Publié le 9 Janvier 2020

 

ENTRACTE – Edward HOPPER 1963

 

 

 

 

 

 

 

Le temps est suspendu. Il arrête notre regard.

Tout ici marque la pause.

Bien sûr, à l’agencement des fauteuils, nous reconnaissons une salle de spectacle. 

Sans eux, le bord de l’estrade pourrait tout aussi bien figurer un bar, élément de décor récurrent chez Hopper, le peintre de cette scène.

Spectacle certes, mais rien de festif pour autant.

Un cadrage quasi chirurgical, qui nous met face à une porte à peine décelable, d’une froideur clinique, et dont on peut se demander si elle s’ouvre vraiment et vers quelle échappatoire elle va mener.

Au lieu du velours rouge, une palette froide : vert des fauteuils, gris acier des murs, bleu sombre de la robe, beige sans chaleur du sol, pâleur de la peau…

Au lieu d’une foule, ou au moins d’un groupe de spectateurs, une femme, seule. Strictement vêtue et coiffée, elle occupe le centre de l’image. Elle a le regard perdu dans le vague, les yeux baissés sur des pensées apparemment sans joie, comme dans une salle d’attente.

Où sont les autres ? Partis se rafraîchir ? Se dégourdir les jambes ? Vont-ils revenir ? Sont-ils jamais venus ?

Seul le titre du tableau -« Entracte »- évoque qu’une partie du spectacle a déjà eu lieu. Cette femme en est-elle l’unique spectatrice désabusée ?

Est-ce notre propre solitude, ontologique, au milieu d’un grand vide, que ce reflet convoque dans un tableau devenu miroir ?

 

Et si, pour la 2ème partie, nous passions plutôt dans la salle d’à-côté ?!!

 

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Rédigé par Brigitte M.

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Publié le 9 Janvier 2020

 

Tout petit déjà Antoine était compliqué. Il avait beaucoup de mal avec l’autorité. A l’école il s’ennuyait, ne comprenait pas le but des exercices qu’on lui imposait, refusait la docilité que montraient ses camarades. Son champ d’excellence à lui, c’était la provocation, l’insolence. Il défiait le maître d’un regard noir où perçait une violence inouïe . « Si je pouvais, je le tuerais » semblait-il penser.

Rien n’y faisait, ni les heures de colle en classe, ni les punitions à la maison…

J’ai bien compris que ce maître, c’était l’image masculine à qui il en voulait tant depuis que son père était parti un soir acheter des cigarettes… Sans plus jamais reparaître.

Quelle déchirure dans notre vie, dans celle de ce gamin surtout, qui de ce jour a refusé d’en parler.

 

Pour comble de malchance, je n’avais trouvé pour gagner ma vie qu’un job de chanteuse de cabaret. A l’Ange Bleu. « Et Antoine qui va encore être seul à la maison ce soir »… Cette pensée m’obsédait, me culpabilisait. Mais je ne trouvais rien d’autre. Pas étonnant qu’il aie fait les quatre cents coups durant toute son adolescence.

Ensuite ? Ensuite c’est la découverte de l’alcool, des drogues. Quelles saloperies ces substances. Elles lui assuraient et lui assurent sûrement un soulagement mais il n’est que temporaire. 

 

Et combien de fois ai-je dû aller le récupérer chez les flics ou aux urgences de l’hôpital… Et ça continue : il insulte médecins et infirmières, ingérable, semant dans un service déjà surchargé un désordre proche du chaos. 

« Ma pauvre Lili Marlene, cette vie est un enfer, il va falloir trouver une solution… Alors, accepter cette lobotomie dont les médecins m’ont parlé ? Je n’arrive pas à décider ».

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Rédigé par Brigitte M.

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Publié le 7 Janvier 2020

ENTRACTE – Edward HOPPER

 

 

 

 

 

 

 

 

Une dame, on ne sait pas qui ?

attend dans une salle fuyante de murs, on ne sait pas quoi ?

devant une scène pointillés sur l'arrière deviné, on ne sait pas où ?

