TRI-MARRANT
Publié le 23 Décembre 2021
QUATRIÈME DE COUVERTURE
Fiction et friction
Mésaventures de Godric personnage de fiction affublé d'une épouse tellement grosse qu'il ne peut pas en faire le tour. Il est relégué en Italie par l'auteur sous le nom de Rodrico car il envisageait de s'écrire lui même la suite de ses péripéties. Chauffeur d'U, grutier, louvoyeur, mendiant. Retour à Nice en deux chevaux rose bonbon.
RÉSUMÉ
Moi ya n'a plus savoir ou est Godric. Zut, je me mets à parler comme lui. C'est qu'il m'en a fait voir ce loustic. Il s'est fait arrêter par la police avec un cadavre dans son taxi. Lui dire Abanien, pas bien parlé français, il est relâché mais convoqué le lendemain et mis en examen pour meurtre. Il s'explique : moi pas tué, si j'avais voulu, pas fait dans la voiture, demi journée pour nettoyer sang, taches pas parties. Il est quand même retenu mais arrive à s'évader. J'arrive à l'extrader en Sicile sous le nom de Rodrico. Sans un rond il fait la manche mais se fait voler le peu qu'il a par plus malin que lui. Sa femme énormément maigrie, qui le recherche, le retrouve, le récupère. Vivant de ses charmes, elle a acquis un petit pécule, et ils décident de revenir à Nice. Ils me demandent un rendez-vous. C'est aujourd'hui, je les attends en regardant par la fenêtre. A ce moment-là, j’entends d'abord puis vois arriver une deux chevaux rose qui se gare en enfumant une bonne partie de la rue. Je les reçois, mon épouse a préparé un bon café dont l'odeur est surpassé par le parfum de Mme Rodrico qui égale en intensité l'odeur des chiottes d'une station service dont le personnel serait en grève depuis plusieurs jours. Ils arrivent en conquérant, veulent reprendre à leur compte la suite de leurs aventures. Je les refoule brutalement et stoppe définitivement le déroulement de cette histoire. Sauf que, quelques jours plus tard, dans un petit village de l'arrière pays faisant face aux pistes de skis de Gréolières, j'ai failli me faire renverser par une deux chevaux rose pilotée par une amazone.
TRI-MARRANT
On ne devrait pas nier que la liberté de mouvement nous a toujours exalté. Dans notre esprit, nous l'associons à la fuite devant l'histoire, l'oppression, la loi et les obligations irritantes, nous l'associons à la liberté absolue, et pour trouver celle ci nous avons toujours pris le chemin de l'ouest.
Wallace Stenger, L'Ouest américain comme espace vital.
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Godric
Je m'appelle Godric, Je suis Albanien d'une petite contrée perdue au fin fond de l’Albanie. Je suis réfugié en France depuis, depuis… un certain temps. Je suis chauffeur d'un taxi hu-vert car je roule à l'électricité. Mon grand-père, lui, montait à cheval à hue et à dia. J'amène deux clients de Nice-est à l'aéroport. A mi chemin, à la place Masséna, un des deux clients me fait signe de m’arrêter, lui descend là, son ami continue jusqu'au terminus 2 de l'aéroport. Je m'arrête, fais signe à mon client qu'il peut descendre, que nous sommes arrivés, mais il ne bouge pas. Je bougonne en me disant : il attend que j'aille lui ouvrir la portière, mais il s'était endormi, je le secoue, voilà-t-il pas qu'il s'écroule, mort. J'appelle un agent de police, on a le choix, ils sont nombreux. Celui que j'interpelle n'a pas de chance, il aurait préféré que ce fut un autre. Là, il était peinard, il se dandinait d'un pied sur l'autre, alors que maintenant il est embarqué dans une histoire qui l'em..… Il bigophone à sa hiérarchie, et moi je perds mon temps. Heureusement je m'étais fait payer la course avant de partir. Des inspecteurs arrivent, ils m’interrogent. Moi dire Albanien, pas bien parlé français, explique course, un descendu Masséna, l'autre trouvé mort arrivant ici. Infirmiers enlever le cadavre et moi râler car banquette imbibée de sang. Comment faire pour nettoyer ? Poireauter encore une heure, réexpliquer mon parcours, rendu mes papiers, chercher clients à ramener en ville, pas trouver, journée de me…
Je reprends la main car le pauvre Godric ne saurait plus quoi faire. Je l'ai embarqué dans cette histoire sans qu'il le sache. J'espère que cet incident (un peu plus qu'incident quand même, il y a un mort) ne sera qu'un entrefilet dans Nice Matin de demain. De toute façon il n'a pas le temps de lire car il se décarcasse pour détacher la banquette arrière. Je l'entends râler comme si j'étais à côté de lui : Bordel, il a perdu au moins cinq litres de sang ce con ! Un peu rustre ce Godric, comme épitaphe il y a plus sympa. Ce qu'il ne sait pas encore, c'est que le lendemain il sera convoqué par la police pour complément d'informations. Et il va y aller tranquilos, la gueule enfarinée. Le lendemain j'arrive le premier, invisible, car je vais souffler les dialogues. :
L'inspecteur :
– Bonjour Mr Godric, je ne vais pas y aller par quatre chemin, je vais vous le dire tout de suite, incessamment sous peu, sans vous faire attendre : vous êtes supposé être l'auteur du coup de couteau et de ce fait vous êtes inculpé d'assassinat sur la personne dont on ignore tout pour le moment car aucun papier d'identité était en sa possession.
