Publié le 29 Janvier 2018

ATELIER n°4

 

Le monologue intérieur

 

 

Le monologue intérieur est un procédé qui permet de suivre les pensées d’un personnage. Employé de façon ponctuelle, il permet d’entrer dans la tête du personnage qui se parle”, en quelque sorte, à lui-même, exprimant sa pensée la plus intime, la plus proche de l'inconscient, selon Édouard Dujardin, l'un des précurseurs du monologue intérieur appelé aussi courant de conscience.

Pour ce quatrième atelier, poursuivez votre histoire en y intégrant la photo d’un couple. L’un des personnages peut représenter votre héros ou héroïne si vous le souhaitez. Rédigez un paragraphe en le parsemant d’un peu de monologue intérieur.

 

  • Les photos :

 

Cliquer sur les photos pour les agrandir.

ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°4 - LE MONOLOGUE INTÉRIEUR
ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°4 - LE MONOLOGUE INTÉRIEUR

Voir les commentaires

Rédigé par Atelier Ecriture

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 22 Janvier 2018

ATELIER n°3 : LE MOT JUSTE

 

Le mot juste, précis, exact raconte parfaitement un ressenti, une action, une scène… Continuer votre histoire après avoir choisi la photo d’un objet ; bien sûr, cet objet doit trouver sa place dans votre texte et participer à l’intrigue. Et pensez au mot juste...

  • Les photos :

 

Cliquer sur les photos pour les agrandir.

ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°3 - LE MOT JUSTE
ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°3 - LE MOT JUSTE
ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°3 - LE MOT JUSTE

Voir les commentaires

Rédigé par Atelier Ecriture

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 17 Janvier 2018

 

 

 

 

 

 

 

 

Je suis arrivée. La Porte est devant moi ;

Cette porte bleue mystérieuse, à double battant en bois et métal, ouverte

Sur l’Inconnu.

Je me retourne vers les villageois qui m’ont menée vers cet endroit.

-Laissez-moi seule. Seule je dois accomplir ma destinée, mon devoir.

Mon chemin commence ici.

Je suis la mutante, les villageois le savent ; ils ont foi en mes pouvoirs.

Pourtant, je maîtrise difficilement toutes les possibilités de mon double cerveau.

Mon inconscient, il se nomme Jung, me porte assistance, me guide :

-Morgane, tes pouvoirs sont infinis, prends confiance en toi.

Je connecte mon cortex à la grande Porte.

Rien ne bouge, je me rassemble et force.

Les vantaux s’entrouvrent, dans un grincement, une raie de lumière

Pénètre l’obscurité.

Une pièce immense se dévoile, une cathédrale gigantesque.

Au centre, repose sur un autel, une boîte noire.

Cette boîte dont parlent tant de légendes.

Je dois comprendre, percer cette boîte.

Jung me retient :

-Elle tressaille, tente de préserver ces secrets. Méfie-toi :

Du Bien au Mal, il y a toutes les nuances.

Je me téléporte vers ce réceptacle ; il s’entrebâille.

Des objets mystérieux rutilent

  • Tiens, une croix ansée  pharaonique. Je la saisis et soudain, je me simila

    rise

A  Nefertiti : je siège sur un trône en or, ici tout est somptueux .

Etourdie, je lâche la croix et prends un bracelet de diamants, aussitôt je me similarise

Avec Zelda Fitzgerald : je participe à une fête, j’adore les fêtes !  Des gens chantent, dansent, boivent, rient.

Je lâche le bracelet.

 

Tout ceci est bien beau, mais il faut sauver la Terre.

Quel objet me permettra d’arrêter l’explosion atomique du monde ?

Voir les commentaires

Rédigé par Viviane

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 10 Janvier 2018

 

Elle n'était jamais sortie au delà de la cour de la ferme, seule, sans être accompagnée, le futur de sa vie elle le connaissait, un mari des enfants. Tout depuis sa tendre enfance la préparait pour cette vie comme sa mère et comme l'avait vécue sa grand mère avant. A l'école, à la maison elle apprenait la couture, la cuisine et comment être une bonne épouse, une bonne mère de famille.

 

Elle venait juste d'avoir 16 ans en ce mois d’août 1914. Quand un orage sous les traits d'une déclaration de guerre, vint assombrir sa vie de jeune paysanne. Dans le village, tous les hommes furent mobilisés, ils partirent pour une guerre qui devait être de courte durée, mais elle s'enlisa et il fallut se rendre à l'évidence, pour les travaux des champs il fallait remplacer les hommes.

 

 

Voila comment Melaine se retrouva au milieu du champ de blé qu'il fallait récolter. Une faux sur l'épaule, elle qui n'avait jamais manier autre chose qu'une aiguille à coudre, regardait cette étendue sans savoir par où commencer.

Elle mesura le fossé entre la réalité de la vie et ce que les Bonnes sœurs lui avaient enseigné.

 

Les hommes, par la stupidité de la guerre, venait de lui ouvrir les portes de sa vie. Elle, qui était depuis son enfance formatée pour être une femme soumise, serait à l’avenir indépendante de ses choix.

 

- Si je suis capable de remplacer un homme, se dit-elle, alors je serais son égale !

 

Ce champ de blé devenait le symbole de sa liberté, de sa prise de conscience. Elle venait, dans sa tête, de bousculer, de renverser toute son éducation. Elle ne serait pas l'image de sa mère, elle serait ELLE!

Et le soir dans sa chambre elle rêvait à un monde d'amour et de paix.

 

Pendant ce temps Paul son ami d'enfance jouait au jeu de la vie et de la mort dans la plaine de la Somme. C'est là, dans la boue, les pleurs et la peur qu'il fit la connaissance de Jacques qui comme lui venait du même département, ils étaient pays comme on disait alors. La souffrance rapproche les hommes et entre eux s'établit une amitié profonde. Paul parlait souvent de Melaine à Jacques qui petit à petit apprenait à la connaître.

 

 

Un soir ou l'attaque fit de nombreux morts dans leurs rangs, Jacques dit à Paul:

- Il faut que je te parle!

- Je sais ce que tu vas me dire, mais il faut que je t'avoue quelque chose.

- Quoi? Qui a-t-il ? demanda Paul.

- Je suis comme toi amoureux de Melaine.

Paul , ne dit rien mais une ombre passa dans ses yeux.