 

Elle a posé ses bras laiteux à angle droit

sur le fauteuil suédine double du premier rang,

d'une queue leu-leu de trois sofas à deux places.

La couleur verte des banquettes vides de tout genre humain

contraste avec le marine de sa robe, au chaste décolleté.

 

On devine une pudeur assortie au décor du lieu,

gris, tendance Le Corbusier,

qui monte en chignon jusqu'au bas de sa nuque.

Le regard du personnage est à guichet fermé.

 

Elle semble avoir posé là son wagon de solitude

mais il n'y a pas péril en la demeure.

 

Elle finira bien par décroiser ses jambes, nues de bas,

à cause de cette contraction musculaire

soudaine et transitoire, ici à point nommée, la crampe.

 

Elle quittera probablement les lieux à la fin de l'entracte.

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Rédigé par Dany-L

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Publié le 7 Janvier 2020

ENTRACTE – Edward HOPPER

 

Un grand mur gris, quelques fauteuils verts sur un sol ocre, devant une scène dont on n’aperçoit qu’un angle et un morceau de rideau qui semble encore tiré.

 

 

 

Dans cette salle vide, une jeune femme assise au premier rang. Robe bleue couvrant ses genoux, pieds chaussés d’escarpins, croisés l’un sur l’autre. Elle étend légèrement ses jambes. Ses bras nus – la robe est à manches courtes – sont posés comme les pattes d’un sphinx sur les accoudoirs du fauteuil, mains bien à plat. Ses cheveux bruns, sagement coiffés, entourent le visage. Elle a les yeux baissés vers on ne sait quelle attente intérieure en attendant le lever du rideau.

 

Une lassitude un peu triste émane de sa personne. La solitude résonne dans le silence de cette salle qui aurait dû être animée. Fragilité.. comme une fêlure… Sa présence emplit l’image de désespérance ténue…

Peut-être que la représentation est terminée, les gens sont partis en emportant l’énergie. Elle reste seule dans le néant, à l’écoute du vide de sa vie...

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Rédigé par Mado

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Publié le 7 Janvier 2020

Il a douze ans, pas un poil au menton. En ce temps-là l’ascenseur n’existait pas, il prenait l’escalier, haut lieu de convivialité où les locataires échangeaient quelques propos légers sur le temps, toujours pourri, la hausse du prix des pommes de terre, mais ça finira quand, ou encore cette foutue ampoule du troisième, il faudra une chute mortelle pour qu’il la remplace. Lui, il la guette, quand il l’aperçoit il se précipite, dégringole les marches pour être certain de la croiser à la pleine lumière du second, son amoureuse, la belle Victorine. Souvent il rêve qu’elle s’arrête stupéfaite, le prend dans ses bras, l’entraîne vers son nid d’amour, son studio sous les combles, le studio de la Victorine.

 

Il a vingt ans, métallo chez Renault en congés mal payés, il tournicote dans Nice au volant de sa quatre chevaux, il rêvasse, tout est beau ici, du bleu intense, du vert violent, qu’est-ce qu’il fout à Boulogne-Billancourt dans le gris sous la pluie. Soudain, il pile. Devant le capot une arche imposante, au fronton « Studios de la Victorine ». Bravo, elle a réussi, pense-t-il, il y a maintenant un « s » à studio. Curieux, il entre…

 

  • Alors, tu me le donnes ton scénario ?

  • Deux virgules à intervertir et tu pourras le lire. Que pense-tu du synopsis ?

  • Un mélo à l’eau de rose. Où prévoies-tu de tourner ?

  • Un, mon public aime ça, tous mes films cartonnent. Deux, aux studios de la Victorine évidemment.

  • A Nice ? Mais cela va me coûter un pognon de dingue.

  • Ceux sont de bons professionnels, tu raccourciras le temps de tournage.

  • Celle-là d’histoire, je crois l’avoir entendu de la bouche de tous les metteurs en scène, de tous les scénaristes avec lesquels j’ai travaillé !

 

Depuis lundi nous tournons en intérieur les scènes dans l’escalier. Menuisiers, éclairagistes, décorateurs, patineurs ont fait un travail formidable. Le réalisme me trouble, je replonge en enfance, mon cœur bat la chamade quand j’entends des pas monter, si Victorine m’apparaissait… La magie du cinéma.

