voyage

Publié le 5 Décembre 2024

 
La soirée a été longue, les voyageurs se sont appliqués à jouer tout de même, aux échecs, au poker, à la belote, malgré l'atmosphère tendue. Mon père a perdu toute sa verve. Il n'est pas rassuré. Il aimerait ouvrir son coffre, mais après plusieurs tentatives auprès du chef de bord, un non catégorique lui a été retourné.
 
De tables en tables, de salons en salons, les voyageurs discutent à l'oreille. Certains sont sûrs d'eux, comme s'ils avaient assisté au vol. Ils connaissent le voleur !!!
Quelle inconséquence !! Je suis médusée de voir ces personnes accuser une autre, par le simple fait qu'elle vous déplaise. Cela est insensé.
D'autres bruits courent dans les couloirs, on entend tout et n'importe quoi.
Une femme a été vue. Elle ne fait pas partie des voyageurs connus . Il paraît qu'elle connaît les faits.
Il faut la retrouver....
Mais comment ? bla bla bla !!
Dès l'arrivée du commissaire de police, nous le mettrons au courant.
Quelques minutes plus tard, le commissaire se présente avec ses collègues, ils vont nous interroger.
C'est le détective Hercule Poirot qui prendra le commandement de cette affaire.
Cet homme, toujours courtois, voire obséquieux, a une obsession de l'ordre. Il pose les questions et classe dans sa mémoire infaillible tous les éléments recueillis avec intelligence.
 
- Vous n'avez aucune idée sur l'identité de cette femme ?
- Non Monsieur.
- Avez-vous vu cette femme dans le train ?
- Où était Monsieur Morassi au moment des faits?
- Je ne sais pas Monsieur.
- Etait-il seul au moment de monter dans le train?
- A-t-il causé avec une personne sur le quai ?
 
Toutes ces questions fusent, se succèdent. Monsieur Poirot reste toujours stoïque et mystérieux. Ses yeux scrutent la personne qu'il interroge. Il met mal à l'aise.
Je décide d'aller voir Marc de Verneuil, j'ai confiance en lui, Je lui pose la question qui me perturbe :
- Dois-je mentionner que le beau brun aux yeux de braise est descendu du train ? Après tout, je n'ai pas vu d'objet dans ses bras, c'est de la diffamation. Quelle histoire !
Marc est de mon avis, rien n'accuse le beau brun.
- D'ailleurs où est-il ?
Je ne l'ai plus revu.
 
Quelle sordide mésaventure.. Ce voyage devait être merveilleux, extraordinaire. C'est bien compromis.
L'enquête menée par le détective ne laisse rien paraître de ses sentiments sur les indices qu'il a recueillis. Pour l'instant, le suspense et le mystère sont les éléments clés de cette affaire.
- Pourquoi voler le stradivarius ?
- Pour de l'argent ?
- Est-ce une escroquerie à l'assurance ?
- Veut-on empêcher Monsieur Morassi de se produire à Vienne ?
- La mafia sicilienne serait-elle dans le collimateur ?
 
Le passé et le présent de Monsieur Morassi semblent être les terrains d'enquête du détective. Pas à pas, il semble avancer sur ce vol. Il se promène, examine les faits et gestes, hume les odeurs de parfum, les distingue les uns des autres.. Le parfum suggère une présence féminine ; de là découle la certitude de son instinct.
 
C'est Madame Howood qui doit être satisfaite ; tout ce joli bazar va apporter de l'eau à son moulin, voilà une histoire à écrire.
La baronne, après l'agitation de la nuit, a les nerfs à vifs et mon père s'avère être un piètre galant aujourd'hui. Il ne peut la rassurer. Lui-même est tendu comme les cordes d’un violon.
Je me rends compte que cette affaire devient toxique, aussi je décide de penser, pour l'instant, à mon bien-être et apporter un peu de réconfort à mon père qui est très inquiet pour sa valise.
Je poursuis ma journée dans une atmosphère plus légère en compagnie de Marc de Verneuil qui lui reste très zen...
 
 

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Rédigé par Arlette

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Publié le 5 Décembre 2024

Valentin Poesy
34 ans
En couple avec Hermine, mais son union bat de l’aile. Il voudrait un enfant, pas elle.
Correcteur de presse au Figaro
Ecrivain de romans policiers à ses heures perdues, deux romans écrits non publiés.
Grand, mince, dégingandé, un peu embarrassé de sa grande taille, un peu timide
Cheveux ébouriffés, petites lunettes
A mis un costume pour le départ, mais habituellement plutôt jeans baskets
Aime le hard rock et le heavy metal
Motivations par rapport au voyage :
  • Rouler sur les traces d’Agatha Christie à qui il voue un véritable culte
  • Chercher l’inspiration pour son prochain roman
  • Plus profondément :
    1. suis-je vraiment fait pour être écrivain ?
    2. un break avec Hermine ; en ce moment ils ne se comprennent plus
Pour un roman
 
Tout un brouhaha dans le couloir, des bruits de pas, des exclamations, des voix fortes qui s’entremêlent. Valentin, surpris et à moitié réveillé, pointe un visage perplexe à la porte de sa cabine.
 
Marco, avec son élégance habituelle, n’élève pas la voix mais semble défait. Même ses cheveux, d’ordinaire impeccablement coiffés, sont tout ébouriffés. Il est très pâle.
 
Dans le brouhaha des voix superposées, Valentin finit par entrevoir l’objet de toute cette agitation : le Stradivarius de Marco a disparu !
 
L’émotion est à son comble. Tout le monde parle en même temps, émet des avis indignés, formule des hypothèses, mais personne ne s’écoute.
 
Marco parvient à prononcer quelques mots sous le feu des questions : comment, où, quand ? Mais il est tellement choqué que ses propos sont un peu confus.
 
Le violon est conservé dans un placard fermé par un cadenas à code. Aucun signe d’effraction, tout était exactement en place. Sauf que l’étagère où reposait le violon est vide.
Chacun se perd en conjectures plus ou moins réalistes ou de pure fantaisie. Marco répond à chaque fois que ce n’est pas possible.
 
On le fait asseoir, on lui apporte à boire, on lui parle un peu plus doucement.
 
Seul Valentin semble avoir gardé un peu de distance. Il pense déjà à l’intrigue qu’il pourrait bâtir à partir de cet événement. Il imagine comment il va transposer les personnages, ce qu’il va faire de chacun, comment il va développer son imaginaire à partir de la réalité.
 
Mais pour cela, il faut qu’il ait un peu d’avance sur les autres dans l’élucidation du mystère.
Révélations
 
Valentin a repris ses esprits, s’est rasé, peigné. Il se plonge dans ses réflexions, échafaude des hypothèses. Il ne connaît pas assez bien la plupart des passagers et ne peut que se perdre en conjectures. Mais il s’amuse comme un fou, faisant peu de cas de la panique et la désolation de Marco, un homme si sympathique au demeurant.
 
Un Stradivarius est invendable, même en passant par le plus roué des receleurs. Qui peut avoir quelque intérêt à le voler ? Un collectionneur ? Un psychopathe ? Il passe en revue tous les passagers qu’il connaît, établit une fiche détaillée pour chacun d’eux, cela nourrira son futur roman quoiqu’il se passe. Mais il demeure perplexe et ne parvient pas à faire émerger la moindre hypothèse.
 
Le haut parleur annonce que tous les passagers sont attendus au wagon restaurant à onze heures pour une communication importante. Aurait-on trouvé l’auteur de forfait ? Valentin continue ses élucubrations à coup de tableaux pleins de flèches reliant ses idées et leurs protagonistes.
 
Quand il entend l’annonce au haut-parleur, il pose son stylo, noue un foulard de soie autour de son cou, enfile un blazer bleu marine. Sait-on jamais, il vaut mieux se donner une allure respectable, chacun soupçonnant tous les autres.
 
Un peu avant l’heure, les voyageurs commencent à affluer. Il n’y a évidemment pas assez de place pour tout le monde et on s’entasse comme on peut dans les moindres espaces et recoins. L’atmosphère est lourde, les regards s’échangent furtivement, ainsi que les civilités d’usage.
 
Un homme en uniforme prend le micro. Il annonce que le violon a été retrouvé dans la cabine de Jean Martin -qui n’est pas venu- de son vrai nom Sylvère Reverdy. Cet homme déjà connu des services de police pour divers vols dans le monde de l’art, se donnant l’apparence la plus banale possible, jusqu’à son nom passe-partout, se fondant habilement dans la foule, était du voyage avec un autre projet peu légal qui ne sera pas dévoilé.
 
Mais apprenant la présence du Stradivarius, il a imaginé une stratégie pour le subtiliser et projeté de le rendre à son propriétaire en échange d’une rançon. Possédant un matériel de professionnel qu’il dissimule dans un de ses bagages, il a réussi à forcer sans effraction la porte de la cabine de Marco à l’heure flottante de l’après-dîner et à faire de même pour le placard, malgré la clé à code. Un jeu d’enfant pour un professionnel !
 
Cependant, il a éveillé les soupçons de Louis, très observateur, qui le croisant dans la coursive en possession d’un paquet assez volumineux, lui a trouvé un air bizarre et l’a signalé au personnel de sécurité du train.
 
Valentin, un peu déçu, se demande ce qu’il va faire de cette histoire, qui n’est pas assez romanesque à son goût. Il va romancer !
 
Monique

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Rédigé par Monique

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Publié le 5 Décembre 2024

Le personnage :
Joséphine CASTALA – espagnole par son père, française par sa mère
Née le 20 mai 1950 à Paris
Yeux verts
Cheveux roux, longs, frisés, retenus souvent par des rubans très colorés, rose fuchsia ou vert émeraude, en queue de cheval ou en chignon.
De taille moyenne, elle a beaucoup de charme et aime le style rétro : robes mi- longues, agrémentées de dentelles et de volants. Porte régulièrement des chapeaux qu’elle assortit à ses toilettes et à ses rubans.
Fiancée depuis deux ans à Maxime, rencontré durant ses études de médecine, biologiste, de quatre ans son ainé.
Fait le voyage de Paris à Istanbul seule ce 20 mai 1977, Maxime étant trop occupé par ses recherches en laboratoire. Elle fête ses vingt-sept ans et la fin de ses études couronnées de succès.
Elle est heureuse de célébrer sa réussite par ce voyage de trois jours dans l’Orient Express. Pourtant la médecine n’est pas son choix personnel mais celui de son père. Elle aurait préféré le domaine de la mode, devenir styliste ou modiste. Elle a suivi les injonctions parentales comme elle a toujours fait jusqu’à présent.
Pour la circonstance, elle porte une robe vert amande, resserrée à la taille, manches trois quart, ornée de dentelles et un petit chapeau en toile fine et fleurie.
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Le départ
Avec une série de secousses, le convoi s’ébranle. L’Orient Express vient d’entamer son long voyage de trois jours à travers l’Europe.
Joséphine Castala sent une émotion monter en elle, une bouffée de liberté inhabituelle. Elle part ! Elle s’éloigne pour la première fois de la sphère familiale, ses frères, ses parents et même Maxime ! Aujourd’hui elle respire à son rythme. Ce voyage sera une étape importante dans sa vie, elle en a le pressentiment. Elle ne sait pas encore qu’elle va vivre durant ces trois jours des moments intenses et faire des rencontres qui modifieront son avenir.
Joséphine se penche légèrement à la fenêtre du wagon dans lequel elle est montée sans trop savoir si c’est bien dans celui-là que se trouve sa cabine. La locomotive annonce le départ par un sifflement strident. « Fantastique ce train ! J’ai l’impression d’avoir changé d’époque ! » se dit la jeune femme.
Elle aperçoit à la fenêtre voisine deux hommes qui regardent comme elle le quai s’éloigner lentement. D’un geste gracieux elle retire son chapeau avant qu’il ne s’envole. Un des deux hommes lui sourit en la saluant et en poursuivant joyeusement la discussion avec son voisin. Leurs voix sont fortes et leur accent chaleureux. « C’est étrange… » pense Joséphine alors que L’Orient Express laisse derrière lui les lumières de Paris, « … je quitte ma ville, je vais passer trois jours sans la présence de Maxime et je ne ressens rien, pas de pincement au cœur. » Les voix chantantes des deux hommes et le roulement du train l’emportent déjà dans un autre monde. Joséphine reste pensive quelques minutes. « Allons ! Je dois trouver maintenant ma cabine et me préparer pour le diner »
Joséphine au wagon restaurant
Premier repas dans l’Orient Express pour Joséphine. Informée que le diner sera servi à vingt heures au wagon restaurant, elle choisit une toilette élégante mais classique. « Ma longue robe fuchsia sera parfaite pour cette soirée, je mettrai mes bottines noires et dans mes cheveux un ruban vert émeraude ». Joséphine n’a jamais voyagé dans un train aussi luxueux. Quand elle a découvert sa cabine, elle a eu l’impression d’entrer dans un décor de cinéma du début du siècle. Ce faste et ce mobilier à la fois simple et recherché, couchette recouverte de bouttis fleuri, petite table de chevet en bois laqué, fauteuil accueillant en velours rouge, lui ont sauté aux yeux avec autant de ravissement que d’amertume. Issue d’une famille aisée du seizième arrondissement de Paris, Joséphine a pourtant rejeté les soirées mondaines données par ses parents. Sa préférence allait sans hésitation aux réunions amicales où toutes les tenues vestimentaires étaient acceptées dans la mesure où elles étaient correctes et au cours desquelles la parole circulait joyeusement et sans emphase. Elle sait que ce soir l’ambiance sera toute autre. Avec une légère inquiétude et sans grand entrain, elle se dirige vers le wagon restaurant. Le couloir étroit qui y mène est éclairé par des appliques en forme de fleurs, lumineuses sans être aveuglantes. La moquette beige sable rend les pas feutrés et étouffe les voix des passagers. Le roulement des roues sur les rails termine de rendre ce moment étrangement angoissant pour elle. Joséphine dépasse une dame très élégante et opulente, au parfum entêtant. « Elle ressemble aux amies de ma mère, aussi guindées qu’elle ! » se dit la jeune femme qui n’appréciait guère leur compagnie. Une jeune personne à la tenue bien différente la précède, robe noire, tablier blanc et petite coiffe sur la tête. « Sans doute la soubrette de la dame » en déduit Joséphine. « Jeanne, ne marchez pas si vite ! » lui enjoint justement sa patronne. Au moment où elles se croisent, Joséphine et Jeanne échangent un sourire entendu.
« Me voilà arrivée ». Joséphine entre dans le wagon restaurant et constate avec un léger soulagement que la plupart des tables de deux personnes sont déjà occupées. Elle aperçoit une place libre à une table de quatre où deux hommes et une femme sont installés. « Puis-je m’assoir avec vous ? » leur demande-t-elle en souriant poliment. Un des hommes l’invite à s’assoir à ses côtés tout en lui rendant son sourire. « Enchanté Mademoiselle, je me présente, Marco Morassi » dit-il avec un accent chantant qui rappelle à Joséphine la conversation à la fenêtre du train il y a quelques heures. « Joséphine Castala », « Eugénie Charpentier », « Marc de Verneuil ». Les présentations sont faites.
La jeune femme ne se sent pas à l’aise, l’atmosphère est pesante. Les plats sont excellents et raffinés, la vaisselle est précieuse, les nappes blanches sont joliment fleuries mais elle ne se sent pas à sa place. Trop de luxe, trop de retenues pour elle qui apprécie les repas simples et les conversations décontractées. Les lumières douces des lampes de la salle créent une ambiance intime bien loin de la réalité. Elle échange des banalités avec ses voisins de table, pas désagréables au demeurant. On commente les plats bien sûr mais plus par politesse et pour combler le silence que par sympathie. Joséphine n’est pas prête pour les confidences, elle a plutôt hâte que le repas se termine.
C’est à ce moment-là que Marco, son voisin de droite, aborde avec son chaleureux accent italien un sujet plus personnel, sa passion pour la musique. Son visage s’anime et ses yeux bleus pétillent quand il lui confie son parcours de musicien.
« Accepteriez-vous de poursuivre cette conversation au salon ? » lui propose Marco. Et sans bien comprendre pourquoi, Joséphine accepte.
Joséphine sera-t-elle suspectée ?
Le lendemain matin, Joséphine se prépare pour aller prendre le petit déjeuner servi dans le salon. Tout en cherchant la tenue adéquate, elle se remémore la fin de la soirée de la veille, passée en compagnie de Marco Morassi autour d’une (ou deux ?) coupe de champagne. La conversation s’est terminée tard et la jeune femme a l’esprit quelque peu dans le brouillard ce matin.
« Marco est un homme vraiment charmant, passionné et passionnant ». La voilà prête à quitter sa cabine quand soudain elle entend des voix résonner dans le couloir. Les sons qui lui parviennent sont stridents et angoissants. « Que se passe-t-il ? » se demande Joséphine, étonnée d’un tel brouhaha dans un train aussi select. Elle entrebâille la porte de sa cabine. Les voix se font plus fortes. Celle d’un homme plus particulièrement, des cris et des lamentations, vociférés avec un accent chantant qu’elle reconnait sans difficulté. «Monsieur Morassi ?? » murmure -t-elle avec une inquiétude grandissante. « Que lui est-il donc arrivé ? Quand nous nous sommes quittés hier soir il était jovial et détendu. » Pour en savoir davantage, elle ouvre grand la porte juste au moment où passe une jeune femme aussi désemparée qu’elle. Leurs regards interrogatifs se croisent. Après s’être saluées, elles se dirigent ensemble vers la cabine d’où viennent les cris. Joséphine et Cécile pressent le pas sans dire un mot. La première a bien compris que Marco Morassi est en détresse et les paroles qu’elle distingue de mieux en mieux le lui confirment : « Mon violon ! Mon violon ! Disparu ! Son étui est vide ! » 
Cécile semble déconcertée mais Joséphine devine dans ces yeux bleus une étincelle de curiosité. « Elle doit être fan de romans policiers » remarque la jeune femme, qui, elle, ne l’est pas du tout. Ces dernières années, ce sont plutôt les livres scientifiques et médicaux qui ont été ses compagnons de lecture.
Catastrophée par cette mauvaise nouvelle, elle se souvient que Marco s’est confié longuement à elle hier soir concernant le précieux instrument de musique. Il lui a notamment fait savoir que son violon est une pièce rare, un Stradivarius, dont la valeur est considérable.
Joséphine se sent envahie d’une double inquiétude. Elle devine l’immense perte pour Marco mais une autre émotion se mêle à sa compassion. Qui savait, à part elle, que Monsieur Morassi voyageait avec cet objet rare valant une fortune ? Allait-elle être suspectée pour ce vol ? Elle chasse rapidement cette pensée qu’elle juge absurde mais qui ne le sera sans doute pas pour les enquêteurs. Cécile la voyant blêmir et chanceler, lui prend amicalement le bras.  « Je vous assure, Cécile, que je n’y suis pour rien ! » Et Cécile la croit, tout en se disant que le voleur, ou la voleuse, se trouve pourtant bien parmi les voyageurs.
Soudain le train freine et finit par s’arrêter en plein campagne. « Les enquêteurs auraient-ils déjà été prévenus ? ».
Joséphine a besoin d’un café là tout de suite pour retrouver un esprit clair. Arrivée au salon où les tables du petit déjeuner sont dressées, elle aperçoit Marc de Verneuil, qui l’invite à s’assoir à sa table, visiblement informé de la disparition du Stradivarius. Les conversations dans la salle sont animées. « Quelle catastrophe ce vol ! », « Mais enfin ce n’est pas sérieux de voyager avec un tel trésor dans ses bagages ! », « Monsieur Morassi a passé beaucoup de temps hier soir en compagnie de la jeune femme rousse… ».
Les craintes de Joséphine s’amplifient, elle avale son café, salue poliment Marc de Verneuil et se lève. Besoin de changer d’atmosphère.
« Cécile, je vais rejoindre Cécile, le seul moyen de me disculper rapidement, c’est de trouver le coupable. Cécile a surement déjà une idée pour mener l’enquête sans attendre qu’un fameux Hercule ou l’un de ses collègues débarque. »
Joséphine découvre la supercherie
Décidée à résoudre le plus rapidement possible cette énigme, Joséphine s’apprête à rejoindre Cécile. « Elle doit s’y connaitre en enquêtes policières, elle me sera d’une grande aide »
En chemin elle se ravise et frappe discrètement à la porte de la cabine de Marco Morassi. Elle se doit de lui exprimer son soutien dans ce moment difficile et souhaite sonder son humeur et ses soupçons. « Marco, croyez bien que je suis vraiment désolée pour le vol de votre Stradivarius ». « Avez-vous des informations concernant l’auteur de ce forfait ? » Marco l’accueille avec un large sourire qui la rassure totalement. « Il n’est pas en colère contre moi, tant mieux. Donc il ne pense pas que je sois la voleuse ou une quelconque complice ». «Ce grand sourire est tout de même bien étonnant, il y a une heure il était effondré ! » se dit-elle intriguée. Marco l’invite, un doigt sur la bouche, à entrer dans sa cabine. Il lui révèle alors que hier soir il a oublié de ranger son précieux violon dans son étui. Il avait eu l’intention de le lui présenter puis s’était ravisé vu l’heure tardive. Et ce matin le violon avait disparu ! Joséphine est de plus en plus dubitative. Ces propos n’expliquent pas le visage jovial de Marco maintenant. Cécile arrive sur ces entrefaites et glisse quelques mots à l’oreille de son amie, dont les yeux s’arrondissent d’étonnement. Elle a pu avoir des informations par l’intermédiaire de son père Jean Martin. La disparition du violon n’est qu’un stratagème pour détourner et concentrer l’attention des voyageurs et des policiers chargés de l’enquête. Joséphine, totalement disculpée, commence à comprendre l’attitude détendue de Marco. « Si ce « vol » n’est qu’un subterfuge, M. Morassi est-il de connivence avec les enquêteurs ?» « Cela expliquerait qu’il n’y ait pas eu d’effraction et que certains voyageurs aient entendu du bruit cette nuit et vu une silhouette noire sortir de sa cabine! » Cécile lui fait signe de se taire et l’attire dans le couloir. Joséphine semble avoir compris et commence à trop réfléchir. « Je lui en ai peut-être trop dit ! » se reproche Cécile.
Perdue dans ces pensées qui se bousculent dans sa tête, Joséphine arrive au salon où les discussions et les interrogatoires vont bon train. Il lui semple avoir aperçu en longeant les cabines un personnage fort connu, Hercule Poirot. Pourtant ce n’est-ce pas lui qui mène l’enquête sur le vol du Stradivarius. Que fait-il dans ce train ? La jeune femme réalise qu’elle se retrouve au milieu d’une enquête policière, domaine qui lui était étranger jusqu’à présent. « Ce voyage devient intéressant ! » Elle se laisse prendre au jeu et fait le point sur la situation. Le violon de Marco n’était pas dans son étui cette nuit, pour faciliter sans doute sa substitution par le ou la complice ? Sa disparition est en réalité une ruse élaborée de toute pièce pour masquer une autre enquête menée, elle, par M. Poirot. Qui a manigancé un tel plan et pour quelles raisons ? Joséphine reste perplexe. Cécile semble en savoir davantage grâce à son père M. Martin. « Pourtant Jean Martin s’est présenté comme commercial dans le domaine du matériel médical… »
Voyant le visage de son amie de nouveau s’assombrir, Cécile lui murmure : « Pas d’inquiétude Joséphine, le précieux violon est en lieu sûr, M. Morassi a parfaitement joué son rôle de victime, c’est un honnête homme.  Pour le reste, que tu as deviné il me semble, je ne peux t’en dire plus. »
Y aurait-il un espion dans l’Orient Express ? Ou un nouvel Arsène Lupin ? Et les triplés cacheraient-ils quelque chose parmi leurs élastiques? « Affaire à suivre »