- Melaine est mon amie et moi c'est Toi que j'aime.

 

 

 

L'armistice fut signé et les deux amis retournèrent au pays. Pour Jacques l'espoir de rencontrer enfin Melaine. Pour Paul retourner vivre dans ce monde rural en cachant son secret.

 

 

 

Le temps passa, et l'on s'habitua très vite à rencontrer dans les rues du village les trois amis se promenant la main dans la main. Paul, Melaine et Jacques, les trois inséparables comme on les appelait. Melaine avait expliqué à Jacques qu'elle ne voulait pas se marier, qu'entre eux il ne pouvait y avoir que de l'amitié. Paul avait avoué à son amie son penchant pour les hommes.

 

La guerre avait libéré Melaine, fait naître un amour entre deux hommes qui se respectaient. Chacun continua sa vie Jacques, Paul et Melaine restèrent célibataires tout en s'aimant d'amitié.

 

"Quand les hommes vivront d'amour" dira plus tard Félix Leclerc, Melaine Jacques et Paul en étaient les précurseurs.

Un soir Mélaine les invita :

- Venez, leur dit-elle, j'ai eue une idée.

Paul et jacques acceptèrent avec plaisir d'autant que Mélaine était fine cuisinière et qu'elle accompagnait toujours ses plats de bon vin. Les trois amis se retrouvèrent en fin de semaine. Paul et Jacques étaient impatients de connaître l'idée de Melaine. Le repas fut excellent : une dorade sur son lit de pommes de terre et tomates, accompagnée de haricots fins de son jardin et le tout arrosé d'un Pouilly fumé. Ils durent attendre le café pour que Melaine leur dévoile son idée. J'ai pensé que nous pourrions écrire notre histoire, écrire et éditer un livre.

- Comment ça, dirent en cœur Paul et Jacques.

- Oui écrire ce que nous avons vécu, la guerre, notre amitié, notre vie quoi !

Paul dit :

- Tout? tu es sûre que cela va intéresser quelqu'un ?

Et jacques renchérit :

- Tout d'abord, en sommes nous capable?

Melaine balaya en quelques mots les doutes de ses amis.

- Oui, nous sommes la génération du renouveau. Notre témoignage pourra servir à d'autres. Je me suis renseignée auprès d'un éditeur, il serait intéressé par notre histoire, alors au travail !

 

Melaine savait que ses amis ne pourraient pas lui refuser l'aventure de l'écriture.

Ensemble ils décidèrent de se retrouver tous les lundi soir pour écrire et construire ce livre.

Chacun raconta son vécu, apporta des photos et documents pour illustrer leur aventure. Melaine rassembla, corrigea les textes et au bout de trois mois le projet du livre se concrétisa par environ cent soixante pages.

Un soir Paul demanda en riant :

- Quel titre allons nous donner à notre œuvre ?

Cette question souleva une multitude d'interrogations et de réponses.

Finalement ils tombèrent d'accord sur : " Amour, Amitié, Liberté".

Ce titre résumait leur vie, leur passé et leur présent.

Le manuscrit fut envoyé à l'éditeur le lendemain. L'éditeur leur fit quelques remarques sur la forme et non sur le fond. Les trois amis ne s'attendaient pas à recevoir un prix littéraire, mais ils furent surpris du succès en librairie de leur ouvrage. Ce travail d'écriture renforça leur amitié, ils décidèrent de continuer à écrire et créèrent un atelier d'écriture au village. Paul écrivit plusieurs recueils de Poésie. Jacques continua ses récits sur la guerre qui l'avait profondément marqué et Melaine fit plusieurs livres de recettes de cuisine et s'essaya dans plusieurs essais sur la condition de la femme.

 

 

Depuis quelques temps Melaine se posait des questions sur sa vie, sur son vide affectif. Elle qui se masquait derrière ses écrits venait de découvrir dans les poèmes de Paul, le reflet de sa vérité, elle était comme lui mais n'avait pas osé en parler à quelqu'un. Elle profita que Paul s'était isolé sur le balcon pour venir lui parler .

 

 

 

 

Dois-je lui dire, va t il me comprendre c'est avec toutes ces questions dans la tête qu'elle aborda Paul.

-Tu sais, j'ai un aveu à te faire, je suis comme toi!

Paul la regarda d'un air interloqué

- Comment çà, lui dit-il.

-Oui enfin, tu comprends je suis .....

-Quoi ? lui dit Paul

-Tu pourrais faire un effort quand même, lui dit elle d'un air excédé. Je pensais que tu étais mon ami et que tu me comprendrais à demi mot.

La tasse de café à la main, Paul eut l'air surpris de l'attitude de Melaine.

-Oui, je suis ton ami, bien sûr, sans problème. Tu es comme moi, tu veux dire que les hommes t'attirent?

-Non, non le contraire, tu es bête! Tu te souviens de cette jeune blonde qui travaille au super marché ?

-Oui très bien, très sympathique.

-Et bien voilà, je suis avec elle.

Melaine articula avec difficulté :

-Je suis lesbienne.

-Ha ! bon ben, ce n'est pas grave, ce n'est pas une maladie, dit Paul en riant.

- Oui, je sais, toi tu peux me comprendre, mais tu connais ma famille, mon père va en faire une maladie si je lui avoue cela.

-Que comptes-tu faire alors?

-Ben voila, tu es le premier à le savoir : je vais partir avec Martine - oui c'est son prénom - pour aller vivre au Canada ; nous partons demain. Je ne sais pas comment le dire à Jacques, je compte sur toi pour me trouver la solution. Je ne veux pas lui faire de la peine. Et surtout, je veux garder notre amitié et malgré les kilomètres qui vont nous séparer, continuer notre aventure de l'écriture. Comprends-moi, mon départ n'est pas une fuite mais un salut. Peut-être que plus tard je pourrai l'avouer à mon père.

Paul resta silencieux, une larme brilla au coin de ses yeux.

-Je te comprends, mais je vais être terriblement seul sans toi. Toi seule me comprenais.

Les deux amis se serrèrent très fort et un lourd silence se posa sur leur amitié.

C'est Jacques qui d'un - et alors vous faites bande à part ? - brisa ce long moment où seul le battement de leurs cœurs leur rappela leur amour.

Ce battement remplit la pièce comme le roulement lancinant du tambour dans le Boléro de Ravel, fit comprendre à Jacques qu'il se passait quelque chose.

