Le stradivarius a disparu
Publié le 29 Novembre 2024
Marco se lève avec élégance, effleurant légèrement le dossier de sa chaise avant d’aider Joséphine à se lever. Sa main reste suspendue prête à guider la sienne. Il sent alors la chaleur de sa paume qui lui provoque un frisson. Ils traversent le wagon sous les regards curieux et envieux. Marco se laisse enivrer par le parfum de Joséphine. A chaque pas il a l’impression de créer une partition secrète qu’il composera pour elle, ce soir, avec son violon.
Le salon est un écrin feutré. Les fauteuils capitonnés de velours vert invitent à la confidence. Il repère un coin intime loin de ces trois individus, affublés de kilts écossais qui dénotent dans ce coin enchanteur. Une horloge ancienne égrène doucement le temps sous les notes du pianiste. Ce murmure mélodieux ajoute une touche de raffinement.
Ils s’assoient l’un face à l’autre, Joséphine ajustant avec grâce les plis de sa robe. Marco fait signe au serveur :
- Champagne s’il vous plaît, le meilleur pour fêter cette rencontre.
Après ces délicieux échanges, grisée par les bulles euphorisantes, Joséphine éprouve une lassitude. Elle demande à Marco de la raccompagner, ce qu’il fait en parfait gentleman.
Alors qu’il regagne sa cabine, un détail attire son attention. Une enveloppe cachetée de cire est déposée sur la table. Intrigué il l’ouvre avec précaution. Une seule phrase, toujours la même écriture, il lit :
- La musique est un dialogue. Patience ! Vous trouverez la clé.
Marco sourit frustré mais fasciné. Son admiratrice aime jouer avec le suspens. En repliant la lettre, il remarque quelque chose d’étrange, un vide oppressant. Là où il avait rangé son stradivarius dans son étui, il ne reste plus qu’un espace froid, déconcertant. Le souffle coupé, il cherche frénétiquement cet objet précieux. Il ouvre les placards, fouille les moindres espaces, mais rien. Une profonde angoisse l’envahit. Son violon, un chef d’œuvre vieux de plusieurs générations, objet indispensable de sa vie, a disparu.
Effondré, il s’assoit. Une feuille de papier froissée attire son attention. Il devient livide, il s’agit bien d’une de ses partitions ; une sonate pour violon de Jean- Sébastien Bach.
Au bas de la page une annotation manuscrite le laisse sans voix.
- Chaque instrument à une histoire. Fouillez dans votre passé et il vous mènera à moi.
Marco fixe les mots avec rage. Le vol n’est pas un simple larcin, c’est un jeu savamment orchestré.