RAMINA

Publié le 13 Mars 2020

RAMINA

Ramina chantait comme personne.

Il y avait belle lurette que Grobis, le chat à fleurs, avait repéré cette tourterelle étonnamment célibataire, qui était arrivée dans le jardin au début du printemps. Ses trilles le charmait, il devait le reconnaître, surtout quand elle attaquait les grands airs d’opéra où elle excellait.

Il en oubliait parfois qu’il avait aussi l’intention de s’en faire un festin, ce qui était dans l’ordre des choses.

Tenter de l’attraper tout de suite, ou découvrir un nouvel air… Grobis était perturbé par ce choix cornélien.

 

Ramina l’avait bien compris, qui, telle Schéhérazade, ne distillait qu’un grand air par soirée et prenait garde en outre de ne choisir que des positions hautes où Grobis ne pouvait l’atteindre.

 

L’arrivée de deux nouveaux jardiniers vint compliquer la situation.

Le premier était originaire de Centrafrique, plus précisément d’un village où la spécialité culinaire des menus de fêtes était le ragoût de tourterelle. Dès le premier jour il remarqua Ramina et se promit de la capturer, de lui tordre le cou, et de l’emporter discrètement dans la gamelle de sa pause-repas.

 

L’autre jardinier, mexicain converti au bouddhisme, nota lui aussi la présence de Ramina et se promit de la recueillir et de l’apprivoiser car il était conquis par ses prouesses musicales.

Fort aise, il avait envie de l’entendre chanter tout l’été !

 

L’après-midi touchait à sa fin. Chacun avait son plan quand Ramina attaqua « Addio del passato »

Et l’on ne sut jamais qui, du chat Grobis ou des deux jardiniers, avait été le plus habile.

 

Ce qui est certain, c’est qu’on ne revit plus jamais la tourterelle dans ce jardin devenu banalement silencieux.

 

Rédigé par Brigitte

Publié dans #Ecriture collective

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