-Quoi ? dit il. Qui a-t-il ?

Paul resta silencieux et c'est Melaine qui lui avoua :

- Je pars Jacques

- Comment tu pars?

- Oui, je ne fuis pas ,je m'envole pour le Canada demain.

Cette simple phrase fit l'effet d'une bombe, le monde de Jacques était entrain de s'écrouler. Tous les étages de sa vie, tombaient les uns après les autres emportant dans un brouillard son sens de la réalité. Il ne pouvait concevoir, vivre sans voir ou entendre Melaine. Elle était la musique de sa vie, sans elle tout devenait ruine. Comme ces villages de la Somme, où il avait vu tant d'hommes mourir. Partir c'est mourir ou construire, elle avait choisi un nouveau départ. L'océan qui allait les séparer viendra le long des rivages lui rappeler ses mots, ses phrases qui aujourd'hui n'ont plus cours. Melaine, c'était ses points de suspensions qui lui permettaient d'écrire sans interrogation... son exclamation "je pars" venait de mettre un point final à son roman.

Jacques s'éloigna, pour cacher des larmes qui écrivaient sur ses joues son mal-être.

Puis il revint, prit Melaine dans ses bras et, tendrement, lui dit dans le creux de l'oreille " Pars! ne t'inquiète pas pour moi. Comme les plaines de la Somme, sur les ruines d'hier, il pousse des coquelicots aux couleurs de l'espérance."

 

Paul, Jacques Melaine, quelque soit l'endroit, entre eux il existe un fil rouge, ils seront toujours amis.

_____________________________________________________________________________________

 

Voir les commentaires

Rédigé par Bernard

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 9 Janvier 2018

ATELIER n°2 : NARRATEUR ET POINT DE VUE

 

Pour continuer notre histoire, voici des photos avec plusieurs personnages, des ambiances diverses. Choisissez celle qui convient le mieux pour la suite de votre nouvelle.

Analysez quel type de focalisation vous avez utilisé lors du premier paragraphe de votre texte et poursuivez dans le même registre.

  • Les photos :

 

Cliquer sur les photos pour les agrandir.

 ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°2 - NARRATEUR ET POINT DE VUE
 ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°2 - NARRATEUR ET POINT DE VUE
 ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°2 - NARRATEUR ET POINT DE VUE

Voir les commentaires

Rédigé par Atelier Ecriture

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 8 Janvier 2018

 

 

La jeep pila sous le coup de frein énergique. Derrière le pare-brise glacé, Hervé se dressa, remonta ses lunettes sur son front, fixa l’horizon devant lui d’un air effaré. L’effort de concentration pour identifier ce qui se dressait, là-bas, dessinait une profonde ride entre ses sourcils.

 

 

Le soir se teintait de taches roses. Autour de lui, la plaine s’estompait, les arbres maigres se diluaient dans la brume. Le temps tournait, le ciel blanc virait au gris sombre, la tempête de neige menaçait.

Dans sa jeep sans toit, ni protection d’aucune sorte, il n’avait que son manteau en peau, chaudement doublé de fourrure, certes, mais insuffisant pour passer la nuit dehors, au milieu de rien et loin de tout. Figé comme une statue, il laissait le vent givrer sa barbe grisonnante et emmêler ses cheveux.

Une lueur blafarde montait dans la plaine. Là-bas… où était sa cabane… Là-bas, où il y aurait dû avoir la nuit.

Pas assez rougeoyant pour un incendie, pensa Hervé, et pas de fumée non plus…

Il soupira, se remit en route, roula quelques kilomètres, s’arrêta devant l’incroyable. Une place illuminée, bordée de façades d’immeubles doucement éclairées d’ocre s’étaient matérialisée en l’espace d’une journée. Des centaines de personnes y étaient rassemblées, balançant à bout de bras une multitude de lumignons blancs, sans doute leurs téléphones portables. Comme à un concert. Sauf qu’il n’y avait aucune musique. Un silence absolu dansait sur la lumière, les gens tanguaient, roseaux fragiles sous la brise d’hiver. Personne ne semblait avoir remarqué Hervé. Pourtant, il ne passait pas inaperçu avec son engin pétaradant, son look d’homme des bois. Ce qu’il était, en fait. Un solitaire vivant de presque rien. Des années qu’il s’était retiré dans sa tanière, en animal semi-sauvage fuyant le monde et le bruit.

Il se dressa à nouveau, remonta ses lunettes sur son front, plissa les yeux à la recherche de sa cabane. Elle avait disparu.

Hervé descendit de la voiture, se dirigea vers la foule. Sur la place flottait une odeur doucereuse, effluves de fruits trop mûrs, relents de matières en décomposition. Autour de lui, les gens continuaient à se balancer mollement, le regard en adoration, insensibles à sa présence. Comme en transe.

Il s’avança, tendit le cou dans la même direction que ceux qui l’entouraient. Jouant des coudes, il se faufila, traversa la place. L’odeur devenait de plus en plus forte. Il tourna au coin de la rue. Là, le choc !

 

La statue d’un lapin immense se dressait à l’angle du mur. Aussi haut qu’une maison de deux étages. Une statue particulière. Composée de détritus de toutes sortes, papiers, cartons, ferrailles, tissus, plastiques, enfin, tout ce que l’on trouve dans les ordures, odeur y compris.

 

En y regardant de plus près, Hervé distingua le paillasson de sa cabane, puis le plaid qu’il avait oublié sur la chaise en bois du jardin… et la chaise. Elle aussi avait rejoint la sculpture. Bon sang ! Toute la cabane y était-elle passée ?

 

Les bras ballants et l’air perdu, il scruta la foule, cherchant quelqu’un à qui se raccrocher, un ancrage dans le réel, mais le lapin géant avait tout aboli.

P’tain ! Ma cabane… Pas le temps de formuler une pensée cohérente qu’il sentit un poids tomber sur ses épaules. Littéralement. Deux bras ronds et roses dégoulinèrent de part et d’autre de son cou. Une mèche blonde suivit, camouflant à demi un visage juvénile.

Une jeune fille, yeux fermés, toute molle, s’appuyait sur son dos, incapable de tenir debout. Bien chargée, la petite… Délicatement, Hervé la fit pivoter, la prit dans ses bras, l’assit tant bien que mal dans la voiture.

