LES QUARTIERS DE BERNADETTE
Publié le 5 Novembre 2022
CIMIEZ
Colline
Intemporelle
Majestueuse
Inaltérable
Etincelante
Zone privilégiée
IL Y A...
Il y a de la verdure
Il y a des pins majestueux
Il y a des cyprès conquérants
Il y a des oliviers impassibles
Il y a des ruines, vestiges d’un autre temps
Il y a de l’histoire
Il y a de l’émotion
Il y a de l’art
Il y a l’ombre de Matisse
Il y a les œuvres de Chagall
Il y a le calme
Il y a des escaliers cachés
Il y a des sentiers pour sortir de la ville
Il y a des jardins fleuris
Il y a des citronniers lumineux
Il y a des orangers parfumés
Il y a des traditions tenaces
Il y a des chansons entêtantes
Il y a des cougourdons festifs
Il y a le « Festin des reproches »
Il y a des boulistes
Il y a plein de boulistes
Il y a une ambiance bon enfant
Il y a des bâtisses sublimes
Il y a une lumière particulière
Il y a la vie en retrait
Il y a encore un peu du temps passé
LE PORT
- Je me souviens de cette petite plage abritée, sous la digue du port en face du Monument aux Morts.
- Je me souviens de mon apprentissage en patins à roulettes en fer sur le quai du port, exactement où sont les rails du tram maintenant.
- Je me souviens de ce clochard (qualificatif de l’époque et il n’y en avait qu’un dans le quartier) qui enjambait la barrière de la place Ile de Beauté pour rentrer dans un trou du mur en dessous y passer la nuit.
- Je me souviens du vitrier, son matériel sur le dos, qui arpentait les rues en hurlant "Vitrier ! Vitrier !" , il avait un œil qui disait zut à l’autre. Il me faisait peur.
- Je me souviens du « Passagin », le vrai, qu’un gentil vieillard pilotait sans encombres à coups de rames pour nous emmener de l’autre côté du port moyennant un sou.
- Je me souviens de la fenêtre devant laquelle mon père m’installait pour aider mes dents de lait très branlantes à tomber ceci pour éviter que je les avale.
- Je me souviens de mes explorations de la colline du Château. Je l’ai arpentée dans tous les sens avec mon frère aîné. C’était notre jardin, dès que l’on sortait de l’école.
- Je me souviens des « bateaux » improbables, faits de bâtons ou d’écorces diverses que l’on posait dans la rigole qui court le long de la route qui descend du Château et dont on suivait les caprices en courant à côté.
- Je me souviens du spectacle du « canoun de miejour » tiré à partir d’une des placettes supérieures.
- Je me souviens du chemin de l’école, qui traversait le port et remontait le début du boulevard Carnot. En automne on traînait des pieds dans les amoncellements de feuilles des platanes sur le large trottoir.
- Je me souviens la Tour Rouge, de la Villa la Côte et du kiosque où l’on achetait des « gratta keka ».
- Je me souviens de cette pâtisserie mythique traverse Martin Seytour, dont le maître à bord au sourire permanent faisait des monstrueuses meringues à la crème chantilly.
- Je me souviens du « Bon Lait » et des deux sœurs qui tenaient la boutique, adorables figures du quartier.
- Je me souviens du Napoléon, bateau qui reliait la Corse et qui venait s’amarrer sous nos fenêtres dans le bassin Lympia, j’étais fascinée par le nombre de voitures qui en sortait.
- Je me souviens du magasin de bonbons au coin de la rue, détour obligé avant ou après l’école.
JE ME SOUVIENS...
« Je me souviens de mes explorations de la colline du Château ».