Godric :
– Moi pas tué, si j'avais voulu, pas fait dans la voiture, demi-journée pour nettoyer sang, taches pas parties.
– Mr Godric voulez vous téléphoner a Mme Godric pour l'avertir que vous êtes en garde à vue.
– Pas Mme Godric, ma femme Mme godiche, elle a deux mains gauches, laisse tomber assiettes, couverts, verres, casse tout. Elle a gros cul, obligée passer en biais les portes, WC repousser une cloison, sinon pas pouvoir s'asseoir, moi longs bras, mais pas pouvoir faire le tour, très jolie ma femme, moi aime beaucoup. Pas téléphone fixe, pas portable non plus.
– Je vais envoyer un homme à l'adresse notée sur votre carte d'identité pour l'avertir.
Pauvre Godric, les ennuis vont continuer pour lui, sa carte d'identité est périmée et il a changé d'adresse. Heureusement on ne lui a pas retiré son portable. Une heure après, toujours retenu, il demande à aller aux toilettes qui sont éloignées de la pièce où il est retenu. Un agent l'accompagne, lui ouvre la porte. Godric qui n'est pas un enfant de cœur le pousse à l’intérieur et verrouille la porte. Il trouve une sortie secondaire et se fait la belle. Et moi je me retrouve avec mon principal personnage qui se promène dans la nature et qui va faire conneries sur conneries. Bien réfléchi, pour le moment je le laisse se dépatouiller tout seul en espérant qu'il ne se fasse pas reprendre. Je vais faire intervenir un quatuor de mercenaires Caucasiens pour me le retrouver. En deux jours ils me le réincorpore dans le roman et pour les rétribuer je leur offre à chacun un cageot de nèfles. Godric fait profil bas, je lui procure une nouvelle carte d'identité au nom Gaglac, je supprime sa famille et le voilà célibataire, grutier dans une entreprise du bâtiment. Évidemment c'est un très bon ouvrier, il gravit vite les échelons et se retrouve à manœuvrer la grue, installé dans la guérite tout en haut. Il a le vertige cet imbécile, j'ai vraiment pas de bol avec mes personnages, je créé toujours des nuls, va falloir que je me concentre d'avantage. Je stoppe mon histoire. A plus.
Rodrico
Moi y a n'a plus savoir où est Godric. Zut alors, je me mets à parler comme lui. C'est qu'il me donne du mal ce personnage. Dès que j’arrête d'écrire il se tire, son vouloir de LIBERTÉ ne lui fait accomplir que des bêtises. Quand il est dans la mer... il revient vers moi, et quand je le réintroduis dans une histoire il veut encore se la raconter tout seul. Donc, il y a quelques semaines, après ses histoires de grues et de taxi, je l'ai naturalisé italien en ajoutant un « o » à son nom, puis je l'ai laissé vivre sa vie.
