Emilie Raper

Publié le 17 Octobre 2024

 

 

Cette femme aux cheveux blancs, s'appelle Emilie Raper. Son regard plein de malice a attiré mon attention. Chaque sillon de son front représente le chemin tortueux qu'elle a subi pendant ses meilleures années de sa jeunesse en 1940.

 

Elle est née à Orléans en 1919, fille de commerçants, travailleurs et courageux, elle a suivi la trace de ses parents. La guerre est venue perturber son destin, elle a choisi une autre route que celle qu'elle avait rêvée étant gamine.
 
Un soir, après une réunion secrète avec des amis de son village, elle décide de faire sa propre guerre, pour lutter contre ces envahisseurs qui voulaient lui voler sa liberté.
- Ah non ! au nom de quoi ?
 
Elle décide de s'engager auprès des réseaux clandestins. Tout en continuant à faire ces livraisons à vélo sur les routes des campagnes environnantes. Elle sert des renseignements précieux pour la résistance qui fournissent aux alliés une aide efficace. Au fil du vent sur sa bicyclette, elle apporte aux hommes dans le maquis de quoi se nourrir et des renseignements de grande importance de la France occupée.
 
Je souligne son courage et sa candeur devant des troupes entières d'allemands qui l'arrêtaient pour lui demander ses papiers. Elle répondait aux questions avec aplomb, avec son sourire malicieux qui faisait capituler les soldats. Ils la laissaient continuer sa route et elle terminait sa mission. Elle acheminait des informations inestimables pour la lutte armée impression de journaux clandestins, destruction des ouvrages stratégiques, ponts, chemins de fer etc.. afin d'entraver l'avancée de l'ennemi. Un seul combat, pour une seule patrie, la sienne, la France de liberté. Elle était presque invisible sur sa bicyclette, elle chantonnait des chansons d'Yves Montant, " A bicyclette", personne ne faisait attention à elle. Elle poursuivait son chemin tortueux, mais fructueux.
 
Cette petite femme, qui est devenue une grande dame, décorée par le Général de Gaulle pour services rendus à la nation, s'en est sortie indemne. Elle a été un élément majeur reconnu dans la Victoire de notre pays.
Surprise imprévisible
 
Deux années, après la fin de la guerre, la vie avait repris plus ou moins sont rythme.
Attablés devant un verre avec quelques amis, la conversation est venue à parler de l'époque que nous avions tous vécu pendant la France occupée.
Au fil des discussions animées, Lucien me dit :
- Tu te rappelles d'Emilie RAPER ?
- Oui, c'est une héroïne, elle a souvent risqué sa vie, pendant cette période noire. Elle a été très impliquée dans la victoire de cette sale guerre.
- Eh bien ! tu devineras jamais, ce qu'elle est devenue après la fin de la guerre, elle s'est mariée avec un allemand.
- Non! tu es sûr de ce que tu me dis?
- J'ai lu un grand reportage sur elle :
Au cours de ses pérégrinations sur les routes dangereuses, elle croisait des barrages de soldats. Ils l'arrêtaient pour vérifier ses papiers.Parmi ces soldats, elle avait remarqué un jeune très beau, des yeux couleur mer, blond, séduisant. Celui-ci était différent des autres. Il se tenait toujours en retrait avec son fusil dans ses bras. Il semblait avoir la tète ailleurs. Il l'a regardé intensément.
Elle le croisait plusieurs fois, sa garnison devait être dans les parages.
Elle était toujours très troublée et confuse, lorsque son regard bleu perçant balayait sa silhouette.
Le soir dans son lit, lumière éteinte elle repensait à lui. Mais elle ne pouvait s'empêcher de lui jeter un regard furtif lorsqu'elle le rencontrait.
Plus tard, l'effervescence de la victoire lui a fait oublier quelques temps, le beau jeune homme Elle reprit sa vie, contrainte, dans le commerce de ses parents. Son père était décédé, et sa mère ne pouvait gérer l'épicerie et charcuterie seule.
 
En 1946, un jour d'été, elle vaquait dans son commerce. Elle servait les clients toujours souriante et joyeuse. Elle chantonnait tout le temps " la vie en rose". Dans la boutique à cet instant, il n'y avait personne, la porte s'ouvre, un monsieur blond, bien mis, élégant rentre dans la boutique, un léger sourire sur les lèvres. Elle lève la tête, reste stupéfaite paralysée, lâche le plat qu'elle tenait dans ses mains. Celui-ci se fracasse sur le sol.
- Pardon mademoiselle, vous ne me reconnaissez pas ? dit-il. Je ne voulais pas vous faire peur, je suis désolée, ce n'était mon intention.. J'ai fait une longue route pour vous revoir. Depuis tout ce temps , je n'ai pu vous oublier, votre regard si doux et malicieux a hanté mes jours et mes nuits.
Avec un accent étranger, il lui dit :
- J'ai alors décidé de venir vous rencontrez pour savoir si vous m'avez pardonné d'être dans le camp adverse qui a fait tant de mal à votre belle France.?
Vous savez dès que j'ai mis un pied sur cette terre, j'ai compris que j'y reviendrait pour des jours meilleurs et que j'y ferai ma vie. et surtout avec vous. Je suis tombé amoureux dès que je vous ai vue la première fois, mais vu les circonstances...
 
Au fil du temps, ils se voyaient souvent, ils apprenaient à se connaître, malgré les réflexions de certaines personnes qui la traitait de "collabo". De fil en aiguille ils se sont rapprochés. Il semblerait que l'amour dépasse les frontières et efface la terrible période politique imposée dont ils ont été les premières victimes.
Ils sont partis vivre le cours de leur vie dans une grande ville, pour pouvoir fermer le livre du douloureux souvenir.
 
Quelle belle histoire d'amour!
 
 
Arlette Julien
 
 
 

Rédigé par Arlette

Publié dans #Ecrire sur des photos

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