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Publié le 16 Mai 2019

Je suis là sur la plage………..c’est la dernière phrase du livre que je suis entrain de lire page 11. La suite je ne la saurai jamais, les pages suivantes ont disparu emportées par le temps, lui qui transforme toute chose en poussière.

Une idée folle et si je continuais l’écriture de ce livre, l’auteur me pardonnera mon audace. Alors je me lance.

 

Je suis là sur la plage, oui mais voilà je fais quoi ? Je m’empresse de relire les 11 pages pour me remettre dans la peau du personnage. Voila ça y est, je suis un jeune niçois de 10 ans.

Je suis sur la plage car la tempête d’hier a nettoyé les galets, leur redonnant leur couleur gris vernissé et je profite du ressac pour chercher les trésors perdus de l’été. Allez, je me lance dans l’écriture.

 

Je suis là sur la plage, et au beau milieu d’un tas hétéroclite, comme un objet abandonné, un petit morceau de bois flotté que les vagues ont roulé. Sa couleur bleu attira mon regard, je le pris délicatement entre mes mains, laissant mon imaginaire d’enfant prendre la direction de mes pensées. Je l’écoutais me raconter son histoire, il faisait partie d’une de ces chaises qui font aujourd’hui la gloire de la Promenade. Il se souvenait du temps où, au soleil de l’été, elles recevaient les touristes, face au casino de la Jetée. La chaise avait pris son titre de noblesse, sa couleur bleue était son armoirie, et moyennant finance auprès d’une préposée, on pouvait s’asseoir. La vie était belle, l’été face aux embruns, l’hiver remisée dans un hangar. Ce petit bout de bois n’arrêtait pas de me parler en français et en niçois, de me conter les histoires de chaises, que la vie s’écoulait tranquille au rythme des saisons. Jusqu’à ce jour du mois de mai 1968 où sa chaise fut prise par des mains inconnues et jetée dans les flots de la Méditerranée, geste de colère. Et voilà comment elle fut emportée par les vagues de fond, roulée, brisée sur les rochers de Rauba Capeu pour à nouveau sombrer. Et c’est ainsi que lui, séparé et ballotté par les vagues, est venu s’échouer sur la plage de Castel où aujourd’hui il fit ma connaissance.

Je ne sais si l’auteur du livre avait prévu de faire parler un petit bout de bois, vestige d’une grande dame. Mais il me plaît d’imaginer qu’un enfant de 10 ans puisse inventer un dialogue entre lui et un bout de bois.

 

J’aurais pu aussi écrire : Je suis là sur la plage, je regarde les galets..

 

Ils sont les notes de la Baie des Anges

Écoutez le matin quand la vague les roule

Musique moderne aux accents étranges

Au tempo de la houle

 

Ils viennent du Var ou du Paillon

Peu importe leur origine

Du pays niçois ils ravinent

De St Martin ou de Peillon

 

Ils ont cette couleur bleu gris

D'un camaïeu d'un grand tapis

Qui se tisse avec le temps

Lorsque souffle le vent

 

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Rédigé par Bernard

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Publié le 14 Mai 2019

Les yeux écarquillés, je peine à réaliser la situation. Pourtant Éric n'a jamais été aussi clair ni concis. Donc il a compris. Au moins en partie. Le principal en tout cas. Et il veut partir, s'en aller seul.

 

Ma mère est étendue sur le lit conjugal, une longue robe rouge qui descend de sa poitrine jusqu'à ses pieds. Elle a gardé ses stiletto préférés, les hauts talons qui font rêver les hommes.

Mon oncle se tient près d'elle, raide, les yeux comme des pépites. Le poing fermé jusqu'à blanchir ses doigts.

 

C'est vrai que ces derniers temps, je n'ai pas pris beaucoup de précautions pour justifier mes absences. Gary est si exigeant maintenant. Il me remplace à l'accueil pendant que je suis les clients dans leur chambre.

Au retour, un clin d'œil de connivence, je cache l'argent dans la boîte rouge, et je reprends mon poste. Lui, sifflote, joue avec son chapeau, fait claquer ses bottes, puis sort prendre l'air dans le parking du motel, affichant l'air satisfait du manager consciencieux.

 

Ce n'était pas une robe rouge.

Une couverture de sang qui lui peignait le corps et rehaussait ses charmes.