 

  • Stop ! On arrête tout. On plie bagage, ordre de grève générale !

Abasourdi, je regarde le réalisateur qui tourne la tête vers le producteur éberlué.

  • Camarades, réunion de suite dans le local de l’intersyndicale.

  • Réunion immédiate dans mon bureau, éructe le producteur.

 

Nous nous retrouvons dans le magnifique bureau d’angle de la villa Rex Ingram qui fut celui de Victor Masséna, 3ème duc de Rivoli et 5ème prince d'Essling, descendant du maréchal Masséna. Debout près de la fenêtre, je sirote un whisky on the rocks. Le temps est magnifique, le ciel uniformément bleu roi, la mer d’un gris d’argent scintille au loin... probablement là que les dieux conservent leurs diamants... quel pays extraordinaire !

Le producteur me tire de ma rêverie.

  • Qui sait quoi ? Je n’ai plus vu de mouvements sociaux dans le cinéma depuis le joli mois de mai soixante-huit.

  • Ils ont essayé de m’embringuer, répond la secrétaire de direction.

  • Et ? Qui est le leader ?

  • Pas simple de vous répondre. J’en connais au moins cinq. Victorine, l’habilleuse, est la plus radicale.

Victorine, Victorine, je t’adorais obsession sentimentale de mon adolescence, ne devient pas malédiction de mon âge adulte. Victorine, comment peut-on appeler sa fille Victorine, ridicule.

  • Elle est suivie de près par Pierre-Henri, le coiffeur.

  • Pierre-Henri ? Il vient de se faire jeter par son minet, son orgueil en a pris un coup, il doit vouloir retrouver son honneur perdu le travelo.

  • Et puis, et puis, on avance, on avance.

  • Marcel, le chef mécanicien fort en gueule, avec lui nous devrions pouvoir nous entendre. Enfin Christian l’éclairagiste et Mireille la costumière, ces deux-là suivront Marcel, aucune personnalité.

  • Eh bien voilà, le vrai problème est Victorine. Quelle mouche t’a piqué pour exiger de tourner ici ?

  • La nostalgie peut-être bien, et puis c’est le titre que nous avons prévu de donner au film, non ?

  • Christine, priez donc Madame Victorine de venir nous présenter son cahier de revendications. Mais je veux être clair, s’il s’agit d’une augmentation des salaires, je n’accepterai pas plus de trente pour cent. Je n’en démordrai pas !

  • Monsieur, le restaurant Studio de la Victorine nous appelle, le cuisinier va partir, il est aux trente-cinq heures, pas à la disposition de la production H vingt-quatre sept sur sept.

  • Compliqué de travailler dans le midi, en plus je suis sûr qu’ils ne travaillent pas le dimanche. Comment je vais tenir mon budget moi !

Notre table est dressée à l’ombre d’un olivier noueux plus que centenaire. Comment peut-on fréquenter la cantine de l’usine Renault de Boulogne-Billancourt quand il existe de tels lieux ? Incompréhensible...

  • Christine, commandez un repas léger, un après-midi de négociations nous attend.

Chère Christine, en entrée, poivrons à l’huile de truffe blanche, petits farcis à la niçoise suivis par une jolie daurade aux yeux bleus pêchée le matin même. Je me laisse tenter par une assiettée de daube avec ses gnocchis baignant dans sa sauce épaisse, un mesclun fondant croquant, un petit chèvre de Sospel, une part de tarte à la confiture des cerises du jardin, le tout arrosé par un chatoyant rosé de Bellet. Comme il nous est recommandé de rester alertes, je finis par un café fort et gourmand, j’adore les mignardises.

Il est bien seize heures trente quand nous regagnons d’un pied lourd le bureau du producteur pour une concertation avec nos partenaires sociaux. Avec tout le respect dû à nos hautes fonctions, Christine nous apprend que Pierre-Henri est parti à un rendez-vous coquin, Marcel et Christian à la pêche aux encornets, obligé c’est la saison, Mireille chercher ses enfants à la sortie de l’école.