La fille dodelinait, murmurait des sons incohérents. Il lui donna un peu d’eau, lui tapota les mains, les joues. Elle ouvrit enfin les yeux, le fixa intensément. Déjantée, mais belle gosse…

Hervé lui sourit :

Ça va mieux ?

La fille fit oui de la tête. Bon signe, ça…

Tu peux parler ?

Re-oui de la tête. On progresse…

Tu peux m’expliquer ce qui se passe ? C’est quoi ces gens, ce lapin ?

C’est les Recycletous ; ils recyclent les déchets, en font des idoles. Quand une idole est érigée, le Grand Gourou Recycletou nous appelle pour la cérémonie de l’Adoration.

Hervé la regarda, dubitatif. Se fout de ma gueule, la miss… ?

La cérémonie de l’Adoration d’un lapin en détritus ? demanda-t-il.

Oui.

Et… c’est ça qui vous met dans cet état de zombie ?

Non, s’insurgea la jeune fille, on est en transe. C’est grâce au Nectar Précieux que le Grand Gourou Recycletou nous a donné pendant la cérémonie.

Hervé opina. Sacrée mixture, ce nectar… Il observa à nouveau la place qui commençait à se vider. Il réalisa alors qu’elle était factice, les immeubles n’étaient que des façades, comme un décor de cinéma. Les gens s’éloignaient, emportaient un morceau d’ordure de lapin avant de partir. Merde, mon plaid… ma cabane... ?

Et ma cabane ? demanda-t-il à la fille.

On l’a déplacée.

Pourquoi ? Vous pouviez pas faire votre truc ailleurs ?

Non, c’est la lune qui décide. Elle a dit que c’était cet endroit-là, précisément qui était désigné.

Hervé leva la tête vers le ciel. La pleine lune brillait. Il se frotta la moustache, s’enquit :

Et... elle sera où ma cabane ?

Viens, répondit la jeune fille, je vais te montrer.

La jeune fille entraîna Hervé sur la piste. Ils contournèrent la place factice. L’envers du décor n’était que vastes panneaux de bois.

Pourquoi construire une place pour vos cérémonies ? demanda Hervé.

Pour représenter la ville. C’est la ville qui génère le plus d’ordures, c’est notre temple amovible. On le construit et on le démonte au gré des injonctions de la lune.

Mmmm…

Hervé opina, puis :

Pourquoi le silence ? Tout est extrêmement silencieux. Même maintenant, les gens s’en vont sans paroles, sans bruit.

C’est prière et tristesse, répondit la fille. Prière pour un monde plus sain, plus respectueux et tristesse devant ce que nous en avons fait. On espère sensibiliser l’opinion par nos messes silencieuses et lutter ainsi contre tout ce qui nous étouffe et nous tue. La Cérémonie de l’Adoration, faut prendre ça au second degré. On n’est pas une secte, on dénonce aussi les sectes en les tournant en ridicule en glorifiant les détritus.

Je vois, marmonna Hervé.

Mais je ne vois toujours pas ma cabane, ronchonna-t-il in petto.

 

La jeune fille marchait devant lui. Elle s’engagea sur le sentier qui menait au lac. La nuit les enveloppait. Le froid piquait les joues, crépitait de givre sur sa moustache. La lumière blanche de la lune, brisée par les branches enlacées, tombait en éclats sur le sentier, pas japonnais aléatoires.

 

 

La forêt s’ouvrit soudain, dévoilant le lac. Il s’étalait devant eux, bleu, mauve, ondulant doucement, bercé de reflets d’argent. Le ciel l’épousa de la même teinte mauve et nacra ses nuages pour parfaire l’harmonie. Entre le ciel et l’eau, des montagnes blanches et bleues protégeaient une forêt sombre. Au bord du lac, toute chaude de son bois couleur miel, la cabane réchauffait l’hiver.

 

Hervé s’arrêta. La jeune fille se retourna vers lui.

Elle te plaît comme ça ? On l’a un peu modifiée…

 

 

Un peu modifiée ? Sa cabane de bric et de broc s’était transformée en chalet magnifique ! Une vraie maison, accueillante, mais c’était toujours sa cabane, il la reconnaissait malgré les changements.

Comment avez-vous fait cela ? s’étonna-t-il.

La jeune fille sourit :

On a gardé son âme, on y rajouté un peu de la nôtre…

Puis, elle l’embrassa et repartit sur le sentier, vers les siens. La nuit l’avala aussitôt, elle disparut.

La lune en fit autant, plongeant derrière les montagnes. Le silence dense pesa d’un coup sur le cœur d’Hervé. La solitude, il l’avait choisie comme une expiation. Peut-être avait-il suffisamment payé… Il voulait voir cette rencontre comme un signe, une étape de sa vie. Cette jeune fille… Sa fille aurait eu à peu près le même âge… Il avait trop bu ce soir-là… le virage, l’accident, sa petite princesse ensanglantée, sa petite princesse inanimée, sa petit princesse morte. Des larmes incontrôlables se frayèrent un chemin jusqu’à ses yeux, libérant des sanglots retenus depuis trop longtemps. Il pleura toutes ces années cadenassées, puis, apaisé, se remit en route vers sa cabane-chalet. Demain, demain… demain, la vie l’attendait...

***

ÉPILOGUE

 

 

Le Grand Gourou Recycletou attendait sa fille :

Où étais-tu passée ? Je t’attends pour partir.

J’ai raccompagné le propriétaire de la cabane, répondit-elle.

Ah ! Il est venu… Qu’a-t-il dit ?

Il semblait perdu…

La jeune fille réfléchit un instant.

Il m’a demandé ce qui se passait. Je lui ai expliqué notre idéologie. Il a paru surpris. « Adorer un lapin ? » qu’il a dit en secouant la tête... C’est sûr que ce n’est pas facile à piger… Mais bon, il a été plutôt sympa. Ce qui l’inquiétait, c’était sa cabane. Il m’a demandé plusieurs fois ce qu’on en avait fait. Alors je l’ai accompagné au bord du lac. Quand il l’a vue, il s’est écrié : « Comment vous avez fait ? »… Faut dire que le spectacle était saisissant au clair de lune ! Je lui ai répondu qu’on avait gardé l’âme de la maison tout en y rajoutant un peu de la nôtre. Ça a eu l’air de lui convenir, alors je suis partie.