Mon oncle immobile, les mains crispées.

Tu n'as pas le droit.. tu avais promis..

Je l'entends parler à ma mère. Un ton vif, hargneux.

Mais, Ted, c'est mon mari.. je ne peux pas..

Trop tard. Il est trop tard.

 

Déjà petite.. un peu boulotte, je veux capter le regard des hommes, me mettre nue devant eux.

Voir le regard vaciller devant moi. M'offrir sans retour.

Sur les toilettes des filles, quelqu'un avait marqué :

Leïla est une nymphomane.

Ils ne savent pas.

 

Papa est absent.

Mon oncle est monté dans la chambre rejoindre ma mère. J'entends des éclats de voix, même si je suis dans la cuisine, en bas, les mains dans un pot de confiture d'oranges amères. J'ai les doigts qui collent. Je me fige quand j'entends les cris. La porte du bas qui s'ouvre. Papa...?

 

J'ai la tête vide, les yeux presque clos.

Je dois rejoindre Gary. Lui seul pourra me dire. Je crois qu'il veut partir, quitter le motel, prendre l'argent..et le large. Mon cœur dévale une pente quand je pense à lui, ma peau frémit et mes mains tremblent.

Éric, je le connais depuis toujours, on courait ensemble en sortant de l'école, il me prenait la main et souriait sans rien dire. Il était là.. c'était tout.

Un jour il m'a offert une bague, m'a dit qu'il voulait rester toujours près de moi.

 

Gary est arrivé un soir au motel. C'est un ami qui lui avait parlé de mes services aux clients. Il m'a plu, avec son accent du Texas, son allure de cow-boy, ses bottes beiges rutilantes. Je l'ai rejoint, dès que j'ai pu laisser l'accueil vide.

La première fois, il m'a frappée. Pour voir.

 

Après la mort de maman, mon père s'est mis à boire un peu, le soir, devant la fenêtre fermée. Il a continué son job de commercial jusqu'à cette nuit où il s'est endormi au volant. Maintenant il a une jambe raide, et reste à la maison sans rien faire.

 

Moi j'ai bien envie de partir avec Gary.

Ce boulot comme il dit, on s'en fout.

J'ai gagné assez d'argent pour qu'on prenne des vacances au soleil, ailleurs que dans ce trou perdu de Suspicious River. Ailleurs.

 

Ce jour-là, ils ont sorti ma mère sur une civière, étalée comme un plat offert aux voisins. Ils ont pu voir, interpréter, inventer des histoires. Les rumeurs ont commencé..

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Rédigé par Nadine

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Publié le 14 Mai 2019

Ça ne compte pas pour poils, ce duvet sur mes jambes ?

Claudine s’examine. Nue dans son cuveau d’eau tiède, un bon vieux cuveau qui vient de Montigny, elle traque les éventuelles imperfections de son corps. L’inventaire fait, rassurée sur sa beauté, elle se laisse aller contre le bois râpeux.

Elle s’est mariée ce matin.

Son cœur s’emballe. Elle l’aime si fort… Ne regrette plus du tout d’avoir perdu ses escapades aux premières lueurs de l’aube dans la campagne alentour de son village. La nuit pâlissait à peine, elle chaussait ses gros godillots, partait sur les chemins baignés de rosée, goûtait la fraîcheur pure, le parfum de l’aurore avec la délectation d’une bête heureuse. Après, c’était l’école, Luce qui l’attendait… Et puis, fin des études, départ pour Paris…

Paris, ses voitures à chevaux, leurs roues pneumatiques si confortables sur les rues pavées. Paris, les soirées à l’opéra avec son amoureux. Son amoureux, son mari, dans la chambre, à côté…

Panique… Ce soir elle sera à lui pour la première fois. Désir, peur, impatience, envie de retarder l’instant, envie de fuir la nuit de noces, exaltation affolée, se télescopent dans son cœur éclaté.

Elle secoue la tête. Ses cheveux, coupés sous l’oreille, volent, libres. N’a pas osé dire à sa mère qu’elle avait sacrifié ses longues tresses. Non, ne pas penser à sa mère maintenant…

L’eau du bain refroidit. Frissonnante, Claudine se lève, enjambe le bord du cuveau, s’enroule dans une serviette, laisse l’empreinte de ses pieds mouillés sur les tomettes.

