes qui durent des siècles ces deux humains, au regard de ces paramètres improbables ont la conscience brutale de partager la même pensée !
 
Mais laquelle ?

Mérovée

 

- MEROVEE - En rêvassant Mérovée caresse le chrisme qu'il porte au cou et une onde intense lui parcourt le cerveau. Il se lève, piétine un nid de fourmis en hurlant, arrache sa tenue de travail et se quitte à l'instant même, atteint par l'acide formique il s'endort !!!

 
-Je rêve ou quoi, j'entends des bruits,cela n'a aucun sens, des gens sont en colère mais bon dieu cela fait des lustres que ça dure, que ça bugge et que ça gueule… je suis fatigué
Mérovée a un songe :
-Dans son rêve il marche, ou plutôt le monde marche pour lui car il atteint l'immobilité parfaite
-dans la rue descend en bataillon serré une armée de bouches qui n'ont plus de visage dans ce 'no-land', des bouches qui de concert vomissent en chœur une ventrée de mots de sons machinalement éructés et balancés à l'air, à la ville, à l'autorité.
-Des siècles et des siècles défilent sous ses paupières, rois, querelles intestines, parentèles toxiques qui s'étripent gaillardement depuis toujours ; et les même revendications, le même combat revient à la surface, peur, faim, quête du pouvoir et du territoire, violences, homicides, infanticides, séquestrations, chaise électrique, conflit sociétal et genré… de l'humain quoi !
-tel un essaim bourdonnant un carré de têtes noires se déploie dans un sens et puis dans un autre innovant une 'novlangue' réducteur de paroles scandées et ressassées.
-Dans son sommeil les images s'entrechoquent, la prise de Poitiers, les Sarrasins, les Burgondes et l'Austrasie, la guerre de Cent ans, Ravaillac et son bon roi de la poule au pot, le roi Soleil jouant avec Lulli encore des images, l'Esclavage et la traite des noirs, 1848, le Résorgimento Italien, la baie des cochons, le Vietnam / Vietkong et le communisme, le fascisme, Fukushi/Nagasaki, des tonnes d'images qui disent des tonnes d'histoires et la rengaine en boucle : j'ai peur, j'ai faim… famines, pestes, palu.., typhoide qui jonchent le chemin en des traces indélébiles, 1936 l'Espagne, les camps, les Afriques etc, etc, des images des histoires notre histoire
…......................................................................................................................................................
-Mérovée sous ses paupières closes entend tintinabuler le son grêle et pur d'une comptine enfantine … Il s'endort... Ils étaient trois petits enfants qui s' en allaient glaner aux champs aux champs aux champs
…......................................................................................................................................................
 
- BASSETERRE - - Hé.... un court-circuit, hé... c'est moi qui te regarde depuis mon bureau...
-c'est quoi ce court-jus ?
 
Soudain il étouffe dans le noir ; et l'humidité très vite lui suce la peau, il s'arrache le vêtement pour respirer un peu, tend les bras, trouve le mur a l'aveuglette le palpe en évalue les aspérités, les trous, le salpêtre, les moisissures, les glaviots qui dégoulinent et s'échappent de ses doigts
 
-Ça pue un max !!!
 
Une telle décomposition le prend à la gorge l'enveloppe et le tétanise ! Alors avec une rare violence il s'empare d'un manche qui traîne - pic ou merlin- ou je ne sais quoi encore et se met à cogner son mur frénétiquement, la chaux cloquée s'en échappe et dépoudre en laissant fuir son sable malodorant ; comme un piétinement de plusieurs corps en colère, à lui tout seul, Basseterre se démène rageusement, blanchi, aveuglé par les poussières et baignant dans son jus il se bouscule et atterrit dans la crasse ; il contemple son travail en souriant.

Horus

Basseterre
 
En avançant dans sa conquête du mur, Basseterre exhume de la blocaille des objets fort intéressants et insolites:une guimbarde, une poupée barbie, des pièces de monnaie en cuivre, une médaille dédiée à la sainte vierge, des bracelets en bakélite, des bagues en plastique de toutes couleurs...Des billes... une poche se détache promptement du lot avec un bruit mat il en jaillit de l'or, de l'antimoine et de la turquoise comme en un déploiement d' ailes vigoureux... sous son nez...il est tellement ému !
Subjugué et confondu il ne peut décrire ce phénomène ce bijou en l’occurrence plus...... précisément !!! dans un halo de poussières d'or il entend :
 