Joséphine a un rendez-vous à Istanbul

La fin du voyage approche. Joséphine commence à ressentir impatience et appréhension. L’ambiance très animée de la veille a fait place à un certain soulagement. Les enquêteurs ont fait correctement leur travail. Marco Morassi a pu récupérer son précieux violon intact. La jeune femme a bien compris qu’il se trame autre chose dans l’Orient Express dont elle ne saura sans doute jamais rien. Cécile lui a fait comprendre que cela relevait d’une affaire d’espionnage international.
Joséphine a décidé de ne pas s’immiscer dans cette énigme-là. Elle est maintenant toute aux préparatifs de son arrivée à Istanbul, ville terminus du train. Installée au salon pour partager avec les autres voyageurs la dernière coupe de champagne, elle songe à ce rendez-vous fixé dans le centre-ville cet après-midi, tout en fouillant dans son petit sac à main. Elle sent sous ses doigts le papier plié en deux. Discrètement elle relit les quelques mots griffonnés à la hâte avant son départ de Paris : « RDV le 23 mai à 14H avec Armelle ». Seuls Maxime et maintenant Cécile sont au courant. Armelle est la fille d’une amie de Madame Castala. Après ses études d’avocate, imposées par ses parents, la jeune femme a choisi de changer de voie et de suivre son compagnon à Istanbul. Elle y a ouvert une chapellerie de luxe qui a aujourd’hui une belle notoriété. Le rêve de Joséphine ! La rencontre avec Marco Morassi lui a fait comprendre combien il est important de vivre pleinement sa passion et de réaliser ses rêves. Et celui de Joséphine est d’être modiste. Comme sa grand-mère maternelle, qu’elle a peu connue mais dont elle a beaucoup entendu parler et qui réalisait des chapeaux de toutes sortes, des bobs, des chapeaux cloche, des capelines, des bérets, qui avaient un succès fou. Maxime connait le gout de Joséphine qui sort le plus souvent coiffée de jolis chapeaux qu’elle assortit à ses toilettes. Il l’a souvent incitée à écouter sa petite voix intérieure plutôt que les injonctions de ses parents. « Dans la famille Castala on est médecin ou rien ». Armelle, elle, a franchi le pas. « Elle pourra me conseiller, me donner peut-être des contacts à Paris et, surtout, la force qui me manque encore. »
Dans le salon les conversations sont joyeuses, on échange des adresses, oui on se reverra, on se le promet du moins. Joséphine écoute et répond plus par politesse que par amitié. Cécile sent l’émotion de son amie qui s’est confiée à elle. Elle sait combien ce rendez-vous avec Armelle signifie pour Joséphine le premier pas vers une nouvelle vie. « Les chapeaux et les coiffures, ça va un peu ensemble ! » avaient-elles remarqué en riant.
Les bagages sont bouclés, l’Orient-Express ralentit, Istanbul n’est plus très loin. Le cœur de Joséphine bat plus vite.
 
Epilogue
« De Paris à Istanbul »
Paris, 20 mai 1980. Joséphine fête ses trente ans. Sa chapellerie, ouverte il y a juste quelques mois dans un quartier chic de la capitale, a déjà une belle renommée. Elle l’a baptisée « De Paris à Istanbul » en souvenir de ce voyage dans l’Orient Express qui a marqué un tournant dans sa vie. Elle a décoré l’intérieur de la boutique dans le même style que l’emblématique train. Elle confectionne elle-même les magnifiques chapeaux personnalisés que recherche sa clientèle aisée.
Il y a un an elle a épousé Maxime. Il l’a soutenue tout le temps de sa reconversion. Cécile qui a été son témoin de mariage, lui a réalisé pour l’occasion une superbe coiffure, un joli chignon piqué de roses vert émeraude et fuchsia. Elle est parvenue à faire tenir dessus un petit bibi agrémenté de voilette confectionné par Joséphine.
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Rédigé par Mireille

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Publié le 5 Décembre 2024

 

Le Personnage littéraire : Jean-Baptiste Noël

Cinquantaine, citoyen exemplaire vacant mais artiste à plein temps
Origine cosmopolite d'Europe, de physique plutôt sympa, subtilement élégant quoique sobre et discret
Comme il est très doué, il a gagné une grosse somme au jeu...et...et donc a choisi le Simplon-Express pour écluser royalement ce pognon de plaisir !
Il choisit le luxueux Simplon Orient-Express qui signe aujourd'hui même la fin d'un rêve ou d'un mythe en vendant ses voitures aux compagnies Monégasques, au Maroc, en Suisse ou à Londres......
 
Ce Baptiste là, très sensible et réceptif reçoit cinq sur cinq les atomes infinis de ce monde fini, luxe qu'il tient à goûter en amateur gourmet...
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Orient Express
Deux marches atteintes ; avec une série de secousses le convoi s'ébranle, deux hommes à la fenêtre regardent le quai interminable filer dans les lumières diluées. L'Orient-Express venait d'entamer son long voyage de trois jours à travers l'Europe...

Jean-Baptiste s'engouffre dans le couloir, trouve sa chambre et s'installe dans son espace élégant minimal fonctionnel ; il proclame pour lui tout seul :

Le luxe ça me botte !!!

Il n'y a plus qu'à se fondre dans la nuit douce-amère afin de voir-venir ; là-dessus ayant sommeil il s'endort.

Alors il reçoit la visite de Arlberg son alter-ego un faune merveilleux habillé d'argent ; celui-ci le titille du bout de sa flûte et Baptiste en frissonne... Vautré de toute son envergure sur le velours rouge du divan Arlberg irradie une lumière léthargique, il observe longuement son dormeur et d' un charme confondu tous deux voguent paresseusement jusqu'aux confins des temps lointains de Carthage ensevelie.

Dans ce regard unique de noyé se dessine paresseusement en mirage, la vibration d'un convoi, un convoi d'éléphants, ces géants impitoyables qui, en passant, écrasent systématiquement des barbares, des bataillons de mercenaires, leurs boucliers en cuir d'hippopotame, leurs chevaux et leurs gens, qui en passant anéantissent insondables et inaccessibles aux fragrances du jasmin mêlées aux émanations des corps décomposés sous l’œil fixe du soleil ; accompagnés en cela par les hurlements déchirants de femmes éventrées d'enfants ensanglantés sous les rapaces criards. Le temps suspendu file à l'allure doucement rythmée du train.... insensé... si chargé... de soupirs et d'histoires... Telle une braise Arlberg en extase s'illumine et...

Cependant, embêté par quelques mouches échappées du contingent, Baptiste grimace un bâillement digne d'un faune et son œil larmoyant goutte, il en frissonne tout du long ; Arlberg a disparu du réseau le laissant entièrement nu mais enrichi d' une moustache souriante et d' un petit bouc tressé d'argent sur le menton. Sur la table de chevet ceci : une salière en cristal ciselé bouchonné d'or l'informe de son passage odorant

Orient Express - la suite
.Je peux interrompre la course de la terre.... J'ai fait partir les voitures bleues ...je peux,... je... suis... Jim... Morrison...
 
...Baptiste fait une toilette puis se contemple dans le miroir: sa bonne coupe de cheveux se passe de brosse mais il manque quelque chose non?...
Le peignoir aux armoiries de la compagnie sur le dos il inspecte la penderie, les tiroirs où son linge est rangé ; toutefois c'est Arlberg qui s'est occupé du bagage et le coquin eh ben il n'en fait toujours qu'à son bouc...
Mais c'est pas banal, c'est pas mal du tout, sympa!!!............C'est comme ça-aa que je t'aimêêêuuu
La chemise soie beige, col Carl, manchettes fermées sur deux gouttes d'or, lavallière parme et petit gilet à carreaux couleur chocolat rehaussé d'un frisson de dentelles, des pantalons clairs ajustés, à pattes d'éléphant soulignent la minceur des hanches et l'ensemble se tient sur des richelieus brillants, un trench-coat beige léger, large col, revers et doublure de teinte puce,... un soupçon de vétiver sur son trait de moustache souligne un personnage convenable,… Baptiste peut sortir prendre l'air
 
A vous l'aventure, Sigmund, je vous suis
 
Vienne sans doute? Dehors les vaches tachent le vert et dans le bleu du ciel tout se délite en une exquise confusion futuriste selon la marche rapide ou ralentie du convoi ; dans le couloir l'esprit enchanté de Baptiste bondit en louvoyant pour se concrétiser sur la moquette du salon-wagon beige soutaché de motifs grenat dont les lignes harmonieuses accrochent l’œil du sol jusqu'au plafond luminescent, enveloppent les cuivres, l'acajou du mobilier, le cristal des lustres, les rideaux somptueux en bourrette de soie, les moquettes épaisses et les personnages en grande tenue... tout ça dans un ralenti de pointilliste qu' effleure une trace d' Eyleen Gray. Un moment il contemple la scène d'un chic de photographe, puis s'installe dans l'un des fauteuils-club épars çà et là entre guéridons, dressoirs et autres confidents ou bergères...Des gens élégants en représentation, suivent un rituel très codifié en se laissant observer, détailler, noter, décortiquer, évaluer, soupeser, jauger au poids d'or pendu là où il peut l'être ...Des mains légères virevoltent des rires en cascade s'égrainent dans l'air ambiant qu' un jazz en sourdine conduit absorbé dans la vapeur odorante du brûle-parfum ; des regards se perdent ou s'animent se confondent inconnus encore ils se découvrent à l'aune d'une boisson offerte dans un cristal plus que parfait...Baptiste, mangeur d'âmes a perçu dans son champ visuel l'aura d'une silhouette; ahhh... Ce profil en proue, cette mèche solaire au bout de laquelle la main gantée exalte nonchalante le dessin d' une arabesque , la dame tel un étendard Mondrian d'où émergeraient deux fuseaux gainés s'identifie à l'instant sur deux escarpins ensanglantés, cette dame est posée là dans l'ottomane tel un grand navire qui semble caboter ou chavirer au rythme sourd de la musique... voilà Baptiste se disant :
 
Bon dieu serait-ce Madame André Putman? peut-être a-t'elle collaboré aux décors des lieux? Elle doit avoir la cinquantaine superbe j'en constate l'autorité et suis confondu...Je veux l'aller voir, la saluer...Elle est seule... car sa jeune camériste est partie sans doute lui chercher un foulard... ah mais voilà la fille qui revient, la dame se tourne un peu :
- Jeanne! vous en mettez du temps!
 