Tu as bien fait, ma fille. Il est temps pour nous de rentrer, le jour se lève déjà…

 

Hervé se lève aussi. Devant sa fenêtre, le lac scintille en rose, effleuré par un rayon de soleil. Aujourd’hui, pour le premier jour de sa nouvelle vie, il s’autorise à à penser au passé, à Christine, son épouse… Dix ans qu’il n’a plus de nouvelles, qu’il n’a pas cherché à en avoir… Il entend encore sa prière… « Ne t’en va pas, c’est trop dur toute seule... »… Aucun reproche, aucune haine malgré sa responsabilité dans la disparition de leur enfant… Et lui, perdu, avait murmuré : « C’est trop dur avec toi... », incapable de la regarder. Il était parti pour fuir sa culpabilité, son chagrin, sa petite princesse morte…

Il secoua la tête, se servit un café bien noir, saisit son téléphone :

Allô… Christine ?

_____________________________________________________________________________________

Voir les commentaires

Rédigé par Mado

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 8 Janvier 2018

Du système à l'ancienne " la rêverie" à la pensée informatisée.

Delphine rêve à quoi, à qui, en position allongée, entourée de ses amis les livres, effondrée, le regard interrogateur sur un fruit, lequel ! une orange bien ronde comme la terre, imagination de chacun sur sa vie et ses origines.

La terre est ronde, pas tout à fait, on sait qu'elle est aplatie aux pôles, pourquoi ?

La soirée s'annonce pleine d'interrogations....

Je la mange, sa couleur, son odeur me tentent, non je l'admire, ce fruit si parfait, qui peut avoir été cueilli dans ces pays lointains, par des gens de couleur, de coutumes différentes, mais qui nous ressemblent malgré tout. Ce fruit ne leur inspire qu'un agrume en l'état primaire et c'est bien.

Donc revenons à cette situation latente d'effondrement de fatigue, de solitude ou autre état qui a raison de soi.

Pourquoi, c'est bien aussi de ne penser à rien, c'est difficile aussi, moi je n'y arrive pas, mon esprit ne me laisse pas tranquille, mais bon là c'est pas moi, c'est Delphine, en regard de son attitude, elle me fait penser à une actrice des années 1960, Brigitte Fossey dans un film dont je ne me souviens plus du titre, ou à Simone de Beauvoir  préparant mentalement son prochain bouquin qui me plaira certainement.

Mais l'héroïne a une idée derrière la tête, son esprit vagabonde et l'être aimé attend patiemment, il est à l'heure actuelle des nouvelles technologies, mais l'attraction qui les unit est si forte qu'elle aura raison de leur attente....

 

Donc Delphine avait la pensée vagabonde, mais l'être aimé l'interrompit.

Revenons à la réalité des événements, à la concrétisation des sentiments envers l'autre. Jérémy sort son amour de sa torpeur. Delphine voit son téléphone s'allumer et se tortiller sur place. Le jeune homme est sur sa tablette, jouet tenant une place implacable dans les mains de son propriétaire.

- Je pensais à toi, l'envie impérative d'entendre ta voix, je te connais échafaudant mille et une pensées, plus utopique les unes que les autres.

 

Comment vas-tu, tu sais que je t'aime.

Il entend Delphine rire aux éclats, puis un milliers de bruits plus bizarres.

- Que se passe-t-il ma chérie?

- Rien, dans deux minutes je suis à la galerie.

Jérémy se trouvait avec un ami, le jazzman de service, un intello, avec un rire épouvantablement communicatif.

Et Bip Bip, l'invité surprise, petit robot tout blanc, récupéré dans l'atelier des copains farceurs, à l'esprit inventeur, c'est leur métier, la grosse boite qui les emploie est la dernière génération en matière de robotique.

- Bonjour jolie demoiselle, articule avec délicatesse ce petit androïde, tout en s'avançant vers Delphine, lui prenant la main et fixant sur elle ses beaux yeux bleus.

- Quelle surprise, mon chéri, finies mes rêveries frénétiques, là je suis dans la réalité, c'est une vision concrète du monde de demain. Ça me fait du bien.

Puis en quelques secondes, regardant ce petit personnage, malgré elle des pensées peuplent son esprit. La jeune femme est peintre, de l'abstrait, ses œuvres se sont tournées vers le surréalisme inspiration Dali dans sa folie, ce sentiment ne l'atteint pas encore, mais...

Jérémy la prenant par le bras, lui chuchote à l'oreille :

- On se réveille, j'ai eu des échos de ton expo, tu as encore vendu un tableau.

Soudain les yeux de Delphine s'allument, on va fêter ça.

- Et moi, et moi, dit Bip Bip, je ne vais pas rester tout seul !!!

Puis voyant notre détermination, le petit robot retourne à sa place.

 

Une sortie nature sans téléphone et tablette.

Delphine porte des lunettes cela lui va bien, pense Jérémy. Journée écolo, le matériel est là, j'espère que l'on a rien oublié.

Charmant avec sa chemise à carreaux, on est dans les mêmes couleurs, se dit la jeune femme.

Examinons la situation, des espèces rares ont été découvertes dans le lac, il faut effectuer des prélèvements et le rapporter au labo, l' eau est un vaseuse ici, lance Delphine.

Que les herbes sont hautes fines et sèches, se dit Jérémy en arrachant l'une d'elles.

Tu as vu si près du bord, c'est une grenouille naine, oh le canard a eu peur!

C'est un coin du lac tranquille avec les cygnes et leurs petits qui nagent en silence, répond la jeune femme.

A ce moment Jérémy prend la main de son amie :

On est bien ici, qu'en penses-tu? On pourrait pique-niquer!

Si elle accepte, je lui fais ma déclaration, sinon on continue nos recherches.

Volontiers le temps et le lieu s'y prêtent.

Laissant leurs bocaux, épuisettes et autres ustensiles de côté, les amis s'entretiennent de leurs sentiments.

Il est gentil, attentionné, tiens un voilier au loin!

Le repas touchant à sa fin, Delphine se lève :

Tu as vu la statue de Charlot un peu plus loin près du massif de fleurs ? Il a gardé son sourire amusé.

Le ciel se couvre, l'appareil photos rentré, leurs affaires sont rapidement prêtes et la voiture n'est pas loin.

Je l'aime bien aussi avec ses cheveux lâchés!

Regarde, on a quand même recueilli quelques bestioles.

