LA NATATION, SPORT SALUTAIRE
Publié le 2 Août 2016
Tiré du recueil "ballon rond et plumes d'azur", un petit plongeon dans l'eau fraîche...
J’attends, dans mon fauteuil roulant, au bord de la piscine du Palais des sport Jean Bouin. J’essaie d’être calme, m’efforce de me concentrer sur ma respiration. Je capte l’odeur de javel et le vacarme assourdissant, des sensations que je retrouve dans toutes les piscines, elles me sont familières, elles me rassurent. Je me sens en terrain connu, presque chez moi. J’avance mon fauteuil, un ami le tient juste au bord, je me penche en avant et bascule dans l’eau. Un geste souvent répété. Il y a une sorte d’ascenseur dans cette piscine. Hors de l’eau, on s’assoit sur un siège qui descend dans l’eau. Je l’évite.
Dans l’eau, j’attends le sifflement de départ. Ça y est. J’avance, me bats contre l'eau. J’allonge mon corps, me transforme en fusée. Comment offrir le moins de résistance à l’eau ? J’exécute les gestes appris et longuement répétés. J’adapte ma respiration à mes mouvements. Plus vite ! Mes oreilles bourdonnent, tellement l’effort fourni est intense. L’eau est froide, mais ma peau, mon corps sont brûlants. Ai-je une chance ? Il ne faut pas penser, juste nager, se concentrer. Encore trois longueurs. Un dernier effort. C’est fini.
Au bord de la piscine, je me tiens à la barre. Mon cœur bat la chamade. Je suis épuisée. Ma maman vient. Elle m’entoure de ses bras, m’aide à sortir du bassin. Cette fois-ci, je prends l’ascenseur. Je m’essuie, me mets un peignoir. Le coach s’approche de moi, un grand sourire aux lèvres.
– Félicitations ! Tu t’es dépassée ! C’est ton meilleur temps. Paris t’attend.
Il s’accroupit à côté de moi. C’est toujours un problème pour les gens « normaux », ils ne savent pas comment se mettre. S’ils restent débout, ils me regardent d’en haut, ce qui doit les gêner. Alors, souvent, ils s’accroupissent, mais ils ont mal aux jambes au bout d’un moment, ils se tortillent dans tous les sens, essayent de déplacer leur poids d’une jambe à l’autre. La conversation en pâtit, mais ce n’est pas de leur faute. Donc, le coach, accroupi à coté de mon fauteuil roulant, redevient sérieux :
– Il y a encore du chemin à faire jusqu’aux jeux Olympiques. A Paris, tu vas tomber sur les meilleurs de toutes les régions de France. Il faut que tu t’accroches. Rien n’est encore gagné.