Dans la chambre, son mari l’attend. Elle enfile sa plus jolie chemise et s’en va, à pas menus, le rejoindre.

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Rédigé par Mado

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Publié le 14 Mai 2019

Ce matin, Cédric m'a confirmée son mécontentement de tenir la boutique seul.

Hier soir, un peu trop imbibé de bière, un air boudeur, pianotant sur le comptoir, me lançant un regard de chien battu, il me dit " Ma puce, je ne sais pas si c'est une bonne idée!!!!!! "

Je reviens du cimetière, mon mari et ma fille y reposent tranquillement et des souvenirs remontent dans mon esprit.

-  Un jour, on ira en Irlande, c'est très beau, me disait Pierre!!!

Je fais ma valise, sans oublier le petit ours de Marie, c'est décidé je veux partir, Cédric mon ami de toujours est très capable d'endosser la responsabilité du Café-Librairie " Le Temps qui Passe ".

Je suis seule désormais, forte je suis malgré ces terribles souvenirs, mais c'est une nécessité, Paris m'étouffe, je respire mal.

Là-bas personne ne m'attend, mais des images, recueillies au cours de nos recherches avec Pierre et Marie, vont me mener dans leurs rêves.

Il y a quelques jours, j'ai contacté une adresse prise sur internet, une vieille maison au bord de la mer d'Irlande à 'YOUTH'.

J'y suis, il fait beau mais froid.

Il faut que je trouve une voiture, les premiers essais ne sont pas concluants, on roule à gauche, oui je sais !!!

Plus j'avance, plus le temps se gâte, il pleut des cordes.

Un couple de personnes âgées, entendant ma voiture pétarader, est sorti et m'attend sur le pas de leur maison mitoyenne à la mienne.

Ce sont des gens accueillants, Abby et Peter, je ne suis pas toujours très gentille, ni patiente avec eux, mais ils me font confiance.

Mon histoire m'inspire quelques lignes ..... quelques pages, je veux rester seule tranquille dans mon nouveau chez moi..

Cachée sous un fauteuil, je retrouve la page 14, toujours celle-là qui prend plaisir à jouer avec mes souvenirs et la suite des évènements. 

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Rédigé par Dominique

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Publié le 12 Mars 2019

Rédigé par Atelier Ecriture

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Publié le 12 Mars 2019

Pour les autres, il pourrait s'agir d'une partition sans note.

Pour elle, un livre dont les pages remontent le temps.

Ses yeux se brouillent en suivant le tracé voluptueux de l'encre sur la page, qui semblent refluer pour irriguer sa pensée.

Les variations Goldberg.

L'aria initiale, sarabande céleste, mécanique précise du contrepoint.

La diversité des Variations. Une trentaine en tout. Sa fille petite, qui tient à s'entraîner sur le cruel exercice, conçu pour clavecin à 2 claviers. Elle peine à rester droite face au piano à queue. Et à croiser ses mains. Sa fille...

La musique résonne en elle, même si.. des boules dans les oreilles. Comme Glenn Gould. Les vibrations du corps bien avant l'audition.. et le dos courbé sous le poids du passé. Le silence installé comme une éternité.

Elle revoit l'enfant sur son vélo, ultime silhouette s'enfonçant dans la forêt. Le carrefour décisif. Les cris.

Les notes mugissent pour atteindre l'apogée. Elle, les freine à peine, un soupir, une pause possible.​ Largo ma non troppo.

Glenn ferme les yeux, en même temps que l'ouïe. Il frôle de son nez les touches du clavier. Staccato.

Elle revoit ses propres séances d'entraînement, un enfant sur chaque cuisse, peinant à impulser ses émotions au fil des doigts, ses petits boudins blancs courant sur les notes..

Goldberg était claveciniste pense-t-elle, plus aisé de jouer l’œuvre du maître sans se croiser les mains. Les variations de l'Aria. Le chef-d'œuvre de Bach, une superposition de lignes harmoniques.. une commande soporifique pour un comte insomniaque. Elle sourit.

La partition sans note. Un chapitre, une variation. Au fil de la mémoire, les yeux vers l'intérieur. Elle s'évade à chaque reprise, happée par la prouesse d'une image mémorielle. Les variations s'enchaînent, les doigts folâtrent et les images avec.​ Le feu rouge, le heurt.

