Publié le 10 Octobre 2019

Je me balade entre nuages, collines et routes poussiéreuses. Un tourbillon, c’est un plaisir. Le calme plat j’aime aussi, c’est du repos pour moi. J’attends. L’action ne va pas tarder, elle ne tarde jamais. J’adore le désert du Nevada, ses buissons que je déplace, ses rapaces que je fixe pour le plaisir de caresser leurs ailes, sa vie au ralenti.

 

Une voiture s’arrête, une valise s’écrase sur la piste. Une femme rondelette avec chapeau à plume en descend, bras ballants, désemparée. La voiture redémarre en trombe dans un nuage de projections. La portière claque, emportée par la vitesse.

J’entends : -Adieu Jasmine !

Je m’approche gentiment, une brise de jour d’été :

-vous avez besoin d’aide peut-être ?

Elle, hagarde, me fixe sans me voir, ne répond pas…

Elle se décide à faire rouler cette lourde valise.

Je n’ai rien d’autre à faire, je décide de l’aider. J’envoie une bourrasque dégager l’horizon. Je sais qu’il y a l’auberge de Brenda un peu plus loin.

Allons bon, le vent se soulève ! ll ne manque plus que ça !

Quelle ingratitude ! Je prends de la hauteur. A l’auberge aussi scène de ménage, claquement de portes (je n’y suis pour rien), haussements de voies.

Jasmine entre dans ce motel de quatrième zone, demande une chambre et attend que Brenda daigne lever les yeux.

J’interviens : un souffle envoi valser la pile de feuilles déposée en désordre sur un semblant de bureau.

-Ah bon sang, ce maudit vent, quel pays !

Brenda toise sa visiteuse :

-Vous voulez une chambre ici ? En cette saison ? C’est vingt dollars payable d’avance !

La rondelette au chapeau à plume paye et se dirige vers sa chambre sordide.

Des cris, encore des cris.

Incapable de réparer la machine à café ? Le compagnon propre-à-rien de la logeuse décide de quitter le domicile conjugal. La vieille guimbarde s’ébranle porte ouverte. La fille adolescente du couple arrive au même instant, assise sur le dossier de la banquette arrière d’une décapotable hors d’âge, accompagnée de déjantés de la côte Ouest qui ne pensent qu’à la fête.

La logeuse effondrée n’arrive pas à pleurer. Jasmine dans l’embrasement de la porte de sa chambre a tout vu.

Par la fenêtre, le soleil se couche dans un grand nuage rouge.

Je décide d’intervenir…

 

La nuit est profonde. La fenêtre ouverte. Je m’infiltre, me glisse dans les courriers. J’ouvre les tiroirs. J’écris, je note les adresses, ne regardant que mes doigts qui filent comme le vent. Ma main esquisse ce que je sens être le futur de

cette maison et chaque mot devrait porter. J’écoute la parole de mes aïeux, ces tornades qui soufflaient et pliaient tout sur leurs passages, inondaient les campagnes et favorisaient l’apparition du soleil qui succédait et tout recommençait.

Je note encore et je file. Je survole Bradbury, la Miranda, Monterey. Les gens dorment englués dans leurs rêves, j’y dépose la nouvelle.

Lorsque je m’arrête, l’horizon s’éclaircit…

 

La femme au chapeau a troqué son galurin contre un tablier Bavarois d’un effet identique. Elle s’installe à la cuisine et prépare des Bretzels, genre de pâtisserie salée, et des délicieux Bavarois au café avec sa petite cafetière de voyage, à faire craquer tous les adeptes de régime.

Des voitures arrivent, se garent n’importe comment, des jeunes, des moins jeunes en sortent.

-C’est ici ? demandent-ils.

Le brouhaha s’installe, les conversations fusent, les claques dans le dos résonnent, les rires sonores s’envolent de table en table.

-Mais qu’est-ce-que c’est ce Bazar ? s’interroge Brenda.

La salle se remplit, on en redemande.

-Mais c’est vrai ce qui se dit, c’est excellent ici !

Jasmine s’éponge le front.

-On va tomber en panne de café, il faudrait faire des provisions.

Brenda se dit qu’elle rêve, mais comment ont-ils su ?

 

Je m’éloigne. Un tourbillon sur la route 66 que personne ne perçoit. Je m’élève à la recherche d’air frais et de hauteurs.

Un rapace flotte dans le ciel d’azur, j’en profite pour lui caresser les plumes.

