SAGA 3

Publié le 19 Mai 2022

Je sens cette histoire aussi trouble que ce tableau. Les années ont passé, Aubergine a quitté Briscaille depuis longtemps. Au début quelques lettres sont parvenues à l'auberge dans laquelle sa sœur a repris la gestion avec beaucoup de réussite. Les terrains à bâtir n'étant pas chers, de modestes maisons et des villas huppées furent construites près du village. Des boutiques ouvrirent dans la rue principale, dont une supérette d'un logo connu. Des artistes-peintres et photographes de renom séjournèrent à l'auberge, exposèrent leurs œuvres. Briscaille ressembla de plus en plus à un petit « Saint-Paul » où à la belle saison les jeux de boules de l'auberge ne désemplissaient pas. Pendant des années, l'essor de ce village se maintint au détriment de quelques anciens défavorisés qui ne voyaient pas ce bouleversement d'un bon œil. La jeune sœur d'Aubergine était devenue une très jolie femme très courtisée qui menait son affaire de main ferme. Toujours vêtue en mauve parme elle était connue sous le nom de Violette. Son jeune fils maintenant avocat s’intéressait au devenir du village. Il briguait la mairie car le maire actuel pourtant compétent, mais vieillissant, se sentait dépassé par l'évolution rapide de Briscaille. Pourtant malgré cette réussite apparente, des doutes et une zone d'ombre persistaient. Qu'était devenue Aubergine ? Quand on l'évoquait devant sa sœur, Violette détournait la conversation, un voile de tristesse dans ses yeux. Puis, en 2021 les événements à venir se précisaient en Russie. Alors Violette nous avoua que sa sœur et elle étaient nées en Russie, mais naturalisées françaises. En quittant Briscaille, Aubergine était entrée en URSS pour retrouver de la famille et avait été emprisonnée par les autorités. Libérée depuis peu elle espérait pouvoir revenir au village qui l'avait adoptée. De nombreux ressortissants russes fortunés avaient élu domicile dans ce village. Alors que jusqu'à ce jour la population vivait en bonne intelligence, l'invasion de l'Ukraine par la Russie jeta un froid dans les relations entre les communautés. Un trouble aussi profond que sur la photo plana sur le village. Pour dissiper ce malentendu les immigrés demandèrent au maire de rassembler tous les habitants pour qu'ils s'expliquent sur leurs désaccords de cette invasion. Alors qu'un samedi soir du mois de juin la place du village et les rues et ruelles étaient décorées pour fêter « la Saint-Briscaille » , comme dans un conte de fée, on vit sortir d'un taxi Angélique s'appuyant sur une canne, vieillie, mais resplendissante de bonheur de retrouver son « chez elle ».

Louis

Rédigé par Louis

Publié dans #Ecrire sur des photos

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