Et... non... ce n'est pas Andrée Putman...Quel dommage! autant pour moi, j'en souris un rien frustré néanmoins!
De droite à gauche Baptiste soupire et finit par se lever; il repère le steward, lui commande un grand tomate-céleri bien tassé susceptible de ramener ses esprits vagabonds; passent les Triplettes de Belleville??? mais non Baptiste ce sont les Pieds Nickelés s'incarnant là devant et qui te jettent en odeur d'enfance... tu éclusais alors chez ton oncle la pile de BD en attendant l'heure ...Epatant non ?
Wagon-restaurant
L'invitation à dîner mène Jean-Baptiste au wagon-restaurant. Entre temps le voilà coincé dans le couloir par l'afflux de voyageurs qui tous convergent dans cette direction ; il se trouve pressé contre une jeune personne au regard pétillant, un peu gêné Baptiste bredouille son excuse en deux mots :
-J -Baptiste Noël, pardonnez cette maladresse, à qui ai-je l'honneur ?
- Mademoiselle Marie-Judith Dupin.
- Eh bien, peut-être à bientôt mademoiselle...
 
Baptiste caresse son bouc l’œil rivé sur le futur qui défile derrière la vitre vert de bleu lignés de noir de rouge et sa pensée se déroule... Davos- concert techno- '' the Belleville Three '' une possibilité !! soupèse-t-il ; A R LGRRR... j'ai oublié mes verres dans la chambre c'est tant pis on est un peu flouté mais après tout...C'est drôle !!! ...Un couple s'installe à sa table.
Puis le trio '' QQQ '' fait une entrée fracassante dans cet espace feutré où tout n'est que beauté, luxe calme et volupté.
Baptiste les perçoit plutôt qu'il ne les voit ; il n'a pas ses lunettes et ce n'est pas Arlberg qui les ramènera ! Voilà le célèbre Trio je suppose dans l'incognito absolu que confère leur apparence, se déplaçant comme un seul homme ; tout de rouge vêtu, il sillonne l'espace en solitaire élastique tel un chewing-gum géant ou un accordéon serré sur sa banquette qui menace de s'éployer ; quelques touches d'or se baladent au niveau des oreilles dans une corpulence de matière rose et grasse terminée par les doigts annelés d' or et d'argent et du rouge, du rouge qui bouge qui bouge en cadence dans une synchronisation consommée sur le blanc immaculé de la nappe faisant fi du somptueux décor qui disparaît dans les ombres du bien pensant ! Gargantuesque. Il voyage en solitaire nul ne l'oblige à se taire. L'important c'est la transparence semble suggérer '' Le Trio QQQ ''
Baptiste, gentilhomme sans afféterie aucune, se confond en mondanités sucrées auprès de ses partenaires de table sans perdre de vue l'aura magnétique de son trio musical. Il faut que je leur demande discrètement s'ils présentent ainsi le '' n°57 des pieds nickelés en voyage '' en toute discrétion n'est-ce pas ?!!
A table une conversation très polie s'engage entre nous trois, attablés devant une assiette de sauce verte agrémentée d'une queue de langouste...
Là-bas la masse rouge cliquette fourche et couteau en rythme endiablé dans le souffle précis des succions et bruits modulés en gorge ponctués de rots synchro gauche droite tempo régulier d'une mastication mesurée, rompue par une lampée puissante d'une note de champagne avec déglutissements à la clé, reniflements de satisfaction appuyés par la tonitruante trompette nasale qui clôt l' intermède sonore de musique concrète d' une rêvalité déconcertante.
J'avais idée d'aller entendre le concert techno Belleville mais le trio QQQ comble mes attentes, mes neurones vidangés par la finesse acoustique de la performance.
Baptiste, soulagé de ces débordements sensoriels offre à ses partenaires de bouche un sourire goguenard tout en s'interrogeant : Feraient-ils partie des gens du K J B I ? il faut avouer que les QQQ en costume écarlate ont du chien et de la transparence, ils me tiennent en alerte ma foi, ce sont pour le moins des vrais représentants des '' Arts du Bruit '' développés par l'élan futuriste d'une époque révolue, mais je crois bien être le seul à apprécier le break et la qualité sonore de la prestation.
 
- Mais oui chère Médèèème, je descends à Vienne rejoindre un ami très cher en Tchéquie du sud nous avons programmé la visite de ruines et châteaux du XIe siècle jusqu' à Budapest ; en sourdine des mots ou des notes s'échappent de mes lèvres car je n'entends plus mes voisins de table, le rouge ayant envahi mon espace en une fournaise bruissante, me voilà parti en vrille...pour l'heure.
Le vol du Stradivarius
Pour Baptiste le concert de Full Métal Jo pour 10 couverts en argent vient de s'achever en triomphe...
Un fumet camphré de cardamome s'insinue voluptueusement dans l'air ambiant et remet éléments et atomes à leur vraie place.
Le café turc servi avec ses loukoums ajoute une note à la satisfaction générale des convives !
Baptiste se lève et salue ses compagnons pour retrouver sa cabine où une sieste réparatrice viendra réconcilier son oreille avec ses cristaux personnels. Il est réveillé par un remue-ménage intense où se mêlent vociférations et aboiements de toutes sortes, un peu groggy il consulte Arlberg qui lui susurre :
- On a volé le violon Stradivarius du chef d'orchestre Marco Morassi ; pour ma part chéri je me contente des salières pour le sel de la vie alors...
 
En toute conscience, se dit Baptiste-Jean, m'ennuyant de la vie c'est ce que je ferais : je volerais ce putain de violon antique et prétentieux et le glisserais dans les bras vigoureux du QQQ pour qu'ils en raniment l'âme.
...Non-non.. il y a aussi la possibilité intelligente des performeurs de rapetisser le violon jusque dans l'étui à lunettes de cette façon ni vu ni connu je t'embrouille...
...Non-non... le chef d'orchestre mène tout le monde à la baguette, il se marre et soulève un tollé du jamais vu car il n'y a pas de stradivarius dans le train et c'est une arnaque aux assurances rondement menée sur un public un peu trop rassasié de loukoums...AH...AH
Cependant cachons nos jolies salières en argent-cristal qui commencent à s'accumuler par la faute de ce bouc un peu ouf car,
 
Une fouille nous pend au nez.
Hercule Poirot et les mots bleus
Chemise beige rehaussée d'un gilet vert de vessie, un foulard de soie noire caresse la pointe parfaite de son petit bouc. Il ouvre sa porte aux autorités locales.
  • Monsieur Baptiste-Jean Noël, dit le chef d'équipage.
  • Jean-Noël le Baptiste c'est cela-même.
  • Voilà l'éminent détective Monsieur Hercule Poirot qui vient nous aider dans la résolution de l'affaire du Stradivarius. Excusez notre intrusion mais elle est générale, vous comprendrez !
  • Monsieuuuur... dit l'éminence, j'apprends que vous jouez... Aux cartes ??? hummm...qui quand comment où et pourquoi...Quelles sortes de jeux ?
  • Non non, vous êtes mal renseigné, je suis un joueur de mots !
  • Comment ce-fait-ce?
  • Cela se peut pourtant !
  • Quelles sortes de mots ?
  • Des mots passants et mots de passes démodés du solitaire monte à l'envers du mot à l'endroit ; à compte de mots, celui du jour : je lui dirais des mots bleus, des mots qu'on dit avec les yeux, tous les mots bleus... tous les mots bleus..........
Ceci dit, on fouille des yeux coins et recoins, mine de rien, puis le petit bonhomme à moustache de cire absorbée, dans l'impassibilité d'une énigme en cours, pontifie :
  • Et tous ces mots, mon bon, où les entassez-vous ?
Sur la table, tout seul, l'étui à lunettes rayonne et regarde Baptiste.
  • Là-dedans, ils sont là-dedans.
  • Ou-Vrez, dit Son Excellence.
Baptiste obtempère et l'étui, bouche bée, lui délivre son velours rouge fuchsia en un éclat révélateur.
  • Les mots, où sont les Mots- les- MOTS ??? hurle Hercule au bord de l'apoplexie.
  • Ils se seraient échappés dans un murmure...
  • Cette rencontre est singulière, merci mon cher !
...Une rencontre... une rencontre ...Ici tous les mots bleus entrent en gare et les autorités courent après le violon !
Jean-Baptiste descend à Prague
Un dernier verre au wagon-salon avant de descendre à Prague où je rejoins Justine et Balthazar. Nous avons l'intention de pousser jusqu'au sud du pays pour tenter de visiter un ou deux châteaux parmi la trentaine de monuments médiévaux...
 
Je repense à ces trois jours d'enchanteresse agitation pour ma part... et bien sûr, il faut résumer les derniers moments accordés au vol d'un violon qui a mis le convoi en effervescence ! L'affaire a été résolue, le violon retrouvé dans la soute à charbon, un jugement a été prononcé sur un passager coupable et son acolyte le conducteur de train... Enfin tout ça recouvre une affaire beaucoup plus grosse mais ça m'ennuie de fouiller là-dedans.
 
Tout de même, je reste perplexe sur cette affaire, se dit Jean-Baptiste ; il reste 696 Stradivarius de par le monde; qui possède ce genre de bijou ?
  • Un professionnel mondialement reconnu ?
  • Un amoureux fou ?
  • Un antiquaire ou un entiché de vieilleries célèbres ?
Quoi, le propriétaire d'un tel objet-bijou doit bien cacher une empreinte secrète que seule l'IRM ou le DOPPLER seraient aptes à mettre au jour.... bref je n'y connais rien de rien, dit Baptiste.
 
Vrai ou faux, authentique ou factice, cette qualité d'instrument doit coûter une blinde.
 
... Bien des émotions en somme : le sel de la vie.
 
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Rédigé par Marie-Thérèse

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Publié le 5 Décembre 2024

 
Marco Morassi, né le 1er Novembre 1937 à Venise, Italie.
Fils d’ Anna-Maria Del Ponte descendante d’une famille aristocratique vénitienne, cantatrice à la Fenice et d’ Alessandro Morassi, violoniste né à Crémone dans un milieu aisé d’artisans luthiers.
Dès sa plus tendre enfance Marco joue du violon. A la fin de ses études supérieures il entre à l’Académie de musique de Giuseppe Verdi. Il rejoint très rapidement l’orchestre philharmonique, puis part à Paris au conservatoire supérieur de musique où il devient un Chef d’Orchestre de renom.
Divorcé, Marco est l’incarnation de l’élégance et du charisme italien. Sa silhouette élancée, sa posture droite témoignent de sa discipline et de son raffinement. Ses cheveux gris argentés coiffés en arrière souligne un visage serein aux traits réguliers qui inspire la maîtrise, mais laisse entrevoir une touche de malice. Ses yeux d’un bleu profond reflètent la passion d’un homme qui voue sa vie à la musique. Dès qu’il esquisse un sourire une fossette se creuse subtilement au coin de son regard. Elle ajoute un charme discret, une note de douceur et de sensibilité.
__________
 
Le départ
Après une série de secousses, le convoi s’ébranle. Accoudés aux fenêtres, comme lui, deux hommes et une femme regardent les lumières de la ville s’éloigner lentement. Sans bruit, il regagne son luxueux compartiment en serrant contre lui l’étui de son précieux stradivarius.
Assis dans un fauteuil moelleux en velours bordeaux, aux accoudoirs ciselés, il ressent une sensation de confort qui l’apaise. Sur la table de marbre, un vase en cristal de roses blanches rajoute une note d’élégance à ce joyau des années trente magnifiquement restauré. Il savoure un des délicieux chocolats de la bonbonnière en porcelaine peinte à la main tout en observant les moindres détails.
Le miroir biseauté au-dessus du lavabo en cuivre, les gravures de scènes mythologiques, les oreillers en soie pour une nuit reposante. Il inspire le parfum du cuir et du bois précieux. Des rideaux brodés de motifs dorés encadrent les fenêtres qui semblent s’ouvrir sur une nuit infinie.
Le son de quelques notes de piano lui provoque un frisson d’exaltation. Ce voyage lui a été offert par une mystérieuse admiratrice qui doit se manifester durant ce séjour.
Marco sait qu’il sera entouré de personnes porteuses de leurs propres secrets et histoires. Que va-t-il découvrir ? Deux coups frappés à la porte le ramènent à la réalité. Un carton rehaussé d’un sceau de cire rouge l’invite à rejoindre le wagon-restaurant à vingt heures.
Rencontres au wagon restaurant
Avant de quitter l’ambiance ouatée de sa cabine, Marco ajuste le col de sa chemise pour nouer sa cravate en soie. Son costume trois pièces, taillé sur mesure, dans un tissu en alpaga bleu-nuit, met en valeur sa mince silhouette. Il lisse ses cheveux argentés de sa main imprégnée de cet envoûtant parfum de chez Caron, conférant à son allure la touche finale d’un homme de grande classe.
Il ouvre la porte de sa cabine et croise une jeune femme qui semble sortie d’un rêve audacieux. Son habit de soubrette au décolleté échancré dépasse ce statut conventionnel. La coupe de sa robe noire très fluide épouse ses courbes sans ostentation. Son tablier de dentelle d’une blancheur immaculée contraste avec l’intensité de son regard. De sa coiffe assortie des cheveux bruns ondulés tombent en boucle naturelles. Elle offre à Marco un sourire aussi rapide qu’intriguant. Elle baisse aussitôt les yeux avec un respect feint mais savamment dosé. Troublée par cette rencontre, une lueur amusée brille dans ses yeux. Conscient du jeu de séduction il se dirige vers le wagon restaurant. Dans le couloir l’air est chargé d’un subtil mélange de bois ciré et d’effluves élégantes qui émanent de ces dames parées de leurs plus beaux atours. Il capte aussi une vague promesse de délices ; des arômes de beurre fondu, des sauces riches en épices qui réveillent ses papilles.
Quand le maître d’hôtel l’accueille Marco est enveloppé par une douce chaleur contrastant avec le froid vif de la nuit. Il est saisi par la splendeur des lieux. Des appliques en laiton diffusent une lumière tamisée, presque dorée qui scintille sur les couverts en argent et les verres en cristal de baccarat. Les tables sont recouvertes de nappes en lin ivoire sur lesquelles sont posées, dans un ballet d’élégance, des assiettes en fine porcelaine aux filetés grenats.
La mélodie jouée par le pianiste vient troubler son esprit, elle lui évoque une rencontre de jeunesse. Il est ramené à l’instant présent par une voie chaleureuse :
- Monsieur Morassi, vos convives sont déjà installés, ils vous attendent.
Marco espérait une table pour deux où il pourrait rencontrer la mystérieuse admiratrice qui lui a offert son voyage mais de grands yeux verts atténuent sa déception.
Il s ‘installe et fait connaissance. Chacun lui offre une expérience sensorielle distincte :
- Joséphine Castalda, une jolie rousse vêtue d’une robe de satin rose fuchsia. Elle est coiffée d’un chignon à boucles dans lequel est tressé un ruban émeraude. Elle vient de terminer ses études de médecine. Sa voix est posée, ses mains fines ornées de bagues discrètes . Elle porte un parfum aux notes de jasmin et d’ambre qui s’intensifient lorsqu’elle incline la tête.
 
- Eugénie Charpentier, brune au teint mat, à l’aspect hautain qui paraît être une explosion de sensations. Sa robe rouge en velours brillant créent des reflets dansants qui attirent le regard insistant d’un homme assis à la table avoisinante.
 
- Marc de Verneuil, homme d’affaires à l’allure réservée. Son costume gris perle à fines rayures est accompagné d’une montre à Gousset qu’il tapote distraitement entre deux échanges. Ce geste laisse entrevoir une certaine timidité.
 