C’était en fait notre « jardin », juste au-dessus de la maison. A pied, en vélo, en patins à roulettes. Je me souviens qu’un jeudi, ex « jour des enfants », transformés en « Indiana Jones » avant l’heure, mon frère et moi avions poussé nos aventures-découvertes un peu plus que d’habitude, notamment vers le dessous de la cascade, là où se trouvent des simili-grottes-bassins que nous avions décidé d’explorer à fond et vers d’autres recoins hors sentiers « balisés » qui nous avaient tellement occupés que l’on avait largement oublié l’heure limite fixée par notre maman pour nous retrouver dans le jardin central avant de redescendre. On s’était fait remonter les bretelles ce jour-là pour avoir tant traîné. Il faut dire que maman avait supplié le garde chargé de la fermeture « Monsieur, s’il vous plaît, ne fermez pas, il m’en manque encore deux » (d’enfants). Encore aujourd’hui je regrette de ne pas avoir assisté à ce sketch.
J’ai beaucoup de tendresse pour tous les souvenirs que j’ai engrangés sur cette colline. Beaucoup de mes anciens repères y sont encore. J’y remonte régulièrement c’est un besoin, comme un ressourcement et beaucoup d’apaisement.
MON QUARTIER LA NUIT
Le ciel, après s’être lézardé de larges bandes roses, jaunes puis orangées et carrément rouges vient de s’obscurcir derrière la colline de Pessicart, à l’ouest de la maison. Il est 19 heures. Toujours un peu de douce mélancolie quand je repense à la journée écoulée. Les lumières de la ville s’allument et leur halo se reflète dans le ciel en une couleur indéfinissable. La nuit tombe ensuite très vite. Je suis à l’extérieur. Bientôt la lune surgira de derrière l’Observatoire pour ensuite revenir par-dessus du Mont Boron, passer le Château et se planter au-dessus de la mer. Passés les oliviers à hauteur de mes fenêtres, j’écoute la ville en bas, elle est assez silencieuse, enfin ! La fraîcheur monte du jardin, l’herbe qui a tant souffert cet été reprend peu à peu sa couleur d’origine. De temps en temps, le bruit d’une voiture ou d’une moto qui passe dans l’avenue derrière. Rien de stressant. Quelques appartements éclairés renvoient leurs fenêtres de lumières sur les branches d’olivier. C’est calme. Il n’y aurait pas ces luminaires, on pourrait de temps en temps se demander si d’autres habitent ici. Je me prends à regarder ce cheminement en zig-zag éclairé en pointillé sur une des collines, il s’arrête brusquement au sommet. Par contre au-delà, il n’existe plus rien du Puy de Tourrettes ou même du Baou de Saint Jeannet, je les retrouverai demain matin. Au-delà des palmiers et des tourelles du Régina, de l’autre côté où se porte mon regard, la ville semble engloutie pour sa vie nocturne.
MON QUARTIER IDÉAL
Il y aurait avant tout de l’espace. Il serait sur les hauteurs d’une colline, parsemé d’espaces verts, alvéoles de poumons en mal d’oxygène.
Il y aurait quelques maisons toutes simples, comme posées au hasard. Des terrasses immenses en guise de halls d’accueil bienveillants. Il y aurait quelques petits commerces, juste ce qui est nécessaire, comme pour nous maintenir le plus possible dans ce microcosme.
Il y aurait des jardins, parcelles colorées pour les potagers, avec des courges comme des tabourets stylés, des tomates comme les feux stop dans les embouteillages, des haricots grimpants comme une barrière pour cacher le linge qui sèche derrière.
Il y aurait un énorme mimosa, comme le soleil les jours où il ne sort pas, un saule pleureur comme un immense parasol de verdure, des citronniers et des orangers comme des lampions de « balletti » et tout en bas, des cyprès hautains comme des gardiens de la colline.
Il y aurait un centre de vie dans ce petit quartier, avec quelques bancs ombragés, invitations à quelques papotages inter-générations ou bien incitations à la lecture tranquille.
Il y aurait une pièce d’eau vivante, abreuvoir pour les oiseaux qui s’avancent avec précaution, alimentée par un filet d’eau surgi de nulle part dont le glouglou, comme un long massage, nous inciterait à la rêverie.
Il y aurait une vie simple, comme un sourire devant un dessin d’enfant.
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