  • Déjà, partis, tous ! Mais comment je vais faire pour tenir mon budget !

  • Ils sont en grève Monsieur !

  • Victorine, Madame Victorine, est-elle encore là ? éructe le producteur.

  • Oui Monsieur, elle attend dans la salle d’attente depuis quatorze heures.

  • C’est fait pour ça une salle d’attente, non ? Faites entrer l’accusée.

  • Oh ! s’insurge Christine subitement toute pâlotte.

  • Je rigole Christine, je rigole pour ne pas pleurer devant mon déficit budgétaire.

Déboule dans le bureau une petite boule de nerf, brune de peau, noire de cheveux dressée sur des jambes arquées.

  • Inadmissible Monsieur le producteur, inadmissible de faire attendre aussi longtemps un représentant des travailleuses et travailleurs toutes catégories socio-professionnelles confondues Nous avons fait le bilan…

  • Bien sûr, bien sûr, l’interrompt patelin le producteur, ensemble nous allons explorer les voies d’un compromis rapide.

  • Jamais, pas de compromis !

  • Mon amie détendez-vous, conditions de travail, temps partiels subis, fins de carrière, tout est négociable.

  • Rien à négocier, amplifier la mobilisation et la grève pour gagner !

  • Mais enfin, soyez raisonnable, les travailleuses et travailleurs, comme vous dites, on besoin de revenus pour vivre.

  • Pas besoin, la caisse de solidarité envers les grévistes y pourvoira.

  • A propos, vous ne m’avez pas dit qu’elle est votre revendication, si c’est un problème de salaire, je peux faire un effort conséquent, trois pour cent d’augmentation immédiate et une prime de vingt euros à la fin du tournage. Pas mal, hein ?

  • Rien à foutre !

  • Alors c’est quoi votre p….. de revendication ?

  • Nous n’acceptons plus de travailler les jours de beau temps !

 

Magie du cinéma, estomac gargouillant, œil baignant dans le rosé de Bellet, j’observe. Elle est où ma Victorine, elle est où ?

 

 

 

 

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Rédigé par Hervé

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Publié le 6 Janvier 2020

Entracte - Edward Hopper, 1963

Entracte - Edward Hopper, 1963

EKPHRASIS SUR ‘‘ENTRACTE’’

 

Atelier :

Écrivez une ekphrasis sur le tableau Entracte de Edward Hopper.

 

Lecture:

- Ekphrasis sur une photographie (cf lien ci-dessous, photo n°III)

- Ecran blanc  de Mansfield (cf deuxième lien, ci-dessous)

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Rédigé par Atelier Ecriture

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Publié le 4 Janvier 2020

Depuis toute petite les studios de la Victorine me font rêver. Le cinéma en général. Les stars, les costumes, les aventures ont bercé mes rêves de jour comme de nuit. Alors, quand j’ai appris que la ville de Nice proposait des journées portes ouvertes pour découvrir cet endroit mythique, j’ai foncé. Et là, en marchant sur ce sol auparavant foulé par d’immenses vedettes de cinéma ou de grands réalisateurs, la magie opère ! La réalité est telle que je l’avais imaginé : les caméras, les travellings, les éclairages, les micros, les claps et même les fauteuils de toile qui attendent les prochains acteurs. J’y suis… Je fais un bond dans le temps. Je m’imagine en starlette des années 60, évoluer avec grâce dans ce décor de cinéma. Je déambule dans les allées, je m’imprègne de l’ambiance, je scrute chaque pièce, chaque détail. J’en prends plein les yeux, rien ne m’échappe. Et là, derrière un fauteuil dans la salle de projection, je découvre avec effarement une bobine de film un peu rouillée, à même le sol. J’ai envie de la récupérer et de la mettre dans mon grand sac cabas car à ce moment-là personne n’est avec moi dans la pièce. Ha ! Si.. trop tard ! Un technicien des studios rentre et me surprend avec la bobine entre les mains.