Les serveurs défilent pour déposer des mets raffinés et succulents, arrosés de grands crus.
Au fil de la conversation, l’esprit de Marco vagabonde errant entre la soubrette et l’admiratrice invisible qui lui a laissé un mot écrit à la plume :
« Nous nous rencontrerons à bord. » 
Un arôme sucré, légèrement alcoolisé lui chatouille les narines. Le soufflé présenté dans une coupelle de cristal dégage un parfum de Grand Marnier, de zestes d’orange et de vanille.
La belle et flamboyante Joséphine, face à lui, déguste ce dessert avec une sensualité naturelle. Marco ne peut s’empêcher d’observer ses lèvres teintées d’un rouge discret. Leurs regards finissent par se croiser.
Marco creuse sa fossette, lui offre un sourire admiratif et d’une voix basse mais assurée, lui déclare :
« Madame, il serait dommage de limiter cette rencontre à une table… Me feriez-vous l’honneur de continuer cette échange au salon ? »
La Stradivarius a disparu
Marco se lève avec élégance, effleurant légèrement le dossier de sa chaise avant d’aider Joséphine à se lever. Sa main reste suspendue prête à guider la sienne. Il sent alors la chaleur de sa paume qui lui provoque un frisson. Ils traversent le wagon sous les regards curieux et envieux. Marco se laisse enivrer par le parfum de Joséphine. A chaque pas il a l’impression de créer une partition secrète qu’il composera pour elle, ce soir, avec son violon.
Le salon est un écrin feutré. Les fauteuils capitonnés de velours vert invitent à la confidence. Il repère un coin intime loin de ces trois individus, affublés de kilts écossais qui dénotent dans ce coin enchanteur. Une horloge ancienne égrène doucement le temps sous les notes du pianiste. Ce murmure mélodieux ajoute une touche de raffinement.
Ils s’assoient l’un face à l’autre, Joséphine ajustant avec grâce les plis de sa robe. Marco fait signe au serveur :
- Champagne s’il vous plaît, le meilleur pour fêter cette rencontre.
Après ces délicieux échanges, grisée par les bulles euphorisantes, Joséphine éprouve une lassitude. Elle demande à Marco de la raccompagner, ce qu’il fait en parfait gentleman.
Alors qu’il regagne sa cabine, un détail attire son attention. Une enveloppe cachetée de cire est déposée sur la table. Intrigué il l’ouvre avec précaution. Une seule phrase, toujours la même écriture, il lit :
- La musique est un dialogue. Patience ! Vous trouverez la clé.
Marco sourit frustré mais fasciné. Son admiratrice aime jouer avec le suspens. En repliant la lettre, il remarque quelque chose d’étrange, un vide oppressant. Là où il avait rangé son stradivarius dans son étui, il ne reste plus qu’un espace froid, déconcertant. Le souffle coupé, il cherche frénétiquement cet objet précieux. Il ouvre les placards, fouille les moindres espaces, mais rien. Une profonde angoisse l’envahit. Son violon, un chef d’œuvre vieux de plusieurs générations, objet indispensable de sa vie, a disparu.
Effondré, il s’assoit. Une feuille de papier froissée attire son attention. Il devient livide, il s’agit bien d’une de ses partitions ; une sonate pour violon de Jean- Sébastien Bach.
Au bas de la page une annotation manuscrite le laisse sans voix.
- Chaque instrument à une histoire. Fouillez dans votre passé et il vous mènera à moi.
Marco fixe les mots avec rage. Le vol n’est pas un simple larcin, c’est un jeu savamment orchestré.
Enquête dans l'Orient Express
Malgré l’heure tardive, encore sous le choc, Marco décide d’alerter le responsable du wagon. Ce dernier très perturbé par un vol dans ce train prestigieux lui conseille de prendre un peu de repos. Il l’assure de son soutien, lui promet que personne ne quittera le train avant le dénouement de l’enquête.
Aux premières lueurs du jour, Marco les traits fatigués, le visage blême est tiré de ses réflexions par des coups secs et répétés à sa porte. Une femme, en tailleur strict, à l’aspect revêche, les cheveux noués en chignon bas se présente en franchissant le seuil :
- Clara Carletti, Chef adjoint de la sécurité ! M. Morassi on m’a rapporté votre problème. Quand avez-vous constaté le vol ? Pourquoi ne pas avoir placé votre stradivarius dans un des coffres prévus pour les objets de valeur ? Soyez explicite dans vos réponses s’il vous plaît.
Marco surpris par le ton glacial lui explique la situation en gardant tout son calme. Son esprit semble pourtant distrait ! Il ne peut s’empêcher de remarquer que le regard de Clara lui est étrangement familier.
Elle l’écoute tout en prenant des notes, l’interrompant souvent pour obtenir plus de détails et finit par lui dire :
- Ne vous inquiétez pas, notre équipe fera tout pour mener à bien cette affaire, elle rajoute :  M. Morassi parfois une ombre du passé peut réserver des surprises…
Marco, décontenancé, fronce les sourcils. Il n’a pas le temps de réagir que Clara esquisse un sourire énigmatique et poursuit :
- M. Morassi qui était au courant de la présence de ce stradivarius dans votre cabine ?
Pris de cours, il répond :
- Tout le monde je suppose, je suis un violoniste et un Chef d’orchestre reconnu !
Pour quelles raisons me posez-vous toutes ses questions, c’est moi la victime, réplique t-il d’un ton agacé !
- Les victimes sont parfois la clé de leurs propres mystères … à bientôt M. Morassi, dit-elle en tournant les talons.
L’affaire s’est répandue dans tout le train, elle alimente toutes les conversations. L’angoisse est palpable parmi les voyageurs contrariés et inquiets. Les compartiments sont fouillés très minutieusement.
Dans le même temps, Josépine Castalda qui a passé sa soirée avec Marco est longuement interrogée. Mme Carletti Clara ne la ménage pas, elle a l’air de s’acharner sur elle cherchant la faille. Les dires de Marco clarifient la situation, l’alibi est solide, elle est écartée de tout soupçon.
Soulagée, Joséphine s’empresse de retrouver Marco qui paraît étonnamment détendu. Elle le remercie de l’avoir mise hors de cause et lui propose de l’aider à éclaircir cette affaire. La présence de Joséphine à ses côtés lui redonne le sourire.
Une jeune femme discrète observe le couple avec un intérêt croissant. Passionnée de faits mystérieux, Cécile Martin décide de leur apporter son aide. Ce trio inattendu commence par examiner la cabine de Marco. Des traces de talons féminins sont visibles sur la moquette, un pendentif en forme de clé en argent est retrouvé coincé sous le pied de la table en marbre ! A qui appartient-il ?
De son côté, Clara Carletti s’enorgueillit d’ un complot divinement mené. Elle se sent fière de cette intrigue qu’elle va, avec tact, commencer à dévoiler. Elle fait courir la rumeur que, durant ses interrogatoires, une présence intrigante parmi les employés va lui permettre de dénouer l’enquête.
La jeune soubrette au service de Mme Roger Martin du Gard va créer la surprise en faisant une étonnante révélation.
Le dénouement
Le mystère s’épaissit. Ce vol qui ne devait être qu’un jeu pour Clara vire au cauchemar. Elle est prête à jouer son rôle d’adjointe à la sécurité jusqu’à la fin, pourtant elle se sent blessée. Les interrogatoires auxquels elle assiste salissent l’homme qu’elle chérit encore. Plusieurs passagers, certainement jaloux de sa notoriété, murmurent des histoires peu flatteuses sur Marco Morassi. Une femme laisse supposer une arnaque à l’assurance, une comtesse que le stradivarius n’existe pas. D’autres évoquent d’importantes dettes de jeu, on parle même de rançons suspectes.
Clara a simplement voulu créer une rencontre mémorable, remplie d’émotion entre Marco et sa fille dont il ne soupçonne pas l’existence.
L’irruption de Jeanne, bouleversée interrompt ses pensées.
- Maman ! Tu ne peux laisser les rumeurs détruire ce moment ! Il a certes des défauts mais il reste mon père. Organise une réunion au salon, je t’en supplie, mets un terme à cette histoire, implore Jeanne en pleurant.
Hésitante, Clara finit par accepter.
Pendant ce temps Joséphine et Cécile fouillent, interrogent en suivant les indices et messages laissés à Marco. Elles découvrent une vérité inattendue : le vol ne serait qu’une mise en scène !
- Une supercherie, s’interroge Cécile à voix haute. Pour quelle raison Marco inventerait-il une telle histoire ?
Leur enquête mène les deux jeunes femmes vers Clara et Jeanne. La subtilité de leurs déductions incite mère et fille à jouer franc jeu avec elles. Les détectives en herbe, amusées par ce scénario romanesque, acceptent de les aider.
A l’heure convenue, tous les voyageurs sont réunis dans le salon. Jeanne est au centre de la pièce. Lorsque Marco franchit le seuil, Joséphine lâche son bras. Un silence impressionnant s’installe.
Jeanne s’avance vers lui, le stradivarius posé sur son épaule. Elle entame une symphonie de Bach coupant court à toutes rumeurs. L’émotion est à son comble.
Marco, partagé entre honte et admiration, comprend alors que cette jolie jeune femme n’est autre que sa fille. Il reconnaît en elle cette grâce divine qu’évoque la musique.
A la fin du morceau, sous les applaudissements, Jeanne remet à son père, ému aux larmes, son stradivarius. D’une voix ferme et déterminée, Clara prend la parole. La vérité éclate enfin avec tous les détails. Ce voyage restera marqué dans les mémoires.
Marco ajoute quelques mots précisant qu’il est juste un homme avec ses faiblesses, mais que la seule chose qu’il n’ait jamais trahie c’est la musique.
Le champagne coule à flots pour fêter cet heureux dénouement. Face à face, père et fille offrent un récital improvisé devant un public charmé.
A la fin de la soirée Joséphine se retrouve seule avec Marco. Il lui tend une enveloppe :
- C’est une invitation à mon concert à Vienne, lui dit-il. Mais pas seulement, j’organise une réception au château après le concert. Je serais flatté de votre présence, rajoute-t-il, en lui baisant la main.
Joséphine, touchée par ce geste élégant, hésite un instant avant de prendre l’enveloppe :
- Vous êtes plein de surprises M. Morassi ! Je vais réfléchir, murmure-t-elle en fixant Marco de ses yeux verts brillants de malice.
Quand à Cécile, elle a déjà rejoint son compartiment. Dans sa tête les idées se bousculent, elle a un sujet de rêve.
Qui sait ! Sera-t-elle la prochaine lauréate d’un prix littéraire ?
 
Josiane
 
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Rédigé par Josiane

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Publié le 5 Décembre 2024

Personnage :
Monsieur Jean Martin arrive à l'heure sur le quai de la gare.
Physiquement, il fait bien la cinquantaine. Cheveux gris. Yeux marrons très perçants. Grand et musclé. Mais il semble vouloir se fondre dans la foule. Il rase les murs comme s'il voulait être transparent. Sa tenue costume gris et cravate est impeccable.
Son voyage sur l'Orient Express est programmé depuis quelques années mais il ne veut pas en révéler la motivation profonde.
Son métier : il se dit qu'officiellement il sera commercial dans le domaine du matériel médical. Cela lui permettra de se rapprocher de certaines personnes qu'il a en vue.

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Dans le train
Jean hisse ses bagages et parvient à sa cabine.
Après avoir soigneusement inspecté sa chambre, sous les tapis, sous les tableaux, il range ses habits dans la magnifique armoire sculptée et s'assied derrière le bureau. Il sort ses notes et relit les descriptions de l'homme et de la femme avec lesquels il doit faire connaissance. Il regarde attentivement les photos des personnages à différents âges puis range tout dans le coffre de la cabine qu'il ferme soigneusement.
Sa fille, Cécile, a bien joué le jeu. Elle ne l'a pas regardé une seule fois en s'installant quelques cabines plus loin. Il lui envoie un court message auquel elle répond aussitôt. Moyen de communication bien pratique qui lui permet également de la géolocaliser en permanence.
Il sort repérer les lieux. Dans sa tête, reviennent sans arrêt des prénoms, des images, le feu… Un léger vertige… Il se reprit et se dirigea vers le wagon bar.
Quelques individus y étaient déjà installés. Il commanda un whisky sec et se vautra dans un fauteuil confortable face au salon. Il scanna de ses yeux acérés les personnes l'une après l'autre.
Un whisky au salon
Jean sirote son whisky dans le salon, bien calé dans son fauteuil confortable. La pièce est sombre mais luxueuse. Quelques lampes éclairées sur le mur contribuent à cet aspect intime. Une odeur de chocolat, de café flotte dans l'air. Les tapisseries accentuent la sensation douillette, le cocooning. Les serveurs, très classe, déambulent afin de satisfaire tous les desiderata des clients.
Jean a bien vu les regards appuyés de sa fille, Cécile, en direction des deux inconnus accoudés à la fenêtre au départ du train. Justement, ils viennent d'entrer et se sont installés pas loin de lui.
Le plus grand, cheveux très courts et blancs, parle avec un léger accent. Son compagnon semble mal à l'aise et ne lui répond que par monosyllabes.
Il revoit dans sa tête les descriptions et les photos qu'on lui a données. Oui, le grand correspond bien. Peut-être en plus vieux. Sa peau se hérisse. Il doit rentrer en contact avec eux. Mais comment s'y prendre ?
Au moment, où leurs regards se croisent, il a le réflexe de lever bien haut son verre de whisky en les saluant comme s'il trinquait avec eux. "Ah, ce beau voyage qui nous emmène vers de belles contrées, n'est-ce pas ?" leur dit-il. Les hommes lèvent également leurs verres et la discussion peut alors commencer. Ils sont bien dans le domaine médical. Cela lui permet de parler de son métier de commercial dans leur domaine.
Au fur et à mesure, les verres de whisky défilent et les langues se délient. Les deux hommes parlent de plus en plus haut avec un fort accent germanique. Bingo, pense Jean. On les a trouvés du premier coup.

