L a maison en fête
Publié le 24 Octobre 2025
Mes copains et moi, Mael, Gael et moi Rodric sommes nés en Bretagne profonde dans les années 1958.
La forêt de Brocéliande juste à côté, nous inondait de récits, légendes et de contes où les elfes et les sorcières, faisaient peur aux jeunes enfants.
On avait six ans et sept ans, aux vacances de la Toussaint, on chapardait un peu partout . On s'inventait des histoires. On connaissait tous les coins, les recoins et les maisons aux alentours.
En particulier, une que nous nommions « la maison des nains » elle était toute illuminée, ce qui lui donnait une allure magique au moment d'Halloween.
Cela nous intriguait beaucoup.
Alors pour jouer et par curiosité, nous nous glissions, un matin en catimini au fond du jardin parsemé de petits nains, ils nous regardaient, cela donnait une atmosphère un peu particulière. Ils étaient colorés, ils semblaient surveiller ce que nous faisions. Certains étaient joyeux, d'autres moins, tout cela nous laissait perplexe et nous émerveillait en même temps.
Un jour après maintes discussions nous nous décidâmes de pénétrer à l'intérieur.
Mael le plus costaud fit la courte échelle à Gael le plus jeune et léger,pour regarder à travers les vitres.
- Dépêche toi, je ne tiens plus !
-
Gael à mi-voix dit : je vois, je vois
-
Rodric : qu'est-ce que tu vois ?
-
Ben ! Des choses, je vois des guirlandes de toutes les couleurs, des lumières, c'est beau, mais, mais ça fait peur
- Tu as peur de quoi ?
- C'est bizarre ça fait peur, j'ai mal au ventre
- Tais-toi et regarde
Mael craque sous le poids, lâche Gael, celui-ci dégringole dans l'herbe.
- Qu'as-tu vu ?
- Eh ! Bien c 'est comme s'il y avait une légère fumée partout, sur une petite table dans un coin de la pièce, il y a un vilain masque de sorcière, elle me fait peur, elle me regardait avec une grimace, des yeux perçants. Tu crois qu'elle va me reconnaître, elle viendra cette nuit dans ma chambre pour me tuer, m'étrangler ?
- « Couillon » qu'est- ce que tu racontes ?
- Ecoutez les copains, l'année prochaine on préparera notre escalade, nous irons voir ce qui se passe dans cette maison d'Halloween.
L'année d'après, nous nous sommes équipés d'échelle et d'escabeau pliant.
La veille, nous avions rodé autour en évitant de faier du bruit.
- Chut silence !
On avait remplacé nos gros godillots par des baskets légers.
A pas feutrés, on s'était dirigés au fond du jardin, où il y avait une grande fenêtre. La curiosité était la plus forte, le cœur battait la chamade. Le silence régnait autour de la maison.
- Les propriétaires sont partis !! c'est bon.
- Tu crois ? dit Gael.
Tout excités, nous installions les échelles dans le silence, seules les mouches et les abeilles butinaient autour de nous d'un air léger par le frôlement de leurs ailes. Le nez écrasé sur les vitres sales chacun explorait les recoins de la pièce en silence.
Rodric : je vois un grand voile comme une toile d'araignée, elle s'étend sur toute la pièce, des araignées noires sont accrochées partout.
Gael chuchote : je vois une tête, la bouche, le nez comme une grosse courge, elle me regarde, elle rigole la bouche grande ouverte, elle fait peur....
Mael marmonne : j'ai un peu la trouille, le masque est toujours là, sur le guéridon et à côté il y a des gants longs noirs en toile cirés.
- C'est peut-être pour nous étrangler, dit le petit, il prépare son meurtre.
En tournant ma tête j'aperçois un squelette !
- Un squelette ! Tu vois, je te le répète il veut nous tuer !
- Arrête de dire de grosses bêtises le minot, c'est du beau travail !
Après être sortis de cet antre bizarre, nous allions dans la forêt de Brocéliande tout à côté, nous nous asseyions sur le sol en rond dans l'herbe, et là les idées fusaient. Des histoires se composaient tout autour d'une vie, une ambiance lourde et pleine de mystères régnait autour de nous.
Le soleil qui s'infiltrait dans la forêt s'étendait comme un rideau d'étoiles et donnait une impression de rêve.
Les odeurs que chacun avait ressenties, étaient différentes ; un c'était une odeur d'encens, l'autre une odeur de fruits mûrs et moi de poussière. Tout cela nous semblait irréel, car dans nos familles, il n'y avait pas de place pour le gaspillage, et les balivernes de ce genre. Pour nous c'était magique.
C'était l'année de mes douze ans la dernière fois que l'on a visité la maison des nains.
Installés sur nos échelles précaires pour regarder à l'intérieur, une voix derrière nous, nous interroge :
- Que faites-vous les enfants ?
Surpris, on dégringola à la vitesse du vent pour tomber dans l'herbe.
- Pardon Monsieur euh ! On regardait les lumières, les sorcières , les squelettes
Le gentil monsieur nous dit :
- Venez les enfants, entrez ! Je vous fais visiter.
Le petit Gael s'accrochait à mon pantalon, chuchotait : non, non, il va nous tuer !
- Venez, venez les enfants
On rentre à reculons en se bousculant et là un spectacle nous éblouit , la pièce est en mouvement, les squelettes habillés de noirs bougeaient, les zombis grimaçaient en émettant des cris bizarres comme des cris d'enfants, le diable habillé de rouge, court dans tous les sens, des pantins affreux montaient, descendaient d'une manière disloquée avec les os qui s'entrechoquaient dans un bruit sec.
Le monsieur voyant notre désarroi voulu nous rassurer et nous dit :
- C'est moi qui fabrique tout cela pour mon fils. Chaque année je transforme ma maison, cette pièce était la chambre de mon petit garçon qui est parti trop tôt d'une maladie, alors pour le garder un peu plus longtemps près de moi, je construis des histoires qu'ils aimaient beaucoup, des histoires de fantômes, de sorcières...
Nous restons tous la trois la bouche grande ouverte et muets d'admiration.
- Cela vous a plu les enfants ?
- Oh oui monsieur
- Eh bien revenez quand vous voulez, prenez un bonbon.
Nous décampions toute jambe, heureux d'avoir fait cette belle découverte.
Arlette
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