« Mademoiselle où avez-vous trouvé ça ? Montrez-moi : aucune indication, je ne sais pas à quoi cela correspond. Venez, allons la visionner et ainsi, nous serons fixés. »


Je suis aux anges ! je regarde avec intérêt le technicien monter, démonter, tourner, couper et enfin projeter le film sur le grand écran. Je suis sagement assise au fond du fauteuil, tellement impatiente que cela commence. Et quelle ne fut pas ma surprise... Alors que je m’attendais à reconnaître le générique d’un film connu des années 60 peut-être avec Brigitte Bardot ou Belmondo, je découvre avec stupéfaction le début d’un film en noir et blanc, et je regarde avec une certaine gêne, un homme au milieu d’une pièce sans aucun décor, sans aucun meuble, sans même de fenêtre. Un homme avec un par-dessus sombre. Il ne s’agit pas d’un film, cela ressemble plutôt à un documentaire. C’est comme si le personnage s’adressait directement au spectateur. Oui voilà, c’est ça : comme s’il me regardait moi, jeune fille recroquevillée dans son fauteuil. Il se passe un bref moment sans paroles qui me semble durer une éternité, l’homme me regarde fixement et dit cette phrase un ton lugubre :

« Vous qui êtes en 2020, faites très attention quelque chose de grave va arriver ! »  Et puis plus rien, un drôle de bruit comme une chaîne qui déraille et se casse. Le silence et le noir total. Je me liquéfie sur place. Quelle angoisse ! Quoi ? Qu’est ce qui va nous arriver en 2020 ? Le technicien ne semble pas du tout inquiet mais plutôt amusé . Je ne vois pas ce qu’il y a de marrant à ce qu’un homme du début du siècle dernier revienne de chez les morts pour nous annoncer un message funeste.

Aucune indication sur la bobine du film, je ne peux donc pas faire de recherche sur cet individu et ses descendants. Après moult questionnements avec le technicien, nous repartons bredouilles, lui avec le sourire, moi en état de décomposition. Toute la journée les images de ce film me reviennent en mémoire et viennent me troubler. Qu’a-t-il voulu nous dire, que va-t-il nous arriver en 2020 ? Ici à Nice, en France ou dans le monde ? Vite, il ne me reste plus qu’à réserver un voyage en navette spatiale direction Mars pour échapper à ce désastre. Le soir même je me couche angoissée en essayant de me raisonner, de me dire de ne pas y repenser, il ne s’agit que d’une mauvaise blague ! Malheureusement même dans la nuit ces images me hantent. Et je me réveille le lendemain matin en sursaut. Je regarde l’heure avec horreur : il est 10h du matin et je viens de rater mon rendez-vous mon rendez-vous d’embauche pour un super poste de directrice marketing.

Je n’arrive même pas à bouger dans mon lit car l’angoisse me paralyse entièrement. Au lieu de me précipiter pour téléphoner à l’agence de recrutement pour essayer d’avoir un autre rendez-vous, je reste figée et je revois encore et encore les prévisions de l’homme dans ce film aux studios de la Victorine.

Oui il va m’arriver quelque chose de grave en 2020, je n’aurai pas de boulot, pas de revenus pour payer le loyer de mon studio dans lequel je viens de m’installer et je finirais par dormir sous les ponts.


En fait le message de l’individu dans ce film ne s’adressait pas à tout le monde. Il ne s’adressait qu’à moi, Pauline, 20 ans, jeune fille crédule et angoissée.

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Rédigé par Leslie

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Publié le 4 Janvier 2020

 

Marcel et Gérard n’en reviennent pas, ils sont éblouis, ils ne peuvent plus rien faire à part regarder devant. Ils se sont arrêtés de travailler. Jamais ils n’ont vu de si belles créatures, leurs cœurs battent à la chamade, leur respiration devient difficile, ils sont comme figés. Gérard, le grand costaud à la casquette, n’a d’yeux que pour la blonde : quelle beauté ! quelle grâce ! «  Je crois rêver … comment pourrais-je faire pour l’aborder, pour lui parler. Je suis si insignifiant, jamais au grand jamais elle ne me regardera. » De son côté, Marcel lui, a un regard de conquérant. Il observe la brune et se dit que c’est la femme de sa vie. « Quelle superbe créature ! Il me la faut, vite ! »