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Rédigé par GHislaine

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Publié le 5 Décembre 2024

Monsieur de Verneuil
Le quai de la gare était en effervescence. Les porteurs, en blouse bleue, et les voyageurs, luxueusement vêtus, allaient et venaient chacun à la recherche de quelque chose. L’environnement de l’Orient-Express ressemblait à une kermesse où tout ce beau monde dansait sur une musique que personne n’entendait. Ce magnifique train, lui, semblait être un grand navire qui attendait, dans le calme, le départ pour s’élancer sur une mer de rails. Trois jours de voyage, ponctués de nombreux arrêts permettraient à ces privilégiés de découvrir les trésors des villes traversées.
Louis de Verneuil, élégant dans son costume veste croisée à la dernière mode de la fin des années trente, suivait tranquillement le porteur qui s’occupait de ses malles, indifférent à toute cette agitation, comme s’il était chez lui. Grand, petite quarantaine, sa gestuelle dégageait une impression de puissance naturelle qu’on ne pouvait pas ignorer. Pas de cravate, col ouvert, foulard de soie griffé. Des bottines de cuir fauve habillées de guêtres à boutons semblaient avoir été faites sur mesure. Certains regards s’attardaient sur son passage, moustache soignée et cigarette à bout doré aux lèvres, c’est vrai qu’il était intéressant à regarder. Titre de noblesse ancien mais ruiné par la république, il s’était reforgé une fortune honnête en faisant carrière dans l’industrie lourde. Ses usines fournissaient l’état Français dans le cadre de son réarmement... sujet du jour, s’il en était. L’année 1938 s’agitait de toute part et après les essais militaires de l’Allemagne pendant la guerre d’Espagne il était temps de prendre les choses au sérieux.
Ses occupations avaient attirées sur lui l’œil de certains services «  Hautement autorisés » et il avait accepté une mission. Celle-ci devait l’emmener à rencontrer des chefs d’industrie qui, comme lui, avaient des bureaux d’études qui travaillaient sept jours sur sept à améliorer leur production.
Son voyage était tout sauf un voyage d’agrément, pourtant il devait faire en sorte qu’il en soit ainsi !
Arrivé à sa cabine, il donna un bon pourboire au porteur qui le remercia en retirant sa casquette. Le chef de wagon se précipita pour lui ouvrir la porte et ranger ses bagages à l’intérieur. Tout était parfait. Pourtant habitué aux palaces et à un certain luxe, Louis reconnut que la réputation de ce train n’était pas usurpée. Mobilier en acajou et essences rares, fenêtres ornées de vitraux aux reflets dorés, tapis de laine et rideaux en satin... La moindre critique de mauvais goût n’aurait pas trouvé à faire son nid.
Avec une série de secousses, le convoi s’ébranla. La nuit était tombée et par la fenêtre, Louis regarda les lumières de Paris glisser lentement devant ses yeux. Sa pensée vint lui rappeler qu’un premier contact aurait lieu ce soir au dîner. Il sera appelé à partager sa table avec un autre convive. Ayant du temps devant lui, il en profita pour faire connaissance avec le cabinet de toilette. Il était à la hauteur du salon. Produits de soin de grandes marques, serviettes de coton blanc dédicacées du nom de la compagnie, miroir avec lumière incorporée qui ne laissait aucun espoir de survie à un point noir égaré sur le visage ou à un poil de barbe rétif. Sur l’habitat, rien à dire. L’interrogation portera, ce soir, sur la partie gastronomique.
Il s’était légèrement assoupi, bercé par le roulement du train, quant on frappa à sa porte :
- Monsieur de Verneuil, le dîner sera servi dans quelques instants.
- Merci, est-ce que mon convive est déjà présent ?
- Oui monsieur ! La dame vous attend. J’ai pris sur moi de faire servir du champagne pour la faire patienter.
- La dame ??? Vous avez bien fait. Veuillez lui présenter mes excuses pour mon retard, je vous prie. Informez-la que je ne saurais tarder.
Louis, ne s’attendait pas à un contact de ce genre. Il remit de l’ordre dans sa tenue et se dirigea vers la voiture restaurant. Le chef de rang l’accompagna à sa table. Assise sur une chaise habillée de moleskine bleue, une coupe de champagne à la main, elle le regarda venir et lui tendit sa main libre. Louis ne put échapper au baise main de rigueur.
- Monsieur de Verneuil je vous remercie de m’accepter à votre table, mes amis m’appellent Charlotte, mes ennemis me donnent du comtesse de Charleroy.
- Charlotte, je vous remercie d’orner de votre beauté, ma modeste table.
- Si nous trinquions Louis ?
Malgré son calme apparent, les questions fusaient dans son cerveau. Qui est-elle ? Fait-elle partie du protocole ? N’est-elle pas un peu trop belle ? Attention mon vieux tu n’es pas encore rompu à certaines manigances... Ce milieu n’est pas le tien, ces gens-là ne travaillent pas avec leurs mains. Sauras-tu faire la part des choses ? L’avenir en décidera. 
La rencontre
Louis lui avait offert ce voyage. Marc considérait plutôt cela comme une obligation de pèlerinage que son vieux père, malade, ne pouvait plus réaliser. Il lui avait fait la leçon.
- Tu verras, c’est un train magique, j’y ai rencontré ta mère. En quelques jours, de complices nous devînmes amants. Nous nous mariâmes en 41 et tu arrivas en 42. Tu vois, nous n’avons pas perdu de temps. Aîné de la fratrie, tu me représentes et tu diriges nos affaires avec bonheur. Je ne tarderai pas à rejoindre ta mère, qui a juré de m’attendre. Si ! Si ! Ne dis pas le contraire, les tempêtes que j’ai du affronter dans ma vie m’ont appris à appréhender la réalité des choses. Je te demande, simplement, d’aider tes frères et sœurs à accomplir leur chemin respectif.
Marc eut un sentiment ému en repensant à ces paroles. Mais bon ! se dit-il chassons la nostalgie et essayons de survivre à ce amas de luxe disparate, de cristallerie, argenterie, tapisserie et autres qui vous donnent l’impression d’être un nabab. Il ne manque plus qu’un sérail pour que l’illusion soit parfaite.
Reconnu par ses pairs dur en affaire, Marc n’en était pas moins amoureux de la nature et du calme. Habitué aux palaces qu’il fréquentait dans le cadre de ses affaires, il appréciait les instants de fuite qu’il s’accordait, hélas, trop rarement. On le disait timide avec les femmes alors qu’il n’en était rien. Sa position sociale le prédisposait, tout simplement, à la prudence.
- Monsieur de Verneuil, le dîner va être servi. Si vous voulez bien me suivre, je vais vous indiquer la table qui sera vôtre pour la durée du voyage. Comme vous le savez l’usage veut que personne ne soit seul à table. J’ai pris l’initiative de choisir un convive qui, j’en suis sûr, vous sera agréable. J’ai fait servir du champagne pour patienter et vous permettre de faire connaissance.
- J’espère que cette malheureuse victime a le sens de l’humour.
- Je le crois Monsieur, je le crois vraiment.
- Vous m’intriguez monsieur le Chef de rang.
- Nous sommes arrivés Monsieur.
Une jeune femme, rousse éclatante, aux yeux verts pétillants, une coupe de cristal où les bulles de champagne dansaient la sarabande à la main, lui adressa un sourire éclatant. L’instant de surprise passé, Marc vint à elle et se présenta.
- Bonsoir Madame, Marc de Verneuil... Pour vous servir.
- Mademoiselle Joséphine Castala. Médecin. Bonsoir Monsieur et merci de m’accepter à votre table.
- Mademoiselle, quel homme serait assez fou pour refuser la compagnie de la beauté et la fraîcheur du printemps à sa table.
La robe de couleur vert amande qu’elle portait avec élégance et son petit chapeau de toile fine fleuri de fleurs des champs étaient de bon ton avec les habitudes de ce train de légende.
Marc prit place. Il la regarda. Elle porta la coupe de champagne à ses lèvres sans le quitter du regard.
La bataille était engagée.
Le Stradivarius
L’ambiance de la voiture restaurant était au beau fixe. Un calme de bon aloi accompagnait la satisfaction des convives dégustant les œuvres du Chef Français défilant dans leurs assiettes. Le service feutré des serveurs était à l’image des lieux. Ils semblaient nager sur une mer de cristal et d’argent, attentifs au moindre désir de ces privilégiés qu’ils allaient servir pendant plusieurs jours. Quelques petits rires étouffés, çà et là, humanisaient, quelque peu, le comportement guindé de cette assemblée.
A leur table, Marc et Joséphine s’appliquaient à faire connaissance en buvant du champagne.
- Savez vous, Marc, que ma mère est Française comme vous et que je suis Espagnole par mon père ?
- Étonnant ! Et si je vous disais que ma mère est Espagnole et que je suis Français par mon père, qu’en penseriez vous ?
- Je dirais que vous vous moquez et qu’il est temps d’aller se reposer. Je vous souhaite une bonne nuit.
- Vous avez raison...Disons à demain, au petit déjeuner ?
- Peut-être bien que oui... Peut-être bien que non.
- C’est votre côté Normand qui se manifeste ?
- Veuillez vous taire vilain garçon et raccompagnez moi à ma cabine.
 
Attablé, avec devant lui un café délicieusement aromatisé, Marc se posait des questions quant au comportement matinal de son voisin de table. Celui-ci, après un bref salut, regardait sans cesse autour de lui et semblait attendre quelque chose. Ses traits tirés dénonçaient une nuit blanche. Un membre du personnel s’approcha et murmura à son oreille. Il se leva précipitamment et le suivi.
Bizarre, pensa t-il. Une mauvaise nouvelle sans doute ou…
- Déjà levé ? Ne me dites pas que vous êtes en train de travailler. Je crois plutôt que vous êtes perdu dans des pensées inavouables. Dites moi tout ! Et il se pourrait que je vous pardonne.
- Bonjour Joséphine. J’espère que vous avez passé une nuit délicieuse. Vous semblez pleine d’énergie, et ma foi, cela vous va très bien.
- Seriez vous un flatteur du Dimanche ?
- Nous sommes Samedi, chère Joséphine. Désolé d’avoir à vous le rappeler… Mais connaissez vous le nom de notre voisin ?
- Oui. Il s’agit d’un grand chef d’orchestre et non moins grand violoniste, mondialement connu. Vieille noblesse Vénitienne. Grande classe et...Bel homme. Divorcé, ce qui ne gâche rien. Il s’appelle Marco Morassi.
- Bravo ! J’ai bien fait de m’adresser à vous. Il semblerait qu’il soit dans votre collimateur. Toujours est-il qu’il avait l’air extrêmement soucieux ce matin… Avez vous remarqué que le personnel est nerveux. Leurs yeux vont et viennent dans tous les sens. Je veux en avoir le cœur net. Vous en profiterez pour commander votre petit déjeuner.
Effectivement la valse chaloupée de la veille s’était transformée en un va et vient chaotique qui ne présageait rien de bon. Marc se décida à appeler un serveur :
- S’il vous plaît…
- Oui monsieur .
- Quel est le motif de cette effervescence ?
- Oh monsieur, un fait inhabituel qui ne saurait, en aucun cas, rompre la quiétude de votre voyage. Soyez rassuré.
- Mais encore... Allons mon voisin a quitté sa table comme si la foudre l’avait frappé.
- C’est que le Maestro Morassi est parti vérifier une mauvaise nouvelle à la voiture administrative...Et
- ET ??
- Il se trouve que c’est là bas que sont consignés les objets précieux que les passagers confient à la compagnie.
- Quel est votre nom ?
- Gaspard Monsieur, pour vous servir.
- Bien Gaspard ! Allez droit au but et finissez vos phrases, que l’on finisse par comprendre ce qui se passe ici.
Pris dans une impasse morale, Gaspard se pencha vers Marc et chuchota à son oreille :
- Le Stradivarius du Maestro a disparu !
- Le stradivarius ?
Marc et Joséphine échangèrent un sourire gourmand. Voilà un événement qui allait enjoliver la monotonie de la promenade.
- Votre avis Joséphine ?
- Comme le vôtre Marc.
- Ne m’a-t-on pas dit qu’un certain légume voyageait avec nous ?
- Si fait mon cher. Un nommé POIROT !
Enquête avec Poirot
Quelle Journée ! Depuis ce matin l’information qui tenait le haut du pavé s’appelait » Stradivarius « . Sa disparition inexpliquée était le sujet principal des discutions de salon. On avait déjà donné un nom à cette affaire : Le mystère du train des milles et une aventures. Les uns et les autres s’épiaient et argumentaient à qui mieux mieux leurs idées les plus folles. Ils avaient, tous, repéré un suspect qui, à leurs yeux, ferait un coupable idéal. Le problème c’est qu’ils avaient chacun le leur et ne voulait pas en démordre.
Marc de Verneuil et Joséphine Castala s’affrontaient dans un débat qui allait, si on peut dire, bon train.
- Regardez celui-ci Marc ! J’ai entendu son nom : Jean-Baptiste Noël. Il paraît sympathique, mais il dit, à qui veut l’entendre, que c’est grâce à un gros gain au jeu qu’il a pu s’offrir ce voyage. Gagner, c’est un fait, mais au jeu on perd souvent et pour se refaire il faut parfois user de moyens quelque peu…
- Oui, bien sûr. Mais en faisant preuve d’une imagination débordante,nous pourrions trouver sans peine, une motivation suffisante à chacun d’entre nous. Tenez, en voilà un autre qui a le don de passer inaperçu. Il parle très peu, uniquement par obligation. Convenez que ce sont là des comportements incompatibles avec les espérances que l’on peut attendre de ce voyage. Gaspard m’a dit qu’il s’appelait Jean Martin. Le nom le plus porté en France. La meilleure façon d’être anonyme, ne trouvez vous pas ?
- Resservez moi du champagne Marc... Mais je crois bien que notre célèbre détective au nom de légume, fait son apparition.
- En effet. Et Gaspard l’accompagne. Ce garçon me fait de la peine. Il tremble de tous ses membres. Ne dirait-on pas que ce train lui appartient ?
En effet, le serveur vint à eux accompagné par un monsieur rondelet, court sur patte et affublé d’une moustache en guidon de vélo. Bien mis de sa personne il portait, encore, des guêtres en cuir beige sur des chaussures bien cirées.
- Monsieur de Verneuil, permettez moi de vous présenter Monsieur Hercule Poirot qui a accepté de mettre ses compétences, en la matière, au service du maestro Marco Morassi.
- Soyez le bienvenu à notre table Monsieur le détective. Je vous présente Mademoiselle Joséphine Castala qui embellit, par sa présence, mon état de célibataire renfrogné.
- Renfrogné. Je suis d’accord, mais ce n’est pas son seul défaut. Il en a tellement que la liste serait trop longue et vous perdriez patience Monsieur Poirot.
- Merci pour votre accueil. J’ai décidé de m’entretenir avec chacun des passagers pour me faire une idée sur la raison de leur présence. Car voyez-vous l’affaire est d’importance et mes petites cellules grises ne demandent qu’à travailler. Un Stradivarius ! Convenez que j’étais obligé de laisser mes vacances de côté pour résoudre cette énigme.
- Comment voyez vous la chose ? demanda Joséphine. Un vol dans le secteur sécurisé du train et le premier jour du voyage voilà qui n’est point commun n’est-ce pas ?
- Joséphine a raison. L’employé de la compagnie a posé, lui-même, l’étui dans le coffre fort destiné aux objets précieux et la porte n’a pas été forcée.
- Ah mes amis, vous pensez beaucoup et vous pensez bien. Il est encore trop tôt pour affirmer quoi que ce soit, mais les circonstances de ce vol me rappellent une affaire qui avait défrayée l’opinion en son temps. Le mystère de la chambre jaune.
- Une chambre jaune. Quelle horreur. Je ne pourrais jamais dormir dans un habitat pareil ! s’exclama Joséphine.
- C’est vrai Mademoiselle, mais comme tous les mystères, il avait été éclairci et je pense que celui qui nous préoccupe aujourd’hui ne tardera pas à l’être. J’ai rencontré un de mes amis, Sir Archibald Fox, ancien officier au service de sa majesté. Il est en train de faire activer ses relations pour me donner un renseignement qui a une importance capitale dans cette affaire.
- Un Anglais ?
- Oui, mais qui vit en France et en Italie, selon ses humeurs. Ce qui fait qu’il a de nombreuses relations dans ces pays. Dès que j’aurais la réponse à ma question je serais en mesure d’en donner une autre quant à l’affaire qui nous concerne.
- Voilà le maestro qui s’approche du bar. Il a l’air moins abattu que ce matin. Se serait-il fait une raison ?
- Monsieur de Verneuil, il a tout simplement reçu la réponse de son assurance. Et apparemment celle-ci semble lui convenir.
Un petit sourire effleura sa moustache et ses yeux se firent rieurs…
- Allons monsieur Poirot, vos petites cellules vous ont certainement fait une confidence…
- Mademoiselle, restons logiques. Pour qu’un objet précieux disparaisse d’un coffre fort, faut-il encore qu’il y ait été mis. Toute la question est là. Bientôt nous aurons la réponse et Poirot pourra continuer ses vacances .
Terminus
Tout le monde avait fait connaissance. Le bon ton étant de mise, l’ambiance dans les salons était celle d’une croisière, où les invitations étaient réservées à une certaine classe...Pour ne pas dire « Classe certaine ». On papotait beaucoup mais le sujet principal des conversations était, sans conteste, l’affaire du violon. Pensez donc ! Un Stradivarius ! On s’en parlait à mots couverts, d’autant plus que chacun avait son idée sur le nom du coupable. Ce fait de voyage allait se transformer en un souvenir qui sera raconté, voire amplifié. Qui le racontera pourra se glorifier de pouvoir dire « J’y étais », le vol n’étant pas encore élucidé, malgré la présence d’un célèbre détective, le mystère demeurait entier.
Assis, près l’un de l’autre, Joséphine et Marc conversaient à voix basse et les regards qu’ils se portaient laissaient supposer que l’ami Maxime n’allait pas tarder à devenir l’Ex de mademoiselle Castala. Se frayant un passage entre les convives, Poirot vint à eux et prit place à leur table.
- Bonjour mes amis. J’ai pris la liberté de commander du champagne, dit-il d’un air guilleret.
- A la santé de qui boirons-nous Monsieur Poirot ? demanda Marc de Verneuil.
- Nous boirons à la santé de l’entrevue que je viens d’avoir avec le Maestro Morassi.
- Auriez-vous résolu l’énigme ? demanda avec gourmandise Joséphine.
- Mon ami, Sir Archibald, que j’avais sollicité, a répondu à mes attentes. Ses relations dans le domaine de la finance ont amené de l’eau à mon moulin, et une réponse à la question fondamentale que nous nous posions tous : Quel est le motif du vol ?
- Et alors ? s’exclama Marc.
- Et alors ! L’affaire est résolue. D’ailleurs c’est bien simple, nous pourrons dire qu’il n’y a jamais eu d’affaire.
Marc s’approcha de Poirot, et, doucement, suggéra :
- Serait-ce une affaire qui ne concerne que des gentlemans ? Une de celle que l’on n’écrit pas ?
- Nous dirons, mon ami, qu’il s’agit d’une aventure qui crée un engouement, propre à susciter l’intérêt d’une promenade entre gens du meilleur monde.
- Je l’avais entendu dire, mais je constate que c’est la vérité ; Poirot, vous êtes un sage... Je lève mon verre à vos petites cellules grises.
Ainsi fut fait.
 
De retour à Paris, chacun et chacune retourna à ses affaires.
Pourtant, quelques semaines après, Marc reçu un coup de fil de Poirot.
- Quelle joie de vous entendre, Monsieur le meilleur détective du monde. Quelles nouvelles m’apportez vous ? En votre compagnie, j’ai beaucoup appris et j’ai failli changer de métier.
- N’en faites rien, vous n’y rencontreriez que mensonges et mauvaise foi saupoudrés d’aléas les plus divers. Je vous appelle pour vous apprendre que notre violoniste a retrouvé le Stradivarius. Il a tenu à m’annoncer, lui-même, cette bonne nouvelle.
- Tiens donc ! Voilà qui termine bien la tragédie de notre aventure. Mais qui l’a retrouvé ?
- Figurez-vous que dans le cadre de son service et par le plus pur hasard, votre serveur favori, Gaspard, l’a retrouvé dans une consigne de notre gare de départ dont la porte était entrouverte.
- Vous m’en direz tant Poirot. Quand je pense que certains esprits chagrin clament à tout va que le monde est mal fait…
- Je ne vous le fais pas dire Verneuil. La raison a parlé et Morassi l’a enfin entendue. Mais, dites-moi, avez-vous des nouvelles de mademoiselle Castala ?
- Si fait Poirot. Elle s’appelle maintenant Joséphine de Verneuil.
- Mes petites cellules grises ne m’avaient pas trompé. Tous mes vœux de bonheur, Marc, à vous et à votre charmante épouse. J’ai rarement rencontré un couple aussi beau que le vôtre. Si vous avez un fils, lui ferez-vous faire le même pèlerinage ?
- Ma foi, ne dit-on pas : Jamais deux sans trois ?
 