La partition interrompue.

Elle joue, inlassable. Tourner les pages. Atteindre l'Aria finale, le mouvement initial.. et muter la mémoire en hommage incessant.

Ouvrir les yeux.

La partition n'est plus la même dans l'encre de ses veines. Les notes ont repris vie et lui sourient, elles courent sur ses lèvres et dans ses yeux.

Le fragile livret s’est figé dans ses doigts transis.

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Rédigé par Nadine

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Publié le 12 Mars 2019

On l’avait inscrit dans cette école de musique, bien sûr ce n’était pas un conservatoire, une simple école de quartier. Sur les murs étaient accrochés de nombreux instruments. Le tambour et ses baguettes magiques, le cor que l’on entend le soir au fond des bois. Lui le nouveau était impressionné par les instruments à cordes, le violon qui sanglote les jours d’automne et la guitare au tempo andalou. Le violoncelle et son corps de femme qui se laissait caresser par son archet. La contrebasse était elle contre, tout contre le mur. Difficile de faire son choix, il fallait faire silence surtout que dans la pièce voisine le piano écrivait une lettre à une certaine Elise.

Il resta là, la tête pleine de sonorités et c’est dans le silence de la nuit qu’il entendit un son grave. L’appel d’un Didgeridoo qui l’entraîna dans un voyage initiatique, à la découverte des bruissements de la vie.

Il était là, assis au pied d’un eucalyptus, son professeur, un aborigène, lui enseignait que sur la partition, les kangourous sautaient de la noire à la blanche en toute liberté.

Le son l’enveloppait, l’habillait de grave.

Il devait chercher sa propre sonorité pour pouvoir continuer à être auditionné, écouté dans cette école, où, sur le mur, on l’avait accroché, sans avoir dit qui il était.

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Rédigé par Bernard

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Publié le 12 Mars 2019

Elle pleure Elise, ses larmes tombent sur le clavier, les notes furieuses se font échos, les blanches s'envolent, les noires tiennent bon.

-  Elle me martyrise cette fillette, dit le piano, pourtant plein d'empathie envers les enfants.

Compatissante mais ferme auprès de la maman d'Elise, la professeure de musique tente d'expliquer que cet instrument n'est peut être pas celui qui lui convient le mieux !!

-  Papa est violoniste, je veux apprendre le violon !

Vivaldi, le printemps, la renaissance de la vie, une envolée de notes souriantes, vives et spontanées, comme celles des oiseaux qui piaillent de joie et d'amour.

J'aime l'hiver, papa sait bien faire semblant qu'un petit traîneau trotte dans la neige, en grattant les cordes de son violon.

Dix ans ont passé, Elise a grandi, jolie jeune fille et avec sa sœur jumelle, elles forment un duo charmant.

Isabelle, enfant avait étudié le violoncelle, instrument encombrant, mais pouvant transformer les notes en tourment grave, sensuel, apprivoisant les sons torturés, implacablement bouleversants.

Donc ces deux perles de la musique baroque, fans des frères CAPUCON Gauthier et Renaud, étaient le bonheur de leurs parents, concerts, voyages exercices, etc...

Etudes et musique, donc ces demoiselles avaient aussi une tête bien remplie.

La maman très intéressée par le Moyen Âge, jouait de la mandoline.

Ce quatuor de cordes, emportait à chaque représentation le public qui en redemandait.

Une petite note de musique, une grande famille de ritournelle, le piano droit contre le mur du salon était compatissant et en sourdine ses petits marteaux envoyaient des blanches, des noires, des dièses et autres mi, fa, sol sous le tapis rouge qui recouvrait le clavier.

Musique de chambre, dit-on, sol, la, si do !!!!!!!!! 

             

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Rédigé par Dominique

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Publié le 11 Mars 2019

Le saxophoniste se réveille. Au loin, la musique de la fanfare résonne. Il se lève brusquement, saisit son saxo et se précipite vers elle. Il est en retard, le défilé a commencé sans lui. Ce n’est qu’après quelques pas que son cerveau se remet à fonctionner, réalise qu’il dormait à même le sol dans la forêt, récapitule. Voyons… il était dans les temps ce matin quand il est parti pour la fête du village. Il a suivi le chemin habituel, traversé le pré, pénétré dans le bois et puis… le trou noir. Impossible de se souvenir pourquoi, comment il s’est retrouvé allongé au pied du grand chêne, tout courbaturé, l’impression d’avoir été battu.

