ALLIANZ RIVIERA

Publié le 8 Août 2016

Une drôle d'aventure sur le stade de Nice... et de la SF pleine d'humour dans le recueil "Ballon rond et plumes d'azur"...

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Habituellement au mois de juin le soleil brille, nous l’aurions alors probablement vu venir. Mais cet après-midi-là le ciel déroule bas un tapis de nuages aux mille nuances de gris.

Assis tout en haut de la tribune de presse, je commente l’événement pour radio Dérision.

  • C’est parti. Le sifflet de Monsieur l’arbitre donne le coup d’envoi du match éliminatoire de la Coupe d’Europe 2016 qui oppose la Péricie en rouge au Livoria en bleu…

  • Bien fait ça de la part de l’avant-centre Péricien…

  • Une passe bien ajustée pour son latéral-droit…

  • Allez peut être que là, il y a moyen de faire quelque chose…

  • La Péricie s’installe dans le camp Livorian…

  • Oh ! Quel tacle, il y a faute là, Monsieur l’arbitre…

  • Effectivement l’arbitre siffle un coup franc, bravo…

  • Nooon, le ballon passe à ras du poteau…

  • Dégagement du goal loin devant…

  • Donné de la tête au numéro neuf, Tresi ; il a du champ…

  • Dommage il n’arrive pas à piquer sa passe, trop petite, trop étriquée, c’était pourtant bien joué…

  • Prugan intercepte et ça repart, petit pont, c’est un triangle de folie qui déboule chez les Livorians, ça peut allez très vite…

  • Berian récupère, il est bien rentré comme ses partenaires…

  • Ils vont réussir à les faire douter…

  • Ça alors… Incroyable ! Une soucoupe volante se pose dans le rond central, elle baigne dans un halo vert pomme…

  • Le jeu continu. En première intention, je dirais, Berian frappe…

Le halo vert s’intensifie, un éclair d’une puissance inouïe fige instantanément toutes les fonctions, tous les sens des spectateurs, des joueurs, même de Monsieur l’arbitre. Chacun reste dans l’état, la position où il était à l’instant du flash. Plus un son, plus la moindre odeur, plus un geste ; curieusement seuls les yeux, donc la vue, perdurent.

Ahurissant ! La bière renversée ne coule pas, la jambe de Berian reste tendue, le goal à l’horizontale entre les poteaux, le ballon stoppé à deux mètres du sol. Impossible ? Pourtant je n’élucubre pas.

De la soucoupe immobile à dix centimètres de la pelouse gicle une grosse poignée de petits ballons qui retombent en éventail. A l’impact, chaque ballon se transforme en humanoïde, mâle, femelle ? A priori rien ne permet de le déterminer. Tous sont dotés d’une tête de la dimension de la balle initiale, d’un corps de taille, de corpulence variables. Tous sont uniformément vert pomme, visiblement la couleur à la mode dans cette galaxie, mais laquelle ? Homo c’est certain puisqu’ils marchent debout sur deux jambes, fils de la terre, quelle terre ? Sont-ils une branche de notre humanité ou est-ce l’inverse ? Sont-ils venus en mode shopping ? Ici nous avons l’habitude de recevoir des touristes, noirs, blancs, jaunes ; des verts comme ça, nous n’en avions encore jamais vus.

Ils se livrent à des tâches bizarres. L’un s’approche de Monsieur l’arbitre, tourne autour pour finalement lui arracher un poil du nez qu’il glisse dans sa jambe comme dans une poche. Un autre sous la jambe toujours levée de Berian lui arrache un poil de la cuisse, un troisième cueille un poil dans la barbe du goal. Ces imberbes semblent passionnés par notre pilosité. Sans que je l’ai vu venir un fluet bien proportionné me fait face, son poing fermé, retourné, médius tendu soutenu par le pouce, cible mon visage. Grossier personnage, je m’attends au pire. Il ouvre la main, je vois ma photo. Il l’observe, la retaille, la plaque contre sa poitrine, la photo a disparu. E.T s’assoit à côté de moi, son bras s’allonge, son poing, son majeur nous visent, il ramène sa main, l’ouvre… un selfie ! Il porte cette fois la main à ce que je crois être sa bouche, hop la photo disparaît. A-t-il envoyé un MMS ?

Et là, j’ai un doute. Est-ce un ou une E.T ?