Ils n’ont plus besoin de moi. Il y a bien quelque part un endroit où je serais utile,

Je grimpe, je grimpe…

 

Voir les commentaires

Rédigé par Gérald

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 8 Octobre 2019

Depuis hier, j'étais accroché à la patère de l'entrée où je m'ennuyais quelque peu. Soudain mon propriétaire, excédé visiblement par le train-train de sa vie, m'attrapa et je remplis ainsi ma fonction première de couvre-chef.
Je l'
entendis murmurer en son for intérieur que nous allions au cinéma voir « le Mecano de la Générale » de Buster Keaton. Le ticket en main, nous prîmes place et c'est ainsi que je me retrouvai sur un siège entre mon propriétaire et une jolie femme qui ressemblait à Annabelle, l'amoureuse de Buster.
Je ne voyais pas très bien ; alors, discrètement, j'allai sur un fauteuil du premier rang au moment de la séquence où le train déraille et où tout le le monde se retrouve dans le fossé, moi y compris… Je fus stupéfait : le chapeau acteur était mon sosie. Comment cela était-il possible ?
Au mot « fin », mon propriétaire se leva, me remit sur sa tête et nous filâmes prendre le dernier train.

Quant à moi, pastichant Boris Vian, j
e me demande si je ne suis pas en train de jouer avec les mots. Et si les mots étaient faits pour ça ? 

Voir les commentaires

Rédigé par Françoise M.

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 7 Octobre 2019

 

PROSOPOPÉE ET NARRATEUR ET POINT DE VUE

 

Réécrire la scène du film du point de vue de l’objet :

- la robe noire de Mireille D’arc dans Le Grand Blond avec une chaussure noire,

- la 2CV de Bourvil dans Le Corniaud,

- la clé à molette de Chaplin, ou la machine, ou l'un des rouages, dans Les Temps modernes,

- les longs gants de Rita Hayworth dans Gilda,

- la chambre ou l’un des meubles de la chambre dans 2001, l’Odyssée de l’espace,

- la robe de mariée de Jeanne Moreau dans La mariée était en noir,

- l’harmonica de Charles Bronson dans Il était une fois dans l’Ouest,

- le sabre-laser de Dark Vador ou de Luke Skywalker dans Star Wars.

- la locomotive dans L’arrivée du tarin en gare de La Ciotat,

- le vélo-solex de Jacques Tati dans Mon Oncle,

- le couteau de Eiko Matsuda dans L’Empire des sens,

- le landau dans Le Cuirassé Potemkine,

- la DeLorean de Doc dans Retour vers le futur,

- la robe de Marylin Monroe dans Sept ans de réflexion.

CINÉMA : atelier 3
CINÉMA : atelier 3
CINÉMA : atelier 3
LECTURE DE PROSOPOPÉE :

L’ÂME DU VIN

Un soir, l’âme du vin chantait dans les bouteilles :
« Homme, vers toi je pousse, ô cher déshérité,
Sous ma prison de verre et mes cires vermeilles,
Un chant plein de lumière et de fraternité !

Je sais combien il faut, sur la colline en flamme,
De peine, de sueur et de soleil cuisant
Pour engendrer ma vie et pour me donner l’âme ;
Mais je ne serai point ingrat ni malfaisant,

Car j’éprouve une joie immense quand je tombe
Dans le gosier d’un homme usé par ses travaux,
Et sa chaude poitrine est une douce tombe
Où je me plais bien mieux que dans mes froids caveaux.


Entends-tu retentir les refrains des dimanches
Et l’espoir qui gazouille en mon sein palpitant ?
Les coudes sur la table et retroussant tes manches,
Tu me glorifieras et tu seras content ;

J’allumerai les yeux de ta femme ravie ;
À ton fils je rendrai sa force et ses couleurs
Et serai pour ce frêle athlète de la vie
L’huile qui raffermit les muscles des lutteurs.

En toi je tomberai, végétale ambroisie,
Grain précieux jeté par l’éternel Semeur,
Pour que de notre amour naisse la poésie
Qui jaillira vers Dieu comme une rare fleur ! »

 

Les Fleurs du Mal - BAUDELAIRE

Voir les commentaires

Rédigé par Atelier Ecriture

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 7 Octobre 2019

Imaginez un dialogue ‘‘à la Audiard’’ entre deux acteurs morts, là-haut, au paradis des acteurs. Entrecoupez de quelques monologues intérieurs ; inventez si vous pouvez les dialogues dans l’esprit Audiard et incluez aussi quelques répliques de films.

 

 

  • « Inventez si vous pouvez » Pas un énoncé, une sentence !

  • Ho, ho, l’hère, l’ire l’air d’haïr vous donne.

  • Ben ça alors, ben ça, tu me la copieras !

  • Ho hère, mon brave, dites-moi.

  • T’es qui toi ?

