DU SOUFFLE AU PATRIMOINE

Publié le 6 Février 2023

 
Quel voyage !
Notre coucou descend à la vitesse grand V vers l'aéroport de Lukla au Népal. Une heure entre Katmandou et Lukla nous évite 12 heures de marche et nous propulse à 2400 mètres d'altitude.
Les pneus crissent sur l'asphalte et déjà les rétro-moteurs s'enclenchent avec une série de coups de freins qui nous chahutent pas mal. Ouf ! Enfin stoppés. La piste de 500 mètres inclinée à 12 % a été entièrement absorbée.
Notre guide nous attend avec mules et matériel pour rejoindre le village de Solukumbu dans la vallée du Sagarmatha à plus de 5000 mètres d'altitude.
 
La fête de l'été dans la vallée du Sagarmatha, au pied de l'Everest est classée au patrimoine mondial de l'immatériel pour ses rituels nous avaient dit nos amis et on avait eu la faiblesse d'accepter sans se douter de ce qu'il nous attendait.
 
La marche, je devrai dire l'ascension, commence et déjà le premier pont suspendu d'une largeur de deux mètres, avec cordages et platelage en aluminium, qui se balance au dessus de gorges impressionnantes. Un Sherpa hors d'âge veille sur son entretien toute la journée et il ne faut pas oublier de laisser une participation. Espérons que les Dieux seront de notre côté. On s'engage les yeux à moitié fermés et lorsqu'on les ouvre c'est pour découvrir un convoi de yacks chargés en sens inverse ? Ah non ! C'était pas prévu au programme ça ! On se plaque contre les filets faisant office de garde corps, on se croise et… on rejoint la terre ferme.
Tout ça va durer six jours dans des paysages somptueux. Partout des drapeaux constitués de lanières rouge, blanc, bleu, jaune, vert qui flottent au vent omniprésent. Un ciel d'un bleu azuréen. Un vent qui, ici, est tout un symbole et représente le souffle des anciens.
 
Le chemin d'accès à la vallée de Sagarmatha également classé premier itinéraire culturel du Népal et patrimoine de l’humanité, longe rivières tumultueuses, bois épars, vallées profondément encaissées. Nous apercevons de très nombreux trekkers en groupe ou isolés, cheminant avec sacs à dos, chaussures de rechange suspendus au sac, pèlerine imperméable, chapeau vissé sur la tête et l'inévitable guide avec son yack.
Étapes de 10 heures par jour nous permettant de nous habituer peu à peu à l'altitude par larges chemins ou sentiers étroits et rocailleux. Ici deux murets de pierres sèches protègent parcimonieusement du vent et toujours en ligne de mire les montagnes de cristal.
Traverser ces étendues sous la domination au loin des plus de 8000 mètres a quelque-chose d'irréel. Arriver à un col, trempés de sueur, mesurer songeur l’effort qu’il faudra encore accomplir pour terminer la journée. Bizarrement la fatigue disparaît face à tant de beauté.
Et puis... Le village est atteint.
 
L'accueil des étrangers chaleureux. Nous nous installons à notre maison du thé.
Le soleil se couche. Les plus de 8000 mètres au loin flamboient du pied au sommet, comme illuminés de l’intérieur, tandis que la vallée se teinte de violet, puis les couleurs s’effacent. Les montagnes s’éteignent.
Le ciel bleu devient rose. La voûte noire s’impose comme chaque nuit avant que les étoiles ne viennent s’installer et éclairer l'Annapurna, le Sagarmatha, l'Everest.
 
Nous sommes réveillés le lendemain par des danses avec groupes de femmes en costumes traditionnels rouges et noirs, sous une pluie de pétales de fleurs. Les rouleaux de drapeaux de couleurs décorent maisons, temples, murets, flottent au vent. Toujours les cinq couleurs. Il y en a pour tout le monde : le ciel, l'air, le feu, la terre, l'eau. Personne n'est oublié. Tout le monde est remercié. Les cylindres de prières sont entraînés de droite vers la gauche, par une foule recueillie et diffusent à l'attention des Dieux des paroles bienveillantes. Nous suivons le mouvement. Voilà qu'un son puissant nous surprend. Les dungchen, ces longues trompes de plus de trois mètres avec extrémités recourbés ne peuvent s'adresser qu'à l'au-delà. Les danses sont rythmées par ces sonorités dominatrices.
 
La fête continue, elle durera plusieurs jours. Je comprends que le vent qui agite tous ces drapeaux, les tenues des danseuses, le souffle de ces instruments sous le regard des géants de notre terre, se soient transformé en patrimoine mondial.
Nous rejoignons notre maison du thé...
 
 

Rédigé par Gérald

Publié dans #Trésors du monde

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