 

Pointe d’angoisse, son cœur rate un battement. Que s’est-il passé pour qu’il s’endorme ainsi alors que ses camarades l’attendaient pour la parade ?

La musique est de plus en plus forte, elle semble venir vers lui. Curieux… ce n’est pas ce qui était prévu ; le circuit de la parade devait passer par les rues du bourg et terminer par une aubade sur la place... Bizarre cet air, lui non plus n’était pas prévu… Une mélodie sombre, loin des envolées joyeuses de la fête. De longs sanglots de lamentos étreignent l’âme ; la forêt pleure, les oiseaux se sont tus. Quelque chose de terrible, enfoui au fond de sa mémoire, cherche à s’échapper… quelque chose de terrifiant, oublié dans l’enfance… La peur le tétanise… c’est là, ça approche... La malédiction de la forêt ! C’est ça, c’est cette vieille légende que lui racontait sa mère, sans doute pour le dissuader de partir seul en explorateur dans les bois. Soulagement... il respire mieux, rit de lui-même et de ses terreurs d’enfant. Se souvient vaguement de l’histoire…

 

Dans la forêt, se cache la fanfare malicieuse. Il ne faut surtout pas la rencontrer sinon la malédiction se réalise. On se sait pas en quoi elle consiste car tous ceux qui ont croisé la fanfare malicieuse ne sont jamais revenus. Il paraît que la musique larmoie avant de devenir sauvage, hargneuse. Les notes rageuses se déchaînent, les trilles mesquines crient. Soudain, la fanfare se matérialise. Les trompettes tempêtent et grondent, féroces. La grosse caisse casse le tempo à grands coups de baguettes qui meurtrissent le dos. Le gros tuba éructe en ut, renverse le monde de son gros souffle fétide. La forêt magique protège son secret par la musique… Démoniaque poésie… Il n’a pas le temps de comprendre le message. Emporté, secoué, il tombe, inconscient, sous le grand chêne.

 

Quand il se réveille, la musique de la fanfare résonne au loin. Il se lève brusquement, saisit son saxo et se précipite vers elle. Il est en retard, le défilé a commencé sans lui...

 

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Rédigé par Mado

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Publié le 18 Juin 2018

Un jour, demain, jamais… de suite !

 

Mes chéris à table. Levez vos fesses de vos fauteuils.

Les chaises de ma cuisine vous attendent…

Elles font quatre pieds de grue comme votre Maman adorée qui en fait deux.

Mes chéris dépêchez-vous votre plat préféré va refroidir.

Mes chéris je vous ai concocté votre dîner favori, de bonnes tripes de lapin farcies.

René, tu peux interrompre ta leçon d’anglais et éteindre ton ordinateur. Dépêche-toi.

Hubert, mon amour, éteins ta télé, tu as déjà regardé la météo il y a un quart d’heure. Même le cul de la speakerine n’a pas changé en si peu de temps.

Toby veux-tu ne pas rester sous la table, courre vite à ta panière.

 

Quand je pense que le bel Armand voulait m’emmener dîner dans ce petit bistrot si parisien, si près de chez lui. Manger des raviolis, boire du rosé de Provence. On dit qu’il n’y en a plus, mais Armand… Il avait même imité l’écriture de ma mère, une lettre pleine d’émotion, Maman m’appelait auprès d’elle pour son avant dernier soupir. Avant dernier, faut pas assécher l’oued. Hubert aurait gobé, la lettre et l’hameçon avec, il gobe tout ce con. D’ailleurs il a la vigueur sexuelle d’un thon qui aurait traversé deux fois l’Atlantique à contre-courant. Franchement qu’est-ce que je fais là ? Ah oui, les liens sacrés du mariage, pour le meilleur et pour le pire. Il l’a dit Monsieur le curé et dans l’ordre. Le meilleur c’est fait, le pire je le vis. Merci petit Jésus.

Ils me fatiguent, me fatiguent, ras le bol, je vais renverser cette putain de table, un jour, demain, jamais, de suite. Blang !

 

*

Oui Maman, une minute !

