L’ESCALE

Publié le 23 Novembre 2023

 
Après une nuit bercée par les émanations alcooliques de la veille, j’ai ouvert difficilement les yeux. Lentement, un par un, en prenant le temps de me rappeler où j’étais et permettre aux brumes qui obscurcissaient mon cerveau de se dissiper.
Un copieux déjeuner accompagné d’un café, noir pour la couleur et serré pour l’intensité, me remit d’aplomb. Il était temps que je me prépare car le ‘Comté de Provence‘ avait profité de notre sommeil pour faire escale à Barcelone et Polalydés ou Sir Edward s’était proposé, la veille, pour me faire découvrir tout ce qui devait être vu dans cette belle ville. A quai, les machines du bateau le faisaient ronronner comme un chat en train de faire sa sieste. C’était rassurant et ce calme m’aidait à surmonter ma culpabilité de femme honnête qui me taraudait à l’approche de ce rendez-vous.
Mon chevalier servant vint me chercher aux alentours de dix heures. Il était d’un chic éblouissant. Costume en lin, chemise blanche en soie, col ouvert sur un départ de pilosité des plus virile, barbe de trois jours comme il convient et mocassins beiges de la plus belle facture. Visage aussi buriné que celui du commandant de notre navire, il était franchement... attirant.
- Venez, me dit-il, Barcelone est à nous pour la journée. La plupart des passagers, ce soir à table, vous parleront de la Sagrada Familia, du quartier gothique ou des ramblas. Moi je vais vous faire sentir l’odeur sucrée ou salée des tapas, ou celle d’une vraie paella servie dans un de ces endroits où il faut être né pour y être admis. Nous irons ensuite faire connaissance avec le Flamenco dans une école de danse perdue au fond d’une ruelle. Dans la vieille ville je vous présenterai à des toreros qui ont défié la mort des dizaines de fois devant des centaines d’aficionados, parfois même, devant Pablo PICASSO et qui n’en ont tiré aucune gloire si ce n’est celle d’être sortis vivants de l’arène sous les vivats d’une foule déçue par le sang qu’elle n’a pas vu couler. Mais rassurez-vous, nous visiterons aussi les sites indispensables à connaître pour que vous puissiez les raconter à votre retour. Gaudi n’aura plus de secrets pour vous.
Le programme qu’il me proposait m’avait déjà épuisée avant d’avoir mis un pied à terre.
- Comment se fait-il, Edward, que vous connaissiez si bien cette ville ? Vous en parlez comme si vous l’aviez vécue de nombreuses années.
- Marjolaine, vous êtes très gentille, ne le prenez pas mal, mais si je vous ai pris sous mon aile c’est pour une bonne raison... Il est encore trop tôt pour en parler. Allons ! Ne tardons pas, une longue journée nous attend. Hier est passé. Vivons le présent. Demain sera un autre jour.
 
Que penser de lui ? Est-il, n’est-il pas ? Après tout il a raison, vivons le moment présent.
Carpe diem, quam minimum credula postero.
 
 
 
 
 

Rédigé par Fernand

Publié dans #Ecriture collective

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