LUCKY

Publié le 3 Juin 2023

 
Il était arrivé dans ma vie comme un cadeau.
 
Un jour, une amie aide-soignante me demande de l'accompagner chez une de ses patientes. Une dame âgée, souriante nous reçoit dans son jardin, où elle fait un élevage de griffons.
Mon amie connaît mon envie d'avoir un nouvel ami de compagnie.
D'un coup d’œil, je vois la mère et ses petits, tous frétillants à notre arrivée. Un chiot un peu timide, boitillant, se tenait en retrait, me regardant avec ses grands yeux marrons, quelques poils les recouvraient en partie, ce qui lui donnait un air coquin. C'est le coup de foudre pour ce petit chien blessé (il s'était pris la patte dans le grillage). Je me mets à son niveau et l'appelle en lui tendant la main, le chiot s'avance lentement, mais sûrement vers moi, se laissant caresser, me lèche la main et son regard m'envahit de tendresse.
LUCKY, je l'avais baptisé de ce nom « chanceux ».
 
En partant du refuge de cette charmante grand-mère, mon nouveau compagnon se blottit contre moi, son petit cœur bat lentement, tout en confiance. J'ai apporté une couverture et quelques croquettes, il ne veut rien manger, mais se sent au chaud dans le plaid et s'endort, des soupirs discrets se font entendre, une patte qui tressaille, un bonheur tout simplement.
 
Mon amie nous dépose à la maison.
La clé dans la serrure, je m'apprête à entrer, lorsque ma voisine sort avec sa golden retriever «CALINE», très vive malgré ses cinq ans (bon d'accord c'est encore jeune pour un chien..). LUCKY n'a rien vu venir, en deux secondes, ils font des roulés boulés en jappant de joie, dans le couloir. Ma voisine a beau appeler sa chienne, rien n'arrête leur complicité naissante. De longues minutes plus tard, chacune reprenons nos occupations.
 
Encore tout chamboulé, mon petit chien fait le tour de l'appartement afin de découvrir son nouveau «chez lui». Dans la chambre de mon fils, il fait une pause, peut être une odeur, un je ne sais quoi d'apaisant.
Mon quartier, c’est LA MADELEINE, où je ramène cette boule de poils qui sera une sorte d'ange gardien à sa manière, doux, calme, affectueux, sans reproche, mais ô combien présent. Un ami véritable que parfois je repousse, la fatigue étant la cause, mais rapidement je le prends dans mes bras, voulant me faire pardonner d'un mouvement d'humeur dont il n'est pas responsable. Et alors sa queue frétille.
 
Je me souviens des promenades du soir, après avoir sonné chez ma voisine, pour nous investir d'une même nécessité. Ces balades, c’est un vrai plaisir, surtout lorsque l'automne laisse tomber doucement les feuilles jaunes ou rousses des platanes du boulevard. Certaines amusent mon chien qui joue avec, le vieux caniche d'un voisine s'en mêle tant bien que mal.
 
Le soir, de retour à la maison, je m'inquiète quand mon fils n’est pas encore rentré de ses livraisons de pizzas. Je sors de temps en temps sur la terrasse afin de voir passer le petit maître de LUCKY. Ce dernier, debout appuyé contre le mur, me lance des regards interrogateurs. Puis mon «ombre de chien», rentre avec moi, se love dans son couffin.
 
Alors, pour tromper l’attente, je me mets au travail. Les idées me viennent et les feuilles blanches se remplissent, j'écris, la nuit est inspirante. Vers minuit, mon fils arrive, un petit bonsoir fatigué, un bisou, j'entends la porte de sa chambre se fermer. LUCKY n'a pas eu sa caresse, enfin ce n'est pas grave...
 
Mon stylo usé a déposé quelques lignes...
Vers trois heures du matin, je me fais un café avec l'envie de voir les étoiles et la lune, cette dernière, timide, cachée à demi derrière un nuage gris. La douceur de la nuit, le silence, quelques larmes coulent doucement sur mes joues... Pourquoi ? Je ne sais pas...
 