 

A quelques mètres de là, deux femmes sont tombées en panne et sortent de leur voiture. Elles sont au milieu de nulle part et se sentent perdues. Au loin, elles aperçoivent deux gaillards en tenue de travail qui regardent vers elles. Elles sont dubitatives voire inquiètes. Ils sont peut-être leur porte de sortie, leurs sauveurs. Mais en même temps, ils les regardent bizarrement et cela les met mal à l’aise. La blonde a peur « Mais qu’est-ce qu’ils ont à nous regarder comme ça ? Qu’est-ce qu’ils nous veulent ? et s’ils nous attaquent ? » La brune elle, est moins craintive et plus décidée. « C’est qui ces deux ploucs ? Parfait ! Ils nous regardent comme deux merlans frits, on va leur demander de l’aide et ils vont se faire un plaisir de réparer notre voiture ou nous ramener à la maison. »


 

Non loin de là, dans un chalet perdu, une femme a tout vu : les deux femmes perdues et les deux hommes impatients. Elle a peur que les choses tournent mal… « Mais comment des femmes si distinguées, peuvent-elles s’acoquiner avec ces brutes ? Comment les prévenir de ne pas s’approcher ? » Elle décroche son téléphone et appelle la police. « Vite, venez vite, deux femmes sont en grand danger, elles s’approchent dangereusement de deux individus suspects. »

Et voilà. On n’en saura pas plus. Voilà comment se termine une éventuelle histoire d’amour avant même qu’elle ne commence.

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Rédigé par Leslie

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Publié le 4 Janvier 2020

« Nouvelle vague » me fait penser à d’énormes vagues qui déferlent et les courageux surfeurs qui se jettent dedans pour les dompter et les apprivoiser. « Surf » me fait penser à la ville de Nazaré réputée pour ses vagues légendaires. « Nazaré » cette jolie petite ville du Portugal que j’ai déjà visité à maintes reprises, ses falaises, ses rochers, cette mer si bleue et si dangereuse, ces petites maisons colorées, ses ruelles festives, l’odeur du poulet grillé et des beignets.

« Le Portugal » le pays de mes parents, de mes grands-parents, mes racines, mon berceau même si je n’y ai jamais vécu, et que désormais je n’ai plus de famille là-bas. Je n’oublie pas les odeurs, la chaleur, la musique, le riz au lait qui me faisait ma Vôvô ma grand-mère avec une pointe de cannelle, le petit train que l’on prenait pour aller à la plage, les parties de dominos avec vovo mon grand-père, mes folles courses avec mes copains dans les rues pavées, les chiens errants, le voisin d’en face du 11e qui descendait son panier pour prendre le pain, la leitaria le café ou toutes les familles se rejoignent le soir jusqu’à pas d’heure.

C’est toute mon « enfance ». Les dix premiers étés de ma vie.

 

***

« Horreur » c’est un mot qui me fait horreur ! Cela me fait penser à un sentiment ou une situation qui fait peur, au « malheur»: la perte d’un être cher, l’abandon, la maladie, la fin d’un amour, la fin d’une vie.

Horreur,  malheur, que de connotation triste… Mais non ! horreur, malheur, cela me rappelle un air de chanson. Mais oui ! horreur malheur : « La salsa du démon ». Tout de suite le souvenir musical est fort, prégnant et me fait remonter le temps jusqu’à ma jeunesse, mon adolescence : jusqu’à ce diable tout poilu et sa grappe de raisin qui ballotte à chaque pas de danse, Vampirella et son fouet. Quelle rigolade ! quelle insouciance ! Le laisser-aller, la légèreté de mes 20 ans.