C'est une histoire d'eau, de fluidité, de sentiments ordinaires dans un décor de silence, de réflexion et de travail. Ils se ressemblent, c'est une attirance particulière qui peut durer dans le temps!!!

La journée se terminait doucement, les abords du lac avaient par leurs découvertes fécondes enrichie les recherches de Delphine et de Jérémy. Du bleu irisant l'eau translucide, les cygnes et les canards en renvoyaient des ombres immatérielles. C'était une invitation à tout oser, mais il fallait rentrer.

 

 

Chemin faisant, le ciel ressemblait de plus en plus à de gros personnages fantasmagoriques, oppressants, menaçants avertissant par leur noirceur que quelque chose de terrible pouvait arriver. En traversant le pont il fallait avoir du courage car son étroitesse ressemblait à une main de sorcière tendue, prolongée par un bras long donnant l'impression que la route n'en finissait pas. L'atmosphère générale était comme une image inerte.

Qui vivait là entouré d'ombres, tout semblait d'un calme, d'un noir, la mise au rebut par le dieu de ténèbres. L'eau stagnante reflétait timidement les derniers rayons du soleil et paraissait ne pas vouloir mourir. Le ciel de Zeus commençait à vibrer d'éclairs, l'onde de la déesse allait inévitablement recevoir par des flèches empoisonnées la fureur des dieux. A moins que dans un élan de compassion pour nos deux promeneurs un dieu bienveillant lance sa palette de peinture pour qu'un éblouissant et majestueux arc en ciel n'apparaisse comme un ordre donné. Couleurs fugaces, dégradés téméraires avec ses tons primaires et secondaires qui n'ont rien demandé mais étonnent toujours par leur beauté.

Sur l'autre rive, les arbres font des ombres accueillantes, le bruissement de leurs feuilles encouragent à l'aventure, ni Zeus ni autres sorcières ne semblent atteindre nos deux jeunes et de la journée ne retiennent que les tendres instants et le doux aveu de Jérémy pour sa belle aux yeux de velours.

Quittons cet endroit lugubre tout droit sorti d'un conte de Grimm, retrouvons nos objectifs premiers, nos habitudes terre à terre de la vie grouillante et dénaturée de la ville.

...

Delphine pensait à l'évolution de sa vie, le tournant de son existence de rêveuse compulsive.

Ma puce tu es encore partie dans tes songes !

Que lui répondre oui c'est vrai, je me disais que cet état de fait était bon pour écrire, projeter sur papier

toutes mes rêveries, mes émotions. Mes amies me sortent de ma torpeur, que me dit Elise?

Je suis là, tu m'entends, me hurle cette dernière en me prenant dans ses bras, me secouant vivement.

Son amie est extraordinaire, affirme Paul à quelques relations, belle, intelligente en plus de la peinture

(elle vend pas mal ..), elle se lance dans l'écriture.

A vrai dire, se dit Jérémy, pourquoi lui reprocher son manque d'attention ? Delphine fixe ses pensées sur des sujets qui ont leurs importance , on ne les connaît pas forcément et cela nous dépasse parfois.

Te souviens tu lorsque nous sommes allés au bord du lac, des événements nouveaux, un décor particulièrement calme, là tu étais transformée, plus de pensées irréelles.

C'est vrai, se remémore Delphine, mon amoureux a raison, j'ai peut être besoin de changement de temps en temps.

Qu'avez vous fait à Vevey l'autre jour, s'informe Paul ?

Justement j'y songeais, se dit Jérémy.

Très bien on a pu recueillir des échantillons pour le labo, le temps était superbe.

Mais en fin de journée on a du traverser la tempête, les éléments se sont déchaînés, c'était l'enfer, ajoute la jeune femme.

Elle exagère, pense en souriant le jeune homme.

Oui le paysage a été différent, mais on peut retenir une palette de couleurs de l'ocre du soleil couchant au sombre de la nuit qui tombe, rendue agressive par les éclairs de l'orage.

_____________________________________________________________________________________

Voir les commentaires

Rédigé par Dominique

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 8 Janvier 2018

ATELIER n°1 : L'INCIPIT

 

La photo, bien que muette, est un complément utile pour illustrer un texte.

Parmi les photos proposées, choisissez votre personnage et écrivez l’incipit de votre histoire en utilisant ce que montre ou suggère la photo.

N’oubliez pas que d’autres photos seront proposées lors du prochain atelier afin de poursuivre votre histoire, à la manière d’un logo-rallye.

La contrainte principale est d’arriver à tisser un fil rouge d’un cliché à l’autre.

  • Les personnages féminins

 

Cliquer sur les photos pour les agrandir.

ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°1 - L'INCIPIT
ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°1 - L'INCIPIT
  • Les personnages masculins :

 

Cliquer sur les photos pour les agrandir.

ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°1 - L'INCIPIT
ÉCRIRE SUR DES PHOTOS - Atelier n°1 - L'INCIPIT

__________________________________________________________________________

Voir les commentaires

Rédigé par Atelier Ecriture

Publié dans #Ecrire sur des photos

Repost0

Publié le 8 Janvier 2018

 

Te souviens-tu, Jean-Michel, de toutes ces musiques qui ont accompagné nos moments de joie ?

Te souviens-tu, Jean-Michel, le jour de notre mariage quand, dans cette église, retentit la cérémonieuse Marche nuptiale de Mendelssohn ? La forêt du Songe d’une nuit d’été entrait dans la petite chapelle. Des trompettes s’échappait l’air humide des profondeurs de la terre. Tu me regardais à l’autre bout de la nef tandis que, encouragée par les archets énergiques des violons, j’avançais sur ton chemin pour réunir nos deux destins. Tremblante comme les pierres de l’édifice face à la puissance des staccatos, je te fixais avec joie. Le temps était suspendu. Mais quand le grave Wagner résonna depuis l’orgue, le doute traversa nos regards : Allions-nous tenir cette alliance jusqu’à notre mort ?

Au fur et à mesure de l’après-midi, l’ambiance s’allégea. La joie s’exprima au travers de sonorités plus sauvages. Sous le tympan de l’église, la pluie aiguë de riz s’immisça dans nos chapeaux, nos décolletés et nos rires. Puis les Vuvuzelas sonnèrent avec fracas, brisant l’ambiance religieuse. Le bouquet final restait à venir avec le concert de klaxons fortissimo de notre parcours niçois qui sema dans la ville une cacophonie assourdissante. Hébétés par tant de liesse, main dans la main, nous laissions le bonheur éclater, heureux de le faire entendre au monde entier.

