Et alors... Quoi ?

Publié le 21 Juillet 2024

 
Avachi dans son vieux fauteuil Club, coincé entre les deux accoudoirs, Edmond VIANDART, cent vingt kilos pour un mètre soixante, pestait contre son épouse qui avait accordé une heure de repos après le service de midi à l’ensemble du personnel. Non mais franchement ! Quelle idée ! Nous allons droit à la ruine avec des procédés pareils.
Ce disant, le havane qu’il était en train de fumer avec délectation, échappa à ses doigts boudinés. Manque de chance, sur le tapis préféré de son épouse. Et voilà ! Ça va encore être ma faute.
 
Elle doit avoir des antennes, je l’entends arriver. Restons calme.
- Edmond ! Qu’avez-vous fait ? Ne voyez-vous pas cette fumée qui se dégage de mon tapis ? Je vous signale qu’une carafe d’eau vous tend les bras à moins de deux mètres.
- Désolé, mais je n’ai pas les bras assez longs. D’ailleurs, c’est à vous que l’on doit ce début de catastrophe. J’ai appelé à l’aide, mais figurez-vous que tout le personnel fait la sieste. Grâce à qui ? Je vous le donne en mille…
- Ne soyez pas de mauvaise foi ! Vous avez tout simplement un mal fou à remuer vos fesses. Vous mangez trop. Le père Gontran, notre confesseur, ne cesse de vous mettre en garde. La gourmandise est un péché !
- Véniel... Véniel, ma chère. Que je confesse régulièrement et pour lequel le cureton m’accorde l’absolution… Pénitence à la clé !
- Vraiment ? Et puis-je connaître la nature de la pénitence ?
- Morale. Pénitence morale. C’est la pire, car elle provoque du remord. Croyez-moi. Le cureton est cruel.
- Vous vous êtes intéressé à la dernière facture de votre couturier ?
- Je suis riche !
- Et à celles de votre restaurateur préféré ?
- Je suis riche !
- Et à votre caractère de mal appris, pour ne pas dire de cochon, que je suis la seule à supporter ? Chaque fois que nous sommes conviés chez des gens bien nés, je tremble une semaine avant, je ne respire plus pendant et je réfléchis aux lettres d’excuses que je vais avoir à écrire après. Quand je pense que les degrés de noblesse de ma famille remontent à saint Louis…
- Ceux de mon grand-père remontent aux anciennes halles de Paris. On l’appelait « Le roi du gigot ». Il mangeait comme quatre, buvait comme dix, faisait la vie comme cent et gagnait de l’argent comme mille. Qu’avez-vous à dire à ça ?
- Mes amis vous trouvent campagnard, rupestre, pour ne pas dire vulgaire. Croyez-vous que cela me plaise ?
- Je reconnais que je n’ai pas bénéficié de votre éducation. Mais est-ce de ma faute si vos amis ne sont que millionnaires ? Il faut travailler pour échapper à cette situation médiocre, ou bien s’escrimer à faire travailler les autres. Reconnaissez que je n’affiche pas mes milliards à la ronde. C’est simple je n’en fais pas cas et je ne suis pas sûr que le fisc connaisse ma situation financière.
- Vous savez, je connais les endroits que vous fréquentez. Vous allez régulièrement jouer à la belote avec votre chauffeur dans des estaminets mal famés. Si mes amis savaient ça, je raserais les murs.
- D’abord, mon chauffeur est un ami d’enfance. Nous avons essuyé nos fesses sur les mêmes bancs d’école. Il se trouve que nous sommes redoutables à la belote, ainsi d’ailleurs qu’au quatre cent vingt et un. Nous formons une équipe que tous les bars du quartier redoutent. Ce n’est pas rien !
- Mes amis jouent au polo, au golf ou font de l’équitation. Et ils se délassent en jouant au bridge ou en s’affrontant aux échecs.
- C’est bien ce que je dis. Distractions de pauvres. Vous devriez inciter vos amis à faire des efforts. La rue est porteuse de surprises, elle est un livre ouvert sur le passé, le présent et le futur. Bien sûr, il faut savoir lire et ce n’est pas donné à tout le monde, mais en faisant un peu d’effort on obtient des récompenses aux coins des rues.
- Vous dites n’importe quoi.
- Louise, quand j’ai racheté la bicoque de vos parents…
- Bicoque ? Quatre-vingt-trois pièces et plus de vingt-cinq hectares de forêt.
- Oui, bon mais c’était une vieillerie, que je continue à restaurer et à y passer deux ou trois jours par an pour vous être agréable. Et puis cela a permis à votre comte de père de vous offrir un mariage à la hauteur de vos prétentions….
- Edmond ! Je ne vous permets pas !
- Vous avez raison ma chère. Restons-en là et passons à autre chose.
- Viendrez-vous à la messe demain avec nos enfants ?
- Vous savez que j’ai des rapports avec Dieu qui ne nécessitent pas la présence d’un curé. Notre intimité n’a pas à être perturbée par une tierce personne. Je m’adresse à lui en direct. Je demande ce qui me semble juste et j’attends sa réponse.
- Et il vous répond souvent ?
- Jamais jusqu’à présent. Mais je lui conserve ma confiance.
- Vous faites bien, ça me rassure un brin... »... SOUPIRS...
 
_________________________
 
 

Rédigé par Fernand

Publié dans #Divers

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article