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Rédigé par Fernand

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Publié le 5 Décembre 2024

 

Personnage

Eugénie Charpentier-Mezcua-38 ans-Veuve depuis 2 ans-Française par son père, espagnole par sa mère. Son physique est en accord avec ses origines : cheveux noirs et lisses, teint très mat, yeux de braise. Elle est de taille moyenne mais bien faite. Son caractère est affirmé. Elle n’a pas de complexe et sait ce qu’elle veut. Elle marche d’un pas décidé, sans regarder autour d’elle et sourit rarement. Déjà issue d’une famille riche elle a hérité de la fortune de son mari qui était chef d’une entreprise multinationale. Elle n’a donc pas besoin de travailler. Si elle fait ce voyage aujourd’hui c’est pour réaliser le rêve de son mari qui voulait le lui offrir pour leurs dix ans de mariage.

 

LE DEPART

Avec une série de secousses, le convoi s’ébranle. Eugénie peut souffler un peu. La matinée a été chargée et elle est arrivée à la gare à l’heure malgré les embouteillages .Heureusement le bagagiste a déposé ses bagages directement dans le compartiment. Elle peut maintenant profiter de ces instants de calme pour admirer ce qui l’entoure. Même si elle a l’habitude de vivre dans le luxe elle est éblouie par l’intérieur de ce train mythique. Sa suite est splendide : tentures de velours rouge, mobilier en acajou et tapisseries au mur dans la chambre, marbre et robinetterie dorée dans la salle de bains. Et que dire du salon où des fauteuils profonds et des tapis épais sont synonymes de confort et de détente. Eugénie sent que ce voyage qu’elle redoutait un peu du fait de sa solitude promet d’être plus agréable que prévu. Elle espère seulement que les voyageurs qu’elle va rencontrer seront à la hauteur de cette belle aventure.
RENCONTRES

Le train roule depuis quelques heures déjà. La nuit est maintenant tombée. Eugénie qui s’est bien reposée s’apprête pour le repas du soir. Elle a revêtu une longue robe de velours rouge et mis sur ses épaules un châle de dentelle noire parsemée de brillants. Elle s’est maquillée avec soin et ses grands yeux sombres brillent ce soir d’un éclat particulier. Et c’est avec une certaine excitation mêlée d’appréhension qu’elle se dirige à pas lents vers le wagon restaurant.

Le majordome posté à l’entrée s’incline devant elle et s’écarte pour la laisser entrer. Soudain, elle a l’impression de pénétrer dans un autre monde. La pièce baigne dans une atmosphère douce et feutrée : lourdes tentures aux teintes chaudes aux fenêtres, lumière tamisée sur les tables et musique d’ambiance. Les tables de deux ou quatre personnes sont recouvertes de nappes d’un blanc éclatant. Les verres en cristal et les couverts en argent scintillent sous les lumières. Le maître d’hôtel très empressé la conduit à sa table où trois personnes sont déjà installées. Elles se présentent chacune à leur tour : Joséphine Castala, Marco Morassi et Marc de Verneuil.

Eugénie qui n’a pas l’habitude de se lier très facilement étudient ses compagnons de table avec attention. Joséphine avec ses cheveux roux, ses yeux verts et sa tenue colorée lui est plutôt sympathique. Elle a d’ailleurs un avantage à ses yeux en étant moitié française et moitié espagnole comme elle. Marco est certes un très bel homme. Elle le trouve élégant et très raffiné dans son beau costume en alpaga d’un bleu sombre. Il semble très sûr de lui et conscient de son charme. Quand il lui apprend qu’il est un chef d’orchestre renommé elle espère en savoir davantage sur lui Quant à Marc de Verneuil il semble très timide et réservé et peu enclin à converser avec elle.

En attendant le début du service, Eugénie parcourt la salle du regard. Soudain elle croise les yeux clairs de l’homme assis à la table voisine. Ses traits sont réguliers, ses cheveux poivre et sel. Il lui adresse un petit sourire malicieux. Eugénie se sent rougir et troublée détourne vivement le regard. Le repas est agréable, les mets délicieux et le service irréprochable…

Le repas terminé Marco l’invite à boire un verre au bar mais Eugénie décline l’invitation. Elle se sent fatiguée et a hâte de retrouver le calme de son compartiment. Mais avant de quitter la salle elle ne peut s’empêcher de se retourner. L’homme aux yeux clairs lui adresse un petit signe de la main sans se départir de son petit sourire. Eugénie sort précipitamment furieuse de s’être retournée et rejoint rapidement son compartiment.

le vol du stradivarius
 
Arrivée dans son compartiment, Eugénie se remémore ce premier repas. Elle a trouvé ses compagnons de table intéressants et tout particulièrement ce chef d’orchestre renommé. Elle espère qu’il acceptera de jouer un morceau de violon qui est son instrument favori. Quant à l’homme aux yeux clairs l’avenir décidera de la suite à donner mais elle doit admettre avoir eu un coup de cœur pour lui. Elle se sent ce soir tout à coup plus jeune, plus joyeuse et c’est le cœur léger qu’elle va se coucher.
Elle dort depuis une heure environ quand un bruit la réveille en sursaut. Quelle heure est-il ? Sa montre indique minuit trente. C’est sans doute son voisin Marco qui rentre se coucher après sa soirée en bonne compagnie. Elle tend l’oreille mais le silence est revenu. Alors qu’elle est sur le point de se rendormir des grincements, des bruits de portes qu’on ouvre et qu’on ferme la font de nouveau sursauter. On dirait qu’on cherche quelque chose. Il est peu probable que ce soit Marco l’auteur d’un tel remue-ménage. Eugénie commence à avoir peur et envisage d’appeler le contrôleur. Mais au moment où elle s’apprête à le faire, elle entend la porte de son voisin s’ouvrir puis se refermer d’un coup sec. La curiosité l’emportant sur la peur, elle sort dans le couloir et a juste le temps d’apercevoir une silhouette, tout de noir vêtue, qui s’éloigne rapidement. Maintenant tout est à nouveau calme. Eugénie est perplexe mais elle est trop fatiguée pour émettre des hypothèses. Elle décide de remettre cela au lendemain et retourne se coucher. Dans la nuit sombre, l’Orient Express poursuit sa route…
Le lendemain matin Eugénie se rend au wagon restaurant pour le petit déjeuner. Mais en entrant elle est surprise par l’agitation qui y règne. Les voyageurs présents discutent à voix basse. Elle aperçoit le contrôleur en grande conversation avec Marco qui semble très énervé. Elle s’approche de Joséphine pour lui demander la cause d’un tel remue-ménage. Et, c’est avec stupéfaction, qu’elle apprend que pendant la nuit on a volé le stradivarius du chef d’orchestre, instrument d’une valeur inestimable. Aussitôt les évènements de la nuit lui reviennent en mémoire. Aurait-elle été témoin, sans le savoir, du vol du violon ? Et maintenant que doit-elle faire ?...
L’ENQUÊTE
Durant le petit déjeuner les conversations vont bon train. Chaque voyageur émet son opinion. Toutes les hypothèses sont évoquées, même les plus loufoques .Eugénie, elle, reste silencieuse. Elle se sent un peu mal à l’aise en pensant à ce dont elle a été témoin durant la nuit. Mais pour l’instant elle ne veut pas en parler. Alors que tout ce beau monde s’apprête à sortir du wagon-restaurant , le contrôleur intervient et fait une annonce : Tous les passagers sont priés de rejoindre le grand salon à 10h précises où les attendra le chef de la sécurité responsable du voyage. Celui-ci récoltera tous les témoignages qui pourront servir à l’enquête. Mais en attendant l’heure de la réunion les voyageurs sont invités à rejoindre leur compartiment et de ne pas en sortir.
Eugénie est contente de retrouver le calme de sa cabine et de plus avoir à afficher la sérénité qui n’est qu’apparente. En effet elle ne sait toujours pas ce qu’elle doit faire et attend la réunion avec une certaine anxiété.
10heures : tous les voyageurs sont maintenant installés dans le salon et attendent l’arrivée du chef de la sécurité. La porte s’ouvre brusquement et l’homme qui pénètre dans la pièce se présente : « Je suis Herman-Farina Edouard chef de la sécurité de l’Orient-Express. Je suis chargé de l’enquête concernant le vol du stradivarius et je m’engage à le retrouver avant notre arrivée à Istanbul.
Eugénie n’en croit pas ses yeux ! L’homme qui vient d’entrer n’est autre que le bel inconnu aux yeux clairs qui l’avait tant troublée la veille au soir. Mais aujourd’hui le sourire malicieux a disparu et le regard est froid et distant. Pendant qu’elle se remet de ses émotions M. Herman précise que certains passagers seront convoqués individuellement pour des précisions supplémentaires. Eugénie apprend avec effroi qu’elle en fait partie. Serait-elle suspectée et pour quelles raisons ?...
En début d’après-midi Eugénie se retrouve dans le salon mais seule cette fois. Elle est terrifiée à l’idée de se retrouver en face du chef de la sécurité. Quand il entre dans la pièce il la salue froidement et s’installe en face d’elle. Ses yeux bleus la transpercent. L’interrogatoire débute aussitôt.
-Que faisiez-vous hier soir entre 22h et minuit trente ?
-J’étais dans mon compartiment. Je me suis couchée tôt car j’étais fatiguée.
-Pourquoi avoir quitté la soirée alors que vous étiez invitée à la poursuivre au salon par M.Morassi ?
-Je n’en avais pas envie. Est-ce répréhensible ?
-En temps normal non. Mais cette nuit un vol a été commis et vous êtes la seule à avoir rejoint votre compartiment situé d’ailleurs à côté de celui de M.Morassi.
-Oui en effet mais cela fait-il de moi une voleuse ?
-Je n’ai jamais dit cela. J’enquête seulement. Quand vous avez rejoint votre compartiment n’avez-croisé personne ?
-Non personne.
-Et quand vous vous êtes couchée n’avez-vous rien entendu ? Des bruits, des vois ?
-Non j’étais fatiguée et je me suis endormie aussitôt.
-Bon pour l’instant je veux bien vous croire mais si quelque chose vous revient venez m’en parler.
Eugénie ressort de cet entretien épuisée. Elle est devenue l’une des principales suspectes. Pourquoi n’a-t-elle rien dit tant qu’elle le pouvait. Il faut absolument qu’elle identifie ce visiteur nocturne. Mais ce ne sera pas chose aisée…

TERMINUS

L’après-midi est un peu morose pour Eugénie. Elle se sent un peu déprimée. Aussi elle décide de ne pas se rendre au wagon-restaurant et de prendre son repas du soir dans son compartiment. Le repas terminé elle sort dans le couloir fumer une cigarette. La nuit est tombée, le silence règne. Alors qu’elle s’apprête à regagner sa cabine elle entend une porte s’ouvrir au fond du couloir. Une silhouette vêtue de noir en sort et s’éloigne rapidement. Eugénie n’en croit pas ses yeux : cette silhouette elle la reconnaitrait entre mille : c’est celle du visiteur nocturne qui sortait du compartiment de M.Morassi. Il faut absolument qu’elle sache le nom de l’occupant de ce compartiment. Elle se souvient alors que dans le bureau du contrôleur il y a le plan du train et pour chaque compartiment le nom de celui qui l’occupe. Elle décide de s’y rendre sur le champ. La chance lui sourit. Le contrôleur est dans le couloir en grande conversation avec M.Morassi. Elle entre dans son bureau, ferme la porte et consulte le fameux plan. Le compartiment au fond du couloir est occupé par Madame Roger Martin du Gard. Ce nom ne lui dit rien. Elle ressort du bureau sans être inquiétée. Elle est trop fatiguée ce soir pour entamer les recherches. Ce sera pour le lendemain.
Le lendemain matin elle se retrouve à table avec Joséphine. Au cours de la discussion elle lui demande si elle connait Madame Martin du Gard. Joséphine acquiesce et lui désigne la dame installée à la table voisine. Les espoirs d’Eugénie s’envolent car la silhouette de cette dame ne correspond en rien à celle aperçue dans le couloir, Madame Martin du Gard étant petite et rondelette et pas fine du tout. Alors que déçue elle s’apprête à quitter la table, une jolie soubrette entre dans la pièce et vient glisser un mot à l’oreille de Madame Martin du Gard. Et soudain pour Eugénie tout s’éclaire. C’est la jolie soubrette qui sortait de chez M. Morassi et c’est encore elle qu’elle a aperçu dans le couloir. Il faut absolument qu’elle explique tout cela à M. Hermann en espérant qu’il ne lui tiendra pas rigueur de son silence lors de leur premier entretien.
M.Herman accepte de la recevoir. Il l’écoute avec attention, sans l’interrompre. Son récit terminé il la remercie et lui confie que cela confirme ses soupçons. Il l’assure que le nécessaire sera fait dans la journée. Il lui demande seulement de n’en parler à personne.
Le soir au wagon restaurant, Eugénie retrouve Joséphine et Marc Morassi qui semble heureux et détendu. Ils lui apprennent que la coupable du vol a été arrêtée et que le violon a été retrouvé en parfait état. Eugénie est soulagée et accepte une coupe de champagne pour fêter cela. Une seule ombre au tableau : M. Hermann n’est pas là et elle ne pourra pas le remercier sachant qu’ils arriveront à Istanbul le lendemain matin terminus de leur beau voyage.
Il est huit heures. L’Orient Express entre en gare d’Istanbul. A l’intérieur les passagers se font leurs adieux. Alors qu’Eugénie s’apprête à descendre une main se tend vers elle pour l’aider. Eugénie sent son cœur battre plus fort : au bas des marches se tient M. Hermann avec ses yeux clairs et son sourire malicieux. Il lui propose de lui servir de guide durant son séjour à Istanbul ce qu’elle accepte avec joie…
 
EPILOGUE
Le séjour à Istanbul s’est déroulé comme dans un rêve. M.Hermann a été non seulement un guide merveilleux mais est devenu un compagnon indispensable. Eugénie a retrouvé sa joie de vivre et devant elle l’avenir lui semble désormais plein de promesses …
 
Élisabeth
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Rédigé par Elisabeth

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Publié le 5 Décembre 2024

 
On est le 20 mai 1977 dernier jour de circulation de l’Orient express
Voyage de Paris à Istanbul avec étapes
 
Personnages :
Des triplés : Qi Qm Qv
Trois garçons nés sous X
 
Qi : l’intello, celui qui gère mais pas rigolo
Qm : le gentil, amoureux de tout et tous et de toutes, un peu trop naÏf
Qv : l’optimiste, il a toujours soif de la vie mais toujours à la traine et étourdi
 
Physiquement impossible de les reconnaître. Toujours habillés pareil.
Coiffés pareil. Mal rasés pareil.
La trentaine environ, c’est pas certain.
Beaux garçons athlétiques, grands et musclés.
Ils font du sport, les mêmes, tout ce que l’on joue avec une balle.
 
Une vie sentimentale perturbée, ils ont du mal à trouver des triplettes
 
Ils travaillent d’arrache-pied et en quinconce sur un projet juteux
dans l’import-export des élastiques en tous genres
Ils hésitent souvent plutôt qu’ils décident.
Compliqué de mettre tout le monde d’accord.
 
Mais, cette fois ils vont prendre tous les trois le train demain. C’est sûr.
 
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PRÊTS… PARTEZ…
Enfin les deux valises sont bouclées. Volets bien fermés et dernier tour de clé.
Qi a commandé le taxi pour Paris Gare de Lyon. Beaucoup de monde sur ce quai et Qm panique. Il ne retrouve plus son billet. Pourtant il est certain de l’avoir mis dans la pochette de la poche de son pochon. Heureusement Qi a pris une photo. Qv porte le gros sac à dos.
Ce serait lui le porte bagage pour tout le voyage parce que souvent il a quelques accessoires personnels supplémentaires. ..
Le train doit stationner sur le quai numéro cinq. Il est déjà là et tous les voyageurs, du beau monde, élégants et distingué, attend l’ouverture des portes. Qm commence par se planter devant la locomotive, en admiration devant le romantisme de la machine, des pistons fuient, ça vapote partout dans un ballet d’escarbilles. Cette loco, une vrai merveille qui piaffe d’impatience.
Encore sur le quai, de belles dames chapotées et des dandys costume trois pièces se gaussent bruyamment, Qm embrasse toute cette foule du regard, un sentiment
d’exception, du jamais vu, des riches, tellement riches.
Pendant que Qi prépare les billets pour le compostage à l’ouverture du wagon numéro un, Qm sa valise rose à la main, tente de distinguer à travers la vitre fumée un peu de l’intimité de la cabine numéro dix, celle qui leur est normalement réservée.
Le sac de Qv trop lourd à cause des provisions pour tout le voyage, git lamentablement par terre. Qv a pris soif. Il sort une gourde mais trop tard, la porte d’accès du train s’ouvre bruyamment.
Qi entre le premier. On a le temps de s’installer. Dans ce train tout est au ralenti et heureusement parce que Qv a laissé son sac sur le quai. Un premier de ses moments d’égarement. La cabine est de toute beauté, comme avant, comme dans le temps disait mamie. Qm reste bouche bée, immobile dans le couloir tandis que Qi tergiverse avec véhémence, encore sur le quai avec Qv. Pas rancunier Qv. Le voilà qui arrive en sifflotant, tout penché du côté de son gros sac.
Chacun s’installe. Enfin c’est pas gagné. Voilà que Qm veut la place près de la fenêtre
et dans le sens de la marche pour quelques belles photos mais Qv ne supporte pas,
à certains moment d’être à contre-sens dans tout ce qui bouge. On fera comme à l’école, chacun son tour a dit Qi.
Il est l’heure du départ. Le wagon est presque complet. Les voilà partis jusqu’à Istanbul.
Un périple pour de magnifiques paysage, une façon originale de voyager
et en finale une bonne surprise. Enfin, on l’espère. L’Affaire est programmé mais va-t-elle trouver l’issue attendue ?
C'EST PAS CLASSIQUE
Dix-huit heures. Reste encore un petit moment pour le dîner au wagon restaurant.
Trop de bruit ici. A cause de QV et son transistor Optalix à fond, l’heure du hit-parade hebdomadaire. Il parie sur Sheila mais ce sera peut-être Sylvie. Une prise de tête dans quelques minutes… à suivre.
Pendant que QM est plongé dans son Salut les Copains, QI a sorti ses dossiers brûlants.
Il doit rendre un devis rapidement mais avant, être certain de la qualité irréprochable de son produit.
N’ayant pu emporter tout son matériel, avec les moyens du bord et pour juger de la bonne adéquation entre l’utile et l’agréable, en attendant, il coince les échantillons entre les deux histoire de fesses de QM. Ils doivent conserver une bonne résistance à l’usage tout en gardant l’attrait gourmand. Un marché juteux l’attend avec des petite culottes célèbres.
 
