LETTRES DE SATINE A SOL

Publié le 4 Novembre 2024

 

« C'est un bâton, c'est une pierre, c'est la fin du chemin
C’est un reste de tronc, c’est un peu solitaire
C'est un éclat de verre, c'est la vie, c'est le soleil
C’est la nuit, c’est la mort, c’est un nœud, c’est l’hameçon
C'est le profond mystère, c'est "tu veux ou tu veux pas"
C’est le vent qui vente, c’est la fin de la pente
C’est la poutre, c’est le vide, fête de la crémaillère
C’est la pluie qui tombe, c’est la conversation sur la rive
Des eaux de Mars, c'est la fin de la lassitude  »
 

AGUAS de MARCO

Sol,

Fin décembre,

le jour grignote la nuit à pas feutrés. Trois mois avant mars, ce mois symbolisant pour nous le retour des beaux jours.
Cette saison correspond au début de l'automne au Brésil. Les pluies diluviennes transforment le paysage et inspirent à Antonio Carlos Jobim les paroles de cette magnifique bossa nova

Sous quel signe nous rencontrerons-nous ?

Combien de lunes te conterai-je qui me séparent de toi ?
Combien de soleils me réchaufferont loin de toi ?
Combien de sourires et de rires qui n'auront pas ta complicité en écho ?
Sur combien de pierres de patience devrai-je mettre mes pas ?

Tous ces instants où tu n'es pas à mes côtés sont-ils  pain perdu ou, telle la pâte qui repose pour mieux lever, gagneront-ils en intensité lorsqu'ils seront partagés ?

Plus fort que la maîtrise du silence, entends-tu toutes les questions au bord de mes lèvres que je ne te poserai pas ?
Est-ce peur ? Est-ce sagesse, Est-ce délicatesse ?

 

Sol,

Mars est là, il s'avance timide. Promesse de soleil en fin de semaine prochaine. Les jours s'étirent lentement et mon impatience fébrile ne peut changer leur cours

A trop gonfler la voile de mes attentes, sans cesse la raccommodant
lorsque de tristes cafards y venaient s'y loger,
A trop enfouir les petites blessures et les grandes meurtrissures
A trop de plein
A trop de vide
Voilà que la peur s'installe avec son cortège de doutes.
Je te délivre des mots que tu dis attendre, espérer. Ces mots,
pourtant miens, ces mots qui me racontent en partie, qui m'échappent
sûrement car ils ont leur vie propre, te retiennent, te suffisent
peut-être ? Ces mots qui se lisent, se disent comme une lecture mais
ne se parlent pas
Je te conte mes forces nouvelles sans parler des lames de fond qui me
fragilisent.
Je te parle de déesse des petites victoires sans dire qu'elles se
construisent sur un lit de failles
Je dévoile mes joies, je tais mes larmes
Je me suis relevée, me tiens farouchement debout , mais je redoute
plus encore la chute.
Je t'offre des mots sans retour. Rien de toi qui ne révèle
l'espace-temps dans lequel tu vis.

Tu m'as dit, il y a un an déjà, j'ai besoin de partir, loin, sans donner de nouvelles à quiconque.

Tu m'as dit tu peux écrire, m'écrire. Je te lirai au fort de ma solitude
Pour que nous existions, laisse-moi partir.
Je serai là aux eaux de mars

J'ai peur de moi et j'ai peur de toi.
Semblables dans nos défauts, dissemblables dans nos engouements et qualités.
J'imagine tout et son contraire.
Je me vois remplie de désirs et mon corps, comme une nature morte, me
trahissant, refusant d'obéir
Je me vois, pour conjurer mes peurs, refusant de me cabrer, violente
avec et sans raisons
J'ai peur que tu oublies les dates
j'ai peur d'empêchements de dernière minute anodins seulement pour toi
j'ai peur de ne savoir où nous rencontrer, d'un lieu émotionnellement
pour moi trop chargé
j'ai peur à chaque sonnerie de téléphone
j'ai peur de mots qui giflent, des : "tu sais bien"
j'ai peur de gestes maladroits, d'être brusquée, de retourner dans un
temps figé de l'histoire qui se moque éperdument de ce qui advient après,
mais qui est advenu déjà et qui change la donne.
Je formule: " Au fil des jours qui nous séparent" quand je ne peux
affirmer avec certitude qu' "Au fil des jours qui me séparent".
Je vis chaque jour la Séparation et je crée chaque jour les petites
réparations, guettant sur mon chemin des étoiles de mer et des
libellules .
Tout cela est fort et fragile.
 La rencontre est un risque. De grandes espérances aux illusions perdues.
La rencontre est un risque mais tout ce temps elle m'a portée.
A trop gonfler la voile de mes attentes, sans cesse la raccommodant....

Tu n'es pas venu. Besoin de prolonger l'expérience.

Tu m'as écrit : « Les jours passent trop vite. Trop tôt pour rentrer. Baiser »

Dix mots. Je les ai comptés, recomptés. Nombre pair. Dix mots concis, clairs, effraction dans la nuit dans laquelle ils me replongeaient.

Et Tomer est entré en douceur dans ma vie .

 


 

Rédigé par Odile

Publié dans #Divers

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