  • Marcelin-Henry de Saint Guodillo, sociétaire de la comédie française de son vivant, âme damnée maintenant. Si j’osai…

  • Ose mon pote, « les cons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît. » (Les tontons flingueurs)

  • Con, moi, Marcelin-Henry de Saint Guodillo ? Brave hère « vous savez quelle différence il y'a entre un con et un voleur ? Un voleur de temps en temps ça se repose. » (Le guignolo) et là je me repose… pour l’éternité. Oui, vivant j’ai volé, volé des mots, d’esprit ou seulement bons parfois, plus souvent vulgaires ou simplement grossiers, volé des tirades interminables à de piètres auteurs, de lyriques envolées à d’antiques poètes hellènes, des rires à de gros nigauds pleins de frics, des larmes à d’adorables minois désargentés. Alors voleur oui, con je ne vous le permets pas. J’attends des excuses.

  • Te fâche pas collègue, des excuses, tout de suite les grands mots, remarque bien « je suis pas contre les excuses je suis même prêt à en recevoir. » (Les grandes familles) mais n’empêche, moi je dis que c’est une sentence, pas un énoncé.

  • A quels écrits faîtes-vous allusion ?

  • L’énoncé de l’exercice de l’atelier d’écriture.

Marcelin-Henry s’assoit confortablement sur un petit cumulo-nimbus onctueux, blanc, entreprend la lecture du fameux texte objet de mon ire.

  • Fichtre ! Ce n’est pas un énoncé mais une sentence !

  • Comme je te le dis, y va m’entendre le gros Père.

  • Le gros Père ?

  • Saint Pierre, chaque semaine sa nymphette nous donne un devoir sur table à faire pour la semaine suivante, nous faire passer le temps qu’elle nous dit, comme si on savait pas que l’éternité c’est pour tout le temps. T’es nouveau ici ?

  • Oui, hier. Celle-là tu la connais ? « Il remontait la rivière à contre-courant » Entendue à la télé, juste avant de partir.

  • Pas mal, mais moi tu sais « je suis ancien combattant, militant socialiste et bistrot. C'est dire si, dans ma vie, j'en ai entendu, des conneries. » (Un idiot à Paris) C’est pas tout ça, je vais y causer du pays au ventru.

  • Calme hère ami, d’haïr cesse, réfléchissons, « deux intellectuels assis vont plus loin qu'une brute qui marche. » (Un taxi de Tobrouk) Positivez, rencontrez notre bon père, souriez lui, explicitez votre déconvenue…

  • De quoi, de quoi « mais pourquoi j'm'enerverais ? Monsieur joue les lointains ! D'ailleurs je peux très bien lui claquer la gueule sans m'énerver ! » (Le cave se rebiffe)

  • Arguez de votre talent, expliquez votre mécontentement, insistez sur le fait que « la justice c'est comme la Sainte Vierge. Si on la voit pas de temps en temps, le doute s'installe. » (Pile ou face.) Enfin n’oubliez pas « Il vaut mieux s'en aller la tête basse que les pieds devant. » (Archimède le clochard)

  • Les pieds devant, c’est fait !

 

\..../

Voir les commentaires

Rédigé par Hervé

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 7 Octobre 2019

Je suis – ou plutôt j’étais – le fidèle compagnon d’Antoine Marechal. C’était un modeste commerçant qui tenait sa boutique dans un quartier populaire de Paris. Pendant de nombreuses années, nous étions inséparables. Tous ses voisins connaissaient sa 2 chevaux. Le dimanche matin, quand son magasin était fermé, il me bichonnait, me lavait, me lustrait, ce qui faisait mieux ressortir ma belle couleur bleue dont j’étais si fière. Je lui rendais bien les soins qu’il me prodiguait. En toute circonstance, il pouvait compter sur moi. Qu’il pleuve, qu’il vente, je démarrais au quart de tour, et c’était pareil lorsque le thermomètre descendait à moins dix.

