LE QUARTIER DE MIREILLE

Publié le 5 Novembre 2022

 

Là, autrefois, c’était un chemin au fond d’un vallon

Entouré de collines aux fleurs multicolores

Sans route, sans voitures et sans habitations.
 

Aujourd’hui, on l’appelle encore Vallon des fleurs.

Cabanons et maisonnettes ont pourtant disparu

Avec l’arrivée des immeubles et des grands ensembles.

Charrettes et charretons ne passent plus par là

Il est bien loin le temps d’autrefois !

Ah ! Quel bonheur toutefois d’y entendre encore chanter les oiseaux,

Siffler les merles et les mésanges et roucouler les tourterelles !

 

Il y a …

Il y a des enfants qui partent joyeux le matin pour aller à l’école

Il y a des écureuils dans les pins de la résidence

Il y a des feuilles mortes sur le sol en automne qui bruissent sous les pattes des oiseaux

Il y a des maisons anciennes aux volets toujours clos

Il y a des glycines au printemps sur le mur de pierre d’une maison voisine aux volets bleus

Il y a du vent dans les pins et les acacias qui diffusent des parfums variés

Il y a parfois le soir le cri d’un petit duc ou peut-être est-ce une chouette, peu importe, qui rompt avec délice le silence de la nuit

LE QUARTIER DE MON ENFANCE...

Je me souviens de l’école Vernier où j’allais enfant. Il y avait l’école des filles et celle des garçons.

Je me souviens des récréations où les garçons interpelaient gentiment les filles à travers la grille qui séparait les deux cours.

Je me souviens de la librairie en face de l’école où l’on achetait parfois quelques bonbons à la sortie de la messe le dimanche.

Je me souviens du garagiste juste à l’angle de ma rue et des odeurs d’essence qui arrivaient jusqu’à nous qui habitions juste à côté.

Je me souviens des jours où nous allions au marché de la Libération avec ma mère, la profusion des fruits et des légumes et l’odeur des étals des poissonniers.

Je me souviens du manège sur la place où il fallait attraper le pompon pour avoir droit à un autre tour gratuit.

Je me souviens de la boulangerie, du coiffeur et de la grande droguerie Vacquier qui me semblait être la caverne d’Ali Baba car on y trouvait mille choses hétéroclites.

Je me souviens de la pharmacie, avec son atmosphère si particulière, ses hautes armoires en bois et ses vitrines derrière lesquelles on voyait des fioles diverses et énigmatiques.

Je me souviens du petit train de marchandises qui reliait, par la rue de Falicon (aujourd’hui rue des Combattants en Afrique du Nord), la gare du Sud et la gare centrale, appelée autrefois gare du PLM.

Je me souviens du changement progressif de ce quartier de mon enfance quand la construction de la voie rapide a commencé.

 

UN SOUVENIR...

Ce dimanche-là, je devais avoir environ sept ans, ma mère m’avait donné deux pièces de monnaie avant de partir pour la messe. Une pièce à mettre dans le panier de la quête et une autre pour m’acheter des bonbons à la sortie de la messe à la librairie qui se trouvait en face de l’école et voisine de l’église.

Pouvoir m’acheter des bonbons était pour moi un plaisir plutôt rare et j’avais hâte que la messe se termine !

Mais les deux pièces de monnaie n’avaient pas la même valeur et je n’ai pas fait très attention à celle que je glissais dans le panier de la quête.

A la sortie, je cours à la librairie accompagnée de ma sœur et de mon frère et je choisis toute contente une friandise. Peut-être un coquillage avec un bonbon rouge dedans ? C’est à ce moment-là que j’ai constaté que la pièce qui restait dans ma poche ne me permettait pas de payer le bonbon choisi. Quelle déception et quelle déconvenue !

Je me souviens encore aujourd’hui de la tristesse qui m’a envahie, accentuée par le regard un peu moqueur de mon grand frère.