JE SUIS HORUS PROTECTEUR DE PHARAON CELUI QUI EST AU-DESSUS DE TOUT-

 
-Basseterre !... je t'ordonne en ces jours de Carnaval, je t'ordonne de me créer un masque d'orpiment par lequel je soufflerai à nouveau le fluide vital à la lumière de Aton-Reh......Et tout s'éteint. Alors qu'il est enfin arrivé à la pierre du mur et sur les genoux, il dégage encore la fenêtre et se jette à l'air libre de l'autre côté et il dit :
- Astre inconçu et puissant allié de Nout, suis-je en hypotypose ? Si tel n'est pas le cas, irradie mon humble personne et permet que j'offre à ta face sublime mes pauvres armes...
Ainsi il fait allégeance à Aton-Râ
Tel l'Oracle, la voix d'un historien célèbre lui parvient alors en ces mots :
 
- 'l'homme qui songe ne peut engendrer un art : ses mains sommeillent ;l'art se fait avec les mains.Elles sont l'instrument de la création mais d'abord l'organe de la connaissance'...Secoue-toi Oh... Basseterre et finis cette œuvre commencée : ce 'carré noir sur fond gris' que veut-tu en dire ?
 
enfin de l'autre côté du mur Basseterre prend de la distance et murmure tout bas : quel rapport entre ce mur et support/surface ou pop culture par exemple ???
 
Mérovée
 
Après des siècles et des siècles d'horreur, Mérovée ouvre un œil, baille les larmes aux yeux, s'étire et se lève ;
-tiens il n'y a plus de soleil... où est mon chrisme ensoleillé...Bah je le retrouverai plus tard, là je n'ai pas le temps de chercher...
-Mais que s'est-il passé ?
Il remet son vêtement et va au travail, il est l'heure...Mérovée est chef de chantier sur un site de rénovation du patrimoine
Ses potes à l'intérieur rassemblent les outils et font du net dans la pièce. On a bien travaillé ce matin, voilà un appareillage de pierres bien régulier, mur propre et convenable !
-Ça va les gars ?
- Rémi ! tu te mets sur les rejointoiements à vérifier et les ragréages au mortier sans oublier d'éponger sur l'humide...On garde le mur tel que, nous avons assez bossé dessus !
-Clotaire ! avec moi il faut dégager les sacs de gravats jusqu'au fourgon
...et c'est parti
…......................................................................................................................................................
Basseterre devient un carré noir sur fond gris car pour l'heure sa pensée a été occultée subitement...
 

Chantier

Alors que Basseterre prostré sur son trou noir méditait, passe Mérovée revenu de son travail...

Ces deux-là se reconnaissent d'emblée bien qu'ils ne se soient jamais rencontrés. Leurs regards se noient dans ce fluide qui les balade depuis quelques siècles déjà et les englobe dans un même corps, là où la fuite est une qualité de survie autant qu'une hygiène mentale et autorise des débordements spacieux et temporels.
MéroBaster ne fait plus qu'une seule et même entité : ELLE   l'espace d'une nanoseconde qui dure l'éternité et dans une langue enfantée abondante et expressive l'énergie interactive circule et invente l'espace et l'environnement comme si le chantier en soi était le moteur et la condition de toute imagination et de toute création.
 
...ELLE… Mérobaster, avec sa conscience augmentée contemple non plus un mur mais ce mur géant dont les fenêtres énuclées absorbent ou recrachent à volonté dans un sonore sublime l'impassibilité du ciel, du soleil, des oiseaux qui sillonnent les espaces et les trous et le souffle dans l'air du bleu azuréen.
 
' Détruire dit-elle ' comme tel titre de roman
Ce mur est une Conscience...
 
ELLE se souvient alors, jeune, rétro pédalant dans sa mémoire, ELLE se souvient d'un petit pavillon au centre du monde réel; vestige d'un passé colonial, agrémenté d'une véranda créole, cette véranda de l'ocre et du cinabre... quelques palmiers du vert des tropiques et le silence mystérieux...
… une photo en son cœur étranger.
Dans ce lieu de souffrances et de soins où pour respirer un autre air on s'accordait un moment sur la coursive, moment de plaisir ou d'évasion que ce reste colonial évoquait car il permettait l'oubli du néant coutumier, des responsabilités, des devoirs et du temps qui passe !
 