Hélas, un événement tragique a mis fin à notre belle amitié. Comme tous les ans, Antoine baissa le rideau de sa boutique le premier août pour s’accorder quelques semaines de vacances bien méritées. Vacances pour lui, heures sup pour moi. J’étais pourtant heureuse. Après avoir passé onze mois à Paris, entrecoupés par quelques petites escapades en Normandie, j’avais besoin du grand air, du Sud, du soleil. Nous partions sur la Côte d’Azur, où une vieille tante d’Antoine nous attendait avec impatience. En échange du logis, Antoine effectuait des petits travaux. Dans une maison, il y a tant de choses à faire ! Nous voilà partis, moi toute rutilante, après une révision à fond, Antoine avec un chapeau pour le protéger du soleil. Nous cherchons notre chemin à travers un Paris encombré pour rejoindre la RN 7, bien connue comme la route des vacances. Profitant de notre priorité, nous traversons un carrefour, ou plutôt, nous tentons de traverser un carrefour, car en plein milieu, une Rolls Royce énorme, costaude comme un tank, me transforme littéralement en pièces détachées. Tout hébété, Antoine reste là, assis sur la chaussée, encerclé des débris de moi, sa voiture. Mais rapidement, le conducteur du tank, je veux dire de la Rolls Royce, arrive pour amener Antoine avec lui. Moi, je reste là, au milieu du carrefour. Naïve comme je suis, je m’attends à ce qu’Antoine s’occupe de moi, qu’il ramasse mes morceaux et qu’il m’amène dans notre garage habituel. Mais Antoine ne revient pas. Finalement, c’est un dépanneur, appelé par la police, qui s’est chargé de l’enlèvement de mon squelette pour m’amener au cimetière des voitures.

C’est là que je guette le retour d’Antoine, depuis des nombreuses années maintenant. Il ne peut pas m’abandonner. Mais, va-t-il me reconnaître ? Je suis toute rouillée. Presque rien ne reste de ma belle couleur bleue.

Voir les commentaires

Rédigé par Iliola

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 2 Octobre 2019

Libre, mobile, conviviale, adorée, je suis la vespa dans « Vacances Romaines » 1953 avec Gregory Peck en reporter et Audrey Hepburn en princesse hongroise. Moi aussi je suis une vedette du film. Sans moi, est-ce qu’il aurait eu autant de succès ? Pourtant je n’ai pas eu d’oscar…

Bon, je me décide à vous raconter cette histoire.

 

Vous vous rappelez cette scène d’anthologie avec mon départ tremblotant piloté par Audrey ? A vrai dire je n’étais pas rassurée moi aussi. Heureusement qu’elle ne savait pas passer les vitesses et qu’on est resté en première !

Vous vous souvenez du marché traversé à contre-sens, les étals renversés, l’autobus qui s’écarte pour nous éviter, la poursuite par des policiers à motos, toutes sirènes hurlantes et l’arrestation mouvementée ? Moi qui incarne la dolce-vita, il fallait le faire. Evidement tout s’arrange. Je leur pardonne tout à ces deux-là.

Et puis le soir, Gregory qui nous conduit au Baletti du château Saint-Ange. Moi, garée près d’une grosse moto Guzzi. Ne voilà-t-il pas qu’elle incline sa roue vers moi quitte à me toucher ! Non mais ! ce n’est pas un gros bras avec ses allures mal dégrossies qui va me faire du plat. J’ai de l’éducation moi ! On me reconnaît et on s’écarte pour me laisser passer, moi.

Mais qu’est-ce que c’est tout ce bruit ? Voilà qu’ils recommencent ces deux-là, ils sont terribles. Gregory ne supporte pas les sbires qui essaient de raisonner Audrey, l’obliger à regagner son palais et cesser ces enfantillages. Fuite qui se termine dans l’appartement de Greg. Mais là on m’a tout raconté, moi j’attendais en bas bien garée.

-Qui on ? m’interroge une lambretta jalouse intéressée !

La femme de ménage pardi. Elle en était si retournée qu’elle en parlait toute seule dans la rue. Pensez, une femme dans le lit de son reporter chouchou, quelle histoire !

 

Mais en tout bien tout honneur. Audrey n’a pris qu’une douche et Greg a dormi sur le canapé du salon. Un baiser au réveil comme un goût d’interdit…

Moi je dis qu’il aurait dû l’emporter sa princesse, foncer vers l’inconnu au petit matin. Moi j’étais prête. Une vespa à Rome c’est sacré, on passe de partout, tout le monde s’écarte, on ne risque rien. Peut-être a-t-il eu peur des conséquences ?

Je rêve à tout cela et je me dis qu’il ne faut pas tomber dans la nostalgie. Tout est beau au pays de la nostalgie. C’est toujours mieux au pays de la nostalgie.

 

Le film est terminé depuis longtemps. On m’a déposé au musée du cinéma à Cinecitta avec une inscription « vespa pilotée par Audrey Hepburn dans Vacances Romaines ». Les gens me prennent en photo, essaient de me toucher.

 

Moi immobile, je rêve de parcourir Rome dans tous les sens. Revoir la villa Borghèse, la fontaine de Trevi, attendre mes passagers dégustant des « bucattini all’amatriciana » dans un restaurant du Trastevere et filer jusqu’au bout de la nuit. Mais non ! je vis dans mes souvenirs.

 

Finalement qu’est-ce que Gregory a dû lui suggérer lors de cette scène où ils se parlent sur un banc de la place d’Espagne, tandis que la musique et les bruits de la nuit Romaine couvrent leur conversation ?