« Nostalgie » quand tu nous tiens…

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Rédigé par Leslie

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Publié le 4 Janvier 2020

Enfin, cinq minutes de tranquillité ; laissez-moi vous raconter. Les studios de la Victorine ont décroché le gros lot : une superproduction digne des meilleures années hollywoodiennes, un film fleuve de près de 3 heures, avec musique symphonique, décors grandioses, pyrotechnie, maquettes sophistiquées plus vraies que nature pour certains plans d’ensemble, trucages, incrustations et images de synthèse, dizaines de figurants et belle brochette d’acteurs, le tout au service d’un remake du fameux « Out of Africa » transposé dans les Alpes-Maritimes.

Les premiers rôles sont confiés par la production à deux acteurs à la mode, héros quotidiens d’une série télévisée à sketches diffusée après le journal de 20 heures sur une chaîne publique. De vous à moi, j’aurais préféré de vraies vedettes de cinéma mais, bon… Et pour la réalisation, moi, après le succès phénoménal de mon deuxième long-métrage « Quelques jours à Nice ».

« Monsieur Benhache ?

  • Ah ! Non ! J’ai dit cinq minutes de tranquillité ! Ca peut attendre, non ?

  • OK ; on attend… Cinq minutes… »

Un chantier et un budget colossaux, à donner des sueurs froides dès le réveil. Pour être franc, depuis six mois que je travaille sur le projet, je ne sais plus ce qu’est une nuit paisible et maintenant que le tournage a débuté, je tiens grâce au Tranxène mais, chut, cela reste entre nous, bien sûr.

Tous les plateaux sont réquisitionnés pour ce film. Une armée de charpentiers, menuisiers et décorateurs a créé les différents intérieurs. Ceux de la ferme m’impressionnent particulièrement ; je ne peux m’empêcher d’y ressentir la présence du beau Robert et de l’énigmatique Meryl. Et pourtant, il va bien falloir coller d’autres visages sur les personnages de Karen et Denys !

« Oh ! Ben ! Tu es là ? On a un problème… ». J’hallucine ! Pas moyen de se poser cinq minutes…

*-*-*-*-*-*-*-*-*-*

Bon, je reprends. Comme chaque jour depuis deux semaines que nous tournons les intérieurs, c’est l’effervescence dans les studios. J’ai beau être le chef d’orchestre, je reste toujours impressionné par le nombre de gens qui collaborent pour la réalisation d’un film : une vraie fourmilière en agitation effrénée ! Et cette agitation reste soudain en suspend, comme par magie, entre mes incantations « Moteur ! » et « Coupez ! ».

C’est fou tout ce qui peut encombrer un décor, hors champs ; le spectateur ne peut pas imaginer ! Caméras et projecteurs, bien entendu, mais aussi perches, micros et enregistreurs, ainsi que tables roulantes des accessoiristes et des maquilleuses, sans parler des chaises pour tout ce petit monde. Mais le pire, ce sont les câbles ! Les haubans soi-disant conçus pour stabiliser les pans de décor mais qui restent à guetter votre tête ou vos jambes dans chaque recoin sombre, et les fils électriques. Ah ! Les fils électriques ! Les kilomètres de fils électriques ! J’en ai attrapé une sueur plus froide que froide quand j’ai lu le poste « Câbles électriques » sur le budget du film. Incroyable ; à l’époque du « sans fil » pour tout et n’importe quoi, pour téléphoner, recharger un mobile ou écouter de la musique, le cinéma, lui, reste à l’ancienne, et les électriciens s’évertuent à étaler leurs spaghettis au sol comme autant de pièges pour les pieds distraits.

« Monsieur Benhache ? On peut vous parler ; ça devient urgent…

  • OK, j’arrive ». J’hallucine ! Quel métier de fou…

*-*-*-*-*-*-*-*-*-*

Bien, revenons au tournage. Bon, aujourd’hui, c’était sans risque majeur : quelques scènes de liaison, deux ou trois dialogues en champs-contrechamps et les figurants à piloter dans les scènes d’ambiance ; ça devait aller. D’ailleurs, j’ai plutôt mieux dormi la nuit dernière.

« Monsieur Benhache ?

  • Oui.

  • Je peux vous parler ?... On a un problème… »

Le ton de voix et l’hésitation de mon premier assistant me font frémir ; on doit avoir un gros problème…

« Voilà… En rentrant sur le plateau 3, pour préparer la scène 14, Monsieur Jean a trébuché dans les câbles…

  • Et ?