Tel un drone survolant sa jolie ville, ELLE en découvre ses tristesses aussi, ses excavations obscènes, morbides éventrations, ses démolitions cruelles, ses béances violées, ses chantiers incertains dans l'éternel, ses citoyens lobotomisés ou désemparés et ses murs abandonnés sans amour et sans soins.. et faisant fi du béton de promoteurs mercenaires et voraces, de la guerre mondiale ainsi que du charançon féroce et sournois, ELLE pointe un doigt terriblement accusateur là là et là et là aussi laissant jaillir promptement encore et encore ici et là des bouffées de palmiers et de dattiers chargés de désirs et pleins du bruissement de mouettes cancanières et d'étourneaux bavards scandant leur refrain à tue-tête :
 
 
LA FONCTION ESSENTIELLE DE CE LIEU EST DE N'AVOIR AUCUNE FONCTION SI CE N'EST SA RAISON PROPRE D'ETRE LA , COMME L'OISEAU :
 
' La raison de l'oiseau'
 

 

 
Marie-Thérèse
__________________________________________________________
 
 

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Publié le 25 Février 2024

 

Alors que Basseterre prostré sur son trou noir méditait, passe Mérovée revenu de son travail...

Ces deux-là se reconnaissent d'emblée bien qu'ils ne se soient jamais rencontrés. Leurs regards se noient dans ce fluide qui les balade depuis quelques siècles déjà et les englobe dans un même corps, là où la fuite est une qualité de survie autant qu'une hygiène mentale et autorise des débordements spacieux et temporels.
MéroBaster ne fait plus qu'une seule et même entité : ELLE   l'espace d'une nanoseconde qui dure l'éternité et dans une langue enfantée abondante et expressive l'énergie interactive circule et invente l'espace et l'environnement comme si le chantier en soi était le moteur et la condition de toute imagination et de toute création.
 
...ELLE… Mérobaster, avec sa conscience augmentée contemple non plus un mur mais ce mur géant dont les fenêtres énuclées absorbent ou recrachent à volonté dans un sonore sublime l'impassibilité du ciel, du soleil, des oiseaux qui sillonnent les espaces et les trous et le souffle dans l'air du bleu azuréen.
 
' Détruire dit-elle ' comme tel titre de roman
Ce mur est une Conscience...
 
ELLE se souvient alors, jeune, rétro pédalant dans sa mémoire, ELLE se souvient d'un petit pavillon au centre du monde réel; vestige d'un passé colonial, agrémenté d'une véranda créole, cette véranda de l'ocre et du cinabre... quelques palmiers du vert des tropiques et le silence mystérieux...
… une photo en son cœur étranger.
Dans ce lieu de souffrances et de soins où pour respirer un autre air on s'accordait un moment sur la coursive, moment de plaisir ou d'évasion que ce reste colonial évoquait car il permettait l'oubli du néant coutumier, des responsabilités, des devoirs et du temps qui passe !
 
Tel un drone survolant sa jolie ville, ELLE en découvre ses tristesses aussi, ses excavations obscènes, morbides éventrations, ses démolitions cruelles, ses béances violées, ses chantiers incertains dans l'éternel, ses citoyens lobotomisés ou désemparés et ses murs abandonnés sans amour et sans soins.. et faisant fi du béton de promoteurs mercenaires et voraces, de la guerre mondiale ainsi que du charançon féroce et sournois, ELLE pointe un doigt terriblement accusateur là là et là et là aussi laissant jaillir promptement encore et encore ici et là des bouffées de palmiers et de dattiers chargés de désirs et pleins du bruissement de mouettes cancanières et d'étourneaux bavards scandant leur refrain à tue-tête :
 
 
LA FONCTION ESSENTIELLE DE CE LIEU EST DE N'AVOIR AUCUNE FONCTION SI CE N'EST SA RAISON PROPRE D'ETRE LA , COMME L'OISEAU :
 
' La raison de l'oiseau'
 
Marie-Thérèse
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Publié le 25 Février 2024

La course

      

   L'anxiété visible sur son visage n'augurait rien de bon pour son classement dans ce rallye. La prochaine épreuve était la descente du mont Gros sur Monaco avec arrivée au bas du mont des Mules. Les derniers classés partaient les premiers, lui étant provisoirement cinquième s'impatientait assis dans sa voiture de série. La singularité de cette course étant de conduire sa propre voiture de tous les jours. Certaines portions de route, étant surtout des lacets, étaient visibles du point de départ. Mon favori, celui de la photo, que je nommerai Antoine pour garder son anonymat, fébrile attendait son tour.

Quelques pilotes pourtant chevronnés avaient mal négocié certains lacets plus difficiles à aborder en descente qu'en course de côte. Trois, deux, un, c'est son tour de partir que j'avais anticipé.