Après ce vacarme, le calme réapparut avec le tintement élégant et discret des coupes de champagne dans cette belle villa d’inspiration italienne où les bulles s’évertuaient à croître l’effervescence de la réception dont nous étions les roi et reine. Plus tard dans la soirée, la danse s’annonça avec Strauss et mon père me fit valser, valser et encore valser. Impérialement. Majestueusement. Puis il me confia à tes bras dès que les premiers accords du rockabilly traversèrent les baffles de la sono. Passes bras dessous bras dessus, sur le côté ou même derrière, nous tournoyions dans le sens de la vie sous les boums boums de la batterie et les ouins ouins des guitares électriques.

Nos visages colorés tantôt de rouge, tantôt de bleu par les projecteurs ont compliqué la tâche du photographe, qui n’a pas manqué de shooter ma jarretière dévoilée au détour d’une acrobatie dont tu maîtrisais la technique. Enfin, le point d’orgue de cette agitation, fût la musique Lounge du CD Première nuit d’amour des Mariés que ta sœur nous avait concocté.

Des années après, au zénith de notre vie de couple, les musiques lancées à plein tube pendant les fêtes organisées avec nos amis et nos enfants, tourbillonnaient dans la maison conviviale de mes rêves.

La maison conviviale de mes rêves, le mariage de mes rêves, la vie sociale et sentimentale de mes rêves. Tout cela fait beaucoup de rêves, Jean-Michel, tu ne trouves pas ? En vérité, nous ne sommes pas allés au-delà de l’amitié. Tu as choisi une autre option que celle de continuer à répondre à mon sourire. Celle de te donner la mort, muselé dans le murmure incessant des notes noires de tes tourments. Aujourd’hui, il n’a rien que du silence autour de ton nom, autour de la douce mélodie que la prononciation de ton nom offre à l’Univers.

La musique est au-delà des mots, atteindrait-elle aussi les morts ? Démunie face à ton cercueil fade et lisse qui rejoindra la chaleur des flammes puisque tu as refusé la chaleur de mon cœur, j’écoute l’Ave Maria de Gounod chanté par Maria Callas pour adoucir cet instant suspendu où je veux croire qu’il reste encore un peu de toi sur cette terre.

Voir les commentaires

Rédigé par Marie

Publié dans #Musique et Danse

Repost0

Publié le 8 Janvier 2018

Posé sur une nappe en velours lie-de-vin plus ou moins douteuse, mon corps de laiton est exposé aux caresses du vent iodé de Deauville. Les empreintes des doigts agiles de mon maître ont été chiffonnées avec soin. Le souvenir de la douceur de ses lèvres sur mon embouchure et de son souffle si vital s’en vont à vau-l’eau. Mes lalala s’envoleraient bien de nouveau mais seul mon extérieur reflétant les nuages semble s’animer encore. Les rares passants en guenille s’émerveillent devant mes quatre pistons. Parfois des exclamations, parfois des interrogations, parfois des critiques. S’ils savaient quelle star j’ai été. Avoir rayonné sous les spots de toutes les salles de France et de Navarre, de New York et de Dakar, quel destin ! J’en ai vu des visages pleins de joie au son de mon pavillon, oh la la. Mon Dieu, que j’en ai connus. Mon corps et mon cœur étaient alors un feu de joie permanent, pour ne pas dire un jeu de foi permanent… Puis les moments difficiles sont arrivés, c’est vrai. Mais jamais je n’aurais pensé échouer ici. Me retrouver là, au gré du vent, au côté d’une petite étiquette intitulée « 2.5 kg Laiton 200 000 yuans », ça me fend le corps. Pourtant Michoutou me l’avait bien dit : « Chérrri, il faut touyours rester humble, sinon tu vas perrdre la face un jourrr. Les feux de la rrrampe sont bien moins colorrrés quand la rrrampe est descendante, crrois-moi ». Mouais… Au moins j’aurais vécu des moments de gloire. Quel destin !

Je me souviens du début de cette aventure à deux. De ces heures et de ces heures, face au mur décrépi de sa chambre de bonne où Nassim me tripotait de ses doigts mal affirmés et essayait de m’insuffler grossièrement de l’air. Je fis des efforts et lui aussi. Sa langue et ses lèvres ! Il les positionnait mal ! Tous les jours, il me tripotait au moins deux heures. Une heure le matin et une heure le soir. Et vas-y que je te mette la langue comme ci, et puis la bouche comme ça. Bouh, le vilain, il me rendait fou avec ses erreurs de placement. Puis du jour au lendemain, ses doigts et sa bouche trouvèrent le truc et ne me quittèrent plus de la journée. Et mes yeux ne quittèrent plus ce mur. Les morceaux s’enchaînèrent, s’enchaînèrent et nous enchaînèrent tous les deux. Oh, là là, j’en ai bavé et sué ! Mais quelle envie d’apprendre et quelle ardeur à se perfectionner ! J’en devenais tout tralala. En revanche, question horizon, quelle poisse ! Être face à ce mur décrépi toute la journée, vous pensez d’une perspective d’avenir ! D’années en années, mes illusions s’effondraient au rythme des chutes du crépi. Ah, et puis cette humidité, brrrrrr. Elle me faisait froid dans le piston.

Un jour, j’eus le droit de sortir par intermittence. Hourra ! Merci petit Jésus ! Face à moi, une rangée d’hommes et de femmes à lunettes, assis dans un amphithéâtre en train de noter. Haydn. Je trompetais solennellement et gaiement. Je laissais faire Nassim avec ses adagio, forte, legato, et staccato. Triolet et re-triolet. Il accumula les médailles dorées et les trophées argentés. S’ensuivirent des jours entiers où je me retrouvais face au front de jeunes enfants et au pavillon de consœurs. Un vrai défilement ! Les garçons et les filles tenaient une petite trompette argentée dans leurs petites mains. Nassim l’appelait la Piccolo ! Moi la schtroumpfette ! Non mais, faudrait pas qu’elle me vole la vedette, la nénette ! Les élèves jouaient Bach tant bien que mal. Quelle dissonance ! Et encore, quand le Son sortait ! Nous cacophonions joyeusement dans une petite salle éclairée d’un blanc pas beau du tout, mais alors pas beau du tout, naan. Ce blanc ne me mettait pas du tout à mon avantage, oulala non. Aucune trompette ne peut être à son avantage sous des néons blafards, alors ça non, je vous le dis franchement. Beurk ! Et puis la résonance, oh lala, c’était épouvantable ! Cela dit, j’étais plus heureuse que face à mon mur !

