Publié le 5 Décembre 2017
Le dos à l'église, pas de porte à fermer pour empêcher le froid d'entrer. Derrière les grilles, la vieille musicienne conjure son sort. Son archet va et vient sur sa contrebasse dont le vernis s'en est allé. Elle joue, joue dans la rue pour quelques pièces de monnaie qui vont améliorer sa misère d'aujourd'hui.
Les sons graves s'envolent comme une prière pour les passants, son regard perdu, pas de partition tout est dans sa tête. Elle se souvient du temps, où, en habit de gala, elle jouait avec les plus grands orchestres, Varsovie, Paris, New York. La vie était belle, elle, jeune et insouciante, n'a pas remarqué que chaque jour amène son lot de concurrents. Elle, vieillissante, un jour fut remerciée, finies les soirées à l'opéra. Aujourd'hui elle survit, parfois ses doigts la trahissent quand le froid de l'hiver est là. Pourtant dans sa tête c'est toujours le printemps. La musique lui apporte la chaleur et le bonheur quand, dans ses bras, elle sent son instrument, Bach devient son amant. Plus personne n'existe, joue jusqu'au soir descendant. Alors elle referme sa valise, le dos courbé elle rentre. Demain sera un nouveau jour, elle sera là, la musique la tient debout, c'est son grand amour.