UN SOIR AUX ACACIAS

Il est déjà très tard, minuit peut-être. Par la fenêtre du salon entrouverte je sens l’air doux de cette nuit de fin de printemps. Bien installée dans mon canapé, il me semble entendre soudain l’ululement lointain d’une chouette.

Je me lève et avec précaution je pousse les rideaux et ouvre grand la porte-fenêtre. Elle donne sur les plates-bandes de la résidence. Elles sont éclairées par de hauts lampadaires bien trop puissants à mon goût. Les fleurs discrètes et odorantes en plein jour sont maintenant beaucoup plus vives et semblent même artificielles. Elles ne peuvent profiter de l’obscurité si nécessaire pourtant à leur bonne santé.

Je m’accoude à la rambarde. Une chauve-souris passe rapidement près de la lumière à la recherche de quelque moucheron.

Mon regard ne s’attarde pas longtemps sur cette végétation et plonge dans les arbres en contre-bas. Je ne fais plus aucun bruit, ni aucun geste, les oreilles grand-ouvertes, à l’affût du prochain ululement. Dans le silence de la nuit, je n’entends plus que ce chant qui remplace les voix des voisins souvent attablés sur leur balcon au-dessus du mien.

Je continue à balayer du regard les feuillages sombres dans l’espoir de voir s’envoler l’oiseau de nuit. C’est alors que je lève la tête lentement et que mes yeux rencontrent la colline d’en face, sombre elle aussi. Mais dans cette obscurité je devine parfaitement la silhouette bien connue de l’Observatoire, si souvent admiré quand le soleil l’inonde de lumière et fait ressortir sa blancheur après la pluie.

Inévitablement je dresse un peu plus encore la tête vers le ciel. C’est une nuit sans lune et je ne peux donc pas assister à son lever derrière les collines, spectacle qui m’émerveille et m’émeut toujours. Je me perds alors, comme très souvent, dans ce ciel noir où brillent pour mon plus grand plaisir mes chères étoiles. Et je reste ainsi un moment. L’ululement ne se fait plus entendre. L’oiseau s’est sans doute envolé. La nuit est silencieuse. Seules quelques fenêtres encore éclairées de l’immeuble voisin indiquent la présence d’autres êtres humains, des terriens comme moi.

Dans le ciel, face à moi, Jupiter étincelant m’emporte vers un infini plein de mystère.

LE QUARTIER IDÉAL

Mon quartier idéal ? Il serait peut-être à lui tout seul comme un petit village ou même comme un hameau.

Quelques maisonnettes au toit rouge, regroupées, mais pas trop, pour se tenir chaud l’hiver telles des oiseaux dans leur nid.

Quelques boutiques essentielles bien sûr pour les achats quotidiens. Une boulangerie avec sa bonne odeur de pain chaud, une boucherie et son étal de couleur rouge, une librairie pour les amateurs de lecture, ouvrages littéraires et magazines divers pour celles (ou ceux) qui aiment préparer de bons petits plats ou ceux (ou celles) qui préfèrent les voitures et les motos.

Il y aurait peut-être aussi une place avec des platanes, une fontaine pour se rafraichir en été, des bancs pour ceux qui, à l’hiver de leur vie, aiment à se retrouver pour se souvenir du temps d’avant.

Il y aurait sûrement un jardin public avec des jeux d’enfants et un terrain vague, tel un carré improbable de verdure sauvage, pour laisser de la place à la nature. On y trouverait au printemps des fleurs des champs, des coquelicots et de la lavande, au parfum si provençal et apaisant.

Mais comment ai-je pu l’oublier ! Il y aurait évidemment dans ce quartier/village, un bâtiment avec une cour et un préau pour accueillir les enfants les jours de classe. Un lieu où quelques adultes leur enseigneraient à vivre heureux ensemble, à découvrir le monde, à connaitre et nommer la nature environnante et les accompagneraient quelquefois, pour cela, jusqu’au champ de lavande.

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Rédigé par Mireille

Publié dans #Ville

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