Puis, la grande vie débuta. Hourra !! Adieu mur décrépi. Youpi ! A moi la libertad ! Face à des dizaines de visages éclairés en clair-obscur par des lumières tamisées, je trompetais de toute mon âme. Quelques volutes de fumées brouillaient ma vue. Cigares de Cuba. Gitane. Malboro. Par-ci, par-là, des effluves de whisky tourbé et de rhum ambré. Les spectateurs écoutaient la moindre note, la moindre respiration. Leurs pieds scandaient discrètement le tempo, leurs têtes dodelinant. Des petits mouvements certes mais pas de palabres. Ça ne jasait pas quand on jazzait, ça non ! Nous avions le droit à de vrais puristes ! Ma sonorité était claire, mon pavillon vibrait de sons purs et de pair, nous entraînions les spectateurs dans les méandres de leur imaginaire. Les notes s’écoulaient telles des feuilles flottantes au rythme du courant d’une rivière avec leur pause, leur cassure et leur flux tranquille. Jazz en scène. Water babies, I fall in love too easily, et j’en passe… Ces notes courtes puis longues me traversaient. Vitales vibrations. Notes aiguës, souffle puissant, je tremblais de tous mes membres. Soufflement long ou notes courtes. Crescendo. Decrescendo. Puis, je tralalalais rapidement. Et enfin la note s’envolait vers l’infini. Le piano me répondait, les cymbales m’étourdissaient avec leur frottement de balais. Nassim m’en faisait voir de toutes les couleurs. Je jubilais. J’avais l’impression d’être l’actrice principale de Taxi Driver. Ce que je préférais par-dessus tout, c’était la sourdine. Quand Nassim me massait avec la sourdine wah wah, j’exprimais des waouh waouh. J’en étais toute chose, vrai de vrai. Mon corps de laiton résonnait de tout ce volume gardé en moi. J’aimais ça, j’aimais ça, oulala que j’aimais ça !

Au lendemain de ces orgies mélodieuses, la bouche de Nassim faisait grève. Sa lèvre supérieure en avait pris un coup. J’en profitais pour refroidir mon embouchure et mon pavillon. C’était le moment où nous étions enfin seuls. Pfiou… Un air de dimanche tranquille. C’était aussi la fête aux câlins. Au programme : des glouglous huilés, des guili guili avec le chiffon, des scratch-scratch avec les brosses bizarres et des bisous bisous parce que je le valais bien. Mmmm… c’était bon.

L’aventure continuait avec son flot de nouveautés. C’était excitant de vivre comme ça ! Certains jours voire des semaines entières, j’étais face à un microphone noir, rond et plat. Un trou noir, quoi. Bof… Mais plein de surprises. Si si ! Il gobait toutes les sonorités issues de mon pavillon. C’était bizarre d’écouter ma voix. Je rencontrais d’autres cuivres : trombones, saxos, et même des ouds, accordéons. Nous étions tous des stars et chacun avait le droit à son micro. Au-delà du mien, le mur s’était transformé en un mur de verre. C’est sympa le verre, on peut se voir dedans. Whouaouh, que je suis belle ! Surtout dans les mains de Nassim !

Les grands grands supers soirs, c’étaient des explosions de lumières. Du rouge, du jaune, du bleu ! Des ronds, des rais, des balayements, des flashs ! Un vrai feu d’artifices, d’artifesses et d’artifaces ! Les baffles gonflés à plein poumon, la joie dans le souffle de Nassim, nous trompetions toutes voiles dehors. Des centaines de paires d’yeux et d’oreilles étaient là pour nous ! Avec le trio, je trompetais avec brio. Piano et contrebasse étaient mes confrères. Le mur s’était métamorphosé en mur d’étoiles. Mais la star, c’était moi. Sur le devant de la scène, tout pavillon devant, j’étais la meilleure. En toute humilité. D’ailleurs, quand Nassim improvisait, j’étais la plus applaudie. Les autres l’étaient un peu, certes, quand chacun jouait son set, c’est normal, mais c’était surtout moi. Si si, vous dis-je ! C’est sans doute parce que j’étais différente. Ben oui, et alors, qu’est-ce qu’il a mon pavillon ? Vous voulez les voir de plus près mes quatre pistons ! Pfff… Elle m’énerve celle-là. Ben quoi ? Oui, c’est pas donné à tout le monde d’avoir quatre pistons ! Ah ssaaa sss’est sssûr que j’en ai eu des jalouses !! Ben ça sert à quoi les quatre pistons, vous demanderont les thons ? Ben sans les quatre pistons, on n’peut pas jouer les quarts de ton ! Pas de musique arabe possible, ni d’originalité ! Nassim s’était enfin démarqué. Le classique, le jazz c’est beau, mais il fallait bien que Nassim me compose des trucs spécialement pour moi, enfin pour nous !

Ah la la, que de souvenirs heureux !

Et puis il y eut la dégringolade, la descente aux enfers. Sniff… Ça parlait chinois partout. Il paraît que l’arrière-petit-fils de Mao avait pris le pouvoir en France. Il imposait de nouveau le code du livre rouge. Interdites la musique française et arabe. Interdits les artistes. Place à la société ouvrière ! Mon corps de laiton ne servirait plus que des ambitions industrielles. Adieu la musique, l’évasion, la vibration cosmique des notes de musique. Aaarrrhhh, bande de dégénérés ! A bas les dictateurs ! Vive les créateurs !

Soudainement, je sens mon corps être pris par une grosse main sale. Oh non, ça y est je vais être mis dans la fournaise. Aaahhh !!! Mon Dieu, sauvez-moi ! Naaann ! Puis j’entends, « Chut…. Chut… c’est moi, c’est Nassim ». Pfiou… j’ai eu chaud ! Et là, il me serre tout contre lui, me caresse le piston, le pavillon, les touches et tout le toutim ! Ah, Nassim ! Que je t’aime !

Voir les commentaires

Rédigé par Marie

Publié dans #Musique et Danse

Repost0