Ils se comportent comme si le problème était réglé alors que de toute évidence il ne l’est pas.

Je voudrais sortir de cette grande léthargie pour en savoir plus ou peut-être replonger dans mes rêves pour découvrir la réponse à mes questions. Mais je n’y arrive pas.

 

J’ouvre les yeux et je constate que tout est éteint, nuit noire… Le musée du cinéma a retrouvé son silence… Mes personnages sont définitivement partis…

Je ne le saurai jamais.

 

Voir les commentaires

Rédigé par Gérald

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 2 Octobre 2019

J’attendais, les portières béantes, de recevoir les sacs, valises et autres objets nécessaires en vacances, tant sur les sièges arrière que dans mon petit coffre. Mon chauffeur, que dis-je, mon maître, mon « Maréchal », est arrivé, appareil photo en bandoulière et avec l’aide de la voisine, le tout fut vite rangé.

Il a enclenché la vitesse et nous voilà partis, insouciants et rapides à travers les rues de Paris désertes à cette heure-ci. Quelques pâtés de maisons plus loin, j’ai senti dans mon arrière-train une poussée irrésistible qui m’a propulsée dans un fatras de meubles déposés par une entreprise de déménagement.

En moins de temps qu’il n’en faut pour que je reprenne mes esprits, je me suis ouverte comme une moule sous la chaleur, ou plus prosaïquement, comme un nénuphar flottant dans la mare d’un jardin japonais. Enfin non, la scène n’était pas silencieuse, un peu comme si tous les pétards du paquet de papillotes s’étaient déclenchés en même temps, faisant sauter tous les emballages des chocolats.

 

J’avais triste mine.

Ma loupiote avant traînait par terre, semblable à un œil de verre sorti de son orbite.

Mes quatre portières me rappelaient cette saynète de gamine en cours de récréation : « Je t’aime, un peu, beaucoup, passionnément… »

Le capot était effondré et ne cherchait plus du tout à cacher quoi que ce soit.

Mon état n’était pas brillant.

Et mon « Maréchal », au milieu de ces morceaux, tenait fermement dans sa main gauche mon volant, brutalement sorti de son axe. La bouche ouverte, il ne semblait pas bien réaliser.

 

Je ne sais toujours pas à quoi il pensait à ce moment-là : aux vacances foutues ? au malus de son assurance auto ? ou bien aux ennuis qui allaient commencer dès que le tout petit bonhomme au chapeau de charlot lui aurait adressé la parole ?...

 

En tout cas, ce qui est sûr, c’est que je vais marcher beaucoup moins bien, forcément…

***

Et puis... Deux Pattes merveilleuses...

Je n’en croyais pas mon œil (celui qui me restait).

Mon maître, mon « Maréchal » était en train de traiter avec le petit bonhomme en noir au chapeau de Charlot, il avait même empoché sa carte de visite ! Quel ingrat ! Quand je pense à tous ces bons et loyaux services que je lui ai rendus.

 

Je ressassais ma rancœur lorsque j’ai entendu un petit « Psiiitttt » assez long. Oh là là ! Ça continue, un de mes pneus qui se dégonfle. Mais non, en fait le bruit s’arrêtait, revenait, s’arrêtait… Comme si quelqu’un essayait d’attirer l’attention.

 

Intriguée, je regarde au fond de la salle, c’était assez noir, juste la lueur de l’écran éclairait quelques têtes. J’aperçois un homme qui me faisait des grands signes me faisant comprendre de le rejoindre. « J’aimerais bien mais… suis pas trop en état en fait ». Et puis, cette personne qui se lève, traverse l’écran et entreprends de rassembler tous mes morceaux.

« Tu vas voir » me dit-elle.

« Oh ! Au point où j’en suis, je risque plus grand chose… »

Je me laissais faire, docile.

 

Il a rapporté tous mes morceaux dans son garage, il y en avait même sur la pelouse. Puis il s’est présenté : « Charly. Mécano, bricoleur, décorateur, passionné. Je vais faire quelque chose de toi ».

Ça a duré des mois, il a tout réparé, tout remonté, il m’a parée de belles couleurs, fait briller le peu de chromes que j’avais. Ses amis venaient régulièrement voir l’avancée des travaux, ça discutait ferme. Ils donnaient leur avis, ils avaient tous l’air de bien me connaître. Parfois je les entendais parler de « la virée ». Ils félicitaient Charly. Ils tapotaient ma carrosserie, caressaient ma capote, effleuraient mes ailes… Je me sentais belle, enviée… J’étais flattée.