Dix-neuf heures. Nos trois amis se préparent. On sort les leggings moulants avec les chemises mal repassées à col Mao. On est communiste ou pas, non ? Les triplés aiment jouer de leur ressemblance mais pour une fois QM a fait sa raie au milieu, QI et QV à droite.
 
Vingt heures. Un brouhaha dans les coursives. QM ouvre la porte du compartiment. Il tombe nez-à-nez sur une fille jeune. Elle arbore un écusson sur sa généreuse poitrine avec écrit en lettres plaquées or : Suite de Madame Robert Martin du Gard. Appelez-moi JEANINE. Enfin pour le coup, là elle la précède, la R.M.D.G pour faire plus vite, et on dirait qu’elle déborde de chaque côté de Jeanne. Madame passera difficilement entre les gouttes, une évidence.
Au tour de QV de prendre rang dans l’étroit couloir tout-à-coup bousculé par un élégant dandy pressé de se rapprocher de R.M.D.G, tout de noir vêtu, des lunettes sombres et un discret attache case porté comme un bébé. S’en suit un imbroglio involontaire, la mallette ne résiste pas et s’ouvre laissant apercevoir des documents et il semblerait, quelques liasses de billets de cinq cent francs, promptement remis en place par l’intéressé, aidé de QV qui n’oublie pas de noter : celui-là non plus il n’est pas communiste… Et, au passage, de se garder un orphelin de père et mère tombé d’un paquet. L’homme se présente, Marc deVerneuil.
 
Vingt-et-une heures. Nos amis sont repus, repas copieux, vins généreux. Ce soir ils sont fatigués et ne trouve pas matière à faire durer le plaisir. L’ambiance générale est à l’indifférence sauf à la table de R.M.D.G. où l’on retrouve une gente féminine très volubile et enjouée. Dans un coin plus reculé du restaurant notre homme à la mallette, Marc de Verneuil, échange quelques propos avec la plantureuse Jeanne. Nos trois amis quittent rapidement la table et tout le XXL de l’endroit.
 
Vingt-deux heures. QV appelle le maître d’hôtel pour un dernier verre tandis que QM cherche son doudou. Avant de dormir QI devrait vérifier le bon comportement des élastiques
QI Docteur diplômé de l’Ecole Supérieure des matières en tous genre a parfois besoin des conseils de son frère QM, lui-même Major de l’Ecole des Arts de la machine à coudre, spécialités Points arrières sur dentelles chics. On ne compte pas sur QV qui n’a pas terminé ses cours du soir d’ingénierie à l’usine des boutonnières.
On verra demain. En attendant, tout le monde remonte le drap sur la nuit.
VA SAVOIR
L’heure est au petit déj. Nos trois amis très en forme, s’installent tout près du bar pour un plein de croissants de lune au beurre accompagnés exceptionnellement d’un lait de chamelle, une spécialité tout droit issue d’un élevage bio des bestiaux du conducteur de train, Mr Brune.
 
Arrive aussi Louis, un bel homme svelte et très élégant, il ne fait pas son âge.
QM l’a déjà rencontré. Il s’installe à leur table et il sort une panoplie de pilules, celles du matin seulement, en nous expliquant qu’il déprime depuis qu’il a donné de la langue à son chat et qu’il en est mort..
 
Pendant que chacun finit le fond de sa tasse, le haut-parleur annonce un arrêt de trente minutes à Zurich pour recharger la locomotive de charbon et d’eau. QM profite de la galerie marchande pour acheter un nième doudou tandis que tout ce beau monde trouve matière à compagnie et blablas, dans ce hall de gare. Une belle journée.
 
Pendant ce temps, dans un coin, derrière le bar, Marc de Verneuil, Mr Noël et Qi terminent leur poker. Qi a gagné sur la triche mais tant mieux, il doit rembourser son crédit pour ce voyage. N’oublions pas que nos 3 Q ont une mission à Istanbul et ne voyagent pas que pour le bling-bling.
 
Tantôt, il faudra être en forme pour le bal sauf qu’un petit soucis vient troubler la quiétude de cette après-midi. Une file d’attente pas possible s’est formée devant les toilettes.
Des urgence. Des borborygmes de ventre partout. Rupture momentanée du stock de papier toilette. Nos trois Q font la queue, ils se sentent indisposés. On a trouvé la cause.
Le lait de chamelle a fermenté. Mr Brune, ce soir passera un mauvais quart d’heure.
 
Mais non, Mr Brune n’est pas venu au bal. Il conduira le train toute la nuit. Ce soir pas de triplette pour nos QQQ mais qu’importe, chacun s’amuse à sa façon. QM, après avoir fait danser toute la gente féminine, finit par tanguer un tango avec Louis. Qi a invité Sarah. Ils s’émoustillent sur une table qui, sous le poids des éventualités, s’écroule sur l’ambiance et ses vers de bois. QV, mal déplié sur un sofa de bienvenue, n’a plus d’yeux que pour les boutonnières de… Jeanne.
C’est à ce moment-là que Marco surgit. Il hurle, il vocifère, il jure. Son stradivarius dans son étui en croco a disparu.
AU VIOLON
Encore une journée bien agréable. Nos 3Q ont de la chance, très bonne nouvelle pour Qi dont le contrat attendu avec impatience a bien été signé suite aux tests des élastiques.
A la demande du Boss et en vue de clôturer définitivement le dossier, QM a profité de l’après-midi qui s’effilochait tranquillement pour inviter dans la salle de bal, les filles volontaires pour s’inscrire au salon de la Pure Dentelle Française à Paris et mannequiner pour les petites culottes.
Ont répondu à l‘appel trois jeunettes Anita, Cécile, Marie Judith, et Sarah un peu plus mûre mais toutes les quatre très enjouées pour ce nouveau rôle, sauf peut-être QM qui aurait bien aimé faire la pose avec Louis. Après un test sur .. mesures et quelques pas de deux, toutes ont été sélectionnées.
De son côté, QV a passé une grande partie de l’après-midi à étudier avec le plus grand sérieux et annoté fébrilement et méticuleusement une carte d’Istanbul, malgré un sérieux reste d’avatars du lait fermenté.
Fatigués, nos QQQ. Quelle histoire cette disparition. Un emprunt ? un vol ? une magouille ? On en saura plus demain. Pour l’heure, le moment est au coucher.
 
Trois heures du matin, QV a du mal à dormir. En plus, il a oublié en salle de bal une fiole de whisky qu’il avait caché pour se donner à fond dans cette histoire naissante avec Louis.
Hélas ce sera non. Il a mal et il a soif et il boit.
Mais, tout-à-coup voilà que le train ralentit, de plus en plus. QV jette un rapide coup d’œil par la fenêtre et voit Marc de Verneuil lancer une mallette un peu volumineuse à un inconnu et le chauffeur de la loco récupérer une valisette. Le train repart ensuite rapidement.
QV en état second, regagne la cabine et s’écroule sur sa couchette.
 
Six heure du matin. Réveil brutal dans tout le wagon. On veut savoir. Un message du Major d’Homme indique que la police s’annonce sur le quai à Belgrade. Personne ne devra s’opposer à la fouille systématique de sa cabine. On se soupçonne, on cherche les regards louches mais aucun strabisme dénombré. Nos 3 Q savent. QV leur a raconté, enfin, le peu dont il se souvienne. Lui QV, une tombe ? un témoin ? un traître ? Qi ne veut pas s’en mêler. QM non plus.
 
Soudain un message de la Direction annonce que les coupables ont été démasqués.
Arrestation de Mr de Verneuil et de son complice, le conducteur de la loco, en possession d’un valisette pleine d’une quantité très importante de carrés de chocolats à la menthe et de mistrals gagnants.
Arrestation de Mlle Jeanne qui aurait dérobé à Madame Martin du Gard, un bracelet en pierre de lave de saturne et une broche coccinelle de 25 brillants. Madame Martin du Gard n’aurait rien remarqué.
LES PRÉNOMS
Par un après-midi très ensoleillé, le train arrive enfin à Istanbul.
Nos trois Q se précipitent hors la gare. Ils ont une adresse précise du lieu de leur naissance.
Les voilà qui découvrent, pour la toute première fois, leurs origines. Ne reste de la casbah qu’un abri pour dromadaires. Ils sont bien une dizaine à ruminer en cœur une indifférence à l’approche de nos trois amis qui pénètrent par la béance de la porte et quelle surprise, quelle immense surprise, la plus importante de toute leur existence, celle de découvrir sur le dernier mur de glaise encore debout trois prénoms : Quillian, Quevin, et Quentin 1952.
Une vieille coutume berbère disait que tous les chameaux nés cette année-là devaient porter un nom commençant par Q. Le mystère restera entier sur le pourquoi de cette bévue de leur mère disparue, mais ils auront atteint le but de leur voyage.
Pendant ce temps, l’affaire du stradivarius a été définitivement résolue. L’inconnu qui a reçu la mallette de Marc de Verneuil, cette nuit-là, n’est plus recherché suite aux aveux de Marco.
Le stradivarius était un faux. Pour sa défense, Marco ne le savait pas. Marc de Verneuil est définitivement acquitté. Finalement l’histoire se termine bien et chacun se retrouve au bar de la gare pour fêter la fin du voyage.
 
Un an après, Marc de Verneuil, embauché par Quentin, n’en finit pas de tirer sur la corde raide de son petit salaire. Fini les élastiques, on est passé au latex pur caoutchouc mais la ressource s’épuise et ça ne paie plus.
Jeanne a regagné sa sous-pente. Elle se souviendra longtemps de ce moment au commissariat où elle a mangé tous les chocolats à la menthe avec le Divisionnaire.
Bien sûr elle a rendu la broche coccinelle de MPMG qu’elle avait juste empruntée  pour le défilé de Quévin, son corsage ayant perdu le bouton du haut.
Depuis, Quillian s’est proposé de lui refaire toutes les boutonnières bien qu’il ait changé d’occupation.
Avec le chauffeur de la locomotive et Louis, désormais plus qu’ami avec Quillian, ils ont ouvert un bar à réglisse, avec bien sûr, des mistrals gagnants. Ils ont acheté une ancienne micheline, diesel pour changer, une vrai boîte à malice pour des défilés tout en dentelles et un peu en latex.
Une belle histoire d’amitié que tout ce petit monde a pu tisser grâce à l’Orient Express.
 
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Rédigé par Dany-L

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Publié le 5 Décembre 2024

L’ORIENT EXPRESS

Consignes

  1. Établir la fiche de votre personnage

  2. Commencez votre voyage avec cet incipit volé, en partie, à Agatha Christie :

    • Avec une série de secousses, le convoi s'ébranla. Les deux hommes se mirent à la fenêtre pour regarder le quai interminable dont les lumières paraissaient glisser lentement devant eux. L'Orient-Express venait d'entamer son long voyage de trois jours à travers l'Europe.... et poursuivez avec votre personnage.

  3. Créer une ambiance : votre personnage rencontre un ou plusieurs personnages. Racontez la rencontre, les circonstances, repas, escale, etc. Et créer une ambiance de l’endroit où s’est produite cette rencontre

  4. On a volé le Stradivarius du Chef d’orchestre ! Racontez comment vous l’avez su, l’atmosphère dans le train après ce vol, vos impressions, suppositions et déductions. Vous pouvez faire participer un personnage de votre choix

  5. La narration policière : Racontez ce que vous avez découvert à propos de la disparition du Stradivarius, éventuellement, faites le point avec ce qui s’est dit dans les autres compartiments en utilisant les éléments de la narration policière : où, quand, comment, pourquoi, qui ? Résolvez l’affaire

  6. Épilogue

  1. Fiche personnage

  • État civil :

      • Sarah De HALBRON

      • Née à Varsovie le 14 mai 1917

      • Fille unique de Jarod et Sofia De HALBRON, riches négociateurs d’art

  • Caractéristiques physiques :

      • Blonde, les yeux couleur noisette éclairent son doux visage. Ses cheveux bouclés, mi- longs sont toujours ramenés en chignon

      • Avec 1m70, 60 Kg et une taille 40, Sarah est élégante Toujours souriante, douce, aimable

    • Traits de caractère :

      • Sérieuse, appliquée, discrète

      • Respectueuse des contraintes familiales

      • Toujours souriante, douce, aimable et respectueuse

      • Très proche de sa famille, son père, sa mère

      • Avec elle on se sent bien, on peut lui faire confiance ce qui a toujours été un atout dans son métier puisqu’elle a toujours travaillé très dur dans l’entreprise familiale pour réussir et s’imposer dans ce créneau particulièrement masculin. Elle s’est même spécialisée dans l’expertise et à même d’estimer la valeur de chaque œuvre d’art, c’est elle qui en fixe le prix d’achat ou de vente. Pour Sarah, ce n’est pas un « travail » mais une passion

    • Objets auxquels elle tient tout particulièrement :

      • Une barrette de nacre blanche surmontée d’une saphir, offert pour ses 20 ans. Elle ne la quittera jamais car elle représente le symbole d’un amour interdit

      • 2 tableaux : « la baie de Douarnenez » d’Eugène BOUDIN, précurseur de l’impressionnisme et « le pont des Concarneau » de Józef PANKIEWICZ, l’un des premiers impressionnistes et symbolistes polonais. Ces œuvres ont une valeur inestimable mais elle avait eu la chance de les acquérir pour une somme beaucoup plus raisonnable lors d’une vente aux enchères où peu d’amateurs s’étaient présentés

    • Préférences vestimentaires :

      • Jupe longue à mi cheville, veste cintrée et bottines lacées à talons bottiers est sa tenue hivernale préférée tandis que, pour l’été, robe fluide et escarpins

      • Toujours assortir ses tenues avec gants, chaussures et sac en cuir de même couleur sans oublier le chapeau

  • Loisirs :

      • La lecture de romans et d’ouvrages qui touchent de près ou de loin à l’art pictural. Sa préférence ? Le mouvement impressionniste, Boudin, Pankiewicz, Monet, Degas, Renoir.

      • Les promenades dans la nature

    • Contexte :

      • En 1937, pour ses 20 ans, le père offre à Sarah un voyage dans l’Orient Express. Pour ses 60 ans, elle renouvelle l’aventure pour la dernière sortie de ce mythique train. Nous sommes le 20/5/1937 et, durant ce voyage, elle se remémore le passé et les souvenirs fusent

 

  1. L’histoire (20 mai 1977) : Le parfum du passé

Avec une série de secousses, le convoi s'ébranle. Deux hommes se mettent à la fenêtre pour regarder le quai interminable dont les lumières paraissent glisser lentement devant eux. L'Orient-Express vient d'entamer ce long voyage de trois jours à travers l'Europe.

Vingt et une heure, un dernier regard sur la berge de fer qui s’éloigne de plus en plus vite et je me dirige vers ma cabine. Je ne suis pas la seule à déambuler dans le couloir de ce convoi de légende. Les voyageurs vont et viennent à la recherche de leur couchette. Tapis pourpre et or, boiserie en ébène, huisserie en cuivre rutilant, tout traduit l’opulence. Quarante ans se sont écoulés depuis mon premier voyage, et je suis là, prête à revivre une belle aventure. J’ai hâte de prendre place. Alors que je déambule, valise à la main, cédant quelque fois le passage à certains plus ou moins pressés, une lithographie m’interpelle. Je m’arrête un instant pour admirer « la baie de Douarnenez ». L’œuvre très connue d’Eugène BOUDIN m’a toujours fait rêver. Les voiliers, la mer qui se trémousse sous un ciel légèrement tourmenté. Soudain sollicitée, je me retourne :

  • Magnifique ! vous aimez ?
  • Comment ne pas apprécier ?