  • Et il a fait une mauvaise chute…

  • Et ?

  • Et il a entraîné trois projecteurs dans sa chute…

  • Et ?

  • Les projos, ça va aller, on a de la réserve… »

Les projecteurs, je m‘en moque ! Mais à voir sa tête, je crains le pire.

« Et Jean ?

  • Là, il est à l’infirmerie des Studios… C’est pas joli, joli…

  • Mais quelle nouille ! »

Il a beau tenter de me ménager, ce brave assistant, sa dernière réplique me glace le sang. Je me rassieds prestement et respire à fond cinq fois avant de le suivre.

*-*-*-*-*-*-*-*-*-*

Une vision d’horreur m’attend à l’infirmerie : l’acteur esquisse une grimace en guise de salut et s’avance en boitillant. Il arbore un magnifique œil au beurre noir et d’autres hématomes, sa pommette cramoisie a doublé de volume. Au premier coup d’œil, c’est un cauchemar pour les maquilleurs ! Jean bredouille quelques excuses, tente de me rassurer sur son état et me demande juste un peu de temps pour se remettre de son choc.

Je retourne dans ma loge, suivi de mon fidèle assistant qui a au moins le tact de garder le silence. Je me verse une bonne dose de whisky, mon remède de crise pour éviter le syndrome de la rate au court-bouillon. Que faire ? Tout le monde est déjà en place. Le budget du film avait jusqu’ici à peu près normalement dérapé, sans excès ; mais on ne peut pas se permettre quinze jours d’arrêt. Alors ? Adapter le scénario ? Changer d’acteur ? Mission impossible ! La production ne suivra pas ! Surtout, rester calme et réfléchir…
 

« Monsieur Benhache…

  • Attends. Laisse-moi réfléchir… »

Tourner malgré tout les scènes du jour, mais sans contre-champs, histoire de ne pas sombrer dans le film d’horreur ? Non, rien de tout cela ne fonctionne. Il me faut mon acteur, un point c’est tout !

Pour éviter la panique, je me réfugie dans le scénario, je consulte fébrilement le planning, je jette un œil au budget, je brasse du papier ; c’est plutôt la brasse coulée dans les papiers…

« Monsieur Benhache, on a peut-être une solution… »

Mais on frappe à ma loge. Ce n’est vraiment pas le moment ! Je réprime un juron, me précipite à la porte que j’ouvre plus violemment que souhaité, prêt à déverser toute mon angoisse sur le premier venu.

Et je reste stupéfait. J’hallucine ! Ma détresse s’évanouit instantanément : devant moi se tient un Jean souriant, indemne de tout hématome et… rajeuni de… cinq ans peut-être. Miracle ou exploit des maquilleurs ?

« Monsieur Benhache ? Je ne suis jamais très loin lors des tournages de Jean. Alors me voilà ! Qu’est-ce qu’on tourne aujourd’hui ? Vous pouvez me passer un script, celui de Jean est tout taché… »

L’assurance désinvolte du personnage me déconcerte. Oui, bien sûr, physiquement, il pourrait convenir ; avec un brin de maquillage, le spectateur n’y verra rien. Mais… pour ce qui est du jeu d’acteur…

« Mais je me présente, Marc, le frère jumeau de ce maladroit de Jean. Ne vous inquiétez pas, j’ai l’habitude, je le remplace de temps en temps. Et personne ne s’en est plaint pour la série TV… Vous pouvez me passer un script ? ».

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Voilà. Quinze jours ont passé. La production a suivi. Le planning a été tenu. Le tournage s’est bien passé, c’est-à-dire jamais comme prévu mais avec des remèdes à tous les aléas. Les électriciens rangent leurs nouilles au mieux. Jean est maintenant maquillable ; il reprend son personnage. Et moi, je ne tournerai plus qu’avec lui… et sa doublure miracle. Mais, chut, cela reste entre nous bien sûr ; le spectateur ne doit rien savoir…


 

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Rédigé par Benoît

Publié dans #Cinéma

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