 

Et puis un matin, Charly est descendu avec un petit sac (rien à voir avec le barda de Maréchal) et il m’a dit « on y va, tu es prête ! ». Il enclenche la première en tirant à lui mon fameux levier de vitesse. Un tour sur la pelouse et en atteignant le portail, j’ai vu dans la rue des dizaines de « petites sœurs », des « deux pattes » comme moi, bichonnées, heureuses, merveilleuses… Un rassemblement de fans de ce modèle de la marque aux chevrons. Je les ai suivis, et puis ils m’ont laissée passer devant et nous sommes partis pour un grand périple, enfin une belle « virée » comme je l’avais entendu maintes fois, et tout le long de la route je croisais le regard des spectateurs émus, enthousiastes, rêveurs, envieux. J’avais l’impression de glisser sur la route, pour un peu j’aurais fermé les yeux pour me laisser aller à ce bonheur, mais non… je les gardais grand ouverts pour ne pas perdre une miette de ces instants heureux.

 

Quand je pense à mon « Maréchal » qui a préféré une Cadillac…. Je lui souhaite tous les ennuis du monde !

 

 

 

Voir les commentaires

Rédigé par Bernadette

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 2 Octobre 2019

Mon Dieu qu'il est lourd !

Un âne mort, qui se permet en plus de polluer l'atmosphère par des émanations nocives…

C'est bien avant l'ère écolo..

Je toussote un peu, histoire de l'apitoyer.. penses-tu ! Il me chevauche fier comme un bar-tabac, c'est le cas de le dire. Et son nigaud de neveu qui me pèse sur l'arrière-train.. une vraie fête ! Je ne vais pas me gêner pour divaguer dans les rues au gré de mon humeur.. pétaradante ! Ce grand dadais qui me dénigre et croit me diriger. Je sens l'orage dans l'air..

Moi, j'adore le pavé mouillé qui brille dans la nuit.. on peut éclabousser le passant stupéfait, et ricaner sous la cape du grand chapeauté !

J'envisage avec délectation un virage mal négocié.. qui finit par une chute au fond du caniveau. Non mais quoi.. tant de mépris pour mon petit cœur souffreteux..

Je hoquette à fendre l'âme.. mais le petit rigole, et le grand s'en fout royalement. Moi qui pourrais avoir si fière allure dans les rues de Paris ! C'est pas parce que Monsieur est cinéaste qu'il doit se croire tout permis.

Et cette caméra qui nous suit sans cesse. J'ai presque envie de stopper net pour voir la réaction. Je pourrai toujours prétexter une panne de carburant.. ce crétin ne s'occupe de rien, sauf de garder l'air serein en toute circonstance.

Heureusement, l'équipe du film me bichonne.

Mais bon, ça commence à bien faire.. marre de tourner en rond pour des rushs au rythme saccadé. Imaginons.. Je pile net.. il se prend les bijoux de famille dans mon guidon et hop ! Pas besoin du couteau nippon de ce film pervers "L'Empire des sens".

Non, juste un cran au-dessous. Un coup de semonce.

Si au moins on changeait de décor. Ces rues désertes, ce quartier si morne.. dignes du plateau de "2001 l'Odyssée de l'espace".

Il manque la vie, un souffle d'air chaud, une bouche de métro, une robe qui s'envole, un brin d'érotisme !

Mais je le prédis.. je vais rester dans les annales des cinéphiles. On parlera encore de moi au siècle prochain. En mode électrique s'il vous plaît. Écolo, silencieux, toujours aussi élégant.. Apte aux rallyes dans le désert !

 

Voir les commentaires

Rédigé par Nadine

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 1 Octobre 2019

Il était une fois dans l’ouest, enfin je crois.

Je me souviens du jour où l’homme aux yeux bleus avait obligé mon maître à jouer cette musique lancinante qui était un prélude à la mort. La mort de l’homme juché sur ses épaules, son frère. Les notes se bousculèrent quand il tomba à terre et je me retrouvais ainsi dans la poussière de l’hacienda.

Le temps passa et mon maître, d’enfant, était devenu adulte à la rancune tenace. Sa raison de vivre était de retrouver l’assassin. Il se servait de moi comme d’un appeau, la musique qu’il jouait, quelques notes, simple phrase musicale, donnait le frisson à qui pouvait l’entendre. Elle était le sésame de la porte de la mort. Enfin, un jour sous un soleil de plomb, il le trouva. Ses lèvres posées sur moi ne tremblèrent pas. La musique retentit dans un monde où tout s’arrête pour l’écouter. L’homme le regarda et ne comprit pas pourquoi une tache de sang venait d’envahir sa chemise. Mon maître s’avança alors, regarda fixement l’homme sur qui, le voile de la mort commençait à faire son œuvre. Il me prit et m’enfonça dans la bouche de cet inconnu. Il se retourna et s’en alla, me laissant seul au milieu d’un gargouillis de salive.