Mama Mia, qu’il ne lui prenne pas l’envie de m’emmener dans ses terres lointaines. Je la sens bien chatte, elle touche mes lèvres, je retrouve la parole, mon nez, je perçois ce parfum subtil de la salsepareille au premier jour d’avril, mes oreilles, j’entends le doux ronronnement émis par tout son corps. Aïe, aïe aïe mes aïeux, pourquoi moi ? Nous sommes vingt mille dans ce stade.

  • Bonjour, je m’appelle Boniface, et toi ?

  • Artchiwtouart.

  • Qu’est-ce que cela veut dire ?

  • Belle princesse pubère qui cherche un fiancé.

Je te l’avais dit ! Malheur, Huguette va me tambouriner un pataquès, je vous dis pas.

  • Tu viens d’où Atchoum ?

  • Pas Atchoum, Artchiwtouart ! Nous venons de l’amas de la Chouette dans la constellation de Cassiopée. C’est un amas ouvert, nous pouvons donc sortir pour visiter les environs.

  • La Terre… Les environs, tu rigoles !

Visiter les environs, hé bé. Quand avec Huguette nous allons à Vintimille faire le marché du vendredi, trente-cinq minutes, c’est toute une expédition. Atchoum et ses pommes vertes parcourent neuf mille trois cent années-lumière, hop là. Pardi la porte à côté, pense à ramener une fougasse !

  • Blaise viens avec nous, nous nous marierons, nous aurons un grand astéroïde avec beaucoup d’enfants. Chez nous pas de travail, pas d’impôts seulement des jeux, de l’amour. Chante avec moi « l’amas de la Chouette, alouette, cacahuète »

  • Pas Blaise, Boniface ! Tu sais, le coup du paradis, en France, on nous le fait tous les cinq ans.

Subrepticement Artchiwtouart m’arrache une poignée de cheveux.

  • Aïe ! Tu m’as fait mal

  • C’est quoi aïe, c’est quoi mal ?

  • Pourquoi ramasser tous ces poils, tu vas en faire un bouquet ? Ils ne fleurissent pas. Tu le sais ça ?

  • Les poils sont une découverte scientifique fondamentale. Quand nous allons les montrer au Comité des Sages nous serons décorés, voire plus. A quel endroit en as-tu encore ?

  • Sous les bras.

  • Tu me montres ?

J’enlève ma chemise, lui montre mes aisselles. Las, elle voit également ceux que j’ai sur la poitrine, elle mouline ses grandes mains, tend son doigt, clique cent photos ; excitée comme une puce ma dulcinée.

  • Oh, beau niçois, tu m’en donnes, tu m’en donnes !

Je m’en grappille une dizaine, les lui offre, le sourire un peu crispé par la douleur.

  • Et encore, où en as-tu ?

  • Euh, c’est tout…

  • Le fond de ton œil droit tortillonne, tu me racontes des cracks !

  • Atchoum, ils sont situés dans un endroit délicat, je ne peux pas te les montrer, encore moins t’en offrir, on se fréquente à peine. La morale, tu comprends ?

  • Pas Atchoum, Artchiwtouart ! Non, la morale n’existe pas, aïe non plus. J’exige, je veux observer de très très près.

  • Ne me crie pas dessus, regarde, mais fait vite.

Je me tourne, baisse mon pantalon, lui montre mon fessier abondamment pourvu… Sur Cassiopée la recherche fait un pas de géant. Instantanément elle pointe son médius en avant. Je me “ rembraille ” aussi sec.

  • Je veux en prélever une petite douzaine.

Basta ! Maintenant me vient la pigne.

  • Ah non ! tu ne les verras plus les poils de mon…

Pfut !

Subitement, Atchoum, humanoïdes, soucoupe volante, disparaissent. Le goal s’écrase sur la pelouse, le ballon file droit au but, Berian se masse la cuisse, Monsieur l’arbitre se gratte le nez, siffle la fin du match. La Péricie a battu le Livoria par un but à zéro.

Si quelqu’un vous raconte l’histoire de ce qui est arrivé ce jour du match éliminatoire de la Coupe d’Europe 2016, vous ne le croirez pas. Vous auriez raison si… vous pouviez m’expliquer ce que fait dans la galerie photo de mon smartphone ce selfie abracadabrantesque ?

Rédigé par Hervé

Publié dans #sport

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