VAGUES A L’ÂME
Publié le 17 Décembre 2020
La pluie ruisselle sur les vitres. Les effluves de café frais moulu remplissent la pièce d’arômes brésiliens. Pourtant c’est la baie des Anges, en bas, qui se prépare pour la nuit ce n’est pas la baie de Rio.
Le soleil avait illuminé plus tôt ces quelques kilomètres depuis le refuge de pêcheurs de Carras, les colonnes du palais de la Méditerranée, magnifique salle de spectacle transformé en hôtel de luxe avec ses statues « Botero » qui interpellent le promeneur, jusqu’à la tour Bellanda, fière, vigie indestructible en surplomb de l’ancien port sur la plage de galets.
Les cartes sont étalées
Inventant au fur et à mesure
Une destinée…
Le regard vide s’envole, survole la corniche, rase les énormes bouées de la baie de Villefranche, s’apaise sur les tuiles vernissées de la villa de David Niven promenade Rouvier à Saint-Jean. La splendeur passée est toujours là. Par les baies à petits carreaux le piano à queue diffuse en silence les harmonies de fêtes disparues. Le petit port est vide de tout voilier et les rouleaux d’une mer en colère lèchent les quais, les jarres de fleurs sont à terre.
Le soleil glisse sous les nuages
Mon regard rêveur
Accroche un visage connu
Roi de cœur suivi du valet de carreau, plutôt bonnes nouvelles…
Sa moustache blanche, son dos voûté, son éternel chapeau de paille, Alexis Mossa en a peint avec amour des coins de nos chères vallées, comme autant de souvenirs de Falicon à la Tinée et de Villeneuve à Contes. Lui qui avait su capter la luminosité si intense de nos paysages et qui nous manque aujourd’hui.
Un mot bien courant me vient aux lèvres : merci…
Son visage s’estompe. Un brusque vent de Ligurie a brouillé les repères.
J’aperçois une forme floue
Comment saurais-je ?
Demandons-le aux cartes !
Un coup de tonnerre retentit, la machine à café siffle. C’est ainsi que l’orage a éclaté. Dehors à travers la vitre, je regarde, j’écoute. J’écoute tomber la nuit. Je cligne des yeux sans vraiment réfléchir. A quoi bon…
Gérald