Plus jamais un son ne sortira de moi ; en se vengeant mon maître venait de signer ma mort.

Il était une fois un Harmonica.

***

Et puis... Un Brouillard intense...

 

Un brouillard intense m’entourait, je ne savais plus dans qu’elle direction aller. Pourtant il y a à peine un quart d’heure, j’étais assis dans mon canapé. Je me souviens, le film Il était une fois dans l’ouest  venait de se terminer. Tout cela ne m’expliquait pas le pourquoi de la situation dans laquelle je me trouvais. Pas un bruit, juste le crissement de mes pas sur du sable venait troubler le silence de mon environnement. Le monde, mon monde avait disparu.

Je fis quelques pas, les bras tendus à la recherche d’un mur, d’une porte, rien ; le brouillard épaississait le mystère. Quand soudain, avec mes pieds, je heurtais un objet. Qu’est ce que cela ? Doucement à tâtons je le saisis entre mes mains. L’objet était de forme parallélépipédique, je le portais à mes yeux et là, je ne pus retenir un cri :

– Un harmonica !

L’harmonica du film, Il était une fois dans l’ouest.

Devant mon air ahuri, il se mit à parler :

– Oui c’est moi, je t’ai fait venir dans mon monde pour que tu me retrouves. Je ne pouvais pas mourir et disparaître comme ça ! Porte-moi à tes lèvres et joue.

Une peur indicible m’envahit ; serais-je entrain de devenir fou ?

A l’intérieur de moi, une petite voix me dit :

– Ecoute-le, joue !

– Mais je ne sais pas, je n’ai jamais fait de musique, m’écriais-je.

– Joue, fais -lui confiance, me répondit la voix.

Alors, au milieu de nulle part, je portais l’harmonica à mes lèvres et je me mis à souffler, à jouer.

A ce moment-là, le brouillard se déchira un vent l’emporta et je me retrouvais enfoncé dans mon canapé.

J’ouvris les yeux, la nuit était bien avancée et là, éclairé par un rayon de lune, l’harmonica trônait sur le guéridon.

Je lui chuchotais :

– C’est toi ?

Le silence fut sa réponse.

Je repensais alors à cette phrase du poète Lamartine : « Objets inanimés avez-vous donc une âme ?».

Aujourd’hui, enfin cette nuit, je sais, et la réponse est Oui !

Voir les commentaires

Rédigé par Bernard

Publié dans #Cinéma

Repost0

Publié le 1 Octobre 2019

On m’a fabriquée exprès pour cette scène. Une machine énorme, pleine de rouages. On m’a déposée là, dans le studio. Quelques essais pour vérifier mon bon fonctionnement et depuis, j’attends.

Une porte claque, un machiniste arrive, une caméra m’observe…

Clap ! Action !

Ça y est, ça tourne.

 

Mes rouages s’ébranlent, les dents crantées s’imbriquent aux creux des rouages d’en face. Tout cliquette, gronde, vibre, crisse… un vacarme épouvantable ! Je ne suis pas très rassurée, certaine que mes boulons vont sauter, mes vis se dévisser, mes courroies déraper, mes pignons, mes pistons s’emballer... quand Charlot est arrivé. Ah ! C’est donc ça ! Je tourne avec Charlie Chaplin… Quel honneur ! Je suis ravie mais vaudrait mieux se dépêcher, je sens que je surchauffe.

 

Charlot s’approche. Salopette sale, godillots tops grands, trop gros, burette en main, clé à molette en poche, il entreprend de me graisser le rouage. Je pressens une catastrophe en gestation… il est si maladroit ! Mais je ne peux intervenir, je suis clouée au sol, je ne peux que subir. Mon rôle est simple, en fait : il suffit que je sois moi-même. Je continue donc à tourner, grincer, couiner, chauffer de plus belle pendant que lui s’active autour de moi, m’abreuve d’huile, serre une vis par-ci, un boulon par-là…

 

Puis, d’un coup, je l’ai avalé. Je ne sais pas comment s’est arrivé. J’étais occupée à maintenir l’unité de ma mécanique quand j’ai senti un truc me grattouiller les dents crantées. Le truc, c’était lui ! Happé par mes rouages, il circule, aplati sur le ventre comme une couleuvre, entre les éléments de ma structure. Je fais tout ce que je peux pour dilater l’espace, je ne veux surtout pas le blesser. Quand il arrive au-dessus d’un piston, je maintiens ce dernier à l’arrêt ; j’évite de respirer, gardant toutes mes valves en apnée à son passage. Je mets tout mon être au ralenti pour ne pas le brûler. Et lui migre, drôle et tranquille, de roues en roues, se faufile tel une anguille jusqu’à mon cœur. Là, croyez-le, croyez-le pas, il me remercie pour la douceur et la bienveillance dont je l’enveloppe malgré ma rude armature métallique. Cela me touche, une larme d’huile m’échappe, s’écrase sur sa main. Il sourit, il me comprend.