Elle le fait exprès j’en suis sûr. Toujours, à chaque fois, elle attend le moment où je vais marquer des points, l’instant où Ninja a repéré le bad boy, va enfin le tuer…

« A table mes chéris ! » Ça ne peut pas être dû au hasard, trop gourde ma génitrice. Et pour manger quoi ? Des tripes de lapin farcies. Plein l’intestin des tripes de lapin farcies, quatorze ans que j’en mange des tripes de lapin farcies. Elle devait déjà en mettre dans mon biberon. Je subodore que le jour de son mariage, sa mère lui a donné une feuille au format A4 imprimée recto seulement « La cuisine pour les très très nulles » Une seule recette à apprendre par cœur. Et l’autre vieux déchet affalé dans son fauteuil à boire de l’alcool et mater des meufs qu’il n’aura jamais. Tu crois qu’il dirait quelque chose, qu’il oserait un mouvement de révolte ? Même pas « Oui mon bébé » « Bien sûr ma puce » pauvre mec, rien dans la culotte, si c’était moi elle en entendrait la vioque. Maurice, lui, sa mère, elle lui dépose un pan bagnat près de son ordi, il peut jouer autant qu’il veut. D’accord il n’est pas le premier de la classe mais à Ninja il fait les meilleurs scores. Personne ne peut le battre, trop fort le cum.

Oui Maman j’arrive !

En fait ici, on m’empêche de vivre ma vie, la vraie vie que je mérite. Impossible de progresser, de devenir une célébrité qui passera à la télé. Ah la tête qu’ils feront, moi je ne les reconnaîtrai pas.

M’évader, je dois fuguer, j’y vais, un jour, demain, jamais, de suite. Bleng !

 

*

 

Oui ma puce, deux secondes !

Tiens, il y avait longtemps, pas moyen d’avoir du temps pour moi, me détendre, siroter un whisky tranquille. Encore sur mon dos à exiger, ici, là, vite, cette femme est un tyran. Je vais lui dire moi où elle peut les mettre ses tripes de lapin farcies. Les tripes de lapin farcies, quinze ans que j’en mange, ça suffit, et ni, ni c’est fini. Et puis elle est trop grosse, les ongles noirs, les cheveux sales, les bas qui plissent. Et puis quand on fait l’amour, une fois l’an, pour notre anniversaire de mariage, elle garde les yeux grands ouverts, compte les fissures du plafond, toujours l’air de dire : au lieu de t’agiter bêtement tu ferais mieux de le repeindre. Au moins ton pinceau servirait à quelque chose d’utile. Bien sûr que c’est à ça qu’elle pense. Je le devine depuis le temps.

J’arrive chérie !

Et l’autre petit con toujours entre deux boutons, presser celui d’acné, écraser celui de la console de jeux. Il croit que je ne vois pas son regard prétentieux persuadé qu’il est d’être un génie. Tu n’as pas encore tué le père pauvre crétin.

Le père ? Mais pourquoi ai-je dit oui ? J’étais encore saoul de la veille, ma seule excuse. Putain, aujourd’hui je vivrais auprès de la belle Annie. Je coulerais des jours heureux, dorloté comme un coq en pâte. Douce Annie qui m’aime encore, qui m’attend toujours. Son sms « viens !»

Et puis merde, ils me font suer tous les deux, je pars, un jour, demain, jamais, de suite. Bling !

 

*

 

Waf, Waf ! Je ne suis pas beau comme ça ? Tout poisseux, couvert de sauce, les yeux, les oreilles, des tripes de lapin farcies en veux-tu en voilà. Ce n’est pas que ce soit vraiment mauvais mauvais mais j’en ai déjà mangé hier et avant-hier alors ce soir mes croquettes étaient bienvenues mais non encore des tripes de lapin farcies. Sacrée famille, deux de partis, une en pleurs, plus un seul pour me nettoyer. Je vivais heureux, traînais toute la journée avec la bande du quartier. Une poubelle par-ci, un tas d’ordures par-là, quelles rigolades ! Pourquoi m’être laissé adopter ? La promotion sociale peut-être, le plaisir de snober les clodos du bout de la rue sûrement. Quelle désillusion, quelle leçon ! Si je n’ai pas compris, je n’ai rien compris. Je dois retourner avec les miens. Ils puent c’est certain, mais pas les tripes de lapin farcies. Quand ? Un jour, demain, jamais, de suite. Ouah, Ouah !

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Rédigé par Hervé

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