JE ME SOUVIENS...
Publié le 12 Octobre 2022
Je me souviens du trolley obligé de s’arrêter car il avait perdu une de ses perches
Je me souviens de la petite épicerie de Madame Maurin, ouverte sept jours sur sept, véritable caverne d’Ali Baba où l’on trouvait de tout
Je me souviens du passage à niveau où le garde-barrière arrêtait la circulation pour laisser passer la micheline poussive
Je me souviens de l’école Nazareth où l’uniforme (jupe plissée bleu marine et chemisier blanc) et discipline étaient de rigueur
Je me souviens du charbonnier dont le visage recouvert de suie nous faisait si peur
Je me souviens du vitrier qui criait dans la rue et nous réveillait en sursaut
Je me souviens de la voiture qu’il fallait démarrer à la manivelle :elle se montrait souvent récalcitrante et mettait les nerfs du conducteur à rude épreuve
Je me souviens du bazar en face de l’école où l’on achetait pour quelques centimes des bonbons aux noms évocateurs : coquillage, carambar, malabar, réglisse…
Je me souviens du marchand de « poutine » installé au coin de la rue et qui interpellait les passants d’une voix puissante
Mais aujourd’hui, tout cela n’existe plus que dans mes souvenirs...
Une Histoire de Manivelle
Comme chaque dimanche nous nous préparons pour notre promenade hebdomadaire. Mais aujourd’hui est un jour spécial car nous allons étrenner la nouvelle voiture de papa. Elle est longue, noire et brille de mille feux. Elle nous attend devant la porte et c’est avec une grande fierté que nous nous installons à l’intérieur : maman, ma sœur Michèle, ma tante, ma cousine et moi. Papa a décidé de nous emmener à Cagnes sur mer, une véritable aventure ! C’est une magnifique journée de printemps et nous sommes heureux. Alors que nous roulons depuis un moment, la voiture émet soudain un bruit bizarre, et, après quelques soubresauts, s’immobilise au milieu de la chaussée. Consternation générale ! Mais papa nous rassure aussitôt : « Ne vous en faites pas, je vais la faire repartir en un quart de tour ! ». Il sort de la voiture la manivelle à la main, ignorant qu’il va devoir livrer un véritable combat. Au premier tour, rien ne se passe. Au deuxième tour, toujours rien. Au troisième tour la voiture tressaute : nous reprenons espoir. Le visage de papa s’éclaire mais pas pour longtemps. Au quatrième tour c’est de nouveau le silence. Derrière nous une voiture arrive et klaxonne. Papa accélère la cadence et des gouttes de sueur perlent à son front. Mais la voiture capricieuse ne veut rien savoir et s’enfonce dans son mutisme. Une deuxième voiture arrive et klaxonne à son tour. Le stress de papa augmente et gagne l’habitacle. Finalement, épuisé, papa abandonne. Après nous avoir demandé de descendre, il nous ordonne de pousser la voiture, ce que nous faisons sans discuter. Quelle fin peu glorieuse pour cette promenade tant attendue et dont nous étions si fiers !