 

Pendant ce temps, la caméra tourne. Faut la terminer cette scène. Il reprend la migration, ressort à l’autre bout de moi, éjecté par un petit rouage sur un petit nuage de poésie… Et moi, depuis, je suis devenue le symbole des Temps modernes !

 

Du moins, c’est ainsi que se le rappelle ma mémoire rouillée… Mais c’est si loin, je m’embrouille un peu, grippée, à l’arrêt, abandonnée depuis presque un siècle. Peut-être n’est-ce pas tout-à-fait comme ça que les choses se sont déroulées, peut-être vaut-il mieux, pour vous qui me lisez, aller voir ou revoir le film sur l’une de vos modernes machines... un ordinateur, je crois…

Moi, je préfère garder mes souvenirs vivants au creux de mon cœur mort.

****

Et puis... Juste une clé à molette...

 

Je relis mon texte. Peut-être quelques imprécisions… ? Vaut mieux que je visionne la scène de Charlot à l’usine. Les Temps modernes remontent à loin dans mon souvenir.

Ordi, Youtube, clic grand écran.

Charlot s’avance, démarche et silhouette reconnaissables dans le monde entier. Tous se déroule comme dans l'histoire racontée par la machine : elle l’avale, il suit tout le circuit des rouages, ressort… chez moi ! Là, debout devant moi, salopette maculée, clé anglaise dans la poche, moustache vagabondant sous le nez, Charlot !

Il me dévisage, sévère, me dit :

J’ai lu ton texte, je ne suis pas d’accord. Cette Mécanique sensible, bourrée de bons sentiments, dessert mon propos. Moi, avec ce film, je veux dénoncer l’aliénation de l’homme à la machine. Si tu me la rends sympathique, comment veux-tu que je sois crédible !

Mais... mais…

J’ai du mal à aligner deux mots et encore moins une idée. Toute ma salive s’est évaporée, je balbutie :

Mon texte ? Mais personne ne le lit, et puis, c’est un hommage. Ton film est, et restera, un des grands films du XXe siècle. Ce ne sont pas les trois bêtises que j’écris qui vont changer quelque chose.

Il se radoucit, me sourit. Regarde autour de lui, découvre l’ordi… Froncement perplexe de sourcils…

Où suis-je ? Qu’est-ce cela ?

Un ordinateur, par lequel tu es arrivé jusqu’à moi. Tu es chez moi.

Ce n’est pas mon monde ici, Renvoie-moi dans mon film.

Ah ! Mais... c’est que je ne sais pas comment faire ! Je pensais que tu saurais repartir puisque tu as su venir.

Non, je ne sais, je ne sais rien. Quel jour sommes-nous ?

Le 7 octobre 2019.

2019 !? Ce n’est pas possible ! Mes souvenirs remontent à… Je ne me souviens plus..

D’un coup, je panique. Le caractère surnaturel de la situation explose dans mon cerveau hébété. Comment faire ? Je lui dis ? … Allez, en douceur :

Heu… en fait, tu es mort depuis longtemps.

Il blêmit, s’évanouit. Pour la douceur, j’ai des progrès à faire ! Bon, comment réanimer un mort pour le renvoyer d’où il vient ?

COMMENT RÉANIMER UN MORT POUR LE RENVOYER D'OÙ IL VIENT ?

Les mots prennent tout leur sens, je suis en plein délire !! Tout ça n’existe pas, n’est-ce-pas ? Je vais me réveiller.. ?!

Tu ne rêves pas, tout cela existe.

Une voix résonne dans mon salon. Charlot ? Non, il est toujours dans les ‘vap’. Un autre visiteur de l’au-delà ? Une autre voix retentit :

T’inquiète pas, on le récupère.

Mais je reconnais ces timbres ! Jean Rochefort et Bernard Blier, sortis tout droit de l’Éternité ! Pas le temps de synthétiser l’information que Charlot a disparu via la Jactance au Paradis, petit texte du présent recueil. Dans mon salon, tout est calme. L’ordi s’est mis en veille, Les Temps modernes sont en sommeil.

Je n’ai rien compris à cette histoire, mais à côté du PC, il y a une clé à molette...

Voir les commentaires

Rédigé par Mado

Publié dans #Cinéma

Repost0