  • Marie-Judith DUPIN, désolée de vous interpeler de manière fort cavalière mais je suis fan de l’impressionnisme et, paradoxalement, de l’abstrait également. Bizarre me direz-vous ?

  • Pas forcément, quelle qu’elle soit une œuvre d’art est source d’émotion. Je sais de quoi je parle, c’est mon métier, enfin, je dirais plutôt une passion. Sarah De HALBRON, enchantée

 

Affublée d’un sac à dos, cette jeune femme, qui ne semble pas coller au luxe qui nous entoure, est fort sympathique. Deux générations nous séparent, pourtant, en quelques secondes, l’art pictural nous a réuni. Une discussion amicale s’en suit sur les peintres et leurs œuvres. Juste avant de nous quitter, elle lance :

  • Heureusement qu’il ne s’agit pas de l’original…

Devant mon air étonné, elle poursuit :

  • Nous venons d’entamer notre fabuleux périple et déjà la police est en alerte ! Il parait que le Stradivarius du Chef d’orchestre a disparu, envolé ! De toute évidence il ne peut pas être bien loin, le train ne s’est pas arrêté, il sera facile de le retrouver.

 

Tandis que nous prenons congé, je ressens comme un malaise. Brusquement ce corridor m’oppresse et les lumières tamisées, qui auparavant traduisaient une atmosphère intime, s’avèrent maintenant angoissantes. Instinctivement je presse contre moi mon sac à mains comme si on devait me l’arracher. Diffusée par haut-parleur centralisé, l’information de Marie-Judith DUPIN est confirmée. Il nous est conseillé de regagner rapidement nos places tout en nous annonçant des fouilles en cours. Pendant le court trajet pour rallier mon antre, tous les visages me semblent suspects. Numéro 47, ça y est, j’y suis…..

J'espérais une chambre similaire à celle d’antan et, une fois la porte ouverte, force est de constater que l’ambiance est empreinte de la même élégance intemporelle. Cloisons en bois précieux, tête de lit incrustée de perles, de nacre et de bronze, drap en soie, salle de bain parée de marbre, ma suite murmure le même raffinement que celle d’autrefois. Pour m’octroyer un brin de repos et oublier l’épisode du larcin, je me love voluptueusement dans ce sofa moelleux accolé à la fenêtre. Je contemple ce qui m’entoure lorsqu’un fumet de poisson, qui exhale ses effluves jusqu’à mon compartiment, me caresse délicatement les narines et m’extirpe de mon extase. Cette ambroisie ressuscite quelques vieux souvenirs que je croyais définitivement blottis au fond de ma mémoire. Les yeux mi-clos, je hume cet arôme suave qui me propulse, involontairement, en ce jour merveilleux où….

Le cœur serré, envahie d’une émotion intense, ma vie défile en accéléré pour finir en arrêt sur image.

Vendredi 14 mai 1937, 11h55. Je me souviens précisément de cet instant dans les moindres détails. Père, très précis quant au respect horaire des repas, tapotait à ma porte, me priant de le rejoindre dans le wagon restaurant. Nous devions fêter mes vingt ans à bord de ce monstre légendaire et j’étais impatiente de découvrir la surprise qui m’attendait. Vêtue d’un tailleur de couleur taupe, bottines à talons bordeaux, sac et gants assortis, je coiffais ma tête de cet élégant chapeau sur lequel trônaient, à l’avant de la calotte, deux petites plumes d’autruche rouges. Dans l’allée centrale luxueusement décorée, je me hâtais, tout émoustillée. Dans ma précipitation, je faillis heurter un couple d’un âge certain. L’espace, faiblement éclairé, était étroit mais intime à la fois. Affublé d’un haut de forme et veste queue de pie, Monsieur cédait galamment le passage à Madame. Sa robe de velours pourpre, cintrée à la taille, lui assurait l’élégance d’une grande dame. Je m’écartais poliment pour libérer l’accès tout en m’abstenant d’effleurer cette panne qui paraissait douce et soyeuse. Entrée dans la salle, je fus éblouie. Prévue pour le confort et le raffinement, la salle me parut spectaculaire. Lumière tamisée, verres en cristal, couverts en argent, tables nappées, cet ensemble glorifiait la richesse. Père, déjà installé, me fit signe de m’approcher, ce que je fis. D’un geste assuré, il héla le Maître d’hôtel. Véritable livre ouvert sur la gastronomie française, il réveilla nos papilles. Nous options pour un filet de Saint-Pierre sur crème de fenouil aux baies de rose sublimé par un sancerre sur lie. Peu de temps après, le Chef de brigade, veste d’un blanc maculé, épaulettes dorées, pantalon noir, surgit du fond du wagon, plateau à la main. Grand, mince, il portait avec prestance la tenue exigée mais, les yeux rivés sur le petit paquet doré, négligemment dissimulé sur un coin de la table, je ne lui portais aucune attention particulière. Mon visage irradiait. Père m’accorda un sourire complice qui semblait dire « patience ». Lorsqu’une voix claire et douce annonça :

« Mademoiselle, Monsieur, Alexis pour vous servir, bon appétit »,

Sa voix me fit tourner la tête, nos regards se croisèrent et la béatitude opéra. Lorsqu’il présenta le plat, il frôla ma main. Un frisson envahit mon échine jusqu’à en trembler de la tête aux pieds. Terrassée par mes sentiments soudains, visiblement partagés, nous voilà figés tel une statue en bronze de Rodin. Je n’osais bouger de crainte que mes mouvements désordonnés n’alertent Père. Yeux dans les yeux, nous étions dans un état second. J’avais l’impression de flotter au-dessus des convives. Soudain le silence. Ambiance musicale, murmure de conversations cessèrent, seul un bourdonnement d’oreilles m’étourdissait. Je me noyais littéralement dans le bleu profond de ses yeux.

 

Dans le silence de ma chambre, perdue dans mes pensées, un martèlement incessant à ma porte me fait sursauter. Confortablement installée, je peine à me lever. Petit, moustachu, affublé d’un costume d’époque, ce personnage atypique semble bien décidé à interrompre mon intimité. L’individu, que je crois reconnaître, se présente avant que je ne prononce un seul mot :

  • Hercule Poirot en service Madame. Je dois fouiller toutes les cabines, je vous prie de m’excuser pour le dérangement

  • Oui je sais, le Stradivarius, mais je doute que vous puissiez le trouver ici

  • Peut-être, mais je me dois de tout contrôler

Aussi consciencieusement que s’il devait enfiler des perles, il inspecte le moindre petit coin. A mon grand étonnement, et bien que la taille, n’aurait pas permis d’y cacher un objet aussi volumineux, ma valise fut son premier choix. Je n’avais rien à me reprocher néanmoins une certaine culpabilité m’oppressait. Incapable de me rendre complice d’un quelconque méfait, je ne m’expliquais pas ce sentiment étrangement angoissant ? La crainte d’être accusée à tort ? Probablement liée à une sombre affaire vécue dans les années 50. A cette époque nous venions d’acquérir, tout à fait légalement, une petite merveille, une toile d’Henry Jacques Delpy, peintre de l’école Barbizon. Une fois la transaction terminée, un individu malfaisant en revendiquait la légitimité prétextant en avoir été spolié par l’occupant en 1940. Bien décidé à récupérer cette œuvre de manière frauduleuse, ce malfrat nous a contraint à nous justifier ce qui n’a pas été une mince affaire.

 

A quatre pattes, rien ne semble échapper à ce fin limier. Il scrute avec minutie tous les espaces réduits. Lit, armoire, table basse, toute niche est visitée. Lorsque, en pleine action de recherche, la voix grave de son colistier l’interpelle, il se relève et prend congé. Cet instrument à cordes d’une valeur inestimable, volé ? Je suis perplexe ! Les questions se bousculent. Comment a-t-on pu faire disparaître un objet de cette taille en si peu de temps ? Sachant qu’il n’est absolument pas négociable, quel pourrait en être l’enjeu ? Une demande de rançon ? Encore faut-il pouvoir le cacher en lieu sûr, pas facile ! Monsieur MORESSI aurait-il opté pour une arnaque à l’assurance suite à de grosses difficultés financières ? Pas très malin mais ça s’est déjà vu. Un gag ? C’est loin d’être drôle ! Bref un vrai mystère….

Pendant que j’extrapole différents scénarios, on frappe à nouveau à ma porte.

  • Sarah ? c’est Marie-Judith DUPIN, vite, ouvrez-moi….

Surprise, je m’exécute. Essoufflée, les joues écarlates, les cheveux en bataille, elle s’engouffre dans l’entrée en faisant claquer la porte sur le mur. Effrayée, la voilà qui me tend nerveusement un paquet assez encombrant et visiblement empaqueté à la hâte. A bout de souffle, elle a du mal à articuler des mots qui me glacent le sang :

  • Il faut le cacher, absolument le cacher

  • Mais de quoi parlez-vous ? Marie-Judith vous me faites peur, de quoi s’agit-il ?

  • Le Stradivarius, bien sûr. Il faut le cacher et vite, je l’ai subtilisé !

Au même instant, dans le couloir, le célèbre détective belge tambourine à ma porte en vociférant :

  • Police, ouvrez comtesse ou je défonce la porte

Le vacarme assourdissant d’un trio d’illuminés en fête me libère d’une situation rocambolesque. Quel cauchemar ! Je m ‘éveille en sueur. La pluie martèle le hublot, les éclairs zèbrent le ciel tandis que le tonnerre mène la danse. J’ai vraisemblablement dû m’endormir blottie dans les bras d’Alexis. Le train file à vive allure et ronronne à une cadence régulière. Vingt-deux heures, il est temps d’aller dîner. Devant le miroir je redresse quelques mèches rebelles, retouche le maquillage de mes lèvres et m’enveloppe d’un foulard Hermès. Offert par Alexis en 1937, il ne me quitte jamais. La faim me tenaille et, tout en me dirigeant vers le wagon restaurant, je ne peux m’empêcher d’ironiser. « Sérieusement, comment aurai-je pu rencontrer le personnage de fiction fétiche d’Agatha CHRISTIE ? Et pourquoi « comtesse » ? Mais oui bien sûr…. Dans le roman, posé sur ma table de chevet, Vera ROSSAKOFF est la comtesse russe dont Hercule POIROT tombe amoureux. Enfin tout s’explique ! » Amusée, souriante, je presse le pas et croise deux jeunes gens d’un retour dînatoire animé. Pour leur laisser le passage, je m’appuie contre une petite alcôve. La porte s’entrebâille sous la pression de mon corps. Instinctivement, j’ouvre et, éberluée, je repère, parmi un tas de cartons, un boite triangulaire noire qui ressemble étrangement à un étui de violon. Scellé sur la coque, un écu en étain sur lequel on peut lire « Marco MORASSI ». Le mystère s’épaissit. J’avance ma main et la retire aussitôt de crainte d’y laisser mes empreintes. Mais alors, que faire ? Impossible de faire marche arrière comme si je n’avais rien vu. Seule dans ce couloir, je cherche une solution lorsqu’une voix brise le silence et me fige sur place :

  • Voulez-vous que je vous aide ?

Telle une coupable, je trésaille. L’angoissante sensation d’être faussement accusée. Je cherche des mots explicites, crédibles pour éviter toute suspicion mais, une fois retournée, c’est le choc. « Alexis ! ». Les cheveux poivre et sel, témoins des années passées, mais la même coiffure, les mêmes yeux bleus, la même douceur dans le regard, la même démarche, la même allure et surtout la même voix. J’ai tellement souhaité cette rencontre que j’en tremble. L’émotion est trop forte, je suis paralysée et complètement perdue. Et allez savoir pourquoi, je réponds :

  • Oui, je veux bien, merci

Alors que je nous imagine mariés, avec enfants et petits-enfants peut-être, bref heureux ensemble, une dame, élégante comme une gravure de mode, l’appelle :

  • Georges, attends-moi

Telle une fumée de cigarette, mon rêve s’évanouit en quelques secondes. Je reste sans voix, déboussolée et déçue mais, quelque part, j’étais soulagée.

Après les présentations d’usage, Sarah, Georges et la belle inconnue empoignent le coffret et ouvrent le couvercle. Bien en évidence sur la doublure de velours pourpre, une note sur laquelle est inscrit « Stéphane PIERRE-BRUNE ». L’air soucieux, Georges, contrôleur dans la Norwich Union assurance, se précipite sur son téléphone. Quelques instants plus tard, l’énigme est quasi résolue. Stéphane PIERRE-BRUNE, était fiché comme malfaiteur notoire. Il restait à dévoiler un complice pour formaliser l’arnaque. L’enquête révéla plus tard qu’il s’agissait de Marco MORASSI. Ruiné par des placements hasardeux, Marco MORASSI visait la fraude à l’assurance.

Durant la poursuite de notre voyage des affinités virent le jour. Chaque arrêt marquait une page d’un livre ouvert sur l’aventure de ce train de luxe. Certains, vantaient les beautés de l’Italie, Rome et son colisée, Pise et sa célèbre tour penchée, Naples et sa côte Amalfitaine. D’autres juraient par tous les diables que rien au monde ne détrônerait la tour Eiffel et la cathédrale Notre Dame. Quant à ceux qui avaient déjà bourlingué bien au-delà des frontières européennes, ils étaient loin de rester muets. Bref, un circuit touristique complet sans les visites. Le terminus fut l’occasion d’une halte prolongée durant laquelle quelques amitiés naquirent. Ma complicité artistique avec Marie-Judith DUPIN se révéla le déclencheur d’une virée majestueuse dans la seule ville au monde qui embrasse les deux continents, l’Europe et l’Asie. Loin de l’impressionnisme, le Palais Topkapi, la basilique Saint-Sophie avec ses mosaïques byzantines furent un ravissement. Férues de découvertes, nous n’imaginions pas quitter Istanbul sans admirer les rives du Bosphore depuis la mer. À l’appontement de Kabakas, Georges et sa compagne, nous ont rejoint. Nous voilà embarqués, tous les quatre, sur le ferry. Je le trouvais pâle, l’air assombri. Je m’efforçais d’éviter son regard, terrifiée à l’idée de m’évader à nouveau dans les méandres de mes désirs inassouvis passés. Tout au long de la traversée de ce détroit, qui relie la mer Noire à la mer de Marmara, Yali et palais ont défilé sous nos yeux émerveillés. Seul Georges semblait, détaché, soucieux. Assise à ses côtés, je fus soudain bouleversée. Je n’en croyais pas mes yeux. Mon pouls s’accélérait et tandis que mon sang se glaçait, des frissons parcouraient mes membres à la vitesse de l’éclair. Au-delà de cette étrange ressemblance, la petite fossette nichée au coin de la commissure de ses lèvres venait de le trahir. Était-ce une hallucination ? Une illusion ? Un désir profond que ce soit réellement lui ? Une coïncidence ? Impossible, la fovéa mentalis est rarissime, ce ne peut être qu’Alexis ! Comment contenir mes émotions alors que les souvenirs me rattrapaient. Pourquoi feindre d’ignorer les sentiments qui jadis nous liaient ? D’un geste brusque je dénouais le foulard attaché autour de mon cou. Le caresser me rassurait. Au même instant je sentais la pression de son étreinte et son doux baiser lorsqu’il me l’avait offert. Dans un état second, impossible de réfléchir. Devant mon expression hagarde de chien battu, Georges vint soudain à mon secours :

  • Tu l’as gardé ? Depuis tout ce temps ?

Pétrifiée je me risquais à répliquer :

  • Témoin d’un amour sincère et profond, il ne m’a jamais quitté

Libéré d’une situation qui pesait, Georges poursuivit :

  • Pour la seconde fois le hasard nous réunit. Je suis bien Alexis, le serveur de 1937. Je n’ai jamais cessé de t’aimer et, pour te retrouver, j’ai arpenté plus d’une fois les rames de l’Orient Express. Dès que je t’ai aperçue, je n’avais qu’une idée, te prendre dans mes bras. Mais après tant d’années, avais-je le droit de m’immiscer dans ta vie ? Je restais à distance pour nous éviter de nouvelles souffrances mais continuer à te côtoyer sans oser me dévoiler devenait un véritable supplice.

  • Non Georges, ta femme….

  • Je ne suis pas marié, c’est ma nièce qui m’accompagne. Depuis toujours, allez savoir pourquoi, elle m’appelle Georges

Le visage de Sarah s’était illuminé. Radieuse, elle murmura :

  • Chut ! Profitons de l’instant présent. Écoutons la blessure de nos cœurs se cicatriser.

Les yeux embués d’émotion, Sarah s’approcha d’Alexis. Il enroula tendrement les bras autour de ses épaules. Une légère brise marine caressait leur visage mais ils restaient là, blottis l’un contre l’autre. Tandis que le moteur du bateau ronronnait doucement, les reflets du soleil couchant se noyaient dans les flots sombres du Bosphore.

 

Main dans la main, il semblerait qu’une nouvelle vie commence pour Sarah et Alexis…

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Rédigé par Christiane

Publié dans #Voyage

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