Morphée m'appelle. Couchée sur mon lit, je sens la fatigue me fermer les yeux. LUCKY monte quelques minutes près de moi, comme à son habitude, puis descend sur la descente de lit, près de moi. Sentant ma main tomber sur ses doux poils, il s'endort.
 
Des bêtises ? Pas plus que ça. Heureux, lorsque nous allions chez le père de mon fils à la campagne, de s'ébrouer dans l'herbe ou courir après les oies ou la petite chèvre.
Les jours se déroulent sans problèmes, jusqu'à ce soir où ma voisine me dit que CALINE est à la clinique vétérinaire pour lui retirer des épillets dans une oreille et un œil. Le regard de LUCKY se fait infiniment triste, est-ce le ton de cette femme, l'absence de son amie… ?
Soudain, il est pris de tremblements.
Quelques jours auparavant, un dogue s'était jeté sur lui, le maître régla rapidement la situation et mon chien n'eut pas de blessures particulières.
En un clin d’œil nous sommes chez le vétérinaire de garde qui constate des convulsions. Après avoir expliqué la situation précédente, je dois laisser mon chien la nuit pour examens.
Je l'ai laissé en pleurant.
 
Le lendemain, je croise ma voisine qui vient récupérer sa chienne.
LUCKY est sous perfusion, tranquille, son regard apaisé.
- Je dois l'opérer, me dit le vétérinaire, un déchirement interne des tissus musculaires de la cuisse le faisait certainement souffrir un peu.
 
A ce moment, on entend dans le couloir des aboiements stridents, c'est CALINE qui sent la présence de son ami. Alors là, je ferme les yeux. M'accroupissant en prenant mon chien dans mes bras, j’assiste à une connexion animale et je rêve..
- Oh ma fidèle amie, je t'aime. As-tu eu mal, ? Je n'étais pas près de toi pour tenir la patte, tu as senti mon mal être, humé mon odeur en rentrant chez toi. Je suis là, ne t'en fais pas, moi je n'ai pas eu peur, dans deux jours nous nous retrouverons pour notre promenade nocturne habituelle, je t'aime ma douce.
 
Un silence assourdissant, troublant... Ma voisine s'était jointe à ma rêverie.
Puis j'entends une voix absolument réelle, le médecin me ramène à la réalité de la vie.
 
De retour à la maison, LUCKY est tout heureux de revoir mon fils, la vie reprend, les promenades, les sorties à la campagne, une vie de chien heureux.
Après plusieurs années, un jour, LUCKY n'est pas bien. Visite chez le vétérinaire qui, après un examen sanguin express, me dit qu'il a une montée d'urée. Il me conseille de le laisser deux jours sous perfusion. Le ramenant à la maison, je le fais manger, ce qu'il fait «pour me faire plaisir», j'en suis certaine....
Dans l'après-midi en rentrant de mon travail, mon fils se tient agenouillé, en pleurs, près de LUCKY qui venait de rendre l'âme pour se rendre au paradis des animaux.
 
J'ai terriblement aimé ce chien, parti trop tôt, à l'âge de huit ans, il a été mon confident, mon meilleur ami silencieux, mais démonstratif à sa façon de mettre sa patte près de moi quand il me sentait triste, observant mes moindres gestes. Mon chien, fixant ses yeux dans les miens, semblait me dire « quand tu pleures, je sais te réconforter, et si quelqu'un te brise le cœur, tu pourras utiliser le mien pour continuer à vivre, car je t'aime mon amie. »
 
Bien qu'il soit décédé en 2014, parfois, allongée sur mon canapé, j'ai l'impression qu'il est près de moi, peut-être est ce vrai, qui sait...
 
Dominique
 

Rédigé par Dominique

Publié dans #Les concours

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