   Je venais de m'élancer avec mon parapente, gardant une bonne distance entre lui et moi. Sachant que je le suivrais il n'était pas perturbé par ma présence dans les airs. Je pus faire quelques photos sur des passages demandant de réelles capacités de pilotage. Il perdit quelques secondes dans le mont des Mules, deux lacets successifs abordés un peu trop vite l'obligeant à ralentir pour reprendre adhérence au sol. La fin de course se fit sans encombre. Puis l'attente avec impatience, car de l'arrivée nous ne voyons pas le tracé la descente. Ayant des obligations à Nice je ne pus attendre la fin de course pour connaitre les résultats. Je le saurai dans la soirée en téléphonant à Antoine. 

La soirée de gala

Quatre jours plus tard, soirée de gala pour la remise des prix. Un photographe flache à tout va. Les photos sont visibles aussitôt. L'Une m'intéresse particulièrement. Le premier et le second a la table de la présidente. J'observe ce trio, la ravissante jeune femme ne semble pas intéresser les deux hommes à sa table. Ils se gargarisent de leurs exploits. Un temps d'observation puis elle se fige, son sourire devient sarcasme. Pourtant je savais Antoine attiré par les jolies femmes. Ce soir, seulement deuxième de la course, il semble obnubilé par le vainqueur. Je ne peux détacher mon regard de cette table.

La présidente s'aperçoit de mon intérêt. Les deux candidats sont seuls dans cette salle. Après la remise des prix ils se sauvent ensemble. Je ne suppose plus, j'agis. Je m'approche de la table de la présidente et lui propose un cocktail, son verre étant vide. Je l'interroge.

- Puis je vous poser une question ?
- Oui.
- Le saviez-vous que ces deux candidats sont homos ?  

Hypotypise

Aucune réponse. Les lumières s'éteignent. Apparait sur écran la photo de la voiture gagnante. Elle me flashe, m'hypnotise ; j'ai l'impression de la découvrir…. Pourtant ! Mais je me souviens, j'avais dû m'absenter avant le dernier départ.

Je comprends mieux sa victoire. Le nom déjà : vite a ras  des pâquerettes, l'avant surbaissé, un profilage étudié par ordinateur. Quatre portes pourtant, rare pour une voiture de course. Il est vrai que seules étaient sélectionnaient les voitures de série. L'œil est attiré par sa couleur, un mélange de jaune, d'ocre, d'orange. Vulgairement" caca d'oie". 

      Faut-il hypo typiser devant une telle voiture ? Que nenni ! hormis la couleur et sa victoire elle est passe-partout. Cette fois-ci, partie dernière, elle finit gagnante. Comme quoi ! Qu'importe la voiture, seule compte la victoire.

Auto stop

Le lendemain lundi je reprends ma deudeuche et part à l'aventure. Je pressens des frissons à la découverte d'un site inconnu.Délaissant la départementale qui ne m'inspire guère, je me retrouve dans une impasse, un lieu féerique à quelques lieux de la civilisation. Une mare dont les eaux frissonnent sous un souffle de vent venant du levant. Certains arbres d'un vert émeraude ou printanier se penchent sur ces eaux pour un bonjour matinal. Un quidam dans un carré de verdure surprend le reflet orange de son vêtement dans l'eau verte. Au deuxième plan une trouée dans l'alignement des différentes essences d'arbres se reflète en deux parties inégales blanches et brouillées. Est-ce l'heure matinale ou le besoin d'émotions, je ressens une plénitude, une joie, un repos dans mon corps et mon âme.
Le décollage d'un avion de l'aérodrome proche me remet dans la réalité de la vie.
 
Louis
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Rédigé par Louis

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Publié le 25 Février 2024

Le lendemain lundi je reprends ma deudeuche et part à l'aventure. Je pressens des frissons à la découverte d'un site inconnu.Délaissant la départementale qui ne m'inspire guère, je me retrouve dans une impasse, un lieu féerique à quelques lieux de la civilisation. Une mare dont les eaux frissonnent sous un souffle de vent venant du levant. Certains arbres d'un vert émeraude ou printanier se penchent sur ces eaux pour un bonjour matinal. Un quidam dans un carré de verdure surprend le reflet orange de son vêtement dans l'eau verte. Au deuxième plan une trouée dans l'alignement des différentes essences d'arbres se reflète en deux parties inégales blanches et brouillées. Est-ce l'heure matinale ou le besoin d'émotions, je ressens une plénitude, une joie, un repos dans mon corps et mon âme.
Le décollage d'un avion de l'aérodrome proche me remet dans la réalité de la vie.
 
Louis
 

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