L'ESCALE EN AVIGNON
Publié le 23 Novembre 2023
9 novembre
Aujourd’hui, escale à Avignon. La péniche accoste en douceur. Nous sommes sur le pont, Melinda et moi, prêts à débarquer. Devant nous, le Palais des Papes, monumental, tout en pierres blanches, se dresse au-dessus de la ville. D’abord happé par les hautes tours, le regard tombe ensuite sur les toits aux tuiles rouges avant de couler jusqu’au port où s’affairent quelques plaisanciers.
Les moteurs de la péniche se taisent. Paul nous rejoint. Nous partons tous les trois vers le centre ville. Nous traversons des ruelles encombrées d’étals à touristes. Epices colorées aux odeurs exotiques, marchands de foulards, d’éventails bigarrés, pizzerias, kebab… j’ai l’impression de traverser le Vieux-Nice. La cause touristique rend les vieilles villes interchangeables. Dommage ! Au détour d’une venelle, un pan de palais papal bouche le ciel. Melinda ne peut retenir un Oh ! de surprise ravie et presse le pas. Ce palais l’attire plus qu’un aimant, en tout cas plus que moi. Elle ne me calcule guère. Ce qui me console, c’est qu’elle ne semble pas plus intéressée par Paul qui n’a pas hésité à laisser la péniche à la seule garde de la cuisinière pour nous suivre… enfin, pour la suivre...
Nous débouchons devant une immense place peuplée de touristes. Le palais, impressionnant ! Splendeur médiévale parfaite, bâtie d’arcades, de tours, de créneaux, de murs, de pierres, de murs, de pierres, harmonieux et massif à la fois. Je me sens tout petit devant cet édifice, pour un peu, je retrouverais la foi. Melinda semble l’avoir en elle, la foi. Elle est en contemplation, avec une lumière nouvelle dans ses yeux d’émeraude, comme une joie profonde qui la rend encore plus belle.
Elle nous propose de faire la visite du palais. Je décline l’offre. Ça va prendre trois plombes, je préfère tracer vers le fameux Pont d’Avignon, vestige d’un pont médiéval dont il ne reste aujourd’hui que quatre arches et surtout, j’aimerais trouver un moyen d’aller jusqu’à l’écluse d’Avignon. La voir de la rive avant de la franchir demain en péniche. C’est quand même ce qui m’a poussé à faire ce voyage… Melinda sourit devant mon enthousiasme. Il paraît que lorsque je parle d’écluse, je m’illumine, enfin, c’est ce qu’elle m’a dit. Et ça, ça m’illumine encore plus !
Finalement, Paul et elle iront visiter le palais pendant que je fonce vers l’écluse et on se retrouve pour déjeuner ensemble vers 13h devant le Pont où nous danserons ensemble…
J’ai trouvé un bus, je suis arrivé devant l’écluse, en apnée devant des chutes d’eau tonitruantes. Un vacarme d’écume, de vent, d’embruns de rivière auxquels manque le sel. En amont, c’est tout calme. Une étendue d’eau tranquille, des canaux et l’usine hydroélectrique post-art-déco, classée aux Monuments Historiques. Vivement demain sur la péniche !
A 13h, j’ai retrouvé Melinda et Paul, comme convenu, devant le Pont d’Avignon. Nous avons déjeuné d’une pizza approximative, rien à voir avec mon savoir-faire ! Mais j’ai oublié illico l’absence de saveur de la pseudo-pizza quand Melinda nous a raconté le but de son voyage : elle envisage de devenir bonne sœur et profite de cette croisière sur le Rhône afin d’obtenir les bonnes réponses à ce grand choix de vie. J’en reste sur le cul ! Paul aussi !
Deux ou trois verre de vin plus tard, j’ai réussi à intégrer le truc et c’est à peu près rasséréné que je suis mes compagnons vers le pont. Là, j’ai osé ! J’ai esquissé un pas de danse et tenant la main de Melinda du bout des doigts, genre menuet. Sympa, elle a joué le jeu et a fait de même avec Paul. Puis, on s’est promenés sur le pont, le Rhône magnifique sous nos pieds. Le soleil commence à décliner, le fleuve vire au pourpre, les pierres du Palais des Papes se teintent de rose et d’ocre. Nous repartons vers la péniche dans une lumière dorée presque surnaturelle, d’une beauté qui m’étreint le cœur.
Maintenant, à l’abri dans ma cabine, j’écris pour raconter et surtout garder le souvenir de cette journée. Je ne veux rien oublier.