LA CAMÉRA ÉTAIT À L'OMBRE
Publié le 28 Janvier 2020
La caméra était à l’ombre du parasol, juchée sur une estrade. Le metteur en scène assis à côté donnait quelques instructions dans son porte-voix.
Ecrasé de soleil, il avait chipé le haut de forme de l’accessoiriste en attendant que l’autre tire-au-flanc assis devant l’estrade veuille bien bouger son cul pour aller lui chercher sa casquette.
Il pourrait par la même occasion ramener deux ou trois bières bien fraîches. On peut rêver ! Allez, on tourne !
Pas possible, il est midi et demie, la nourriture refroidit dans les assiettes. Pourvu qu’il y ait salade niçoise au menu.
Menue, menue, comme ma rémunération pense in-petto le metteur en scène ; à partir d’aujourd’hui je ne fais plus que des films américains avec Marylin et John.
En attendant, il faut le faire ce film. Allez, tout le monde en place, on reprend. Je sais, il fait très chaud mais c’est la dernière prise. Après, pause déjeuner pour tout le monde !
« Dernière prise » a dit le metteur en scène. Mais personne n’y croit. Tous traînent les pieds. Même la pause déjeuner ne fait avancer personne. C’est un mauvais jour.
Et la pluie s’en mêle, pluie d’été, il va y avoir de l’orage. « Vite aux abris » dit Julien le perchiste, en riant aux éclats « Excusez-moi, c’est nerveux ». On n’a pas une scène avec de la pluie…. Oui mais pas tout de suite, dommage… Regarde Martine avec son parasol en guise de parapluie. Remarque, dit Julien, c’est quand même bien dans le thème… Regarde la pluie s’est arrêtée, remarque le metteur en scène. On reprend. On tourne.
Taratata, on tournera demain, j’ai les gosses à aller chercher à l’école de musique.
Et voilà comment le quotidien plombe le rêve !... Julien le perchiste déploie puis rengaine la lance à incendie qui génère la pluie… et lance une œillade meurtrière à Julie, la jeune première aux prises avec le prédateur notoire qui les dirige… Encore une scène en vue !
Il ne manque plus qu’une scène de ménage, c’est vrai que Julie avec sa jupe ras les fesses allume tous les hommes du plateau et alors là maintenant avec le tee-shirt mouillé, comment vous dire ???
Dommage qu’elle ne soit pas gaulée comme l’était Marylin, j’aurais bien endossé le rôle de « Mister President» !