Le nouveau Rodrico est parti en Sicile. Je l'ai un peu oublié, repris par une nouvelle vie d'après confinement. Puis Mado me tire de ma léthargie, et je repars à la recherche de Rodrico. Mais, en y repensant, Rodrico a eu beaucoup d’ennuis avec sa grue (élévateur) tétanisé par le vertige et sa grue (sa femme) car en plus de sa clientèle payante, elle avait un amant, un athlète atèle qui lui, avait de longs bras. Après une enquête sérieuse de plusieurs jours je le situe dans les quartiers chauds de Cagliari sans une lire en poche. Les siciliens n'ont pas encore compris que la nouvelle monnaie est l'euro, ils sont pour les traditions. Donc, Rodrico sans un rond (dans ce cas le mot rond et international) essaie de faire la manche, dépose sa casquette par terre, et le premier tire-laine qui passe la lui fauche sans se presser, dans un geste tout a fait naturel. Et il pleut, il pleut. Bon prince je le dirige vers une place ou il y a des arcades, je le place dans la plus fréquentée. La foule passe sans le voir, il n'a même pas une cédille que l'on pourrait lui subtiliser en passant. Il pleure sur son passé, il voudrait bien retrouver ce semblant de LIBERTÉ qu'il avait en attendant les éventuels clients dans son taxi…
Tiens ! Une belle femme toute habillée de noir comme le veut la tradition sicilienne, sans doute pas très catholique, s’arrête. Cette belle femme regarde intensément ce mendiant qui s'obstine à regarder ses pieds, puis s'écrie :
– Godric, depuis le temps que je te cherche, regarde, j'ai tellement jeûné que j'ai perdu au moins quinze kilos. Tends-moi la main que je la prenne de nouveau, tu me reconnais : Mme godiche tu m’appelais, moi faire imbécile pour être tranquille, toi gros couillon, regarde-toi: crado, crevé, affamé, perdu. Ah mamamia, toi venir avec moi, moi t'aime toujours, maintenant toi pouvoir m'enlacer, ce soir libres de nous aimer en remettant plusieurs fois sur le sommier nos ébats.
RODRICO en baissant la voix :
– Fini Godric, maintenant Rodrico. Avec l'excuse que je ne travaillais pas, tu t'en es payé des mecs, les vieux moches, tu les faisais payer cher, surtout les montagnards, ça leur rappelait les escalades en rappel. Les jeunes bien sûr te reprenaient tout.
– Je n'y pouvais rien si tu avais les bras trop courts, c'est bien ce que tu disais, et ce n'était pas que les bras ….. Allez viens, je loue une chambre dans le bas quartier.
– Juste ce soir, parce que je veux être LIBRE. Tu comprends, j'aspire à la LIBERTÉ. Je ne veux plus dépendre de quelqu'un ou de quelque chose. Surtout plus de cet écrivaillon qui m'a sorti de mon néant pour m'embarquer dans des histoires pourries. Tu ne t’es jamais demandé comment tu es apparue ? Il faut fuir, le semer, l'enfouir dans des terres arides, qu'il en crève.
– FUIR, tu crois que c'est ça la LIBERTÉ. Il vaut mieux négocier avec lui, peut-être lui graisser la patte. Je ne crois que ce soit un mauvais bougre, c'est peut-être sa façon d'être libre, de raconter ce qu'il veut sans être contrôlé. N'est-ce pas lui qui a dit :
– Il nous restera un soupçon de LIBERTÉ tant qu'un détecteur de pensées ne sera pas inventé. Et puis, tu sais bien comme moi que nous ne sommes que des marionnettes entre ses mots. Et de tous ces maux choisissons le moindre, faisons comme les marionnettes, baissons le rideau en disant : bonne nuit les petits.
Rodrico… la suite..
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Orage, O désespoir de voir la Sardaigne inondée à la saison des châtaignes. Cette pensée me ramène à mon couple d'insoumis, d'autant qu'un courrier du consulat italien m'informe que Mr et Mme Rodrico me rendront visite ce jour. La fenêtre ouverte, je regarde dans la rue, mon instinct m'avertissant de leur proche arrivée. Un bruit fracassant d'échappement libre attire mon attention sur le bas de la rue où je vois apparaître une 2CV rose bonbon, d'une autre époque, qui aurait subi quelques dégradations lors de certaines dérives de manifestations. Un emplacement libre leur permet de se garer, me permettant de profiter de la bonne odeur que dégage la voiture. Le couple s’extirpe de l'habitacle, je leur fais signe de monter. Je les fais rentrer, j'ai du mal à les reconnaître, ils ont rajeuni, ils parlent un français châtié, mais le parfum de Madame, d'une odeur d'eaux des toilettes où l'on n'aurait pas tiré la chasse, envahit tout l'appartement. Heureusement que le goût du café que mon épouse nous sert égaie un peu l'atmosphère ! Puis Mr Rodrico prend la parole, il vient revendiquer quelques améliorations dans son statut de personnage de roman. Il n'est pas content de la tournure des événements. Sa demande est un ultimatum, il veut la liberté d'écrire lui-même la suite de mon histoire et me laisser sur la touche. Je me touche, je me pince pour être sûr de ne pas rêver. Je ne sens rien ! Donc je rêve. Et mon rêve se poursuit car je les prends tous les deux par un bras, et je les mets dehors, me retenant difficilement de leur filer un coup de pied aux c.... Mais dans mon rêve, je suis libre de les bousculer pour qu'ils dégringolent les escaliers à défaut de les descendre. C'est ainsi que je me découvre un sixième sens. Je me « sens » bien d'avoir agi ainsi. Pas question d’odeur, mais de satisfaction de soi. Un sentiment de liberté, délesté de deux personnages illusoires.
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Un mot sur la deuxième photo que j'allais occulter.
Autant la 2CV est ringarde, autant cette jolie femme est d'actualité, libre. Si l'on reste dans la gamme des «Citroën» et que cette jeune femme est aussi avenante de face que de dos, elle serait DS. Elle doit s'appeler Claudine, car dans une publicité à la télé, il se répète souvent que Claudine est libre ! C'est bon d'avoir la liberté d'écrire n'importe quoi !
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Le jour est l'inverse de la nuit.
Le raisin est un fruit à pépins ainsi que la mandarine.
Dans le miroir, mon visage est fripé comme une pomme reinette.
Hormis la couleur, une rose rouge ressemble à une rose blanche.
Pour avancer à reculons, se positionner en contre sens.
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Je me sens libéré depuis que j'ai relégué mes deux personnages irréels dans les oubliettes d’où je n 'aurai jamais dû les sortir. Donc, l'esprit libre, je me promène dans un sous bois à quelques kilomètres de Nice, à la recherche de champignons. Un oiseau virevolte au-dessus du lit d'une source qui sourd d'entre les pierres. Le gazouillis de l'eau et de l'oiseau s’emmêlent dans ce décor automnal. La pleine lune d'un blanc lumineux se mire dans la neige immaculée tombée la veille sur les pentes de Gréolières. Puis une bonne odeur de cèpe vient me dilater les narines. J'avance lentement car j'approche d'un tapis de mousse sous lequel une foison de champignons sortis la veille pointent leurs chapeaux. Mon panier rapidement rempli, je retrouve mon vélo que j'avais planqué dans un fourré. Je rejoins le chalet en pédalant comme un Virenque à l'arrivée d'une course de côte. Sur ce chemin étroit j'ai dû me serrer sur le bas coté pour laisser passer une 2CV rose pilotée par une super Nana, légèrement plus vêtue que la fille du tableau. Ouvrant la porte du chalet une bonne odeur de café me rappelle que j'étais parti sans déjeuner. Les amis sont étonnés de me voir car ils me croyaient encore couché.
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LIBERTÉ ET AMITIÉ EN VRAC
Quand on a l’amitié
A donner en partage
Sentiment très prisé
Auquel on s’attache.
Quand on a l’amitié
Que l’on prend de l’âge
Bouée de sauvetage
Et point d’ancrage.
Bien plus fort que l’amour,
Jamais renié
Se tisse de jours en jours
Pour l’éternité.
Quand on prend la liberté
De choisir l’amitié
Ce noble sentiment
Nous comble pleinement.
Liberté, liberté chérie !
C’était un très bon choix,
Tu nous files entre les doigts,
ET tu nous déchoies.
Avoir le liberté d’écrire,
D’en pleurer ou d’en rire
De bien trouver le sujet
D’en extirper son entité.
Liberté, ton nom que l’on claironne
Se modifie et ne résonne
Que maladif et affaibli
Par des décrets abusifs.
La liberté de 1945
A été bien fêtée
Par tous les rescapés
Avec du rouge et un blanc seing.
Bien sûr, la liberté se mérite,
Les entreprenants, les émérites
Ne s’encombrent pas de rites
Mais ils militent.
Si l’on prend la liberté
De décider de se cloître
Pour restaurer le futur de passé.
Eh bien l’on n’est pas couché !
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SLAM EN LIBERTÉ
Je pars au hasard, sans regarder derrière.
Il n'est pas trop tard, à vous revoir mes frères.
La vie m'a souri, pas toujours, c'est ainsi.
Mon sac sur l'épaule, un, deux, trois, je décolle.
Mon but c'est l'horizon, avec ou sans raison.
Raison éphémère, je pose mon cul sur une pierre.
Je regarde le monde, sans raison, je déraisonne.
Pourquoi suis je ici ? En haut de la colline.
C'est bête d'être bête, lion ou zibeline.
Reprends ton sac dis, il te reste quelques lieux,
Encore je m'entête, mais d'ici quelques lieues
Le décors changera, ce sera oasis ou Sahara,
Ou par-dessus les océans
Je me poserai sur mon séant,
Suant sang et eau sous un soleil torride,
Ou pataugeant sur un sol humide.
Seul, perdu dans cette immensité,
Des quatre coins de la terre avec humilité,
J'en reviens fatigué, heureux d'avoir vécu mon idéal.
Après cet intermède, bonheur de retrouver mon bercail.
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Louis NARDI